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Décisions | Sommaires

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C/18242/2022

ACJC/313/2023 du 01.03.2023 sur OTPI/748/2022 ( SP ) , CONFIRME

Normes : CPC.261.al1; CO.699.al2; CO.706.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/18242/2022 ACJC/313/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 1ER MARS 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'une ordonnance rendue par la 20ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 14 novembre 2022, comparant par Me Olivier SIGG et Me Adriano ANTONIETTI, avocats,
Walder Wyss SA, rue d'Italie 10, case postale 3770, 1211 Genève 3, en l'Étude desquels il fait élection de domicile,

et

B______ SA, sise ______, intimée, comparant par Me Cédric BERGER et
Me David BRAUN, avocats, Köstenbaum & Associés SA, rue François-Bellot 12, case postale 3397, 1211 Genève 3, en l'Étude desquels elle fait élection de domicile.


EN FAIT

A. a. B______ SA a pour but l'achat, la vente et ______, spécialement ceux touchant à l'informatique, ______, ______ et ______, ______ ainsi que ______.

Son capital-actions est composé de 130'000 actions nominatives d'une valeur nominale de 1 fr., détenues à hauteur de 50,115 % par C______, de 29,346 % par D______, de 6,923 % par E______, de 6,731 % par A______, de 6,654 % par F______, de 0.077 % par G______, de 0,077 % par H______ et de 0,077 % par I______.

C______, F______, G______ et H______ sont inscrits au Registre du commerce en qualité d'administrateurs, au bénéfice de la signature collective à deux.

L'organe de révision inscrit est J______ SA.

b. A teneur des statuts, l'assemblée générale ordinaire a lieu chaque année dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice (art. 13 al. 1).

L'article 21 des statuts prévoit que la société est administrée par un conseil d'administration composé d'au moins trois membres (al. 1). La durée des fonctions des administrateurs est d'une année. Elle prend fin lors de l'assemblée générale ordinaire qui suit l'expiration de leur mandat. Ils sont indéfiniment rééligibles (al. 4).

c. Les comptes annuels de B______ SA ont été établis au 31 décembre de chaque année concernée.

La dernière clôture des comptes annuels a été effectuée au 31 décembre 2021.

d. Par courrier du 22 mars 2022, B______ SA a mis A______ en demeure de verser, au plus tard le 21 avril 2022, la somme de 333'252 fr. 09, correspondant aux soldes débiteurs de deux comptes courants ouverts à son nom dans les livres de la société.

e. Aucune assemblée générale ordinaire n'a été convoquée avant le 30 juin 2022.

f. Par courriel du 14 juillet 2022, C______ a convoqué une assemblée générale ordinaire pour le 3 août 2022, laquelle n'a finalement pas eu lieu.

g. Par courrier du 19 juillet 2022 adressé à B______ SA, A______ a constaté que la convocation à l'assemblée générale ordinaire n'était pas valable. L'assemblée n'ayant pas été convoquée et les membres du conseil d'administration n'ayant pas été réélus avant le 30 juin 2022, la société était en situation de carence, de sorte que seule une assemblée générale universelle permettait de procéder à la réélection des membres du conseil d'administration.

h. Par pli du 20 juillet 2022, A______ a informé le Registre du commerce de la situation de carence dans laquelle se trouvait B______ SA.

Le Registre lui a répondu le 28 juillet 2022 que seul le Tribunal pouvait établir que les organes n'avaient pas été régulièrement réélus et prononcer à titre provisionnel le blocage des inscriptions.

i. Par courrier du 22 juillet 2022, B______ SA a répondu à A______ qu'à teneur des statuts, la durée des fonctions des administrateurs prenait fin lors de l'assemblée générale ordinaire qui suit l'expiration du mandat.

