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Décisions | Sommaires

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C/18/2023

ACJC/483/2023 du 06.04.2023 sur JTPI/2221/2023 ( SFC ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/18/2023 ACJC/483/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 6 AVRIL 2023

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 13 février 2023, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. a. A______ SA, inscrite au Registre du commerce genevois depuis ______ 1997, a pour but tous services et mandats entrant dans le cadre de l'activité d'une fiduciaire et d'un bureau comptable.

B______ en est l'administrateur président et C______ l'administrateur. Ils disposent tous deux de la signature individuelle.

b. Le 3 janvier 2023, "A______ SA", sous la plume de C______, a informé le Tribunal de première instance de son surendettement selon l'art. 725 al. 2 CO.

c. Par ordonnance du 9 janvier 2023, le Tribunal a imparti à "A______ SA" un délai pour produire le bilan au 31 décembre 2022, vérifié par un réviseur agréé, avec des biens estimés à la valeur d'exploitation et à la valeur de liquidation, ainsi que la décision du conseil d'administration d'aviser le juge du surendettement.

d. Par courrier du 19 janvier 2023, le conseil de A______ SA a informé le Tribunal de ce que les administrateurs de la précitée n'avaient pas signalé un quelconque surendettement.

e. Le 9 février 2023, A______ SA a transmis au Tribunal ses comptes annuels de l'année 2022. Elle ne se trouvait pas en état de surendettement. Elle a précisé avoir déposé le même jour plainte pénale pour faux dans les titres auprès du Ministère public.

Elle a conclu, principalement, à ce que le Tribunal annule l'ordonnance du 9 janvier 2023, raye la cause du rôle, les frais devant être mis à la charge de l'Etat, et, subsidiairement, constate l'absence de surendettement, raye la cause du rôle, et mette les frais à la charge de l'Etat.

f. Par jugement JTPI/2221/2023 du 13 février 2023, le Tribunal, statuant par voie de procédure sommaire, a constaté que A______ SA n'était pas en situation de surendettement (ch. 1 du dispositif), a arrêté les frais judiciaires à 200 fr., mis à la charge de la précitée, condamnée en conséquence à verser ce montant à l'Etat de Genève (ch. 2 à 4), a dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 5) et a débouté l'intéressée de toutes autres conclusions (ch. 6).

B. a. Par acte expédié le 24 février 2023 à la Cour de justice, A______ SA, comparant en personne, a formé recours contre ce jugement. Elle a nouvellement conclu à ce que la Cour déclare nuls l'ordonnance du 9 janvier et le jugement du 13 février 2023 rendus par le Tribunal, déclare qu'elle "est victime d'un acte délictueux et ne peut être considérée comme responsable du courrier du 3 janvier 2023", dise que les frais de première instance sont à la charge de l'Etat et lui alloue des dépens à hauteur de 1'000 fr.

Elle a produit de nouvelles pièces.

b. Elle a été avisée par pli du greffe du 28 février 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 al. 1 LP).

La décision sur les frais ne peut être attaquée séparément que par un recours (art. 110 CPC).

1.2 Le recours a été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de 10 jours (art. 174 al. 1 LP) et selon la forme requise, de sorte qu'il est recevable.

1.3 Le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

1.4 Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC). Le juge établit les faits d'office (maxime inquisitoire, art. 255 let. a CPC). La preuve des faits allégués doit, en principe, être apportée par titres.

1.5 La recourante a produit des pièces nouvelles devant la Cour.

1.5.1 Selon l'art. 326 CPC, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (al. 1); les dispositions spéciales de la loi sont réservées (al. 2).

A cet égard, l'art. 174 LP - applicable à la faillite sans poursuite préalable par renvoi de l'art. 194 al. 1 LP - prévoit que les parties peuvent faire valoir des faits nouveaux, lorsque ceux-ci se sont produits avant le jugement de première instance (art. 174 al. 1, 2ème phrase, LP). Cette disposition spéciale de la loi, au sens de l'art. 326 al. 2 CPC, vise les faits nouveaux improprement dits (faux nova ou pseudo-nova), à savoir ceux qui existaient déjà au moment de l'ouverture de la faillite et dont le premier juge n'a pas eu connaissance pour quelque raison que ce soit; ces faits peuvent être invoqués sans restriction et prouvés par pièces, pour autant qu'ils le soient dans le délai de recours. Aux termes de l'art. 174 al. 2 LP, le failli peut aussi invoquer de vrais nova, à savoir les faits, intervenus après l'ouverture de la faillite en première instance, qui sont énumérés aux chiffres 1 à 3. Selon la jurisprudence, ces vrais nova doivent également être produits avant l'expiration du délai de recours. En vertu de la lettre claire de l'art. 174 al. 2 LP, aucun autre novum n'est admissible. Partant, dans le cadre d'un recours contre un prononcé de faillite sans poursuite préalable, seuls les pseudo-nova sont en principe recevables, les hypothèses énumérées exhaustivement à l'art. 174 al. 2 ch. 1-3 LP étant étrangères à ce type de procédure. Il n'est ainsi pas possible d'invoquer que, dans le délai de recours, l'état de surendettement a été éliminé, qu'un nouvel organe de révision est arrivé à la conclusion qu'il n'y a pas de surendettement ou encore qu'une postposition de créance nouvellement consentie rend superflu l'avis au juge (arrêts du Tribunal fédéral 5A_252/2020 et 5A_264/2020 du 18 juin 2020, consid. 4.1.2; 5A_243/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1 et les références, publié in SJ 2019 I p. 376).

