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Décisions | Sommaires

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C/8710/2023

ACJC/1468/2024 du 20.11.2024 sur JTPI/7862/2024 ( SFC ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8710/2023 ACJC/1468/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 20 NOVEMBRE 2024

 

 

Pour:

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 19 juin 2024, représenté par Me B______, avocat,

 

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/7862/2024 du 19 juin 2024, notifié à A______ le 20 juin 2024, statuant par voie de procédure sommaire et sur requête d'autorisation de vente d'actifs, le Tribunal de première instance (ci-après: le Tribunal) a rejeté la requête formée par A______ le 11 juin 2024, tendant à l'autorisation de vendre les parcelles n° 1______, 2______ et 3______ de la commune de C______ [GE] (ch. 1 du dispositif), laissé les frais judiciaires – arrêtés à 1'000 fr. – à la charge de A______, compensé ces frais avec l'avance fournie (ch. 2), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3) et débouté la partie requérante de toutes autres conclusions (ch. 4).

B.            a. Par acte expédié au greffe de la Cour civile le 1er juillet 2024, A______ forme un recours contre ce jugement, dont il sollicite l'annulation.

Principalement, il conclut à ce qu'il soit fait droit à sa requête d'autorisation de vendre les parcelles nos 1______, 2______ et 3______ de la commune de C______, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Il a produit un bordereau de pièces, pour certaines non soumises au Tribunal.

b. Invité à se déterminer sur le recours, D______, commissaire au sursis concordataire accordé à A______, a transmis à la Cour un rapport adressé au Tribunal le 19 août 2024, dans lequel il recommande notamment la vente des parcelles de C______ à E______, pour le prix de 5'140'000 fr., moyennant encaissement préalable par A______ de ses comptes de prévoyance de type 3e pilier A, aux fins d'éteindre les dettes hypothécaires grevant lesdites parcelles.

c. Par pli du greffe du 9 juillet 2024, la Cour a informé A______ de ce que la cause était gardée à juger.

d. Par courrier de son conseil du 11 septembre 2024, F______ LTD a transmis à la Cour copie d'un jugement du 26 août 2024, par lequel Tribunal avait notamment prolongé le sursis concordataire accordé à A______ pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 25 décembre 2024, chargé le commissaire au sursis de faire estimer à nouveau la valeur des parcelles de C______ et fait interdiction à A______, sous peine de nullité, d'aliéner ou de grever l'actif immobilisé, de constituer un gage, de se porter caution et de disposer à titre gratuit pendant la durée du sursis, sauf autorisation du Tribunal.

F______ LTD a exposé que l'appel [recte: le recours] formé par A______ lui apparaissait en conséquence mal fondé.

F______ LTD a adressé d'autres courriers à la Cour les 2 septembre, 9 octobre et 1er novembre 2024.

e. Par courriers de son conseil des 18 et 26 septembre 2024, A______ a conclu à l'irrecevabilité des écrits de F______ LTD et à l'imputation de frais supplémentaires de 450 fr. à charge de celle-ci et de son conseil.

Il a simultanément adressé à la Cour une estimation de la valeur de ses biens immobiliers de C______ datée du 18 septembre 2019.

f. Par courriers de son conseil des 16 et 21 octobre 2024, A______ a adressé à la Cour copie des derniers actes produits devant le Tribunal dans la présente procédure. Il a persisté dans les conclusions de son recours.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent du dossier soumis à la Cour:

a. A______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de C______, sur laquelle est érigée une maison d'habitation, ainsi que de la parcelle voisine n° 2______, non bâtie. G______, épouse de A______, est au bénéfice d'un usufruit sur ces deux parcelles.

b. A______ et G______ sont copropriétaires, à raison de la moitié chacun, de la parcelle n° 3______ de la Commune de C______, sur laquelle se trouve un garage en PPE.

c. Les parcelles nos 1______ et 2______ sont collectivement grevées, en premier rang et sans concours, d'une cédule hypothécaire au porteur d'un montant de 2'300'000 fr., inscrite au Registre foncier le 14 novembre 2007.

d. Les immeubles précités ainsi que la parcelle n°3______ sont collectivement grevés en deuxième rang d'une cédule hypothécaire au porteur d'un montant de 300'000 fr., inscrite au Registre foncier le ______ mars 2022.

e. E______ est locataire de la maison sise sur la parcelle n°2______ depuis le 2 novembre 2023, date à laquelle un contrat de bail d'une durée de deux ans a été conclu avec A______, pour un loyer mensuel de 10'000 fr.