j. Par courriel du 15 août 2022, J______ SA a convoqué l'assemblée générale ordinaire de B______ SA pour le 13 septembre 2022, avec à l'ordre du jour l'approbation du procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire des actionnaires ayant adopté les comptes de l'exercice 2020 (ch. 1), le rapport de gestion, bilan et comptes de pertes et profits de l'exercice 2021 (ch. 2), le rapport de l'organe de révision sur les comptes de l'exercice 2021 (ch. 3), l'approbation des comptes 2021 et la décision relative à la proposition d'emploi du bénéfice au bilan (ch. 4), la décharge au conseil d'administration (ch. 5), l'élection des administrateurs pour l'année 2022 (ch. 6), l'élection de l'organe de révision pour l'exercice 2022 (ch. 7), et les changements des statuts : président avec signature individuelle (ch. 8).

k. Lors de l'assemblée générale ordinaire du 13 septembre 2022, C______, H______, F______ et G______ ont été élus en qualité d'administrateurs et J______ SA en qualité d'organe de révision; au vu du bénéfice réalisé en 2021, il a été décidé de verser un dividende de 550'000 fr. aux actionnaires.

l. Le 14 septembre 2022, B______ SA a adressé à A______ un décompte de versement de dividende pour l'exercice 2021 de 24'062 fr. 50, impôt anticipé déduit, et l'a informé qu'en raison de la procédure de recouvrement initiée à son encontre, ce montant ne lui serait pas versé.

m. Les dividendes ont été versés aux autres actionnaires le 22 septembre 2022, à l'exception de celui de E______, versé le 27 septembre 2022.

n. Le 22 septembre 2022, A______ a saisi le Tribunal de première instance d'une requête en carence à l'encontre de B______ SA.

o. Par requête de mesures provisionnelles et superprovisionnelles déposée le 23 septembre 2022 à l’encontre de B______ SA, A______ a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que le Tribunal fasse interdiction à B______ SA, sous la menace des peines prévues à l'article 292 CP, de mettre en œuvre les décisions prises sous chiffres 1 à 8 de l'ordre du jour, reçu en date du 15 août 2022 pour l'assemblée générale ordinaire de B______ SA, tenue le 13 septembre 2022, et de le dispenser de la fourniture de sûretés.

Il a invoqué la nullité des décisions prises lors de l'assemblée générale du 13 septembre 2022 en raison de la carence de B______ SA, les mandats des administrateurs et de l'organe de révision ayant pris fin au 30 juin 2022 sans renouvellement valable.

Il a fait valoir que l'exécution de décisions nulles mettait en danger la sécurité juridique en générale et celle de la société en particulier et qu'en outre, si le dividende venait à être versé, il serait impossible pour la société d'en obtenir le remboursement, causant un préjudice difficilement réparable.

p. Par ordonnance du 23 septembre 2022, le Tribunal a fait droit à la requête à titre superprovisionnel.

q. Dans ses déterminations du 31 octobre 2022, B______ SA a conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet de la requête et à la révocation de l'ordonnance sur mesures superprovisionnelles.

r. Le 3 novembre 2022, A______ a adressé au Tribunal des déterminations écrites spontanées et des pièces.

s. A l'audience du 7 novembre 2022 du Tribunal, A______ a contesté le mandat conféré par B______ SA à ses conseils. Il a plaidé, persisté dans les conclusions de sa requête et conclu, en outre, à ce qu'il soit fait interdiction à B______ SA et à ses anciens membres du conseil d'administration de prendre toute décision tant qu'il n'aura pas été remédié à la carence dans l'organisation de la société.

