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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/13443/2022

ACPR/787/2022 du 10.11.2022 sur ONMMP/2956/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;VOIES DE FAIT;INTENTION;APPAREIL DE PRISE DE VUE ET/OU D'ENREGISTREMENT SONORE;CAS BÉNIN
Normes : CPP.310; CP.52; CP.126; CP.179ter; CP.179quater

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/13443/2022 ACPR/787/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 10 novembre 2022

 

Entre

A______, domiciliée ______[GE], comparant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 25 août 2022 par le Ministère public,

et

B______, domicilié ______[GE], comparant par Me Vadim HARYCH, avocat, Banna & Quinodoz, rue Verdaine 15, case postale 3015, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 6 septembre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 25 août précédent, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 9 mai 2022.

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour instruction.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et B______ se sont mariés en 2011.

De leur union sont issus deux enfants, C______ né en 2013 et D______ né en 2016.

Séparés depuis mars 2019, A______ et B______ s'opposent, depuis le mois de juin suivant, dans le cadre d'une procédure civile en droit de la famille.

b. Le 27 avril 2022, A______ a demandé l'intervention de la police à son domicile, à la suite d'un conflit avec B______.

À l'arrivée de la police, elle a expliqué que le prénommé l'avait filmée avec son téléphone portable lors de l'échange des enfants. Lorsqu'elle avait voulu lui prendre l'appareil, B______ lui avait tordu le poignet.

Les policiers n'ont pas constaté de lésions particulières sur le poignet de A______.

c. Lors de son audition par la police le 9 mai 2022, A______ a déposé plainte contre B______ pour voies de fait (art. 126 CP) et enregistrement non autorisé de conversations (art. 179ter CP).

En substance, elle a expliqué que le jour des faits, B______ s'était présenté pour récupérer les enfants. Elle précisait ne plus le laisser entrer à son domicile depuis janvier 2022 dès lors qu'il était arrivé que l'intéressé refuse de quitter les lieux durant plusieurs minutes. Les enfants lui avaient aussi appris, à la même période, que leur père la filmait lorsqu'il les ramenait ou les récupérait chez elle.

Le jour des faits, elle était exceptionnellement sortie pour demander à B______ de lui rendre les passeports des enfants. Dans le cadre de cette conversation, elle avait eu l'impression qu'il cherchait à l'énerver. Puis, elle avait remarqué qu'il tenait son téléphone portable devant son ventre, étant précisé que l'objectif était tourné dans sa direction. Elle lui avait alors demandé s'il la filmait, ce à quoi il avait répondu : "oui, c'est pour ma propre sécurité". Elle lui avait demandé d'arrêter. Comme il ne cessait pas, elle s'était approchée pour lui prendre le téléphone. Avec sa main droite, elle avait empoigné le haut de l'appareil, sans toucher B______, lequel maintenait fermement le téléphone avec sa main droite. Puis, le prénommé lui avait saisi et tordu le poignet droit avec sa main gauche afin qu'elle lâche l'appareil. Elle avait crié de douleur. Rapidement, B______ avait fait le tour de la voiture. Elle l'avait suivi jusqu'à l'arrière du véhicule pour qu'il reste sur place le temps qu'elle appelle la police, mais ce dernier n'avait pas attendu et avait quitté les lieux.

Elle a ajouté que la séparation était difficile, B______ ne voulant pas tourner la page et se montrant très intrusif dans sa vie privée. Il faisait des remarques déplacées sur son nouveau compagnon et investiguait au sujet de ce dernier. Les enfants vivaient mal la situation. Ils se portaient mieux lorsqu'ils n'étaient pas confrontés à la tension entre leurs parents.

d. À l'appui de sa plainte, A______ a produit un certificat médical établi le 28 avril 2022, faisant état d'une discrète rougeur face ventrale et dorsale du poignet droit et d'une sensibilité interligne dorsale versant radiale. Selon le médecin, les lésions constatées étaient compatibles avec l'anamnèse présentée par A______.

Une photographie, produite par la prénommée, a aussi été jointe à ses déclarations.

e. Entendu par la police, B______ a expliqué que l'échange des enfants se faisait toujours à l'extérieur de la propriété de A______, sur la voie publique. Afin de se prémunir contre d'éventuelles accusations de A______, il filmait systématiquement la scène au moyen de son téléphone portable, ce dont ses enfants et leur mère avaient connaissance. Ensuite, il effaçait les vidéos. Il expliquait agir de la sorte depuis l'établissement du rapport du Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale en mars 2022, dès lors que A______ s'opposait aux conclusions dudit rapport et que la tension était montée d'un cran entre eux. Il ignorait s'il avait le droit de filmer et, le cas échéant, arrêterait de le faire.