Une somme de 240'000 fr., correspondant aux loyers pour la durée contractuelle de deux ans, a été versée aux époux A______/G______ par E______ à la signature du contrat.

f. Par ordonnance du 18 novembre 2020, le Tribunal de première instance a ordonné le séquestre au préjudice de A______, débiteur, des parcelles nos 1______, 2______ et 3______ de la commune de C______, sur requête de F______ LTD, créancière, sur la base d'une sentence arbitrale du 29 octobre 2020.

Le séquestre ordonné porte sur une créance de 1'358'384 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 30 octobre 2020. Il est annoté au Registre foncier sur les parcelles précitées.

g. Le 20 novembre 2023, F______ LTD a validé le séquestre par une poursuite n°4______, dans le cadre de laquelle une commination de faillite a été notifiée à A______ le 16 mars 2022. F______ LTD a déposé une requête de faillite le 6 avril 2022.

h. Sur requête de A______, l'Office des poursuites a, par décision du 20 juillet 2023, invité celui-ci à lui verser la somme de 1'912'278 fr. à titre de sûretés au sens de l'art. 277 LP, après quoi l'inscription du séquestre auprès du Registre foncier serait radiée et le montant reçu consigné.

i. Par arrêt du 9 novembre 2023, la Chambre de surveillance des poursuites et faillites a rejeté la plainte formée par F______ LTD contre la décision susvisée de l'Office des poursuites.

Par arrêt 5A_884/2023 du 5 mars 2024, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par F______ LTD contre la décision de la Chambre de surveillance des poursuites et faillites du 9 novembre 2023.

j. Dans le procès en faillite, le 26 avril 2023, A______ a saisi le Tribunal d'une requête d'ajournement de faillite et de sursis concordataire provisoire.

Il y a proposé, comme plan d'assainissement, la vente des biens-fonds nos 1______, 2______ et 3______ de la commune de C______, afin d'obtenir des liquidités pour désintéresser intégralement ses créanciers; il a précisé qu'il contestait la créance de F______ LTD et que le montant des sûretés arrêté par l'Office des poursuites devrait être versé par l'acquéreur au moment de la vente de la maison.

A l'appui de sa requête, il a notamment produit une évaluation de la valeur des biens-fonds de C______, émanant de H______ SA, datée du 23 février 2022, faisant état d'une valeur vénale de 5'184'100 fr., ainsi que d'un "prix de vente réaliste entre CHF 5'200'000.- et CHF 5'600'000.-".

k. Par jugement JTPI/5040/2024 du 25 avril 2024, non publié à la demande de A______, le Tribunal a octroyé à celui-ci un sursis concordataire provisoire d'une durée de quatre mois et désigné D______, expert-comptable, en qualité de commissaire au sursis.

l. Lors des audiences tenues respectivement les 6 juillet 2023 et 18 avril 2024 par-devant le juge du concordat, G______ a déclaré renoncer à toute indemnisation en lien avec la vente des parcelles nos 1______ et 2______, sur lesquelles elle était au bénéfice d'un usufruit, ainsi qu'à quelque montant que ce soit en lien avec la vente de la parcelle n° 3______, dont elle était copropriétaire avec son époux.

m. Par courrier adressé le 11 juin 2024 au Tribunal, avec copie au sursitaire, le commissaire au sursis provisoire a indiqué que selon les informations en sa possession, l'état des dettes de A______ s'élevait à 5'279'264 fr au total et se décomposait comme suit:

-        F______ (sûretés 277 LP): 1'912'278 fr.

-        Administration fiscale (ICC/IFD): 105'555 fr.

-        [Banque] I______ (hypothèque nette): 2'238'015 fr.

-        J______ (hypothèque 7%) 276'684 fr.

-        K______ AG avocats 75'943 fr.

-        B______ avocat 105'269 fr.

-        L______ 416'990 fr.

-        M______ 121'480 fr.

-        N______ 27'050 fr.

-        O______ 10'000 fr.