B______ SA a produit une procuration en faveur de ses conseils, signée par F______, administrateur, et K______, sous-directeur, tous deux au bénéfice de la signature collective à deux. Elle a plaidé et persisté dans ses conclusions.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

t. Par ordonnance OTPI/748/2022 rendue le 14 novembre 2022, le Tribunal a déclaré irrecevables les conclusions formulées par A______ le 7 novembre 2022 (ch. 1 du dispositif), a rejeté la requête (de mesures provisionnelles) (ch. 2), a révoqué en conséquence l'ordonnance sur mesures superprovisionnelles rendue le 23 septembre 2022 (ch. 3), a statué sur les frais et dépens (ch. 4 et 5) et a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

Le Tribunal a notamment retenu que dans la mesure où le conseil d'administration de B______ SA n'avait pas convoqué l'assemblée générale ordinaire dans les six mois suivant la clôture des comptes au 31 décembre 2021, l'organe de révision avait été fondé à la convoquer. A teneur des statuts de la société, les fonctions des administrateurs avaient pris fin lors de l'assemblée générale ordinaire qui avait suivi l'expiration de leur mandat. Le délai de six mois prévu par l'art. 699 al. 2 CO était un simple délai d'ordre. L'assemblée générale avait ainsi été valablement convoquée et les décisions prises lors de celle-ci valablement adoptées. A______ n'avait pas rendu vraisemblable l'irrégularité de la convocation de l'assemblée générale du 13 septembre 2022 et partant sa prétention en nullité des décisions adoptées à cette occasion.

B. a. Par acte du 25 novembre 2022 à la Cour de justice, A______ a formé appel de cette ordonnance, sollicitant son annulation. Il a conclu à ce que la Cour, sous suite de frais, fasse interdiction à B______ SA, sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP, de mettre en œuvre les décisions prises sous chiffres 1 à 8 de l'ordre du jour pour l'assemblée générale ordinaire tenue le 13 septembre 2022.

b. La requête de suspension du caractère exécutoire de la décision entreprise a été rejetée par arrêt ACJC/1628/2022 du 9 décembre 2022.

c. Dans sa réponse du 15 décembre 2022, B______ SA a conclu, sous suite de frais judiciaires et dépens, à la confirmation de l'ordonnance querellée.

Elle a formé de nouveaux allégués et produit de nouvelles pièces.

d. A______ n'ayant pas fait usage de son droit de réplique, les parties ont été avisées par plis du greffe du 6 janvier 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions de première instance rendues sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC), lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

L'action en annulation d'une décision de l'assemblée générale est de nature pécuniaire (ATF 133 III 368 consid. 1.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_404/2011 du 7 novembre 2011 consid. 1.1). La valeur litigieuse est déterminée de façon concrète d'après les objets des décisions de l'assemblée générale dont l'annulation est requise. Le Tribunal fédéral a notamment retenu que l'intérêt d'une société à la nomination de son administrateur unique ne saurait être inférieur à la valeur de son capital-actions (arrêt du Tribunal fédéral 4P_344/2006 du 27 février 2007 consid. 5.2, in RSPC 2007 p. 399; 4C_47/2006 du 30 mai 2006 consid. 1.2).

Interjeté dans le délai utile de dix jours (art. 311 al. 3 CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable, la valeur litigieuse étant supérieure à 10'000 fr., au vu du capital-actions de l'intimée.

1.2 La Cour revoit le fond du litige avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC) et applique le droit d'office (art. 57 CPC). Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable -, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC).

En outre, dans le cadre de mesures provisionnelles, instruites selon la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), la cognition du juge est circonscrite à la vraisemblance des faits allégués ainsi qu'à un examen sommaire du droit (ATF 131 III 473 consid. 2.3; 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5). Les moyens de preuve sont, en principe, limités à ceux qui sont immédiatement disponibles (art. 254 CPC; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, p. 283 n. 1556).

2. L'intimée a formé de nouveaux allégués et produit de nouvelles pièces.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

2.2 En l'espèce, les pièces nouvelles produites ont été établies après que le Tribunal avait gardé la cause à juger, de sorte qu'elles sont recevables, ainsi que les allégués de fait s'y rapportant, sans préjudice de leur pertinence pour l'issue du litige.

3. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir violé les art. 699 et 731b CO en considérant que le délai de six mois pour convoquer une assemblée générale ordinaire après la clôture de l'exercice était un délai d'ordre et en retenant que les décisions prises par l'assemblée générale étaient valables.