Le jour des faits, il avait répondu à A______ qu'il n'avait pas les passeports des enfants sur lui et qu'il les lui rendrait prochainement. Alors qu'il reculait pour quitter les lieux, A______ lui avait "sauté" dessus, tentant de lui arracher son téléphone. Il contestait lui avoir saisi ou tordu le poignet, mais admettait avoir tenu fermement son téléphone et fait un mouvement de recul pour se dégager de l'emprise de cette dernière. Il ne l'avait pas entendue crier de douleur ni appeler la police, son intention étant que les enfants ne restent pas dans un tel environnement.

À l'issue de son audition, B______ a déposé plainte contre A______ pour voies de fait (art. 126 CP).

f. Entendu par la police le 12 mai 2022, E______ a expliqué avoir assisté à une dispute entre sa voisine et son ex-voisin, durant dix à quinze secondes, alors qu'il se rendait au local poubelle situé à côté de l'entrée principale de la résidence. Voyant que la situation était tendue entre eux verbalement, il s'était fait discret. Il avait entendu une conversation en lien avec les passeports des enfants et leur restitution. Il était ensuite rentré chez lui et n'avait rien vu ou entendu de plus.

g. La séquence filmée par B______ a été versée à la procédure. L'on y voit A______ embrasser ses enfants à l'extérieur de la résidence avant que ces derniers se dirigent vers la porte arrière, ouverte, du véhicule de leur père. A______ s'éloigne en direction de l'entrée de la résidence. Puis, elle se retourne pour discuter avec B______ à propos de SMS qui ne lui seraient pas parvenus, avant de lui demander s'il est en train de l'enregistrer. Le prénommé lui répond agir "pour sa propre protection". Il recule et A______ avance dans sa direction. Elle fait ensuite mine de téléphoner et attire l'attention de l'aîné des enfants sur les agissements de son père. Puis, on distingue la main de A______ s'approcher du combiné. On comprend de la fin de la séquence que A______ et B______ ont tenté respectivement de saisir et conserver le téléphone.

h. Par ordonnance du 25 août 2022, le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur les faits dénoncés par B______ au motif que les versions des parties s'opposaient et que le seul témoin des faits n'avait pas été en mesure d'apporter une contribution utile à la vérité. De plus, il apparaissait que des voies de faits pouvaient être reprochées de part et d'autre, A______ admettant avoir tenté de s'emparer de force du téléphone portable de B______, lequel tentait de le conserver.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public décide de ne pas entrer en matière sur les voies de fait dénoncées par A______ pour les mêmes motifs que ceux précités (art. 310 al. 1 let. a CPP).

Les éléments constitutifs de l'art. 179quater CP étaient réalisés, B______ ayant enregistré A______ contre sa volonté. Toutefois, au vu des circonstances, soit le fait que les parties s'opposent sur le plan civil, que B______ ait expliqué avoir systématiquement effacé les enregistrements après la remise des enfants et qu'il se soit engagé à ne plus filmer, sa culpabilité et les conséquences de son acte étaient peu importantes, ce qui justifiait une non-entrée en matière (art. 8 al. 1 et 310 al. 1 let. c CPP). B______ était toutefois rendu attentif à la teneur des art. 179ter ou 179quater CP et au fait que la clémence dont il bénéficiait ne serait plus de mise en cas de récidive.

D. a. Dans son recours, A______ précise que, depuis la séparation, B______ se montrait très intrusif et harcelant, la suivant dans les lieux publics, prenant des photographies des enfants de son compagnon ou encore postant des messages à son sujet sur les réseaux sociaux. En janvier 2022, elle s'était d'ailleurs rendue à la police pour dénoncer des faits constitutifs de harcèlement et de violation de domicile. En outre, le 24 juin 2022, dans le cadre de la procédure de divorce, B______ avait déposé un mémoire de réponse contenant des photographies de l'intérieur de son domicile, prises à son insu en janvier 2020.

Au fond, elle reproche au Ministère public d'avoir considéré, de manière infondée, que la culpabilité et les conséquences de l'acte B______, qui avait enregistré sur un porteur de son puis conservé une conversation non publique avec elle, étaient de peu d'importance, au sens de l'art. 52 CP. La culpabilité de B______, qui avait tenté de la provoquer alors qu'elle-même était "calme et distante", était "pleine". Qu'ils s'opposent sur le plan civil ne rendait pas "moins" grave la commission de l'infraction. En outre, il n'était pas établi qu'il ait, conformément à ses dires, effacé lesdits enregistrements, ce d'autant qu'il avait réitéré ses agissements dans le cadre de la procédure de divorce en juin 2022. Enfin, il n'était pas censé ignorer l'illicéité de son comportement. Les actes de B______ avaient des conséquences sur la santé psychique de leurs enfants, qui avaient été gravement affectés. Le jour des faits, elle se trouvait derrière le véhicule au moment où B______ avait démarré, de sorte qu'elle avait été contrainte de se pousser pour ne pas être heurtée par le véhicule. Les enfants, qui n'étaient pas attachés, avaient été propulsés dans la voiture. Son fils aîné avait eu des crises de pleurs durant les jours suivants et lui avait demandé à plusieurs reprises si son père irait en prison s'il l'écrasait ou encore pourquoi elle avait appelé la police. Il avait aussi cherché à comprendre pour quelle raison son père l'enregistrait. Il en avait fait part à la pédopsychiatre.