Le commissaire au sursis provisoire a relevé que la vente des biens-fonds nos 1______, 2______ et 3______ de la commune de C______, telle qu'envisagée par A______ au prix de 5'140'000 fr., soit 4'442'248 fr. net, ne permettrait pas le remboursement intégral de tous ses créanciers, bien qu'elle puisse améliorer sa situation financière, et qu'il subsisterait par conséquent une insuffisance d'actifs.

Le montant net susvisé de 4'442'248 fr. s'obtenait après déduction des postes suivants du prix de vente:

-        Charges hypothécaires (5'875 fr. par mois 5'875 fr.
dès le 30 avril 2024)

-        Commission de courtage 140'000 fr.

-        Impôts sur les bénéfices et gains immobiliers 311'877 fr.

-        Loyer 24 mois payé d'avance à rembourser 240'000 fr.
(selon convention du 2 novembre 2023)

Le prix de vente proposé, soit 5'140'000 fr., paraissait conforme au marché en tenant compte de l'évolution des taux d'intérêts hypothécaires et de l'estimation effectuée par H______ SA le 23 février 2022.

Il existait enfin d'autres actifs susceptibles de désintéresser les créanciers de A______, tels que des avoirs de prévoyance de type 3ème piliers A et B, sans qu'il soit possible de se prononcer à ce stade sur la disponibilité de tels actifs.

n. Par requête du 11 juin 2024, A______ a conclu à ce que le Tribunal autorise la vente des biens-fonds nos 1______, 2______ et 3______ de la commune de C______ et le versement des sûretés fixées par l'Office des poursuites au sens de l'art. 277 LP.

Il a exposé en substance qu'il devait pouvoir vendre le plus vite possible les biens immobiliers dont il était propriétaire, afin d'éviter les effets négatifs de l'évolution des taux hypothécaires, d'un désistement de son acquéreur et de l'accumulation d'autres intérêts et charges. Il n'avait selon lui aucune obligation de rembourser immédiatement l'intégralité de ses créanciers et contestait la créance de F______ LTD. Il était titulaire d'une police d'assurance P______ (valeur de rachat 110'890 fr.), d'un compte de libre passage auprès de P______ (657'320 fr.) et de deux comptes 3ème pilier A (211'480 fr.), dont il pouvait récupérer les montants, puisqu'il était indépendant et qu'il pouvait les nantir dans n'importe quel établissement bancaire de son choix.

o. Il a produit le projet d'un acte de vente établi par Me Q______, notaire, portant sur les parcelles n°1______ et 2______ et 3______ de la commune de C______, conclu d'une part par les époux A______/G______ en qualité de vendeurs, et d'autre part par E______ en qualité d'acheteur, pour le prix de 5'140'000 fr., payable comme suit:

" a) à concurrence d'une somme de DEUX CENT QUARANTE MILLE FRANCS (Frs 240'000.-), par le versement d'un pareil montant que le vendeur reconnaît avoir reçu de l'acquéreur avant la signature des présentes, versement valant quittance d'autant de l'acquéreur.

b)      à concurrence d'une somme de *(intérêts hypothécaires réglés par l'acquéreur), par compensation avec une créance de pareil montant que l'acquéreur a envers le vendeur conformément au contrat de bail qu'ils ont signés le 2 novembre 2023.

c)      et à concurrence du solde, soit la somme de *(Frs *.-) par le versement d'un pareil montant que le notaire soussigné reconnaît avoir reçu en sa comptabilité, pour le compte du vendeur, de l'acquéreur auquel il en est donné quittance définitive et sans réserve.

Laquelle somme demeurera bloquée en l'Etude de Me Q______ sur le compte vendeur, jusqu'à l'inscription du présent acte au Registre Foncier qui opérera le transfert de propriété.