3.1 Aux termes de l'art. 261 al. 1 CPC, le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable. Il s'agit là de conditions cumulatives (Bohnet, Commentaire romand CPC, 2019, n. 3 ad art. 261 CPC).

L'octroi de mesures provisionnelles suppose la vraisemblance du droit invoqué et des chances de succès du procès au fond, ainsi que la vraisemblance, sur la base d'éléments objectifs, qu'un danger imminent menace le droit du requérant, enfin la vraisemblance d'un préjudice difficilement réparable, ce qui implique une urgence (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au CPC, in FF 2006 p. 6841 ss, spéc. 6961; Bohnet, op. cit., n. 3 ad art. 261 CPC).

Est difficilement réparable le préjudice qui sera plus tard impossible ou difficile à mesurer ou à compenser entièrement. Entrent notamment dans ce cas de figure la perte de clientèle ou encore l'atteinte à la réputation d'une personne (arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 4.1).

Toute mesure provisionnelle implique qu'il y ait urgence. Cette notion d'urgence comporte des degrés et s'apprécie moins selon des critères objectifs qu'au regard des circonstances; ainsi, l'urgence apparaît comme une notion juridique indéterminée, dont le contenu ne peut être fixé une fois pour toutes. Il appartient au juge d'examiner de cas en cas si cette condition est réalisée, ce qui explique qu'il puisse se montrer plus ou moins exigeant suivant les circonstances sans s'exposer pour autant au grief d'arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 4P_224/1990 du 28 novembre 1990, in SJ 1991 p. 113, consid. 4c). Cela étant, alors même que les mesures provisionnelles sont subordonnées à l'urgence, le droit de les requérir ne se périme pas, mais la temporisation du requérant durant plusieurs mois à dater de la connaissance du dommage ou du risque peut signifier qu'une protection n'est pas nécessaire, voire constituer un abus de droit (arrêt du Tribunal fédéral 4P_263/2004 du 1er février 2005 consid. 2.2). Ainsi, la requête de mesures provisionnelles risque d'être rejetée si le tribunal arrive à la conclusion qu'une procédure ordinaire introduite à temps aurait abouti à un jugement au fond dans des délais équivalents (Colombini, Code de procédure civile, condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise, 2018, p. 825, ch. 6.1; Bohnet, op. cit., n. 12 ad art. 261 CPC).

Un fait est rendu vraisemblable si le juge, en se basant sur des éléments objectifs, a l'impression que le fait invoqué s'est produit, sans pour autant devoir exclure la possibilité qu'il ait pu se dérouler autrement; le juge peut en outre se limiter à un examen sommaire des questions de droit (ATF 139 III 86 consid. 4.2).

3.2.1 Au sein de l'assemblée générale, l'actionnaire exerce ses droits, notamment ceux qui concernent la désignation des organes, l'approbation du rapport de gestion et la décision concernant l'emploi du bénéfice (art. 689 al. 1 CO).

L'assemblée générale est convoquée par le conseil d'administration et, au besoin, par les réviseurs; les liquidateurs et les représentants des obligataires ont également le droit de la convoquer (art. 699 al. 1 CO).

Selon l'article 699 al. 2 CO, l'assemblée générale a lieu chaque année dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice comptable. Par ailleurs, le rapport du réviseur doit être mis à la disposition des actionnaires vingt jours au moins avant l'assemblée générale ordinaire (art. 696 al. 1 CO).

3.2.2 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société (art. 706 al. 1 CO).

L'action formatrice prévue par l'art. 706 CO est dirigée contre la société (art. 706 al. 1 CO) et tend à l'annulation rétroactive de la décision de l'assemblée générale qui est attaquée. Le jugement qui l'admet est opposable à tous les actionnaires, chacun d'eux pouvant s'en prévaloir (art. 706 al. 5 CO; ATF 136 III 345 consid. 2.2.2, in SJ 2010 I 529; ATF 122 III 279 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_404/2011 du 7 novembre 2011 consid. 5.1).

