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Décisions | Sommaires

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C/4456/2022

ACJC/732/2023 du 06.06.2023 sur ORTPI/308/2023 ( SFC ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4456/2022 ACJC/732/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 6 JUIN 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, recourant contre une ordonnance rendue par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 14 mars 2023, comparant par Me Laurent STRAWSON, avocat, rue De-Beaumont 3, case postale 24, 1211 Genève 12, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

B______ SÀRL, sise ______, intimée, comparant par Me Samir DJAZIRI, avocat, Djaziri & Nuzzo, rue Leschot 2, 1205 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance ORTPI/308/2023 du 14 mars 2023, le Tribunal de première instance a notamment ordonné la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé dans le cadre de l'action en annulation de la poursuite n° 1______ pendante devant le Tribunal des baux et loyers, procédure C/2______/2023, et invité la partie la plus diligente à remettre toute décision prononcée sur mesures provisionnelles et/ou au fond par le Tribunal des baux et loyers dans le cadre de l'action suscitée en annulation de la poursuite.

En substance, le Tribunal a considéré qu'il se justifiait d'ordonner la suspension de la présente procédure de faillite diligentée par A______ à l'encontre de B______ SARL, en application de l'art. 85a al. 2 LP, au vu de l'ordonnance sur mesures provisionnelles rendue le 13 mars 2023 par le Tribunal, ordonnant la suspension provisoire de la poursuite n° 1______ et de la procédure en annulation de poursuite pendante devant la juridiction des baux et loyers.

B. a. Par acte déposé le 24 mars 2023 à la Cour de justice, A______ a formé recours contre cette ordonnance, sollicitant son annulation. Il a conclu à ce que la Cour dise que la poursuite n° 1______ ira sa voie.

b. Dans sa réponse du 27 avril 2023, B______ SARL a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.

c. A______ n'ayant pas fait usage de son droit de détermination spontanée, les parties ont été avisées par plis du greffe du 23 mai 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :

a. A la requête de A______, l'Office cantonal des poursuites a notifié le 26 mai 2021 à B______ SARL un commandement de payer, poursuite n° 1______, pour la somme de 27'600 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er mai 2018, à titre de "loyers non-perçus du 01.06.2016 au 30.04.2018 – CHF 1'200.-, soit 23 x 1200".

B______ SARL n'y a pas formé opposition.

b. Le 18 octobre 2021, une commination de faillite a été notifiée à B______ SARL.

c. Par décision DCSO/72/2022 du 24 février 2022, la Chambre de surveillance des Offices des poursuites a rejeté la plainte formée le 28 octobre 2021 par la précitée contre la commination de faillite.

d. Le 8 mars 2022, A______ a saisi le Tribunal d'une requête de faillite, dans la présente cause.

e. Le 30 mars 2022, B______ SARL a saisi le Tribunal de première instance d'une action en annulation de poursuite, assortie de mesures superprovisionnelles et provisionnelles (cause C/3______/2022).

f. Par ordonnance du même jour, le Tribunal, statuant sur mesures superprovisionnelles, a ordonné la suspension provisoire de la poursuite n° 1______ et dit que l'ordonnance déploierait ses effets jusqu'à l'exécution de la nouvelle décision qui serait rendue après audition des parties.

g. A l'audience du Tribunal du 28 avril 2022 dans la présente cause, A______ a persisté dans ses conclusions en faillite. B______ SARL a déposé des pièces et a conclu au déboutement du précité de toutes ses conclusions. Elle a subsidiairement conclu à la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans la procédure en annulation de la poursuite initiée le 30 mars 2022.

A______ s'est opposé à cette conclusion subsidiaire.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

h. Par ordonnance ORTPI/473/2022 du 29 avril 2022, le Tribunal a ordonné la suspension de la procédure de faillite jusqu'à droit jugé dans la cause C/3______/2022.

i. Par jugement JTPI/14969/2022 du 14 décembre 2022 dans la cause C/3______/2022, reçu le 19 décembre suivant par B______ SARL, le Tribunal a constaté son incompétence à raison de la matière du Tribunal de première instance pour connaître de l'action en annulation de la poursuite déposée le 30 mars 2022 et l'a déclarée irrecevable.

j. Le 18 janvier 2023, B______ SARL a saisi le Tribunal des baux et loyers d'une action en annulation de poursuite, assortie de mesures provisionnelles (cause C/2______/2023).

k. Le 2 février 2023, le conseil de A______ a sollicité du Tribunal la reprise de la présente procédure, à la suite du jugement rendu par le Tribunal le 14 décembre 2022.

Par pli du 10 février 2023 au Tribunal, B______ SARL s'est opposée à la reprise de la procédure, motif pris de la saisine du Tribunal des baux et loyers de l'action en annulation de la poursuite.

l. Les parties se sont encore déterminées sur la reprise de la procédure par écritures des 20 et 21 février 2023.

m. Le 13 mars 2023, B______ SARL a requis du Tribunal des baux et loyers le prononcé de mesures superprovisionnelles.

Par ordonnance du même jour, le Tribunal des baux et loyers, statuant sur mesures superprovisionnelles, a ordonné la suspension provisoire de la poursuite n° 1______ et dit que l'ordonnance déploierait ses effets jusqu'à exécution de la nouvelle décision à rendre après audition des parties.

n. Sur quoi, le Tribunal a rendu l'ordonnance présentement querellée.

EN DROIT

1. 1.1 Le recours est recevable contre les décisions finales, incidentes et provisionnelles de première instance qui ne peuvent pas faire l'objet d'un appel (art. 319 let. a CPC) et contre les autres décisions et ordonnances d'instruction de première instance dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (ch. 2).