Le vendeur donne alors comme instruction irrévocable au notaire de:

- consigner la provision nécessaire pour acquitter l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers;

- régler à l'Office cantonal des poursuites la somme permettant la radiation du séquestre;

- rembourser le créancier hypothécaire afin que les cédules hypothécaires soient remises libres de tout engagement à l'acquéreur;

- régler la commission de courtage due à *;

- régler les frais inhérents à la vente;

- reverser le solde du prix de vente à Monsieur A______. "

p. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré notamment que l'appel aux créanciers prévu par la loi n'avait pas encore eu lieu et que la liste des créanciers dressée par le commissaire au sursis le 11 juin 2024 était une liste provisoire, basée sur les seules informations en sa possession. Ledit commissaire n'avait pas effectué d'inventaire de l'ensemble des biens du débiteur, ni procédé à leur estimation, en particulier l'estimation des actifs grevés par un gage immobilier, qui devait être communiquée par écrit aux créanciers gagistes et au débiteur. La valeur vénale des biens dont l'aliénation était prévue ne faisait l'objet que d'une estimation, non produite, effectuée par H______ SA le 23 février 2022. Dans ces conditions, et faute d'une évaluation plus récente, il n'était pas possible de déterminer la valeur vénale actuelle des dits biens, ni de vérifier que le prix proposé de 5'140'000 fr. était en adéquation avec le marché immobilier, ni encore d'estimer si une offre supérieure pourrait être obtenue dans le cadre d'une vente de gré à gré.

La vente envisagée ne couvrait par ailleurs pas l'entier des dettes connues du débiteur, étant précisé que le versement des sûretés à hauteur de 1'912'278 fr. auprès de l'Office des poursuites était obligatoire pour obtenir la levée du séquestre inscrit au Registre foncier sur les parcelles à vendre. La compensation envisagée du loyer avec le prix de vente, à hauteur de 240'000 fr. n'apparaissait pas davantage conforme aux exigences légales, dès lors qu'elle avait pour effet de privilégier un créancier, soit E______, au détriment d'autres créanciers. Le fondement de cette compensation était au demeurant peu clair, étant relevé que la convention du 2 novembre 2023 dont elle découlerait n'avait pas été produite.

Ainsi, il n'était pas établi que la vente proposée des parcelles n°1______, 2______ et 3______ de la commune de C______ soit favorable aux créanciers, ni que cette vente doive être urgemment conclue pour éviter une dévaluation des biens ou un désistement de l'acquéreur potentiel. En tout état, ladite vente était prématurée et la requête tendant à son autorisation devait donc être rejetée.

q. Dans son second rapport, adressé au Tribunal le 19 août 2024, le commissaire au sursis provisoire a estimé le total des actifs réalisables de A______ à 5'140'036 fr., dont 4'436'373 fr. au titre du produit de vente net des immeubles de C______.

Il a relevé que ce total était inférieur de près de 240'000 fr. au total des dettes de A______, qui s'élevait à 5'377'623 fr. en tenant compte de la créance de F______ LTD à hauteur du montant séquestré (soit 1'912'278 fr., sûretés comprises). Il a néanmoins préconisé de vendre les parcelles de C______ à E______ pour le prix proposé de 5'140'000 fr., qui semblait conforme au marché et proche de la valeur vénale estimée par H______ SA en 2022. La vente permettrait notamment de rembourser les créanciers hypothécaires et de stopper le paiement de intérêts hypothécaires, qui étaient versés sans contrepartie dès lors que A______ ne percevait plus de loyer. Le report de la vente de plusieurs mois avait par ailleurs déjà eu des conséquences importantes pour A______ concernant la pénalité de résiliation anticipée de la principale dette hypothécaire, qui avait augmenté de plus de 95'000 fr. entre les mois de mai et d'août 2024, compte tenu de l'évolution des taux d'intérêts.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du juge de la faillite et du concordat (art. 309 let. b CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 al. 1 et 295c al. 1 LP).

Interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 LOJ), dans le délai utile de 10 jours (art. 321 al. 2 CPC) et dans la forme écrite prévue par la loi (art. 321 al. 1 CPC), le recours est recevable.

1.2 Les décisions rendues en matière de faillite et de concordat sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC). La procédure sommaire est applicable (art. 251 let. a LP) et la maxime inquisitoire s'applique (art. 255 let. a CPC).

Celle-ci ne dispense pas les parties de collaborer activement à la procédure; il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_855/2017 du 11 avril 2018 consid. 4.3.2).

1.3 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl/De Poret Bortolaso/Aguet, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).

2.             2.1 Dans le cadre d'un recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC). Cela vaut également lorsque le litige est soumis à la maxime inquisitoire (Jeandin, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 2 ad art. 326 CPC).

