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Décisions | Sommaires

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C/4294/2022

ACJC/64/2023 du 17.01.2023 sur JTPI/9462/2022 ( SML ) , JUGE

Normes : cpc.58.al2; lp.70.al2; co.143; cc.715.al2; lp.38.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4294/2022 ACJC/64/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 17 JANVIER 2023

 

Entre

Monsieur A______ et Madame B______, domiciliés ______, recourants contre un jugement rendu par la 11ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 5 août 2022, comparant par Me Tomoé Céline CASTELLO, avocate, Borel & Barbey, rue de Jargonnant 2, case postale 6045, 1211 Genève 6, en l'Étude de laquelle ils font élection de domicile,

et

E______ SA, sise ______, intimée, comparant par Me Marco ROSSI, avocat,
SLRG Avocats, quai Gustave-Ador 2, 1207 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/9462/2022 du 5 août 2022, notifié à A______ et B______ le 5 septembre 2022, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure sommaire, a constaté que la procédure était devenue sans objet en tant qu'elle était dirigée contre D______ SARL, EN LIQUIDATION (chiffre 1 du dispositif), prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée par A______ "au commandement de payer, poursuites n° 1______ (n° 2______)", à concurrence de 30'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 décembre 2020, et de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020 (ch. 2), prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée par B______ au commandement de payer, poursuite n° 2______, à concurrence de 30'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 décembre 2020, et de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020 (ch. 3), arrêté les frais judiciaires à 400 fr., compensés avec l'avance fournie par E______ SA et mis à la charge de A______ et B______ (ch. 4 et 5), ceux-ci étant condamnés, conjointement et solidairement entre eux, à payer à E______ SA 400 fr. au titre de remboursement des frais judicaires (ch. 6) ainsi que 1'316 fr. au titre de dépens (ch. 7).

B. a. Par acte expédié le 15 septembre 2022 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ et B______ (ci-après : les époux A______/B______) ont formé recours contre ce jugement, concluant à l'annulation des chiffres 2 à 7 de son dispositif et, cela fait, à ce qu'il soit dit que les poursuites n° 1______ et n° 2______ n'iraient pas leur voie, sous suite de frais judiciaires et dépens.

b. Par courrier du 7 octobre 2022, E______ SA a conclu au rejet du recours, sous suite de frais judiciaires et dépens.

c. La cause a été gardée à juger le 27 octobre 2022, ce dont les parties ont été avisées le jour même.

C. Les faits suivants résultent de la procédure :

a. E______ SA, société inscrite au Registre du commerce de Genève, est une société active notamment dans la gérance d'immeubles et le courtage immobilier.

G______ en est l'administrateur avec pouvoir de signature individuelle.

b. D______ SARL était une société inscrite au Registre du commerce de Genève, qui avait pour but social notamment l'exploitation, la création, l'achat, la vente et la location de tous établissements publics.

Suite au prononcé de sa faillite le ______ mai 2022, la société a été radiée du Registre du commerce le 12 août 2022.

A______ était l'associé-gérant président de la société et B______ en était l'associée-gérante, tous deux avec pouvoir de signature individuelle.

c. K______ SA, aujourd'hui en liquidation, inscrite au Registre du commerce de Genève, avait pour but social l'exploitation d'un café restaurant et d'une façon générale l'exploitation de tous établissements publics dans le domaine de la restauration et de toutes activités liées à ce domaine.

La société a eu successivement pour administrateur, avec pouvoir de signature individuelle, G______, du 8 avril 1998 au 16 mars 2020, puis A______ dès le 16 mars 2020.

d. Le 6 mars 2020, les personnes susvisées ont signé divers documents, à savoir :

d.a Un contrat intitulé "Convention de cession d'actions de K______ SA", conclu entre "K______ SA, représentée par Monsieur G______, administrateur ( ), dénommés ci-après : « le Cédant »", d'une part, et "D______ SARL, représentée par Monsieur A______ et Madame B______ ( ), dénommés ci-après : « le Cessionnaire »", d'autre part.

A teneur de cette convention, G______ certifiait être le seul détenteur des 100 actions au porteur de K______ SA, d'une valeur nominative de 1'000 fr. chacune, et déclarait céder lesdites actions à D______ SARL pour le prix de 255'000 fr. Il était en outre stipulé que cette dernière société entrerait "en jouissance des actions au porteur ( ) cédées dès le 6 mars [2020]" et que "le Cessionnaire" s'était acquitté du prix convenu "en mains du Cédant, sous déduction d'un crédit de [30'000 fr.] dont les conditions [avaient] été définies par les parties".

Le contrat a été signé, sous la rubrique "le Cédant", par G______ - agissant à son nom personnel et à celui de K______ SA - et, sous la rubrique "le Cessionnaire", par A______ - agissant à son nom personnel et à celui de D______ SARL - et par B______.

d.b Un document intitulé "Inventaire mobilier-matériel, Restaurant « K______ » no. ______, rue 4______ à [code postal] Genève", qui porte la signature de A______ et celle de B______.

Cet inventaire liste divers objets mobiliers (tables, chaises, articles de vaisselle, appareils électroménagers, etc.) dont la valeur n'a pas été spécifiée.

d.c Un contrat intitulé "Pacte de réserve de propriété et reconnaissance de dette", conclu entre "E______ SA, représentée par Monsieur G______, administrateur ( ), dénommée ci-après : « le Cédant »", d'une part, et "D______ SARL ( ) et Monsieur A______ et Madame B______ ( ), Agissant conjointement et solidairement entre eux, dénommés ci-après : « l'Acheteur »", d'autre part.

