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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/9140/2024

ACPR/573/2024 du 05.08.2024 sur OCL/408/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;LÉSION CORPORELLE;INFRACTIONS CONTRE L'HONNEUR
Normes : CPP.319; CP.177.al3

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/9140/2024 ACPR/573/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 5 août 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me Laura PANETTI-CARUSO, avocate, SKANDAMIS AVOCATS SA, rue Charles-Bonnet 2, 1206 Genève,

recourant,

 

contre l'ordonnance de classement rendue le 26 mars 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 8 avril 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 26 mars 2024, notifiée le lendemain, par laquelle le Ministère public a classé sa plainte.

Le recourant conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de ladite ordonnance; principalement, à ce qu'il soit ordonné au Ministère public de renvoyer C______ en jugement pour lésions corporelles simples et injures; et subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée au Ministère public afin qu'il poursuive l'instruction et procède aux auditions sollicitées.

b. Le recourant a été dispensé de verser les sûretés (art. 383 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. La police est intervenue, à trois reprises, au domicile de C______ et A______ et des deux enfants de celle-là – nés respectivement les ______ 2008 et ______ 2011 – (cf. rapports d'interpellation du 1er juin et de renseignements du 2 juin 2022) :

- le 30 mai 2022, en raison de l'ivresse de A______, lequel avait chuté et s'était blessé à l'œil gauche en heurtant un meuble. Ce dernier avait été conduit aux Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après: HUG);

- le 31 mai 2022, à la suite d'un conflit verbal du couple;

- et le 1er juin 2022, en raison d'une altercation du couple. Selon les premiers éléments, C______ avait été menacée par son conjoint, au moyen d'un couteau, qui aurait essayé de lui asséner un coup. A______ avait été interpellé et présentait, sur les lieux de l'intervention, une alcoolémie de 0.61 mg/l.

b. Des plaintes pénales ont été déposées de part et d'autre, notamment :

b.a. Le 1er juin 2022, par C______ contre A______.

Elle a expliqué que, le 30 mai 2022, il s'était mis à lui hurler dessus et lorsqu'elle lui avait demandé de se calmer, il l'avait frappée au visage, si fort qu'elle était tombée. À terre, il lui avait alors donné plusieurs coups de poing et de pied au ventre. Son fils les avait rejoints et, sans voir qu'elle se faisait frapper, il avait dit à A______ de la laisser, puis était retourné s'enfermer dans sa chambre. Alors qu'elle s'était éloignée, A______ avait tenté de la suivre et avait glissé sur le tapis. Son visage avait violemment heurté la table de la salle à manger. Elle s'était précipitée chez les voisins, afin qu'ils appellent la police, ce qu'ils avaient fait. "En la voyant discuter avec [ces derniers], son mari s'était arrêté".

En début de soirée le lendemain – le 31 mai 2022 –, A______ était revenu au domicile. Il l'avait suivie en bas de l'immeuble, s'était mis à hurler, l'avait frappée à la nuque et donné une gifle. Son fils avait assisté à la scène, ainsi que sa voisine, D______, qui avait appelé la police. Sans solution pour la nuit, A______, qui s'était calmé, était resté dormir dans l’appartement. Elle-même avait dormi dans la chambre de sa fille.

Le 1er juin 2022, au domicile conjugal, lors d'une nouvelle dispute, A______ avait tenté de lui asséner, à tout le moins, deux coups de couteau dirigés vers son ventre et sa gorge. Elle était parvenue à les esquiver. Il l'avait menacée en lui disant qu'il allait détruire ses papiers pour qu'elle retourne en Afrique, et en frottant deux couteaux l'un contre l'autre, en la regardant et en lui disant qu'il allait la tuer comme une vache. Il l'avait également poussée violemment contre le mur et lui avait donné un coup de pied à la cheville gauche. Il l'avait insultée la traitant de "pute", "connasse" et "couillon".

De plus, depuis le courant d'avril 2022, il lui avait, à plusieurs reprises, sans son consentement, contraint à entretenir des rapports sexuels et à lui prodiguer des fellations.

b.b. Le 8 juin 2022, par A______ contre C______.

Ils vivaient ensemble depuis quelques semaines, avec les enfants de son épouse. La cohabitation ne se passait pas bien.