L'art. 326 al. 2 CPC prévoit que les dispositions spéciales de la loi sont réservées.

Selon l'art. 174 al. 1 LP, la décision du juge de la faillite peut, dans les dix jours, faire l'objet d'un recours au sens du CPC. Les parties peuvent faire valoir des faits nouveaux lorsque ceux-ci se sont produits avant le jugement de première instance.

L'art. 295c LP prévoit que le débiteur et les créanciers peuvent attaquer la décision du juge du concordat par la voie du recours, conformément au CPC. Sont notamment attaquables au sens de cette disposition les décisions relatives à des actes soumis à autorisation au sens de l'art. 298 al. 2 LP (Bauer/Luginbühl, Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 3e éd., 2021, n. 4 ad art. 295c LP).

2.2 En l'espèce, le recourant produit à l'appui de son recours plusieurs pièces non soumises au Tribunal. Contrairement à ce qu'il soutient, la décision attaquée n'est pas une décision du juge de la faillite et le recourant ne peut pas se prévaloir de faits ou de moyens de preuves nouveaux en application de l'art. 174 al. 1 LP. Le recours est en effet dirigé contre une décision du juge du concordat, statuant sur un acte soumis à autorisation en vertu de l'art. 298 al. 2 LP. Or, l'art. 295c LP, qui règle le recours contre de telles décisions, ne prévoit pas de disposition spéciale au sens de l'art. 326 al. 2 CPC, contrairement à l'art. 174 al. 1 LP. L'art. 295c LP renvoie seulement aux règles ordinaires des art. 319ss CPC, soit notamment à l'art. 326 al. 1 CPC, qui prohibe l'invocation de faits et moyens de preuve nouveaux dans le cadre du recours.

Il s'ensuit que les pièces produites par le recourant qui n'ont pas été soumises au Tribunal sont irrecevables.

2.3 Les écrits adressés à la Cour par F______ LTD, qui n'est pas partie à la procédure, seront ignorés, sous réserve du jugement du Tribunal du 26 août 2024, qui fait partie du dossier de première instance et est connu du recourant. Il ne se justifie pas de prononcer une sanction à l'encontre de F______ LTD ou de son conseil, comme sollicité par le recourant.

3.             Le recourant reproche au Tribunal d'avoir refusé d'autoriser la vente de ses immeubles de C______, aux motifs notamment que cette vente était prématurée et que les conditions prévues de celle-ci étaient susceptibles de léser les intérêts de ses créanciers. Il soutient que les conditions d'autorisation d'une telle vente seraient réunies et que celle-ci serait urgente.

3.1 Dans le cadre du sursis concordataire, le débiteur peut poursuivre son activité sous la surveillance du commissaire (art. 298 al. 1 1ère phrase LP).

Sauf autorisation du juge du concordat ou de la commission des créanciers, il lui est interdit, sous peine de nullité, d'aliéner ou de grever l'actif immobilisé, de constituer un gage, de se porter caution et de disposer à titre gratuit pendant la durée du concordat (art. 298 al. 2 LP).

Les interdictions légales de disposer ont pour but la protection du patrimoine du débiteur. Le débiteur n'est en effet autorisé à poursuivre que les affaires courantes, dont les opérations interdites ne font pas partie. Il n'en demeure pas moins que la conclusion de telles opérations peut être dans l'intérêt des créanciers, si l'actif immobilisé est soumis à une dépréciation, s'il est nécessaire de se procurer des liquidités ou s'il faut que des secteurs d'activité soient aliénés dans le cadre de l'assainissement. Pour cette raison, l'interdiction n'est pas absolue, mais elle est soumise à une réserve d'approbation, le juge du concordat pouvant autoriser de telles opérations (Bauer/Luginbühl, op. cit., n. 20 ad art. 298 LP).

Dans sa décision, le juge du concordat doit tenir compte de la mesure dans laquelle les créanciers doivent s'attendre à des pertes sur leur créance concordataire et de la question de savoir si l'exécution de l'opération est critique dans le temps en vue d'une éventuelle dépréciation. Le juge du concordat dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour statuer. Bien que la loi ne le prévoie pas expressément, le juge du concordat doit, avant d'octroyer l'autorisation, demander l'avis du commissaire, à moins que celui-ci ne demande également l'autorisation de l'acte (Bauer/Luginbühl, loc. cit.).