Ce contrat était rédigé en ces termes :

"Les parties établissent un pacte de réserve de propriété dans le cadre de l'achat, par la société D______ SARL et Monsieur A______ et Madame B______, de 100 actions de CHF 1'000.-, entièrement libérées, de la société K______ SA ( ) et de l'ensemble du matériel-mobilier meublant le tea-room « K______ SA » sis rue 4______ no. ______ à [code postal] Genève, selon l'inventaire annexé.

Le Cédant fait inscrire avec l'accord expr[ès] de l'Acheteur conformément à l'article 715 CC, la présente réserve de propriété d'un montant de CHF 30'000.- ( ) au Registre public des pactes de propriétés du domicile de l'Acheteur.

En apposant sa signature au présent contrat, l'Acheteur consent, au sens de l'article 4 de l'ordonnance du Tribunal fédéral du 19.12.1910, à l'inscription précitée.

Si un tiers se voit accorder des droits sur les choses cédées, le Cédant doit être avisé immédiatement par pli recommandé de l'Acheteur.

L'Acheteur a l'obligation, tant que la réserve de propriété existe, d'assurer les objets contre le vol, les dégâts d'eau et d'incendie et d'informer l'assureur en cas de sinistre, les prestations devront se faire au profit du Cédant, soit par le rachat des objets détruits ou endommagés.

Ce pacte de réserve de propriété vaut reconnaissance de dette ( )".

Le contrat a été signé, sous la rubrique "le Cédant", par G______ - agissant au nom de E______ SA - et, sous la rubrique "les Acheteurs", par A______ - agissant à son nom personnel et à celui de D______ SARL - et par B______.

d.d Un document intitulé "Reconnaissance de dette", signé par A______ et par B______ et rédigé en ces termes :

"Par la présente, nous soussignés A______ & B______ ( ), reconnaissons devoir à la société E______ SA la somme de CHF 5'000.- ( ), et nous nous engageons à rembourser cette somme à première demande au plus tard le 31 mai 2020, sans possibilité de retard ni de renouvellement.

La présente vaut reconnaissance de dette au sens de l'article 82 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillites. ( )".

e. Les 27 et 31 août 2021, sur réquisition de E______ SA, trois commandements de payer, poursuites n° 1______, n° 2______ et n° 3______, portant sur les sommes de (i) 30'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 15 décembre 2020, (ii) 5'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 1er juin 2020, (iii) 3'400 fr., plus intérêts à 5% dès le 1er mars 2020 et (iv) 2'500 fr., ont été notifiés respectivement à A______, B______ et D______ SARL.

Les poursuivis y ont formé opposition.

Selon le libellé des commandements de payer, ces sommes concernaient le montant dû selon "reconnaissance de dette du 6 mars 2020" (poste n° 1), le montant dû à titre de "prêt" (poste n° 2), le montant dû à titre d'"inventaire marchandises et boissons" (poste n° 3), ainsi qu'un montant à titre de dommage complémentaire selon l'art. 106 CO ("frais de recouvrement"; poste n° 4).

f. Le 7 mars 2022, E______ SA a formé devant le Tribunal une requête en mainlevée provisoire dirigée contre D______ SARL et les époux A______/B______. Elle a formulé les conclusions suivantes, sous suite de frais judiciaires et dépens :

- prononcer la mainlevée provisoire de l'opposition formée par D______ SARL au commandement de payer qui lui a été notifié le 31 août 2021 dans le cadre de la poursuite n° 3______, conjointement et solidairement avec A______ et B______ (conclusion n° 1);

- prononcer la mainlevée provisoire de l'opposition formée par A______ au commandement de payer qui lui a été notifié le 27 août 2021 dans le cadre de la poursuite n° 1______, conjointement et solidairement avec D______ SARL et B______ (conclusion n° 2);

- prononcer la mainlevée provisoire de l'opposition formée par B______ au commandement de payer qui lui a été notifié le 27 août 2021 dans le cadre de la poursuite n° 2______, conjointement et solidairement avec D______ SARL et A______ (conclusion n° 3).

En substance, E______ SA a allégué qu'elle détenait K______ SA, société locataire d'une arcade à la rue 4______ no. ______, [code postal] Genève, et propriétaire du fonds de commerce d'un restaurant situé à la même adresse. Début mars 2020, elle avait cédé les actions de K______ SA à D______ SARL. Celle-ci n'avait pas été en mesure de payer l'intégralité du prix de vente à E______ SA, un solde de 30'000 fr. restant à payer. Les parties avaient signé, le 6 mars 2020, un document intitulé "Pacte de réserve de propriété et reconnaissance de dette", prévoyant que D______ SARL et les époux A______/B______ s'engageaient à payer 30'000 fr. à E______ SA et qu'une réserve de propriété serait inscrite "pour la valeur précitée", l'acte signé valant reconnaissance de dette. La réserve de propriété avait dûment été inscrite au Registre des pactes de réserve de propriété, ainsi qu'en attestait la pièce 7 annexée à la requête (i.e. un extrait - non signé et non certifié conforme - du "Registre des pactes de réserve de propriété, Office des poursuites, rue du Stand 46, 1211 Genève 8" daté du 5 juillet 2021). D______ SARL et les époux A______/B______ s'étaient également engagés à payer à E______ SA la somme de 5'000 fr. d'ici le 31 mai 2020 au plus tard (ce qui faisait l'objet de la "reconnaissance de dette" signée par les époux A______/B______ le 6 mars 2020) ainsi qu'un montant de 3'400 fr. à titre de reprise du stock du restaurant. Enfin, E______ SA avait droit au paiement de 2'500 fr., correspondant à la provision sollicitée par son avocat en lien avec la procédure de mainlevée. Aucun paiement n'ayant été effectué, E______ SA avait requis les poursuites litigieuses contre D______ SARL, A______ et B______, "pris conjointement et solidairement", en vue de recouvrer les montants de 30'000 fr., 5'000 fr., 3'400 fr. et 2'500 fr. susmentionnés.

