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Décisions | Sommaires

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C/8000/2023

ACJC/586/2024 du 07.05.2024 sur JTPI/86/2024 ( SML ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8000/2023 ACJC/586/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 7 MAI 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par la 3ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 janvier 2024,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/86/2024 du 3 janvier 2024, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, à concurrence de 9'003 fr. 21 (ch. 1 du dispositif), a arrêté les frais judiciaires à 300 fr., compensés avec l'avance fournie, mis à la charge de A______, condamné à les rembourser à B______ (ch. 2 et 3) et a dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4).

En substance, le Tribunal a considéré que le jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes constituait un titre de mainlevée définitive. Les montants que A______ avait été condamné à payer à B______, avec intérêts à 5%, étaient de 9'003 fr. 21. La créance requise en poursuite s'élevait à 9'557 fr 59, laquelle ne ressortait pas des pièces produites.

B. a. Par acte expédié le 11 janvier 2024 à la Cour de justice, A______, comparant en personne, a formé recours contre ce jugement, sollicitant implicitement son annulation. Le recours ne comporte pas de conclusions formelles. Le précité se dit prêt à régler la moitié de l'"indemnité" due à B______.

Il a produit de nouvelles pièces et a formé de nouveaux allégués.

b. Dans sa réponse du 6 février 2024, B______, comparant également en personne, a refusé "l'offre de Monsieur A______ et exig[é] la totalité du montant dû accompagné des frais".

Il a produit de nouvelles pièces.

c. Par réplique du 19 février 2024, A______ a persisté dans ses précédentes explications.

d. Les parties ont été avisées par plis du greffe du 12 mars 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :

a. Par jugement JTPH/41/2018 du 16 février 2018, le Tribunal des prud'hommes a condamné C______, D______ SA et A______, pris conjointement et solidairement, à verser à B______, les sommes brutes de 1'462 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2012 (ch. 3 du dispositif), de 1'657 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2013 (ch. 4), de 2'356 fr. 10, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2014 (ch. 5). Le Tribunal a également condamné C______ et D______ SA, pris conjointement et solidairement, à verser à B______ 704 fr. 55, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2016 (ch. 6). La partie en ayant la charge devait opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 7).

Ce jugement est définitif et exécutoire.

b. A la requête de B______, l'Office cantonal des poursuites a notifié le
1er février 2023 à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, pour la somme de 9'557 fr. 59, avec intérêts à 5% dès le 24 février 2023. Le titre de la créance était le jugement du Tribunal des prud'hommes du 16 février 2018.

Opposition y a été formée.

c. Le 15 avril 2023, B______ a adressé un courrier du Tribunal, concluant au prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer précité.

Il a produit le jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes du
16 février 2018, la réquisition de poursuite ainsi que le commandement de payer.

d. Par ordonnance du 21 avril 2023, le Tribunal, retenant que la requête était incomplète, a imparti à B______ un délai pour rectifier sa demande.

e. Par requête du 22 mai 2023, B______ y a donné suite en déposant une requête selon la formule mise à disposition. Il a conclu au prononcé de la mainlevée définitive à concurrence de 9'557 fr. 59, avec intérêts à 5% dès le
24 janvier 2023.

f. Par courrier spontané du 29 août 2023, A______ a offert le paiement d'environ la moitié de la créance en poursuite, relevant qu'il avait été condamné par le Tribunal des prud'hommes aux côtés de C______ et D______ SA.

g. A l'audience du Tribunal du 29 septembre 2023, B______ a persisté dans ses conclusions.

A______ n'était ni présent ni représenté.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). Selon l'art. 251 let. a CPC, la procédure sommaire est applicable aux décisions rendues en matière de mainlevée d'opposition.

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

Bien que le recours ne comporte pas de conclusions formelles, l'on comprend des explications du recourant qu'il s'oppose au prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer en tant qu'elle porte sur la moitié des montants fixés par le jugement prud'homal. Le recours a été formé dans le délai et la forme prévus par la loi, de sorte qu'il est recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 lit. a
a contrario et 58 al. 1 CPC).

1.3 Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables devant l'instance de recours (art. 326 al. 1 CPC).

Les allégations et pièces nouvelles produites par le recourant, de même que les nouvelles pièces versées par l'intimé, sont dès lors irrecevables.

2.  Le recourant reproche au Tribunal d'avoir prononcé la mainlevée pour la totalité de la créance résultant du jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes et se déclare prêt à régler la moitié de ladite créance.

2.1.1 En vertu de l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.

Le juge de la mainlevée se fonde en principe sur le dispositif du jugement dont il n'a pas à revoir le bien-fondé (ATF 142 III 78).

Le juge saisi d'une requête de mainlevée définitive doit notamment vérifier si la créance en poursuite et résultant du jugement produit est exigible (Abbet/ Veuillet, La mainlevée de l'opposition, 2017, n. 22 et 34 ad art. 80 LP; Stücheli, Die Rechtsöffnung, Zurich 2000, p. 198; Staehelin, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 2010, n. 39 ad 80 LP).
Est exigible ce qui peut être aussitôt exigé, ce qui est dû sans terme ni condition. Il en est ainsi d'une créance ou d'une dette dont le paiement peut être immédiatement réclamé, au besoin en justice, sans attendre l'échéance d'un terme ou l'avènement d'une condition (ATF 119 III 18 consid. 3c; arrêt du Tribunal fédéral 5A_331/2012 du 28 février 2013 consid. 2.2 et les références citées).