S'agissant des voies de fait, le Ministère public avait fait abstraction du certificat médical et de la photographie produits. Elle avait tenté de s'emparer du téléphone pour faire cesser une violation à l'art. 179ter CP et B______ n'avait pas explicité les voies de fait subies. En tout état, il appartenait au Ministère public d'administrer les preuves "nécessaires".

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger, sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             La recourante fait grief au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte.

1.5    Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Selon la jurisprudence, cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore" (arrêt 6B_1456/2017 du 14 mai 2018 consid. 4.1 et les références citées). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 1 CPP en relation avec les art. 309 al. 1, 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2) et signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de se prononcer (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; 138 IV 86 consid. 4.1.2 et les références citées). Face à des versions contradictoires des parties, il peut être exceptionnellement renoncé à une mise en accusation lorsqu'il n'est pas possible d'apprécier l'une ou l'autre version comme étant plus ou moins plausible et qu'aucun résultat n'est à escompter d'autres moyens de preuve (arrêts du Tribunal fédéral 6B_174/2019 du 21 février 2019 consid. 2.2 et les références citées).

Une non-entrée en matière doit également être prononcée lorsqu'il peut être renoncé à toute poursuite ou à toute sanction en vertu de dispositions légales (art. 310 al. 1 let. c cum art. 8 al. 1 CPP). Tel est notamment le cas si la culpabilité de l'auteur et les conséquences de son acte sont peu importantes (art. 52 CP).

2.5    À teneur de l'art. 126 al. 1 CP, sera puni celui qui se sera livré sur une personne à des voies de fait qui n'auront causé ni lésion corporelle ni atteinte à la santé. Selon la jurisprudence, la notion de voies de fait caractérise les atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles ni dommage à la santé, voire même aucune douleur physique (ATF 134 IV 189 consid. 1.2).

Les voies de fait ne peuvent pas être commises par négligence (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire Romand, Code pénal II, 2017, Lausanne, n. 6 ad. art. 52).

3.3. Contrevient à l'art. 179ter CP, celui qui, sans le consentement des autres interlocuteurs, aura enregistré sur un porteur de son une conversation non publique à laquelle il prenait part.

Le but de la disposition visée est de protéger les autres participants contre un enregistrement clandestin de propos qu'ils conçoivent comme non publics. Cela signifie que la conversation ne doit pas être audible par toute personne qui se trouve là par hasard (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, Berne 2002, vol. I, n. 6 ad art. 179bis).

3.4. L'art. 179quater al. 1 CP punit sur plainte, celui qui, sans le consentement de la personne intéressée, aura observé avec un appareil de prise de vues ou fixé sur un porteur d'images un fait qui relève du domaine secret de cette personne ou un fait ne pouvant être perçu sans autre par chacun et qui relève du domaine privé de celle-ci.

Le Tribunal fédéral a admis que le domaine protégé par la disposition pénale ne comprend pas seulement les évènements se déroulant dans une maison, mais également ce qui se passe dans les environs immédiats, qui sont considérés et reconnus sans autre par les occupants et par les tiers comme faisant encore pratiquement partie de l'espace appartenant à la maison (ATF 118 IV 41 consid. 4 et suivants p. 44 et suivantes, JdT 1994 IV 79; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), op. cit., n. 7 ad art. 179quater CP). Il a toutefois nuancé cette position de principe, considérant que la licéité du comportement dépendait essentiellement de la question de savoir si le lieu était publiquement observable par tout un chacun, ce qui est le cas dans le contexte d’une maison partagée par plusieurs familles (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1149/2013 du 13 novembre 2014, consid. 1.2-1.3; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), op. cit., n. 7 ad art. 179quater).

S’il faut outrepasser des limites physiques, juridiques ou morales pour observer des faits de la sphère privée au sens étroit, ceux-ci ne sont plus perceptibles "sans autre" par chacun. La limite morale est celle qui n’est pas franchie sans le consentement de la personne concernée d’après les mœurs et les usages généralement reconnus dans le pays (ATF 118 IV 41 c. 4e, JdT 1994 IV 79).