La décision ordonnant la suspension de la cause est une mesure d'instruction qui peut, conformément à l'art. 126 al. 2 CPC, faire l'objet du recours de l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (Gschwend/Bornatico, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2017, n. 17a ad art. 126 CPC).

1.2 En l'espèce, dirigé contre une ordonnance ordonnant la suspension de la procédure, le recours, écrit et motivé, et déposé auprès de l'instance de recours dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision (art. 321 al. 1 et 2 CPC), est recevable.

1.3 Dans la procédure de recours, la cognition de la Cour est limitée à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

2.  Le recourant fait grief au Tribunal d'avoir ordonné la suspension de la cause.

2.1.1 Le tribunal peut ordonner la suspension de la procédure si des motifs d’opportunité le commandent. La procédure peut notamment être suspendue lorsque la décision dépend du sort d’un autre procès (art. 126 al. 1 CPC).

La suspension doit répondre à un besoin réel et être fondée sur des motifs objectifs dès lors qu'elle contrevient à l'exigence de célérité de la procédure, imposée par les art. 29 al. 1 Cst. et 124 al. 1 CPC. Elle ne saurait être ordonnée à la légère, les parties ayant un droit à ce que les causes pendantes soient traitées dans des délais raisonnables. Elle ne peut être ordonnée qu'exceptionnellement et l'exigence de célérité l'emporte en cas de doute (ATF 135 III 127 consid. 3.4; 119 II 386 consid. 1b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_218/2013 du 17 avril 2013 consid. 3.1; Frei, in Berner Kommentar, 2012, n. 1 ad art. 126 CPC; Staehelin, in Kommentar zur schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 4 ad art. 126 CPC).

Une suspension dans l'attente de l'issue d'un autre procès peut se justifier en cas de procès connexes, même s'il n'est pas nécessaire que l'objet du litige ou les parties soient les mêmes. Il s'agit en effet d'éviter des décisions contradictoires ou incohérentes. En outre, la seconde procédure, dont l'issue sera déterminante pour le sort de la procédure suspendue, doit être déjà bien avancée faute de quoi, en règle générale, la suspension ne sera pas compatible avec l'exigence de célérité (Frei, op. cit., n. 3 et 5 ad art. 126 CPC).

2.1.2 Lorsque la suspension de la poursuite a été ordonnée selon l'art. 85a al. 2 LP, le juge ajourne sa décision sur le jugement de faillite (art. 173 al. 1 LP).

Prise à la lettre, cette disposition ne prescrit l'ajournement de la faillite que lorsque la suspension de la poursuite a été déjà ordonnée par le juge saisi de l'action en annulation ou en suspension de la poursuite. On ne saurait toutefois en déduire a contrario que la déclaration de faillite ne doit pas être ajournée alors qu'une requête de suspension de la poursuite était pendante quand le poursuivant a requis la faillite (ATF 133 III 684 consid. 3.2).

Il découle de la relation entre les art. 85a al. 2 et 173 al. 1 LP que, si le poursuivi entend obtenir une suspension provisoire de la poursuite afin de bénéficier d'un ajournement de la faillite, il doit déposer sa requête avant l'audience de faillite. S'il a procédé de la sorte, le juge ne saurait ouvrir la faillite avant que le sort de la requête de suspension de la poursuite ne soit connu. S'il prononce la faillite avant d'examiner la requête de suspension de la poursuite, laquelle se trouve ainsi privée d'objet, le juge se rend coupable d'un déni de justice (ATF 133 III 684 consid. 3.2; cf. également arrêt du Tribunal fédéral 4A_286/2020 du 25 août 2020 consid. 3.1).

2.1.3 A teneur de l'art. 63 al. 1 CPC, si l'acte introductif d'instance retiré ou déclaré irrecevable pour cause d'incompétence est réintroduit dans le mois qui suit le retrait ou la déclaration d'irrecevabilité devant le tribunal ou l'autorité de conciliation compétent, l'instance est réputée introduite à la date du premier dépôt de l'acte.

2.2 En l'espèce, l'intimée a requis, le 30 mars 2022, la suspension provisoire de la poursuite sur la base de l'art. 85a al. 2 LP, avant l'audience de faillite, de sorte que le juge de la faillite était tenu d'ajourner sa décision jusqu'à droit jugé dans la procédure C/3______/2022. A la suite du jugement rendu le 14 décembre 2022 par le Tribunal dans la cause précitée, reçu par l'intimée le 19 décembre suivant, constatant son incompétence à raison de la matière et déclarant en conséquence la requête irrecevable, l'intimée a le 18 janvier 2023 saisi le Tribunal des baux et loyers d'une requête en annulation de la poursuite. Compte tenu de la réintroduction de la cause dans le mois suivant la décision d'incompétence, l'instance est réputée avoir été introduite le 30 mars 2022. C'est par conséquent à bon droit que le Tribunal a retenu qu'il se justifiait de suspendre la présente procédure de faillite jusqu'à droit jugé définitif sur la procédure actuellement pendante devant le Tribunal des baux et loyers.

2.3 Infondé, le recours sera par conséquent rejeté.

3. Les frais judiciaires de la présente décision seront arrêtés à 800 fr. (art. 48 et 61 al. 1 OELP; art. 26 RTFMC) et mis à charge du recourant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais du même montant fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Le recourant sera en outre condamné à verser 1'000 fr. à l'intimée à titre de dépens, débours et TVA compris, au regard de l'activité déployée par son conseil (art. 85, 89 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 24 mars 2023 par A______ contre l'ordonnance ORTPI/308/2023 rendue le 14 mars 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/4456/2022–5 SFC.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 800 fr., compensés avec l'avance de frais fournie, acquise à l'Etat de Genève, et les met à la charge de A______.

Condamne A______ à verser à B______ SARL 1'000 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN et Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.