g. Lors de l'audience du Tribunal du 5 août 2022, les époux A______/B______ ont conclu à l'irrecevabilité de la requête de mainlevée, subsidiairement à son rejet, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Ils ont fait valoir que E______ SA n'avait pas formulé de conclusions distinctes contre chacun des débiteurs solidaires, qui formaient une consorité passive simple, de sorte que la requête était irrecevable. En tout état, les pièces produites ne valaient pas reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 LP. La convention de cession d'actions ne concernait pas E______ SA qui ne détenait pas les actions de K______ SA et, partant, ne possédait pas la légitimation active. L'extrait produit sous pièce 7 req. n'était pas certifié conforme et ne prouvait pas que le pacte signé le 6 mars 2020 avait été inscrit au Registre des pactes de réserve de propriété. La créance de 5'000 fr. était contestée et la reconnaissance de dette signée le 6 mars 2020 n'apportait pas la preuve de son existence. Quant à l'inventaire signé le même jour, il ne spécifiait pas la valeur des divers objets mobiliers inventoriés.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

h. Dans le jugement querellé, le Tribunal a retenu que E______ SA avait introduit une seule requête de mainlevée, en prenant toutefois des conclusions distinctes contre chaque débiteur solidaire, mis en poursuite séparément, sollicitant que la mainlevée de l'opposition formée par chacun des consorts soit prononcée dans chacune des poursuites litigieuses. L'argument d'irrecevabilité soulevé par les époux A______/B______ tombait donc à faux, E______ SA ayant seulement mentionné, dans ses conclusions, le fait que chaque codébiteur était recherché "conjointement et solidairement" avec les autres codébiteurs. Les conclusions prises à l'égard de chacun d'eux, suffisamment individualisées, étaient ainsi recevables. Par ailleurs, une division des causes n'était pas opportune, les parties ne l'ayant du reste pas requise. Dans la mesure toutefois où la faillite de D______ SARL avait été prononcée le ______ mai 2022 et que les créances déduites en poursuite étaient nées avant l'ouverture de la faillite, la requête de mainlevée était dépourvue d'objet en tant qu'elle visait cette société, au vu de l'art. 206 al. 1 LP, ce qu'il y avait lieu de constater.

Le document intitulé "Pacte de réserve de propriété et reconnaissance de dette" valait titre de mainlevée provisoire, dès lors qu'il faisait état d'une réserve de propriété d'un montant de 30'000 fr., qu'il valait reconnaissance de dette et était signé par les époux A______/B______. Il en allait de même du document intitulé "Reconnaissance de dette" pour le montant recherché de 5'000 fr. En revanche, aucun titre de mainlevée n'avait été produit s'agissant des montants de 3'400 fr. (l'inventaire signé ne mentionnait aucun montant chiffré) et de 2'500 fr. (la demande de provision de l'avocat de E______ SA n'était pas une reconnaissance de dette).

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 142 al. 1 et 3 CPC) pour les décisions prises en procédure sommaire.

Interjeté dans le délai et selon la forme prévus par la loi, le recours est recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et/ou à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (HOHL, Procédure civile, Tome II, 2ème éd. 2010, n. 2307).

En l'espèce, les éléments de fait que les recourants considèrent comme établis de façon manifestement inexacte par le Tribunal ont été intégrés dans l'état de fait dressé ci-avant dans la mesure utile, sur la base des actes et pièces de la procédure.

1.3 Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 lit. a a contrario et 58 al. 1 CPC).

1.4 La procédure de mainlevée de l'opposition (art. 80 ss LP) est une procédure sur pièces ("Urkundenprozess"; cf. art. 254 CPC), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire; le juge de la mainlevée examine uniquement la force probante du titre produit par le créancier poursuivant, sa nature formelle, et non pas la validité de la prétention déduite en poursuite (ATF 132 III 140 consid. 4.1.1 et les références citées). Le prononcé de mainlevée ne sortit que des effets de droit des poursuites (ATF 100 III 48 consid. 3) et ne fonde pas l'exception de chose jugée (res iudicata) quant à l'existence de la créance (ATF 136 III 583 consid. 2.3).

2. Les recourants reprochent au Tribunal d'avoir admis la recevabilité des conclusions n° 2 et n° 3 de la requête de mainlevée. Selon eux, l'intimée n'a pas formulé ses conclusions de façon suffisamment précise contre chacun des débiteurs poursuivis, de sorte que lesdites conclusions ne peuvent pas être reprises telles quelles dans le dispositif du jugement de mainlevée. Les recourants font également grief au premier juge d'avoir violé l'art. 58 al. 1 CPC.

2.1.1 Le tribunal n'entre en matière que sur les demandes et requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action (art. 59 al. 1 CPC). Il examine d'office si ces conditions de recevabilité sont remplies (art. 60 CPC).

La procédure sommaire est introduite par une requête en justice (art. 252 CPC) qui doit comprendre la désignation des parties, les conclusions et la description de l'objet du litige (BOHNET, CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 7 ad art. 252 CPC).