Les 30 et 31 mai 2022, elle s'était énervée contre lui et la police était intervenue, sur appel des voisins.

Le 1er juin 2022, ils s'étaient disputés et la police était, à nouveau, intervenue. Alors qu'ils discutaient, C______ s'était fâchée et avait commencé à crier, sans qu'il ne sache pour quelle raison. Elle l'avait poussé, à deux ou trois reprises, saisi au niveau des bras et griffé. Sur incitation de la prénommée, le fils de cette dernière s'était approché et lui avait donné des coups de poing au visage et sur tout le corps. Sa femme lui avait également donné des coups de poing et l'avait griffé. Il avait mis ses bras devant son visage pour se défendre. Il s'était retrouvé au sol et on lui avait asséné plusieurs coups de pied. Il n'était pas en mesure de dire combien de coups il avait reçus. Depuis, il avait une côte gauche cassée, la malléole droite cassée, un tendon déchiré, les avant-bras griffés et "un œil au beurre noir". C______ et le fils de celle-ci l'avaient traité de "fils de pute" et "trou du cul".

À l'appui de sa plainte, il a produit les pages 2 à 6 de photographies des HUG, datées du 2 juin 2022, montrant un hématome au niveau de l'avant-bras droit et de la main droite, deux griffures sur l'avant-bras gauche et un œil au beurre noir à gauche.

c. Les plaintes susmentionnées ont été inscrites sous le numéro de procédure P/1______/2022.

d. Les parties ont été entendues, à plusieurs reprises, durant la procédure :

d.a. Entendu, une première fois, par la police, le 1er juin 2022, A______ a contesté les faits reprochés, mais a reconnu avoir traité sa femme de "pute", "connasse" et "couillon". Il a expliqué que lorsqu'il buvait son café dans la cuisine, il s'était énervé, avait pris un couteau et avait cassé la lame en donnant un coup dans l'évier. Il avait vu son épouse tomber par terre et avait pris soin d'elle, notamment en lui massant la cheville gauche. Tout à coup, les policiers étaient intervenus dans leur appartement et l'avaient emmené sans aucune explication. Il se rappelait de tout ce qui s'était passé, mais parfois il avait de petites absences et avait du mal à mettre tous les évènements dans le bon ordre.

Le 30 mai 2022, C______ l'avait agressé et avait demandé à son fils de le frapper. Celui-ci lui avait donné plusieurs coups au visage lui causant ainsi "l'œil au beurre noir". La fille de la prénommée encourageait son frère. Les marques de griffures sur ses bras avaient été commises par son épouse.

d.b. Entendu, par la suite, par le Ministère public, il a expliqué ne jamais avoir été violent vers sa femme, ni ne l'avoir contrainte sexuellement. Le 30 mai 2022, elle l'avait frappé avec son poing et l'avait fait chuter.

Il a confirmé sa plainte. Il mélangeait les choses et les dates. Il se rappelait cependant que C______ l'avait tapé à la main notamment, en lui fermant la porte dessus car elle refusait qu'il rentre au domicile. Elle l'avait également poussé avec ses deux mains, ce qui l'avait fait chuter et taper la tête par terre. Elle lui avait ensuite donné un coup de poing à l'œil droit. Il avait fini à l'hôpital. C'était la première fois que son épouse le frappait. Il n'avait pas glissé sur le tapis; C______ l'y avait "jeté". Les faits dénoncés s'étaient en réalité produits sur plusieurs jours, c'était "la déroute totale". Ses beaux-enfants étaient présents lorsqu'elle l'avait poussé dans la cuisine, mais il ne se souvenait plus s'ils étaient là au début.

d.c. Entendue par le Ministère public, C______ a confirmé, en substance, sa plainte et contesté les faits reprochés. Elle n'avait pas insulté A______ et ni elle ni ses enfants n'avaient fait preuve de violence à son égard. Ses enfants n'étaient pas présents lors des différentes querelles. Le 30 mai 2022, A______ avait asséné un coup de pied et de poing à son fils. Elle n'était pas présente lorsque son époux s'était fait les blessures dénoncées, à l'exception de "l'œil au beurre noir". Le jour en question, en l'"attaquant", il avait glissé sur le tapis et s'était tapé l'œil en tombant sur la table ou contre le mur.