Dans la procédure de recours, si l'adéquation du produit de la vente est contestée, l'autorité de recours n'intervient que si le juge du concordat a manifestement outrepassé son pouvoir d'appréciation, notamment si, malgré l'urgence qui peut exister, il a autorisé un prix d'achat manifestement trop bas (Bauer/Luginbühl, op. cit., n. 21a ad art. 298 LP).

3.2 En l'espèce, après avoir refusé d'autoriser la vente litigieuse dans le jugement entrepris, le Tribunal a à nouveau fait interdiction au recourant, par jugement subséquent du 26 août 2024, d'aliéner ou de grever l'actif immobilisé durant le sursis provisoire prolongé. Il est dès lors douteux que le présent recours, interjeté contre le seul jugement entrepris et initialement recevable, conserve aujourd'hui son objet, dès lors qu'une décision de la Cour de céans autorisant par hypothèse la vente requise entrerait en contradiction avec la décision subséquente du Tribunal. Le recours devrait donc être rejeté, et la cause rayée du rôle de la Cour (cf. art. 242 CPC), pour ce motif déjà, étant rappelé que la maxime inquisitoire permet à la Cour de prendre d'office en considération tous les éléments importants pour la décision à rendre (cf. Bohnet, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 5 ad art. 255 CPC) et que la Cour peut, comme le Tribunal fédéral, tenir compte d'éléments nouveaux qui rendent sans objet le recours (cf. ATF 145 III 422 consid. 5.2; 137 III 614 consid. 3.2.1).

La question peut toutefois demeurer ouverte, le recours devant en tout état être rejeté pour les motifs qui vont suivre.

3.3 En l'occurrence, on ne voit en effet pas en quoi le Tribunal aurait outrepassé son pouvoir d'appréciation en refusant d'autoriser la vente envisagée des biens immobiliers du recourant.

3.3.1 S'il est vrai que le Tribunal a affirmé à tort que l'estimation desdits biens effectuée par H______ SA au mois de février 2022 n'avait pas été versée à la procédure, comme le relève le recourant, il a néanmoins tenu compte de cet élément par le biais du rapport que lui a adressé le commissaire au sursis provisoire le 11 juin 2024, lequel en faisait expressément état. Le Tribunal était cependant libre de considérer que l'estimation susvisée était trop ancienne pour refléter correctement la valeur actuelle des biens litigieux et qu'il convenait de disposer d'une estimation plus récente avant d'autoriser la vente. Dans sa décision subséquente au jugement entrepris, le Tribunal a d'ailleurs prié le commissaire de se procurer une telle estimation et ce procédé ne prête pas le flanc à la critique.

3.3.2 C'est également à tort que le recourant reproche au Tribunal d'avoir considéré que la vente proposée, combinée à la réalisation des autres actifs disponibles, ne permettrait pas de désintéresser l'ensemble de ses créanciers, compte tenu notamment de la créance de F______ LTD.

Une telle insuffisance du produit de la vente projetée ressort en effet du premier comme du second rapports établis par le commissaire au sursis provisoire, qui a estimé en dernier lieu le découvert prévisible à 240'000 fr. environ. Comme l'a relevé à bon droit le Tribunal, la prise en compte dans ce calcul de la créance de F______ LTD pour un montant de 1'912'278 fr., comprenant les sûretés exigées par l'Office des poursuites pour lever le séquestre, paraît pleinement justifiée, puisque la levée dudit séquestre est un préalable nécessaire à l'exécution de la vente. Contrairement à ce que soutient le recourant, on ne voit notamment pas en quoi la créancière susvisée abuserait de son droit en s'opposant à la levée du séquestre tant que le total des sûretés calculées par l'Office des poursuites n'est pas fourni. Il n'appartient d'ailleurs pas au juge du concordat de revoir le bien-fondé de la créance susvisée, qui fait l'objet d'une sentence arbitrale en force, ni celui des sûretés requises par l'Office, dont le montant a été confirmé par arrêts de la Chambre de surveillance et du Tribunal fédéral.