Les conclusions sont l'énoncé des prétentions que le demandeur (le requérant) déduit en justice et espère se voir allouer. Elles déterminent la nature et l'objet de l'action (TAPPY, CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 11 et 12 ad art. 221 CPC). Selon un principe général de procédure civile, les conclusions doivent être formulées de telle manière qu'en cas d'admission, le jugement puisse être exécuté. En d'autres termes, elles doivent être suffisamment claires et précises pour qu'un dispositif qui par hypothèse en reprendrait la formulation soit susceptible d'une exécution forcée (TAPPY, op. cit., n. 12 ad art. 221 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 3.2). Cette exigence de précision découle notamment du principe de disposition (art. 58 al. 1 CPC; cf. infra consid. 2.1.2) : les conclusions déterminent en effet ce que le tribunal pourra accorder et l'étendue de la chose jugée que pourra revêtir la décision finale (TAPPY, op. cit., n. 12 ad art. 221 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_686/2014 du 3 juin 2015 consid. 4.3.1).

En procédure de mainlevée, les conclusions portent sur l'octroi de la mainlevée définitive ou provisoire de l'opposition. La conclusion tendant simplement au prononcé de la mainlevée est suffisante. En cas d'imprécision ou d'erreur (par exemple sur le numéro de la poursuite, le montant de la créance ou le point de départ des intérêts), le juge peut déterminer le véritable sens des conclusions selon le principe de la confiance (ABBET, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd. 2022, n. 64 ad art. 84 LP et les références citées).

2.1.2 Aux termes de l'art. 58 al. 1 CPC, le tribunal ne peut accorder à une partie ni plus, ni autre chose que ce qui est demandé, ni moins que ce qui est reconnu par la partie adverse (ne eat iudex ultra petita partium).

Il convient ainsi de déterminer, lorsque le tribunal n'alloue pas strictement les conclusions du demandeur (du requérant), s'il reste néanmoins dans le cadre des conclusions prises, sans allouer plus que ce qui est demandé ni étendre l'objet de la contestation à des points qui ne lui ont pas été soumis. Le principe de disposition n'interdit cependant pas au tribunal de déterminer le sens véritable des conclusions et de statuer sur cette base, plutôt que selon leur libellé inexact. Les conclusions doivent en effet être interprétées selon le principe de la confiance, à la lumière de la motivation de l'acte (arrêt du Tribunal fédéral 5A_527/2016 du 16 novembre 2016 consid. 3.3.2 et les références citées).

Il n'y a pas violation du principe ne ultra petita lorsque le tribunal alloue un montant non pas solidairement aux demandeurs mais à l'un d'eux : en effet, allouer tout ou partie des montants réclamés par plusieurs demandeurs à un seul d'entre eux, ne revient pas à accorder plus que demandé, mais au contraire à n'allouer qu'une partie de ce qui était demandé; ce n'est pas accorder plus ou autre chose (HALDY, CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 6 ad art. 58 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 284/2006 du 19 janvier 2007 consid. 3).

2.1.3 La solidarité existe entre plusieurs débiteurs lorsqu'ils déclarent s'obliger de manière qu'à l'égard du créancier chacun d'eux soit tenu pour le tout (art. 143 al. 1 CO). A défaut d'une semblable déclaration, la solidarité n'existe que dans les cas prévus par la loi (art. 143 al. 2 CO).

Selon l'art. 144 CO, le créancier peut, à son choix, exiger de tous les débiteurs solidaires ou de l'un d'eux l'exécution intégrale ou partielle de l'obligation (al. 1). Les débiteurs demeurent tous obligés jusqu'à l'extinction totale de la dette (al. 2).

L'art. 143 CO consacre la solidarité passive, qui est une modalité d'une obligation qui lie plusieurs débiteurs et qui oblige l'un quelconque d'entre eux à payer la totalité de la dette avec effet libératoire à l'égard des autres. Chaque débiteur répond à l'égard du créancier de toute la dette, lequel peut exiger la prestation intégrale de chacun d'eux. La structure de la solidarité passive se caractérise par le fait qu'il existe autant d'obligations que de débiteurs, mais toutes ont le même titre, la même cause et le même objet, chacune étant en principe indépendante de l'autre. Le créancier dispose de plusieurs créances autonomes, chacune à l'égard de chaque débiteur pris isolément, créances qui peuvent avoir un sort juridique propre. La validité de chacune doit être examinée séparément (ROMY, CR CO I, 3ème éd. 2021, n. 1 et 3 ad art. 143 CO).

Les débiteurs solidaires forment une consorité passive simple au sens de l'art. 71 CPC, le créancier ayant la faculté de les rechercher séparément ou ensemble à raison d'une partie ou du tout (JEANDIN, CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 6 ad art. 70 CPC et n. 6 ad art. 71 CPC).

2.1.4 Aux termes de l'art. 70 al. 2 LP, lorsque des codébiteurs sont poursuivis simultanément, un commandement de payer est notifié à chacun d'eux.

Cette disposition n'exclut toutefois pas qu'une seule requête de mainlevée soit dirigée contre chacun des codébiteurs (débiteurs solidaires), pour autant que des conclusions distinctes soient prises contre chacun d'eux et pour chacune des poursuites (arrêts du Tribunal fédéral 5A_945/2021 et 5A_946/2021 du 27 avril 2022 consid. 6.1; ABBET, op. cit., n. 34 ad art. 84 LP).