Celui qui intente l'action doit posséder un intérêt juridique personnel à l'annulation de la décision litigieuse, en ce sens que la constatation ou la modification demandée doit lui être utile. La jurisprudence donne une définition large d'un tel intérêt, puisqu'elle considère comme suffisante, sauf abus de droit, l'intention de préserver les intérêts de la société. Dans ce cas, il est cependant nécessaire que la situation juridique de l'actionnaire demandeur soit elle aussi effectivement modifiée par un jugement qui admettrait sa demande. La procédure judiciaire n'est pas là pour trancher des questions juridiques abstraites sans effet sur des rapports de droit concrets (ATF 122 III 279 consid. 3a, in JT 1998 I 605; arrêt du Tribunal fédéral 4A_404/2011 du 7 novembre 2011 consid. 5.1; Peter/Cavadini,
CR-CO II, n. 11 ad art. 706 CO).

3.2.3 Sont annulables en vertu de l'art. 706 al. 1 CO les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts. Les principaux cas d'annulation sont énumérés à l'art. 706 al. 2 CO; il s'agit essentiellement des décisions qui violent des dispositions protégeant les droits des actionnaires, le principe de la proportionnalité et, en particulier, le principe selon lequel un droit doit être exercé avec ménagement. Sont nulles les décisions affectées de vices graves. En particulier, des vices formels graves et manifestes dans la prise des décisions peuvent entraîner la nullité de celles-ci. Toutefois, même dans ces cas, le vice de procédure formel ne peut entraîner la nullité des décisions que si un déroulement correct de la procédure aurait abouti à des décisions différentes (arrêt du Tribunal fédéral 4A_516/2016 du 28 août 2017 consid. 6).

3.2.4 Jurisprudence et doctrine retiennent qu'une réélection tacite d'un administrateur à la fin de son mandat n’est pas admissible. Il n’est pas non plus admissible de considérer qu’en cas de situation de «pat» à l’assemblée générale (cas où il est impossible de dégager une majorité), les administrateurs en place conservent leurs fonctions. Le Tribunal fédéral a, à cet égard, déclaré que sont nulles les clauses statutaires qui (i) prévoient la reconduction automatique d’un mandat d’administrateur lorsque l’assemblée générale n’est pas tenue, car la désignation des membres du conseil d’administration constitue un droit inaliénable de l’assemblée générale ou (ii) prévoient la reconduction automatique d’un mandat d’administrateur dans le cas où l’assemblée générale s’est réunie, mais que celle-ci a refusé de réélire les administrateurs candidats à leur propre succession car il faut considérer que, dans cette hypothèse, l’assemblée s’est prononcée en refusant de nommer les candidats concernés (ATF 148 III 69 consid. 3.3; Peter/Cavadini, Commentaire romand, n. 6a-6b ad art.710 CO).

Le Tribunal fédéral a souligné que la compétence inaliénable de l'assemblée générale serait contournée si le conseil d'administration pouvait prolonger son mandat en ne convoquant pas l'assemblée générale. Cela serait d'autant plus choquant dans le cas où l'élection n'était pas simplement oubliée, mais empêchée dans le but de conserver le mandat. Dans l'ATF 140 III 349, le Tribunal fédéral a accordé une grande importance à la prise en compte de la volonté exprimée par l'assemblée générale en mettant fin au mandat si l'élection n'a pas eu lieu en raison d'une situation de blocage. Dans le même sens, il faut exiger que l'assemblée générale puisse exercer son droit de nomination en exprimant explicitement sa volonté, et donc que la poursuite du mandat d'administrateur ne s'applique qu'en cas d'expression positive de sa volonté (ATF 148 III 69 ibid).