3.3.3 Pour le reste, le prix de la vente proposée (soit 5'140'000 fr.) est certes proche de la valeur vénale estimée par H______ SA au mois de février 2022 (soit 5'184'100 fr.), ce que relève le commissaire au sursis provisoire. Cependant, ladite estimation mentionne également un prix de vente "réaliste" compris entre 5'200'000 fr. et 5'600'000 fr., de sorte qu'il ne paraît pas exclu, mais au contraire vraisemblable, que les immeubles du recourant pourraient être réalisés à un prix supérieur à celui envisagé, ce que la nouvelle estimation commandée par le Tribunal permettra le cas échéant de déterminer.

Par ailleurs et surtout, la vente envisagée par le recourant, dont la partie acquéreuse serait la locataire actuelle des immeubles, présente l'inconvénient notable de prévoir la déduction de la totalité des loyers versés par celle-ci, pour un montant de 240'000 fr., du prix de vente susvisé. Or, si l'existence d'une telle clause pouvait paraître justifiée en cas de vente intervenant peu après la conclusion du bail, puisque les loyers avaient été versés d'avance, tel n'est plus le cas actuellement, puisqu'elle reviendrait à permettre à ladite locataire d'occuper, ou d'avoir occupé, gracieusement les locaux pendant la majeure partie du bail, au détriment des intérêts financiers du recourant, ce qui n'est pas admissible. Peu importe à ce propos que la locataire ne soit pas formellement créancière du recourant, comme celui-ci le relève. Le seul fait qu'elle puisse être privilégiée au détriment des intérêts du recourant et de ses créanciers suffit à justifier que la vente ne soit pas autorisée à ce stade aux conditions prévues, comme l'a retenu le Tribunal.

3.3.4 Rien n'indique par ailleurs que la locataire susvisée ne serait pas disposée à acquérir les immeubles litigieux au prix proposé de 5'184'100 fr. sans en déduire la totalité des loyers versés, ni qu'il serait excessivement difficile de trouver un autre acquéreur solvable et disposé à s'acquitter dudit prix, sans compensation. Il est ici observé que le montant de ladite compensation, soit 240'000 fr., correspond au montant qui manquerait pour désintéresser l'ensemble des créanciers du recourant, selon le commissaire au sursis provisoire, si la vente était autorisée aux conditions actuellement prévues. Il convient donc de s'assurer que la vente ne peut pas être envisagée sans cette compensation avant de l'autoriser, comme l'a retenu le Tribunal.

Enfin, bien que le commissaire au sursis provisoire préconise d'autoriser ladite vente nonobstant le déficit susvisé, celle-ci n'apparaît pas particulièrement urgente, ni ne pouvoir attendre que le juge du concordat dispose d'une évaluation plus récente des biens immobiliers concernés. Aucune dépréciation desdits biens n'est invoquée, ni rendue vraisemblable, par le recourant ou le commissaire au sursis provisoire. S'il est vrai que des intérêts hypothécaires continuent à courir, ceux-ci doivent être assumés prioritairement au moyen des loyers perçus par le recourant et le fait d'affecter lesdits loyers, même perçus d'avance, au paiement des intérêts hypothécaires ne péjore pas la situation financière du recourant, contrairement à la compensation susvisée. Le fait que la résiliation anticipée des crédits hypothécaires doive entraîner le paiement de pénalités, et que le montant de celles-ci soit susceptible d'augmenter en fonction de l'évolution des taux hypothécaires, ne permet pas non plus de conclure à l'existence d'une réelle urgence, étant observé que lesdits taux sont par nature fluctuants. Au demeurant, l'écoulement du temps tend au contraire à réduire le montant des pénalités potentiellement dues, considérant que celles-ci correspondent généralement à la différence entre le taux d'intérêts convenu et le taux du marché pour la durée restante du contrat.

3.3.5 Pour l'ensemble de ces motifs, le juge du concordat n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en refusant d'autoriser à ce stade la vente des biens immobiliers du recourant aux conditions prévues par celui-ci. Le recours sera en conséquence rejeté.

4.             Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais du recours, arrêtés à 1'500 fr. (art. 54 et 61 OELP) et compensés avec l'avance de même montant fournie par celui-ci (art. 111 al. 1 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 1er juillet 2024 par A______ contre le jugement JTPI/7862/2024 rendu le 19 juin 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8710/2023–5 SFC.

Au fond :

Rejette le recours.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 1'500 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de même montant fournie par celui-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.