2.2 En l'espèce, l'intimée a introduit une seule requête de mainlevée de l'opposition, en prenant néanmoins des conclusions individualisées contre chaque débiteur solidaire, mis en poursuite séparément, sollicitant que la mainlevée provisoire de l'opposition formée par chacun d'entre eux soit prononcée dans chacune des poursuites concernées, dont elle a précisé le numéro. Dans sa requête, l'intimée a en outre précisé avoir requis ces poursuites contre D______ SARL et les époux A______/B______, "pris conjointement et solidairement", en vue de recouvrer les montants recherchés de 30'000 fr., 5'000 fr., 3'400 fr. et 2'500 fr. (postes nos 1 à 4 de chaque commandement de payer). Dans le jugement querellé, le Tribunal a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée par chacun des recourants (la cause étant devenue sans objet à l'égard de D______ SARL, déclarée en faillite en ______ 2022, puis radiée en ______ 2022) au commandement de payer notifié dans chacune des poursuites concernées, pour des montants déterminés (postes nos 1 et 2). A noter que la mention, entre parenthèses, de la poursuite n° 2______ au chiffre 2 du dispositif de ce jugement résulte à l'évidence d'une erreur de plume, seule la poursuite n° 1______ étant dirigée contre A______.

A la lecture de la requête, il apparaît manifeste que l'intimée entendait obtenir la mainlevée de l'opposition formée par A______ à la poursuite n° 1______ (conclusion n° 2), d'une part, et la mainlevée de l'opposition formée par B______ à la poursuite n° 2______ (conclusion n° 3), d'autre part, tandis que la mention, dans ses conclusions, du fait que chaque poursuite était requise contre l'un des débiteurs, pris "conjointement et solidairement" avec les autres, visait seulement à clarifier que ceux-ci étaient recherchés ensemble pour les mêmes créances, en tant que débiteurs solidaires. Interprétées selon le principe de la confiance, à la lumière de la motivation de l'acte, les conclusions de l'intimée ont ainsi été formulées avec suffisamment de clarté et de précision. En particulier, leur formulation était suffisamment précise pour déterminer pour quels montants chaque débiteur était poursuivi personnellement et pour permettre à chaque débiteur de faire valoir ses moyens de défense. Par ailleurs, en prononçant la mainlevée provisoire des oppositions faites aux poursuites litigieuses, pour une partie des montants réclamés, le Tribunal n'a pas alloué à l'intimée plus ou autre chose que ce qui était demandé. Partant, c'est à tort que les recourants font grief au premier juge d'avoir violé la maxime de disposition.

Il résulte de ce qui précède que les conclusions nos 2 et 3 de la requête de mainlevée sont recevables. Le recours sera rejeté sur ce point.

3. Les recourants reprochent au Tribunal d'avoir considéré que les titres produits valaient reconnaissance de dette pour les montants recherchés de 30'000 fr. et 5'000 fr., intérêts en sus.

3.1.1 En vertu de l'art. 82 al. 1 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire.

Par reconnaissance de dette au sens de cette disposition, il faut entendre notamment l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant (ATF 130 III 87 consid. 3.1) -, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 136 III 624 consid. 4.2.2; 136 III 627 consid. 2). Cette volonté doit résulter clairement des pièces produites et non d'actes concluants; à défaut, elle ne peut être déterminée que par le juge du fond et la mainlevée doit être refusée. Cela étant, il n'est pas nécessaire que le titre contienne une promesse de payer la dette; il suffit qu'il atteste du fait que le poursuivi se considère obligé de payer cette dette. Il en va ainsi de la lettre par laquelle le débiteur sollicite la remise de tout ou partie de sa dette ou un délai de paiement sans contester la dette elle-même (ABBET/VEUILLET, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd. 2022, n. 36 et 37 ad art. 82 LP et les références citées). La simple reconnaissance de l'existence d'une dette ne suffit pas. En outre, l'existence, dans le document signé, d'une clause du type "le présent document vaut reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 LP" n'a aucune valeur et ne lie pas le juge de la mainlevée (ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 42 et 45 ad art. 82 LP et les références citées).

Un contrat écrit justifie en principe la mainlevée provisoire de l'opposition pour la somme d'argent incombant au poursuivi lorsque les conditions d'exigibilité de la dette sont établies et, en particulier dans les contrats bilatéraux, lorsque le poursuivant prouve avoir exécuté les prestations dont dépend l'exigibilité. Un contrat bilatéral ne vaut ainsi reconnaissance de dette que si le poursuivant a rempli ou garanti les obligations légales ou contractuelles exigibles avant le paiement dont il requiert le recouvrement, ou au moment de ce paiement, c'est-à-dire s'il a exécuté ou offert d'exécuter sa propre prestation en rapport d'échange (ATF 145 III 20 consid. 4.1.1 et les références citées). Ces principes s'appliquent aux situations dans lesquelles le créancier fonde sa requête non pas sur une reconnaissance de dette pure et simple (par laquelle le débiteur reconnaît devoir lui payer une somme d'argent déterminée sans réserve ni condition), mais sur un contrat bilatéral parfait, par exemple un contrat de prêt, un tel contrat ne valant titre de mainlevée provisoire au sens de l'art. 82 al. 1 LP que si le poursuivant a fourni sa prestation (arrêt du Tribunal fédéral 5A_446/2018 du 25 mars 2019 consid. 5; ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 166 ad art. 82 LP).

La créance doit être exigible au plus tard au moment de l'introduction de la poursuite, à savoir lors de la notification du commandement de payer (arrêts du Tribunal fédéral 2C_781/2020 du 28 décembre 2020 consid. 5.2; 5A_785/2016 du 2 février 2017 consid. 3.2.2 et les références citées).

3.1.2 Lorsque le créancier est au bénéfice d'une reconnaissance de dette, le juge prononce la mainlevée si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (art. 82 al. 2 LP).

La répartition du fardeau de la preuve est différente de celle qui prévaut dans le procès civil : le créancier qui produit un titre exécutoire n'a pas à prouver d'autres faits; c'est au débiteur poursuivi de rendre vraisemblable l'inexistence de la créance figurant dans le titre ou l'existence de fait dirimants ou extinctifs (ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 103 ad art. 82 LP et les références citées).