Le mandat du conseil d'administration prend fin à l'expiration du sixième mois suivant la clôture de l'exercice concerné, si aucune assemblée générale n'a été organisée conformément à l'art. 699 al. 2 CO ou si l'élection du conseil d'administration n'a pas été inscrite à l'ordre du jour (ATF 148 III 69 ibid; cf. Peter/Cavadini, op. cit., n. 9 ad art.710 CO).

3.3 Dans le présent cas, il est constant que l'appelant est actionnaire de l'intimée, que les comptes de l'exercice 2021 de l'intimée ont été clôturés au 31 décembre 2021 et qu'aucune assemblée générale ordinaire ne s'est tenue avant le 30 juin 2022.

Le Tribunal a considéré que dans la mesure où le conseil d'administration de l'intimée n'avait pas convoqué l'assemblée générale ordinaire dans les six mois suivant la clôture des comptes au 31 décembre 2021, l'organe de révision avait été fondé à la convoquer. A teneur des statuts de la société, les fonctions des administrateurs avaient pris fin lors de l'assemblée générale ordinaire qui avait suivi l'expiration de leur mandat. L'assemblée générale avait ainsi été valablement convoquée et les décisions prises lors de celle-ci valablement adoptées.

L'appelant reproche au premier juge d'avoir retenu que les fonctions des administrateurs avaient pris fin lors de l'assemblée générale ordinaire (du 13 septembre 2022) qui avait suivi l'expiration de leur mandat, conformément à l'art. 21 al. 4 des statuts, et non à l'échéance du délai de six mois prévu par l'art. 699 al. 2 CO, et qu'il en allait de même de l'organe de révision.

Ce grief est infondé. Certes, la jurisprudence récente du Tribunal fédéral a retenu qu'une réélection tacite d'un administrateur à la fin de son mandat n'est pas admissible. Tel n'est toutefois pas le cas en l'espèce. Une première assemblée générale a été convoquée le 14 juillet 2022 pour le 3 août 2022, laquelle n'a finalement pas eu lieu, l'appelant ayant fait valoir que la convocation de ladite assemblée n'était pas valable. L'assemblée a été ensuite convoquée le 15 août 2022 pour le 13 septembre 2022. A cette occasion, les administrateurs ont été élus, de même qu'un organe de révision. Il n'est ainsi pas question ici d'une reconduction automatique des fonctions d'administrateurs prévue par les statuts ou d'une reconduction tacite.

On peine par ailleurs à comprendre l'intérêt de l'appelant à requérir des mesures provisionnelles, dès lors que les dividendes décidés à l'occasion de l'assemblée générale du 13 septembre 2022, ont été portés en déduction des montants faisant l'objet de la procédure de recouvrement initiée par l'intimée à son encontre.

L'appelant n'a par conséquent pas rendu vraisemblable que les décisions prises lors de l'assemblée générale du 13 septembre 2022 seraient vraisemblablement annulables voire nulles, de sorte que c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que les conditions permettant de prononcer des mesures provisionnelles n'étaient pas réunies.

L'ordonnance entreprise sera par conséquent confirmée.

4. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 2'400 fr. (art. 26 et 37 RTFMC) et mis à la charge du recourant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront entièrement compensés à due concurrence avec l'avance de frais de 1'400 fr. fournie par l'appelant, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). L'appelant sera condamné à verser 1'000 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Il sera par ailleurs condamné à verser à l'intimée 2'000 fr. à titre de dépens d'appel, débours et TVA compris (art. 84, 85, 88 et 90 RTFMC; art. 23 al. 1, 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 25 novembre 2022 par A______ contre l'ordonnance OTPI/748/2022 rendue le 14 novembre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/18242/2022–20 SP.

Au fond :

Confirme cette ordonnance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'400 fr., compensés à due concurrence avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève, et les met à la charge de A______.

Condamne A______ à verser 1'000 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Condamne A______ à verser à B______ SA 2'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.