3.5    En l'espèce, si les parties s'accordent sur le fait qu'une dispute a éclaté entre elles lors du passage des enfants à leur père à l'extérieur de la résidence où est domiciliée la recourante, le mis en cause conteste les accusations de cette dernière selon lesquelles il lui aurait saisi puis tordu le poignet droit dans le but de lui faire lâcher le téléphone.

Bien qu'il ressorte du certificat médical produit que les lésions constatées sont compatibles avec l'anamnèse présentée par la recourante, aucun élément objectif ne permet de corroborer ladite version, dès lors que le geste incriminé n'a pas été filmé – ce qui n'est pas contesté – et que le témoin – qui n'apparait pas dans la séquence filmée produite – n'a pas rapporté avoir assisté à cet évènement.

En tout état, même à considérer que le mis en cause aurait saisi le poignet de la recourante, aucun élément au dossier ne permet de retenir que ce dernier aurait eu la volonté de la blesser. En effet, ce dernier a expliqué qu'il entendait uniquement conserver son téléphone de sorte que le caractère intentionnel du geste incriminé devrait être nié.

Aucun autre acte d'enquête ne paraît susceptible d'apporter des éléments utiles sur ce point. La recourante n'en dit mot, d'ailleurs.

Un des éléments constitutifs de l'infraction fait ainsi manifestement défaut (art. 310 al. 1 let. a CPP) et l'analyse du Ministère public sur ce point ne prête pas le flanc à la critique.

3.6. La recourante reproche aussi au mis en cause d'avoir enfreint l'art. 179ter CP et le Ministère public considère que les éléments constitutifs d'une infraction à
l'art. 179quater CP sont réalisés.

Or, il est constant que les faits reprochés se sont déroulés à l'extérieur de la résidence dans laquelle la recourante est domiciliée. Ainsi, il apparait que la conversation litigieuse était audible par tout un chacun passant aux abords immédiats de ce lieu, ainsi qu'en atteste d'ailleurs le témoignage du voisin de la recourante.

Quoiqu'il en soit, la question de savoir si le mis en cause a effectivement violé les
art. 179ter et 179quater CP peut demeurer indécise.

En effet, même à admettre que tel serait le cas, la culpabilité du mis en cause devrait être sensiblement relativisée, compte tenu du contexte dans lequel cette atteinte est survenue. À l'évidence, les parties sont en conflit depuis leur séparation et leurs rapports sont tendus; l'acte incriminé s'inscrit donc dans une continuité de querelles décrites par le recourante comme étant incessantes. À cela s'ajoute que l'on ne décèle nulle trace de malice, de curiosité malsaine ou de volonté de nuire dans la réalisation de cet enregistrement qui n'a pas été diffusé. En particulier, la recourante, qui soutient que le mis en cause avait tenté de la provoquer, ne décrit aucun élément tendant à penser que ce dernier aurait souhaité obtenir un quelconque avantage par cet enregistrement. Enfin, il s'est engagé à ne plus réitérer ses agissements, si bien qu'il est permis de penser que cet épisode ne se reproduira pas, étant précisé que le fait de produire, dans le cadre de la procédure civile, des photographies prises en janvier 2020 ne peut pas être considéré comme une récidive.

Les conséquences de l'acte doivent également être qualifiées de peu importantes. En effet, bien que la recourante allègue que ses enfants auraient été gravement affectés par les actes reprochés au mis en cause le 27 avril 2022, elle ne rend pas vraisemblable que les conséquences seraient autres que bégnines (questionnement et incompréhension). De son propre aveu, ce sont ses enfants qui l'ont informée, dès janvier 2022, que leur père la filmait lorsqu'il venait les déposer ou les récupérer. Ainsi, il n'est pas établi que la violation des art. 179ter ou 179quater CP soit la cause directe des perturbations constatées par la recourante ni qu'elles en seraient la principale raison, étant précisé qu'à teneur de ses propres explications, les enfants paraissent davantage avoir été sensibles aux tensions existant entre leurs parents ou encore à la manière dont leur père aurait quitté la résidence qu'au fait que ce dernier avait filmé leur mère.

Il en découle que tant la culpabilité de l'auteur que les conséquences de l'infraction sont de peu d'importance. Les conditions de l'art. 52 CP étant remplies, une non-entrée en matière au sens de l'art. 8 al. 1 et 310 al. 1 let. c CPP était donc justifiée.

Pour le surplus, il n'appartient pas non plus à la Chambre de céans d'examiner les autres faits dénoncés dans le cadre du recours, faute de décision préalable sur ce point
(art. 393 al. 1 let. a CPP).

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/13443/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

-

CHF

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

1'000.00