e. Entendues également par-devant le Ministère public :

e.a. E______, voisine du couple, a raconté que, le 30 mai 2022, elle avait ouvert sa porte et vu, un peu plus loin, C______ et son fils retenir ou essayer de calmer A______, qui avait la tête en sang. Ce dernier, qui lui avait semblé alcoolisé, s'était approché et lui avait demandé d'appeler la police, car C______ l'avait frappé. Elle s'était exécutée. Elle l'avait senti très agressif et énervé. Le 1er juin 2022, sa fille, dont la chambre donnait sur l'appartement du couple, avait entendu un grand bruit. Elle-même avait entendu un gros fracas et les murs de son entrée avaient tremblé. Elle était sortie sur le palier et avait entendu la voix d'un homme qui hurlait. Elle avait appelé la police. Pour elle, c'était A______ qui était très violent.

e.b. D______, voisine du couple, a expliqué, que le 1er juin 2022, A______ s'était approché d'elle pour lui montrer son œil au beurre noir et lui avait dit "regarde ce qu'elle m'a fait", en lui indiquant que les coupables étaient soit C______, soit le fils de celle-ci. Cette dernière lui avait dit que A______, ivre, était tombé contre la table et l'avait agressée. Elle lui avait montré des marques de coups. Sur son appel, la police était intervenue.

e.c. La Dre F______, psychiatre ayant rédigé l'expertise psychiatrique pénale réalisée sur A______, a confirmé son rapport diagnostiquant chez le prénommé un trouble de la personnalité, un trouble neurocognitif léger et une dépendance à l'alcool (cf. expertise psychiatrique pénale du 27 novembre 2023). La prise d'alcool de l'expertisé, au moment des faits – 30 et 31 mai et 1er juin 2022 – avait pu embrumer ses souvenirs. Le trouble dont souffrait A______ pouvait emporter des imprécisions de dates, des oublis de noms ou de lieux. Entre juin 2022 et février 2023, il avait eu une consommation chronique excessive d'alcool qui avait pu aggraver légèrement ces troubles.

f. Par suite de l'avis de prochaine clôture informant les parties de l'intention du Ministère public de classer la procédure s'agissant des faits reprochés à C______ – qui ont par la suite été disjoints dans la présente procédure – et d'établir un acte d'accusation à l'encontre de A______, ce dernier a requis l'audition de ses beaux-enfants, dans la mesure où, ils pourraient fournir des informations sur les faits reprochés et renseigner sur les relations avec leur mère.

g. Dans la procédure P/1______/2022, A______, détenu, est renvoyé devant le Tribunal correctionnel pour tentative de meurtre, viol, contrainte sexuelle, menaces, tentative de contrainte, voies de fait, injures et dommages à la propriété.

C. Dans la décision querellée, le Ministère public constate que les versions des parties sont contradictoires et que A______ a varié dans ses accusations. Les photographies produites, dépourvues d'explications sur les lésions constatées et les causes alléguées, ne permettaient pas d'asseoir ses accusations. En tout état, à elles seules, ces photographies ne permettaient pas de corroborer l'existence des lésions dont se prévalait A______ ni d'établir quelle en serait la cause.

Les déclarations des parties divergeaient également quant aux injures qu'aurait proférées C______ à l'encontre du prénommé et rien ne permettait de tenir pour établis les propos dénoncés.

Ainsi, aucun élément de preuve neutre, impartial et objectif, ne permettait de corroborer les accusations portées à l'encontre de C______, cette dernière niant les faits reprochés.

Enfin, dans la mesure où, lors des faits, les enfants n'étaient âgés que de 11 et 14 ans, que près de deux ans s'étaient écoulés, et qu'il n'était pas établi qu'ils en avaient été témoins, leur audition était rejetée. En outre, leur audition EVIG serait disproportionnée, compte tenu des intérêts en jeu, et mettrait en péril leur bien-être, lequel devait primer.

D. a. Dans son recours, A______ relève que, même si en raison de ses troubles, ses déclarations présentaient des incohérences, le témoignage de E______, les rapports médicaux et les photographies produites confirmaient qu'il avait été victime de violences de la part de son épouse.