1.5.2 En l'espèce, les pièces nouvelles visent des faits antérieurs à la date à laquelle le Tribunal a rendu sa décision. Elles n'ont toutefois pas trait à la solvabilité ou aux conditions du prononcé d'une faillite. La recevabilité de ces pièces peut souffrir de demeurer indécise, compte tenu de ce qui suit.

1.6 La recourante a formulé de nouvelles conclusions.

1.6.1 Les conclusions nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

1.6.2 La recourante a nouvellement conclu à la nullité de l'ordonnance du 9 janvier 2023 ainsi qu'à la constatation de ce qu'elle serait victime d'un acte délictueux. Conformément à la disposition légale rappelée ci-avant, de telles conclusions sont irrecevables.

2. La recourante reproche au Tribunal d'être entré en matière sur la requête de faillite du 3 janvier 2023, d'avoir constaté qu'elle n'était pas en état de surendettement et d'avoir mis les frais judiciaires à sa charge, motif pris de ce que son identité avait été usurpée.

2.1.1 L'art. 192 LP prévoit que la faillite est prononcée d'office sans poursuite préalable dans les cas prévus par la loi, soit en particulier les art. 725 et 725a CO (arrêt du Tribunal fédéral 5A_269/2010 du 3 septembre 2010 consid. 3).

2.1.2 En vertu de l'art. 59 CPC, il n'est entré en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action (al. 1), en tête desquelles figure le fait que la partie demanderesse possède un intérêt digne de protection (al. 2 let. a).

2.2 Dans le présent cas, dans la mesure où la décision de première instance a constaté que la recourante n'était pas en état de surendettement, constat correspondant aux conclusions subsidiaires qu'elle a formées, se pose la question de son intérêt à agir concernant cet aspect du jugement entrepris.

L'on ne discerne pas en quoi une annulation du chiffre 1 du dispositif concerné servirait l'intérêt juridique de la recourante, ce qui rend le recours irrecevable en tant qu'il vise le chiffre 1 du dispositif du jugement.

3.  Reste à traiter le sort des frais judiciaires et dépens de première instance et de recours.

3.1 A teneur de l'art. 106 al. 1, 1ère phrase, CPC, les frais – qui comprennent les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC) – sont mis à la charge de la partie succombante. Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC). Cette disposition suppose une répartition des frais judiciaires et des dépens en fonction de l'issue du litige comparée avec les conclusions prises par chacune des parties (arrêt 4A_226/2013 du 7 octobre 2013 consid. 6.2, publié in RSPC 2014 p. 19). Le principe selon lequel les frais doivent être répartis selon l'issue du procès repose sur l'idée que les frais doivent être supportés par celui qui les a occasionnés, étant présumé que c'est la partie qui succombe qui a occasionné les frais (ATF 145 III 153 consid. 3.3.1).

Le tribunal peut toutefois s'écarter de cette règle et répartir les frais selon sa libre appréciation, en statuant selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), dans les hypothèses prévues par l'art. 107 CPC, notamment lorsque des circonstances particulières rendent la répartition en fonction du sort de la cause inéquitable (art. 107 al. 1 let. f CPC).

La décision sur la répartition des frais relève du pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_345/2018 du 5 novembre 2018 consid. 3 et la référence).

3.2 Dans le présent cas, la recourante soutient que les frais de première instance et de recours devaient être mis à la charge de l'Etat, dans la mesure où son identité avait été usurpée par un tiers, lequel a déposé devant le Tribunal l'avis de surendettement le 3 janvier 2023. Elle fait valoir avoir déposé plainte pénale contre X pour faux dans les titres et usurpation d'identité, pièces à l'appui. A son sens, ni elle ni son administrateur ne serait "responsable de l'ouverture de la procédure". En l'état, il ne peut être déterminé si, comme l'allègue la recourante, un tiers aurait déposé en son nom l'avis de surendettement devant le premier juge, dans la mesure où le résultat de la plainte pénale n'est pas connu.

Dans ces circonstances, c'est sans arbitraire que le Tribunal a considéré que la recourante avait succombé dans ses conclusions et mis les frais de la procédure à sa charge. Leur montant n'étant pas critiqué, il ne sera pas revu, étant précisé qu'il est conforme au tarif applicable. Il s'ensuit que le recours sera rejeté sur ce point.

Les frais du recours, arrêtés à 200 fr. (art. 48, 61 OELP), seront dès lors également mis à la charge de la recourante, qui succombe intégralement. Elle sera en conséquence condamnée à verser ce montant aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Compte tenu de l'issue du litige, il ne sera pas alloué de dépens à la recourante, qui comparaît en personne.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 24 février 2023 par A______ SA contre les chiffres 2 à 5 du dispositif du jugement JTPI/2221/2023 rendu le 13 février 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/18/2023–5 SFC et irrecevable pour le surplus.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ SA de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 200 fr. et les met à la charge de A______ SA.

Condamne A______ SA à verser 200 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.