Le poursuivi peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil - exceptions ou objections - qui sont dirigés contre la dette reconnue, notamment les vices de la volonté au sens de art. 23 ss CO ou encore la simulation. Même en présence d'une reconnaissance de dette abstraite (la cause de l'obligation n'y est pas mentionnée), celle-ci reste matériellement causale et le poursuivi peut faire valoir tous les moyens en relation avec le rapport de base : il lui appartient de rendre vraisemblable la cause de l'obligation et de démontrer que cette cause n'est pas valable ou ne peut plus être invoquée (ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 104 ad art. 82 LP et les références citées). Le poursuivi n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables, en principe par titre (art. 254 al. 1 CPC). Le juge n'a pas à être persuadé de l'existence des faits allégués; il doit, en se fondant sur des éléments objectifs, avoir l'impression qu'ils se sont produits, sans exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_446/2018 du 25 mars 2019 consid. 4.2 et les références citées). Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour décider si un état de fait est vraisemblable ou non. Les exigences de vraisemblances sont d'autant plus élevées que la reconnaissance de dette est univoque et inconditionnelle (ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 107 ad art. 82 LP et les références citées).

Le juge de la mainlevée doit vérifier d'office l'existence d'une reconnaissance de dette, l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, l'identité entre le poursuivi et le débiteur désigné et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et la dette reconnue (ATF 142 III 720 consid. 4.1; 139 III 444 consid. 4.1.1 et les références citées).

3.1.3 Selon l'art. 715 al. 2 CC, le pacte en vertu duquel l'aliénateur se réserve la propriété d'un meuble transféré à l'acquéreur n'est valable que s'il a été inscrit au domicile actuel de ce dernier, dans un registre public tenu par l'office des poursuites.

Un pacte de réserve de propriété ne peut être conclu qu'en relation avec un contrat visant l'aliénation à titre onéreux d'une chose mobilière. En général, il s'agira d'une vente à crédit mobilière, dans laquelle les parties conviennent que le transfert de la possession se fera immédiatement, mais que le paiement de partie ou totalité du prix de vente ne se fera que plus tard (PANNATIER KESSLER, CR CC II, 2016, n. 11 ad art. 715 CC; STEINAUER, Les droits réels, Tome II, 5ème éd. 2020, n. 2994 et 2995).

Le pacte de réserve de propriété a pour effet d'empêcher la propriété mobilière de passer à l'acquéreur au moment du transfert de la possession sur l'objet. Le transfert de la propriété est soumis à une condition suspensive affectant le contrat réel entre l'aliénateur et l'acquéreur, cette condition suspensive consistant généralement à faire dépendre le transfert de la propriété du paiement de l'entier du prix convenu. A défaut de pacte de réserve de propriété, l'aliénateur ne peut faire valoir à l'égard de l'acquéreur qu'une créance obligationnelle en paiement du prix, laquelle risque de ne pas être honorée si l'acquéreur est insolvable. Grâce à l'institution du pacte de réserve de propriété, l'aliénateur demeure propriétaire de l'objet, de sorte qu'il peut le revendiquer de manière réelle en cas de mesure d'exécution forcée à l'encontre de son débiteur, indépendamment de l'insolvabilité de ce dernier. Le pacte de réserve de propriété a ainsi une fonction de sûreté en garantie du paiement du prix de l'objet aliéné (PANNATIER KESSLER, op. cit., n. 2 et 5 ad art. 715 CC).

Le contrat d'aliénation à titre onéreux fonde la créance (en général, la créance en paiement du prix) pour laquelle la réserve de propriété sert de garantie. Par rapport à cette créance, la réserve de propriété a les caractéristiques d'un droit accessoire (comme un droit de gage). Elle suppose donc que le droit principal existe : si la créance garantie est éteinte ou si elle est prescrite, la réserve de propriété tombe (art. 114 al. 1 CO) (STEINAUER, op. cit., n. 2996). En cas de cession de la créance en paiement du prix, le cessionnaire acquiert également la propriété de la chose vendue soumise au pacte de réserve de propriété (art. 170 al. 1 CO) (PANNATIER KESSLER, op. cit., n. 9 ad art. 715 CC).

Pour constituer valablement une réserve de propriété en faveur de l'aliénateur, il faut cumulativement (i) un contrat d'aliénation à titre onéreux suivi d'un transfert de possession de l'objet aliéné, (ii) un pacte de réserve de propriété sur lequel les parties s'accordent et (iii) une inscription au registre (PANNATIER KESSLER, op. cit., n. 10 ad art. 715 CC). Le pacte de réserve de propriété ne produit ses effets que s'il a été inscrit dans le registre des pactes de réserve de propriété tenu par l'office des poursuites. L'inscription au registre a un effet constitutif, en ce sens qu'avant l'inscription, le pacte ne produit aucun effet réel, ni entre les parties, ni envers les tiers. L'inscription doit en principe comprendre les indications figurant à l'art. 7 de l'ordonnance du 19 décembre 1910 concernant l'inscription des pactes de réserve de propriété (OIPR), notamment l'échéance convenue pour la créance de l'aliénateur, ainsi que le montant et l'échéance des différents acomptes, si la vente est faite par acomptes (art. 7 let. i OIPR) (STEINAUER, op. cit., n. 3002, 3010 et 3011).

L'art. 17 OIPR prévoit que le registre des pactes de réserve de propriété est public et que l'office des poursuites délivre des extraits certifiés conformes à quiconque en fait la demande.

