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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/19295/2022

ACPR/884/2022 du 19.12.2022 sur ONMMP/3172/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : PLAINTE PÉNALE;DÉLAI
Normes : CPP.310.al1; CP.198; CP.31

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/19295/2022 ACPR/884/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 19 décembre 2022

 

Entre

A______, domiciliée c/o Résidence G______, ______, France, comparant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 14 septembre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 23 septembre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 14 septembre 2022, communiquée par pli simple le lendemain, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits visés par la présente procédure.

La recourante conclut à l'annulation de cette ordonnance et au renvoi de la cause au Ministère public pour l'ouverture d'une instruction.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 600.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 10 juin 2022, A______ a déposé plainte contre B______, lui reprochant d'avoir, le 5 janvier 2022, commis des attouchements sur sa personne alors qu'il lui prodiguait un massage.

Dans le cadre de son travail comme serveuse au restaurant "C______" à D______ [GE], elle avait rencontré B______, lequel s'occupait de la conciergerie du lotissement et était devenu un ami. Le jour des faits, il était venu au restaurant et avait déjeuné avec ses deux employeurs, soit E______ et F______. Vers 15h, il lui avait dit de venir avec lui car il allait lui faire un massage aux cervicales. Arrivés dans un bureau où se trouvait un lit, il lui avait demandé de retirer ses vêtements du haut et de déboutonner son pantalon. Elle avait retiré seulement son t-shirt. Une fois allongée sur le ventre, il lui avait retiré son soutien-gorge, avec son accord, puis avait tenté de baisser son pantalon. Lors du massage, il lui avait touché les seins et posé son pouce au-dessus de son anus. Elle était en état de choc durant ces faits. Elle avait quitté les lieux après avoir reçu un message de son compagnon lui annonçant être venu la chercher au travail. Après le massage, B______ lui avait demandé de ne rien dire à personne car il fallait que cet événement reste entre eux. Il était revenu le lendemain au restaurant et lui avait demandé si elle était satisfaite de ses services, ce à quoi elle avait répondu par la négative, lui expliquant que son comportement n'avait pas été normal. Elle avait été confrontée à lui à deux reprises et il avait fait "comme si de rien n'était".

Elle avait accepté le massage prodigué par B______ parce qu'elle pensait qu'il était un ami et qu'il ne profiterait jamais d'elle en une telle occasion. Elle avait été naïve, mais il avait tenu un discours si amical qu'elle ne s'était rendue compte de rien. Elle avait ressenti ce massage comme un viol car elle était tétanisée et perdue, sous le choc et avait eu du mal à réaliser. Dans la foulée, elle avait avisé E______. Son autre employeur était aussi au courant, comme probablement le reste de l'équipe. Elle n'avait pas dénoncé les faits plus tôt car elle était sous le choc et ne savait pas trop ce qu'elle devait faire. Elle avait honte. Sa famille n'était pas au courant, hormis son compagnon.

b. Entendu à la police le 1er septembre 2022, E______ a remis des captures d'écran de messages échangés avec A______ quelques minutes après les faits, desquels il ressortait notamment que les massages effectués "n'étaient pas normaux", qu'elle était "choquée" et avait été "complètement mal à l'aise pendant 30 minutes". À la suite de cela, il avait adressé un message à B______ pour lui demander de faire très attention à son comportement et de garder ses distances avec ses employés. Il a ajouté avoir entendu B______ dire qu'il avait déjà été confronté à une plainte pour le même genre de motif.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public constate que les faits décrits par A______ pourraient être constitutifs de désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel (art. 198 CP). Cette infraction se poursuivant uniquement sur plainte, la plainte déposée le 10 juin 2022 était tardive. Partant, il n'y avait pas lieu d'entrer en matière (art. 310 al. 1 let. a CPP).

D. a. Dans son recours, A______ explique qu'il était difficile pour une femme ayant vécu une situation pareille de prendre la décision et d'avoir le courage de déposer plainte contre une personne qui travaillait sur le même site. Dès lors, elle estimait que B______ devait être poursuivi et ce, pour juste motif.

b. À réception des sûretés, la cause a été jugée sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             La recourante reproche au Ministère public d'avoir retenu que sa plainte était tardive.

3.1. Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Une non-entrée en matière doit également être rendue lorsqu'il existe un empêchement de procéder, par exemple lorsque le délai pour déposer plainte prévu par l'art. 31 CP n'a pas été respecté (art. 310 al. 1 let. b CPP; arrêt du Tribunal fédéral 6B_848/2018 du 4 décembre 2018 consid. 1.5).

3.2. Se rend coupable de la contravention réprimée par l'art. 198 al. 2 CP notamment celui qui, sur plainte, aura importuné une personne par des attouchements d'ordre sexuel.

3.3. Aux termes de l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois. Le délai court du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction.

L'observation du délai de plainte fixé à l'art. 31 CP est une condition d'exercice de l'action publique (ATF 118 IV 325 consid. 2b p. 328/329), qui justifie un refus de mettre en œuvre la poursuite pénale lorsqu'elle n'est pas réalisée, ou le prononcé d'un non-lieu lorsque le juge d'instruction a procédé à des mesures d'instruction. En dépit de la lettre de l'art. 31 CP, le délai institué par cette disposition est un délai de péremption (arrêt du Tribunal fédéral 6B_482/2008 du 26 août 2008 consid. 3.2 avec référence à l'ATF 97 IV 238 consid. 2 p. 240), qui ne peut être ni suspendu, ni interrompu, ni prolongé. Tout au plus, son terme est-il reporté au prochain jour ouvrable lorsqu'il tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit du for (ATF 83 IV 185 p. 186).

3.4. Le Ministère public a estimé tardive la plainte de la recourante en lien avec la contravention dénoncée.

3.5. En l'espèce, il n'est pas contesté que la plainte a été déposée le 10 juin 2022, soit plus de cinq mois après le 5 janvier 2022, dies a quo du délai, lequel arrivait à échéance le 5 avril 2022. Elle est donc bien tardive.

La présence de la personne mise en cause sur le lieu de travail de la recourante ne suffit pas à constituer une cause d'empêchement non fautif de procéder. S'agissant du choc subi allégué, rien ne permet d'affirmer – en l'absence d'élément objectif, comme un certificat médical par exemple – que la recourante n'avait pas la faculté d'agir dans le délai prescrit, étant souligné que les messages échangés avec son employeur ne font mention que d’un choc passager.

4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui seront arrêtés à CHF 600.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Françoise SAILLEN AGAD, juges, Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/19295/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

     

- délivrance de copies (let. b)

CHF

     

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

-

CHF

     

Total

CHF

600.00