La crédibilité des déclarations de C______ était relative, dès lors qu'elle n'avait pas été en mesure de fournir une explication sur les lésions qu'il présentait et que sa version était contredite par le témoignage de E______, sur le fait qu'elle aurait sonné chez les voisins et qu'il se serait arrêté en la voyant discuter avec eux.

L'audition des enfants permettrait de faire la lumière sur l'ensemble des évènements dénoncés. La présence du fils avait également été mentionnée par C______, puisqu'elle l'accusait d'avoir asséné à celui-ci un coup de poing à la mâchoire.

Il produit divers documents médicaux, dont il ressort que :

- le 31 mai 2022, un taux de 1.46 mg/l avait été détecté, à son arrivée aux urgences des HUG. Il présentait un hématome périorbitaire gauche, et une petite plaie non suturable au niveau de l'arcade gauche. Il n'avait pas de saignement intracrânien ni de fracture crânienne (cf. dossier médical daté du 8 juin 2022 et scanner cérébral du 31 mai 2022);

- le 2 juin 2022, aux urgences des HUG, une fracture de la base du 5ème métacarpien droit et une possible fracture du scaphoïde et de la 7ème côte lui avaient été détectées. Il présentait également une griffure de l'avant-bras gauche; des hématomes à l'avant-bras droit, à la main droite au niveau dorsal métacarpe 4-5 et périorbitaire gauche d'allure ancienne; ainsi qu'un érythème type dermabrasion au niveau du thorax antérieur à gauche (cf. dossier médical daté du 2 juin 2022 et du compte rendu de la consultation aux urgences du 2 juin 2022).

b. Par courrier du 6 mai 2024, il sollicite d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire, étant indigent – incarcéré depuis plus d'une année et bénéficiant d'une défense d'office – et son action civile ne paraissant pas vouée à l'échec.

c. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1, 396 al. 1 et 90 al. 2 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. Aux termes de l'art. 319 al. 1 CPP, le ministère public ordonne le classement de tout ou partie de la procédure notamment lorsqu'aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'est établi (let. a), lorsque les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis (let. b).

Cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore". Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 1 CPP en relation avec les art. 309 al. 1, 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2) et signifie qu'en principe, un classement ne peut être prononcé par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de se prononcer (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; 138 IV 86 consid. 4.1.2).

3.2. Dans les procédures où l'accusation repose essentiellement sur les déclarations de la victime, auxquelles s'opposent celles du prévenu et lorsqu'il n'est pas possible d'estimer que certaines dépositions sont plus crédibles que d'autres, le principe in dubio pro duriore impose en règle générale que le prévenu soit mis en accusation (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.2 et les arrêts cités). Cela vaut en particulier lorsqu'il s'agit de délits commis typiquement "entre quatre yeux" pour lesquels il n'existe souvent aucune preuve objective.

Il peut toutefois être renoncé à une mise en accusation lorsque la partie plaignante fait des dépositions contradictoires, rendant ses accusations moins crédibles ou encore lorsqu'une condamnation apparaît au vu de l'ensemble des circonstances a priori improbable pour d'autres motifs (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.2; arrêts du Tribunal fédéral 6B_277/2021 du 10 février 2022 consid. 3.1.3; 6B_258/2021 du 12 juillet 2021 consid. 2.2 et les arrêts cités). En outre, face à des versions contradictoires des parties, il peut être exceptionnellement renoncé à une mise en accusation lorsqu'il n'est pas possible d'apprécier l'une ou l'autre version comme étant plus ou moins plausible et qu'aucun résultat n'est à escompter d'autres moyens de preuve (arrêts du Tribunal fédéral 6B_277/2021 précité consid. 3.1.3; 6B_258/2021 précité consid. 2.2; 6B_1164/2020 du 10 juin 2020 consid. 2.2).

3.3. En l'espèce, si les parties s'accordent à dire qu'une altercation est intervenue du 30 mai au 1er juin 2022, elles en livrent chacune une version différente.

Vu le contexte particulièrement conflictuel dans lequel s'inscrit la présente procédure, il s'impose de considérer avec une certaine prudence les allégations des parties et de ne les retenir que si elles sont corroborées par d'autres éléments de preuve objectifs (arrêt du Tribunal fédéral 1B_267/2011 du 29 août 2011 consid. 3.2).