3.1.4 Le contenu d'une obligation peut consister dans des sûretés à fournir pour garantir une créance (Sicherheitsleistung; GILLIERON, Commentaire de la LP, 1999, n. 8 ad remarques introductives aux art. 38-45 LP). L'exécution forcée ayant pour objet des sûretés à fournir s'opère par la poursuite pour dettes (art. 38 al. 1 LP).

La procédure est la même que pour la poursuite tendant au paiement d'une somme d'argent, sauf que la continuation de la poursuite a exclusivement lieu par voie de saisie (art. 43 ch. 3 LP) et que les espèces obtenues par la réalisation des biens saisis ne peuvent être distribuées au poursuivant, mais doivent être consignées (cf. art. 9 et 24 LP), de telle façon qu'elles se trouvent à la disposition du poursuivant si celui-ci établit au fond son droit à la créance en garantie de laquelle les sûretés ont été fournies (ATF 129 III 193 consid. 2.2; 110 III 1 consid. 2b et les références citées). Le montant consigné ne sera remis au poursuivant qu'avec l'accord du poursuivi, au vu d'un jugement ou au terme d'une poursuite en réalisation de gage (GILLIERON, op. cit., n. 31 ad art. 38 LP). La poursuite en prestation de sûretés ne constitue donc pas un mode spécial de poursuite, mais une poursuite ordinaire qui a un but spécial, à savoir d'assurer l'exécution d'une prestation du poursuivi qui n'est pas destinée à satisfaire directement le poursuivant, mais à garantir l'exécution d'une obligation contractée à son profit (ATF 129 III 193 consid. 2.1 et les références citées). Elle ne peut ainsi servir qu'à rendre efficace le droit du poursuivant à ce que le poursuivi, pour garantir son obligation, offre et constitue une sûreté sur laquelle le poursuivant puisse mettre la main si le poursuivi ne remplit pas son obligation (ATF 93 III 79, JdT 1967 II 119 consid. 2; GILLIERON, op. cit., n. 9 ad art. 38 LP).

La poursuite en prestation de sûretés n'est pas restreinte aux seules sûretés pécuniaires; elle peut s'appliquer aux sûretés à fournir sous forme d'une garantie personnelle ou réelle (par ex. sous forme d'une cédule hypothécaire) (GILLIERON, op. cit., n. 35 ad art. 38 LP; ATF 129 III 193 consid. 3.4). L'obligation de fournir des sûretés peut être toute générale ou limitée à la prestation d'une sûreté déterminée, par ex. : consignation d'une somme d'argent, de papier-valeurs ou de choses mobilières spécifiées; constitution d'un gage immobilier; constitution d'un cautionnement; remise d'une garantie bancaire; constitution d'une garantie réelle utilisée dans les affaires (par ex. : dépôts aux fins de sûreté) (GILLIERON, op. cit., n. 34 ad art. 38 LP). La prétention en prestation de sûretés peut avoir pour fondement la loi, une décision judiciaire ou encore un contrat (arrêt du Tribunal fédéral 5A_60/2012 du 13 juillet 2012 consid. 4.1).

Si la poursuite en prestation de sûretés s'exerce selon les mêmes formes que la poursuite tendant au paiement d'une somme d'argent (ATF 110 III consid. 2b), la réquisition de poursuite doit toutefois indiquer qu'il s'agit d'une poursuite en prestation de sûretés et le commandement de payer doit inviter le débiteur à constituer des sûretés à hauteur du montant indiqué (art. 69 al. 2 ch. 2 LP). Le préposé doit ainsi modifier le texte figurant sur le formulaire officiel, en indiquant que le débiteur est sommé de fournir au créancier des sûretés pour la somme mentionnée et préciser que la poursuite se poursuivra par voie de saisie (art. 69 al. 2 ch. 4 LP; GILLIERON, op. cit., n. 29 ad art. 38 LP et n. 43 ad art. 69 LP).

Dans sa requête de mainlevée, le poursuivant n'a pas à préciser, dans ses conclusions, si la poursuite tend au paiement ou à la fourniture de sûretés. Une telle précision doit toutefois résulter du commandement de payer et la mainlevée doit être refusée, faute de titre, si une poursuite en paiement a été ouverte alors que le titre tend à la constitution de sûretés (ABBET, op. cit., n. 58 et 66 ad art. 84 LP et les références citées).

3.2.1 En l'espèce, les recourants soutiennent avec raison que les pièces versées à la procédure ne valent pas reconnaissance de dette pour la somme réclamée de 30'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 décembre 2020 (poste n° 1 des commandements de payer).

Dans sa requête, l'intimée a allégué avoir cédé les actions de K______ SA à D______ SARL, laquelle n'avait pas été en mesure de payer l'intégralité du prix de vente convenu. En relation avec la vente de ces actions, les recourants s'étaient engagés, solidairement avec D______ SARL, à lui payer le solde du prix de vente, soit 30'000 fr., et à faire inscrire une réserve de propriété en sa faveur à concurrence de ce montant. A l'appui de ses allégués, l'intimée s'est fondée sur le document intitulé "Pacte de réserve de propriété et reconnaissance de dette" daté du 6 mars 2020 (cf. supra EN FAIT, let. C.d.c).

Contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, il ne ressort pas de ce document la volonté des recourants de payer à l'intimée, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée et exigible, étant relevé que la clause libellée "ce pacte de réserve de propriété vaut reconnaissance de dette" est dénuée de toute valeur. En signant ce contrat, les recourants ont tout au plus consenti à l'inscription d'une réserve de propriété d'un montant de 30'000 fr. au Registre des pactes de réserve de propriété, en lien avec la vente des actions de K______ SA. Or, outre le fait que le pacte signé par les parties ne produit pas d'effet faute d'avoir été inscrit audit Registre (l'extrait produit par l'intimée, qui ne comprend qu'une partie des indications figurant à l'art. 7 OIPR, n'est pas signé ni certifié conforme par l'Office cantonal des poursuites, de sorte qu'il est dépourvu de toute force probante), ce document ne peut, tout au plus, que fonder une éventuelle prétention de l'intimée en prestation de sûretés (la réserve de propriété ayant pour fonction de garantir la créance en paiement du prix de cession des actions). Il ne saurait dès lors valoir titre de mainlevée s'agissant des poursuites nos 1______ et 2______, puisque celles-ci tendent au paiement d'une somme d'argent (selon le libellé de chaque commandement de payer, le débiteur n'est pas invité à constituer des sûretés à hauteur des montants réclamés, mais à payer ces montants au créancier, l'Office cantonal des poursuites ayant utilisé le formulaire officiel sans en modifier le texte).

A cela s'ajoute que le contrat de cession des actions de K______ SA (cf. supra EN FAIT, let. C.d.a) n'a pas été signé entre l'intimée et les recourants, mais entre K______ SA, représentée par G______, d'une part, et D______ SARL, représentée par les recourants, d'autre part. De surcroît, à teneur de ce contrat, ce n'était pas l'intimée qui était l'unique détentrice des actions cédées, mais G______. Enfin, il ne ressort nullement de ce contrat que les recourants se seraient engagés à verser à l'intimée une quelconque somme d'argent et celle-ci n'allègue pas - et a fortiori n'établit pas - qu'elle se serait vu céder les actions et/ou une créance d'un montant de 30'000 fr. par K______ SA et/ou G______. Il suit de là que l'intimée ne produit aucun titre susceptible d'établir qu'elle serait titulaire d'une créance en paiement du prix des actions contre les recourants, créance dont la réserve de propriété susvisée ne constitue qu'un droit accessoire.

Eu égard aux considérations qui précèdent, les recourants ont rendu vraisemblable l'inexistence de la créance de 30'000 fr. alléguée par l'intimée en lien avec la vente des actions de K______ SA.

Partant, c'est à tort que le Tribunal a prononcé la mainlevée provisoire requise à concurrence de 30'000 fr., intérêts en sus.

3.2.2 En revanche, s'agissant du montant recherché de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020 (poste n° 2 des commandements de payer), l'intimée est au bénéfice d'une reconnaissance de dette pure et simple, par laquelle les recourants ont reconnu devoir lui rembourser la somme de 5'000 fr., d'ici le 31 mai 2020 au plus tard, sans réserve ni condition.

Le document intitulé "Reconnaissance de dette" (cf. supra EN FAIT, let. C.d.d), signé par les recourants, est sans équivoque tant sur le fait que la créance déduite en poursuite est reconnue de façon inconditionnelle que sur le montant et l'exigibilité de cette créance. Il s'agit dès lors d'un titre de mainlevée au sens de l'art. 82 al. 1 LP. Les recourants - qui se limitent à affirmer, sans le rendre vraisemblable par titre, que la créance serait inexistante - ne remettent d'ailleurs pas en cause ces éléments, pas plus qu'ils ne contestent avoir signé ce document.

Partant, c'est à bon droit que le Tribunal a prononcé la mainlevée provisoire requise à concurrence de 5'000 fr., intérêts en sus.

3.2.3 Par conséquent, les chiffres 2 et 3 du dispositif du jugement entrepris seront annulés et il sera statué à nouveau, en ce sens que la mainlevée provisoire des oppositions formées aux poursuites n° 1______ et n° 2______ sera prononcée à hauteur de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020.

4. Les frais de première instance ont été arrêtés à 400 fr. et compensés avec l'avance versée par l'intimée, ce qui n'est pas critiqué devant le Cour. Les frais de seconde instance seront arrêtés à 600 fr. (art. 48, 61 OELP) et compensés avec l'avance versée par les recourants, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Au vu de l'issue du litige, la mainlevée requise ayant été prononcée à hauteur de 5'000 fr. dans chacune des poursuites litigieuses, ce qui correspond à environ 12% de la somme totale réclamée, l'intimée, qui succombe en grande partie, supportera les frais judiciaires à raison de 880 fr. (art. 106 al. 2 CPC), et les recourants à raison de 120 fr. L'intimée versera dès lors 480 fr. à ces derniers.

Elle versera en outre aux recourants, à titre de dépens pour les deux instances cantonales, la somme de 1'750 fr., débours et TVA compris (art. 84, 85, 89 et 90 RTFMC).

Les chiffres 4 à 7 du dispositif du jugement entrepris seront annulés et il sera statué dans le sens de ce qui précède.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté par A______ et B______ contre les chiffres 2 à 7 du dispositif du jugement JTPI/9462/2022 rendu le 5 août 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/4294/2022-11 SML.

Au fond :

Annule les chiffres 2 à 7 du dispositif du jugement attaqué et, statuant à nouveau :

Prononce la mainlevée provisoire de l'opposition formée par A______ au commandement de payer, poursuites n° 1______, à concurrence de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020.

Prononce la mainlevée provisoire de l'opposition formée par B______ au commandement de payer, poursuite n° 2______, à concurrence de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de première instance et de recours à 1'000 fr. et les compense avec les avances versées, qui restent acquises à l'Etat de Genève.

Les met à la charge de E______ SA à concurrence de 880 fr. et à celle de A______ et B______, solidairement entre eux, à concurrence de 120 fr.

Condamne E______ SA à verser 480 fr. à A______ et B______, solidairement entre eux, à titre de remboursement des frais judiciaires.

Condamne E______ SA à verser 1'750 fr. à A______ et B______, solidairement entre eux, à titre de dépens de première instance et de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.