2.1.2 Le juge doit ordonner la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription (art. 81 al. 1 LP).

2.2 La procédure de mainlevée, qu'elle soit provisoire ou définitive, est un incident de la poursuite. La décision qui accorde ou refuse la mainlevée est une pure décision d'exécution forcée dont le seul objet est de dire si la poursuite peut continuer. Le juge de la mainlevée définitive examine seulement la force probante du titre produit par le créancier, sa nature formelle, non la validité de la créance; il n'a ni à revoir ni à interpréter le titre qui lui est soumis (ATF 143 III 564 
consid. 4.1; 132 III 140 consid. 4.1.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 4A_630/2023 du 28 février 2024 consid. 4.1.1). 

Le prononcé de mainlevée ne sortit que des effets de droit des poursuites et ne fonde pas l'exception de chose jugée quant à l'existence de la créance (ATF 136 III 583 consid. 2.3). 

Le juge doit examiner d'office l'existence des trois identités : l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, l'identité entre le poursuivi et le débiteur désigné et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et le titre qui lui est présenté (ATF 139 III 444 consid. 4.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_630/2023 précité, ibid).

2.3 La solidarité existe entre plusieurs débiteurs lorsqu'ils déclarent s'obliger de manière qu'à l'égard du créancier chacun d'eux soit tenu pour le tout (art. 143 al. 1 CO). A défaut d'une semblable déclaration, la solidarité n'existe que dans les cas prévus par la loi (art. 143 al. 2 CO).

Selon l'art. 144 CO, le créancier peut, à son choix, exiger de tous les débiteurs solidaires ou de l'un d'eux l'exécution intégrale ou partielle de l'obligation (al. 1). Les débiteurs demeurent tous obligés jusqu'à l'extinction totale de la dette (al. 2).

L'art. 143 CO consacre la solidarité passive, qui est une modalité d'une obligation qui lie plusieurs débiteurs et qui oblige l'un quelconque d'entre eux à payer la totalité de la dette avec effet libératoire à l'égard des autres. Chaque débiteur répond à l'égard du créancier de toute la dette, lequel peut exiger la prestation intégrale de chacun d'eux. La structure de la solidarité passive se caractérise par le fait qu'il existe autant d'obligations que de débiteurs, mais toutes ont le même titre, la même cause et le même objet, chacune étant en principe indépendante de l'autre. Le créancier dispose de plusieurs créances autonomes, chacune à l'égard de chaque débiteur pris isolément, créances qui peuvent avoir un sort juridique propre. La validité de chacune doit être examinée séparément (Romy, Commentaire Romand, CO I, 3ème éd. 2021, n. 1 et 3 ad art. 143 CO).

Les débiteurs solidaires forment une consorité passive simple au sens de
l'art. 71 CPC, le créancier ayant la faculté de les rechercher séparément ou ensemble à raison d'une partie ou du tout (Jeandin, Commentaire Romand,
Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 6 ad art. 70 CPC et n. 6 ad art. 71 CPC).

2.4 Le débiteur solidaire qui paie au-delà de sa part a, pour l’excédent, un recours contre les autres (art. 148 al. 2 CO).

2.5 En l'espèce, le jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes, définitif et exécutoire, constitue un titre de mainlevée définitive, ce qui n'est à juste titre pas remis en cause par les parties. Le recourant a été condamné, aux côtés de C______ et de D______ SA, à payer les montants de 1'462 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2012, de 1'657 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2013 et de 2'356 fr. 10, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2014, à l'intimé. Les précités sont ainsi débiteurs solidaires. Conformément aux principes rappelés ci-avant, chaque débiteur répond à l'égard du créancier de l'entier de la dette. L'intimé était ainsi fondé à requérir une poursuite à l'endroit de l'un d'entre eux, soit le recourant. Il appartiendra au recourant, s'il s'y estime fondé, de faire valoir sa créance récursoire auprès des autres débiteurs.

En revanche, seuls C______ et D______ SA ont été condamnés à verser à l'intimé la somme de 704 fr. 55. C'est dès lors à tort que le Tribunal a prononcé la mainlevée pour ce montant.

Par ailleurs, l'intimé n'a pas explicité le calcul des intérêts moratoires requis, de sorte que celui-ci ne peut être vérifié. La mainlevée définitive sera dès lors prononcée pour les sommes de 1'462 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le
1er juillet 2012, de 1'657 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2013 et de 2'356 fr. 10, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2014, conformément à ce qui figure sur le jugement valant titre de mainlevée définitive.

2.6 Le recours se révèle fondé dans la mesure de ce qui précède. Par souci de clarté, le chiffre 1 du dispositif du jugement sera entièrement annulé et la mainlevée définitive sera prononcée pour les montants précités, l'intimé étant débouté des fins de ses conclusions pour le surplus. Il ne se justifie en conséquence pas de revoir la répartition des frais de première instance.

3. Le recourant, qui succombe dans une large mesure, sera condamné aux frais du recours (art. 106 al. 1 CPC).

Les frais judiciaires seront arrêtés à 450 fr. (art. 48 et 61 OELP) et compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimé, les démarches effectuées ne le justifiant pas.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 11 janvier 2024 par A______ contre le jugement JTPI/86/2024 rendu le 3 janvier 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8000/2023-3 SML.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de ce jugement.

Cela fait :

Prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, pour les sommes de 1'462 fr. 45, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er juillet 2012, de 1'657 fr. 45, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le
1er juillet 2013 et de 2'356 fr. 10, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le
1er juillet 2014.

Déboute B______ des fins de sa requête pour le surplus.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 450 fr., compensés avec l'avance de frais fournie, acquise à l'Etat de Genève, et les met à la charge de A______.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Marie-Pierre GROSJEAN, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Marie-Pierre GROSJEAN

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.