Dans ce contexte, les déclarations du recourant jouissent d'une crédibilité affaiblie. En effet, ses accusations ont varié lors de ses différentes auditions, notamment quant à la présence des enfants de son épouse au moment des faits et à la manière dont il a été blessé – si d'abord "l'œil au beurre noir" aurait été causé par un coup donné par son beau-fils, il a ensuite déclaré que c'était un geste de la prévenue qui en était à l'origine –. Ses souvenirs posent également question, s'agissant, à bien le suivre, de l'intervention de la police au domicile du couple alors qu'il était simplement en train de "prendre soin de sa femme", blessée à la cheville. Il reconnait d'ailleurs lui-même qu'en raison de ses troubles, ses souvenirs et, a fortiori, ses déclarations peuvent manquer de précision. Il faut ajouter à cela que, lors des interventions de la police et à l'arrivée aux urgences, le recourant était alcoolisé, état qui, de l'avis de l'expert, accentue ses pertes de mémoire. Or, même si ces incohérences sont dues aux troubles constatés par l'expert, cela ne permet pas, pour autant, d'étayer de manière satisfaisante une accusation contre la prévenue, au vu des dénégations de celle-ci et de l'absence de preuve objective.

De son côté, la prévenue est demeurée constante dans ses dénégations. L'absence d'explications sur certaines des blessures du recourant n'est pas de nature à mettre en doute sa crédibilité. Elle précise, sur ce point, ne pas avoir été présente au moment de leur cause, à l'exception de "l'œil au beurre noir", pour lequel elle a expliqué qu'il avait glissé et que son visage avait heurté un meuble ou un mur. La potentielle contradiction relevée par le recourant entre les déclarations de la prévenue et le témoignage de E______ ne permet pas non plus de retenir une crédibilité moindre à celle-là, la divergence ne concernant pas les faits objets de la plainte.

Pour le surplus, le dossier ne recèle aucun élément objectif permettant de confirmer, à satisfaction de droit, les accusations portées contre la prévenue. Si les photographies et documents médicaux produits – au stade du recours pour ces derniers – attestent de différentes blessures et traces sur le corps du recourant, ils ne permettent pas d'en connaître l'origine, ni de confirmer que les gestes dénoncés en seraient la cause, ni même d'écarter la version donnée par la prévenue. Les témoins entendus n'ont pas assisté aux actes dénoncés, voire tendent à accréditer plutôt une violence de la part du recourant envers la prévenue. D'ailleurs, certaines allégations de ce dernier sont même contredites, notamment la date à laquelle il a présenté sa blessure à l'œil voire le motif de celle-ci. En effet, selon le rapport de police du 2 juin 2022 et le dossier médical daté du 8 juin 2022, la blessure a été constatée respectivement le 30 et 31 mai 2022 et serait due à un heurt contre un meuble.

Dans ces circonstances, la décision attaquée ne prête pas le flanc à la critique.

3.4. La prévenue nie avoir insulté son mari et aucun élément au dossier ne corrobore les accusations du recourant, de sorte qu'il n'existe pas de soupçon suffisant à son égard justifiant une mise en accusation pour injures. En tout état de cause, même à considérer que des propos attentatoires à l'honneur auraient été prononcés par la prévenue, dans la mesure où le recourant reconnait l'avoir insultée (cf. B. d.a. supra), l'art. 177 al. 3 CP trouverait application.

Ainsi, le classement est également justifié sur ce point.

3.5. Enfin, le refus d'audition EVIG des enfants de la prévenue apparait également justifié. Leur présence, au moment des faits objets de la plainte du recourant, n'est pas établie – la déclaration de la prévenue selon laquelle le recourant avait frappé son fils ne signifie pas pour autant que ce dernier aurait assisté aux faits dénoncés par celui-là –, du délai écoulé depuis ceux-ci – 2 années –, de leur jeune âge à l'époque – 11 et 14 ans – et de leur bien-être.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée et le recours rejeté.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 300.-, au vu de sa situation personnelle (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, faute de chance de succès de son recours, il ne peut être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire (art. 136 al. 1 let. a et b CPP). Sa démarche n'était, en effet, pas propre à faire aboutir sa plainte pénale, ni à faire valoir ses éventuelles prétentions civiles.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire gratuite.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 300.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et
Madame Valérie LAUBER, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/9140/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

215.00

Total

CHF

300.00