Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision
AARP/220/2025 du 16.06.2025 sur JTDP/76/2019 ( PENAL ) , ADMIS
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE P/20523/2017 AARP/220/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale d'appel et de révision Arrêt du 16 juin 2025 |
Entre
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
requérant,
Ensuite de l'arrêt AARP/247/2019 du 15 juillet 2019,
et
A______, domicilié ______, France, comparant par Me François CANONICA, avocat, CANONICA & ASSOCIÉS, rue François-Bellot 2, 1206 Genève,
B______, partie plaignante, comparant en personne,
cités.
EN FAIT :
A. a. Par ordonnance OTMC/3549/2017 du 21 novembre 2017, le Tribunal des mesures de contrainte (TMC) a ordonné la mise en liberté de A______, avec des mesures de substitution, consistant notamment au dépôt d'une somme à titre de caution de EUR 10'000.-. Ce montant, après conversion en francs suisses (CHF 11'460.-), a été déposé en espèces le 21 novembre 2017. L'ayant droit économique en était le père de A______, C______.
Par jugement JTDP/76/2019 du 22 janvier 2019, le Tribunal de police (TP) a, notamment, reconnu A______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 du code pénal suisse [CP]), de tentative de vol (art. 139 ch. 1 cum 22 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) et de violation de domicile (art. 186 CP), l’a condamné à une peine privative de liberté de six mois, sous déduction de 47 jours de détention avant jugement, ainsi qu'à payer à B______ CHF 3'331.30, avec intérêts à 5% dès le 20 avril 2017, à titre de réparation du dommage matériel, ainsi qu'à la moitié des frais de la procédure (CHF 2'088.- en totalité) et à payer à l'État de Genève l'émolument complémentaire (CHF 600.-). Il a également renoncé à ordonner le placement en détention pour des motifs de sûreté de A______ et a ordonné le maintien des sûretés jusqu'à ce qu'il débute l'exécution de la peine privative de liberté ferme prononcée.
Ce jugement a été confirmé par arrêt AARP/247/2019 du 15 juillet 2019 de la Chambre pénale d’appel et de révision (CPAR), frais de la procédure d'appel en CHF 1'755.- à la charge de A______. Cet arrêt a été notifié à ce dernier le 26 juillet 2019.
Il est entré en force le jour où il a été rendu, vu l'absence de recours au Tribunal fédéral (art. 437 al. 3 CPP ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_58/2014 du 15 avril 2014 consid. 3.1), soit le 15 juillet 2019. Il est devenu exécutoire à l'échéance du délai du recours précité, vu l’effet suspensif de l’art. 103 al. 2 let. b de la Loi sur le Tribunal fédéral [LTF], la règle de l'art. 45 al. 1 LTF et la suspension de l’art. 46 al. 1 let. b LTF, soit le 17 septembre 2019.
Le Ministère public (MP) a, le 24 septembre 2019, enjoint au Service de l'application des peines et mesures (SAPEM) d'ordonner l'exécution de la peine privative de liberté précitée. Celle-ci n'a toutefois jamais été exécutée.
A______ ne s'est pas acquitté des frais judiciaires, malgré un rappel entraînant des frais supplémentaires d'un montant de CHF 20.-.
B______ n'a donné aucune suite au courrier du MP du 23 janvier 2025, l'invitant à prouver la réception de la somme que A______ avait été condamné à lui verser.
B. a. Par requête du 7 mars 2025, reçue le 10 mars 2025, le MP, observant que le solde de peine à purger était prescrit, requiert la dévolution des sûretés, dont CHF 3'419.- devaient être affectés à la couverture des frais de procédure et de rappel, et le solde acquis à l'Etat.
b. Interpellé par la CPAR par envoi recommandé, B______, qui a pourtant retiré le pli, ne s'est pas manifesté dans le délai lui ayant été imparti pour se déterminer sur cette requête.
c. Dans le délai prolongé à sa demande, A______, sous la plume de son conseil, a indiqué s'en rapporter à l'appréciation de la Cour de céans.
EN DROIT :
1. Selon l'art. 240 al. 3 CPP, la dernière autorité saisie, soit en l'occurrence la CPAR, est compétente pour statuer sur le sort des sûretés.
Formée devant l'autorité compétente, la requête du MP est recevable.
2. 2.1. Aux termes de l'art. 240 al. 1 CPP, si le prévenu se soustrait à la procédure ou à l'exécution d'une sanction privative de liberté, les sûretés sont dévolues à la Confédération ou au canton dont relève le tribunal qui en a ordonné la fourniture.
Lorsqu’un tiers a fourni les sûretés, l’autorité peut renoncer à leur dévolution s’il a donné aux autorités en temps utile les informations qui auraient pu permettre d’appréhender le prévenu (art. 240 al. 2 CPP).
Par analogie avec l'art. 73 CP, les sûretés dévolues servent à couvrir les prétentions du lésé et, s’il reste un solde, les peines pécuniaires, les amendes et les frais de procédure. Le reliquat éventuel est acquis à la Confédération ou au canton (art. 240 al. 4 CPP).
2.2. La dévolution intervient ipso iure, de telle sorte que la décision de l'autorité est de nature purement constatatoire. Avec la dévolution, le prévenu perd de manière définitive le droit à la restitution de la garantie (arrêt du Tribunal fédéral 7B_69/2022 du 28 août 2024 consid. 4.2).
Contrairement à l'art. 239 al. 2 CPP, la dévolution des sûretés n'est pas limitée à celles fournies par le prévenu, et comprend de la sorte également l'argent versé par un tiers (M. A. NIGGLI / M. HEER / H. WICHPRÄCHTIGER [éds], Basler Kommentar Schweizerische Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, 3e éd., Bâle 2023, n. 6 ad art. 240 CPP).
L'allocation au lésé de la prestation de sûretés échue suppose une demande de ce dernier (cf. art. 73 CP ; M. A. NIGGLI / M. HEER / H. WICHPRÄCHTIGER [éds], op. cit., n. 7 ad art. 240 CPP ; F. MANFRIN, Ersatzmassnahmenrecht nach Schweizerischer Strafprozessordnung : ein Beitrag zur Konkretisierung des Verhältnismässigkeitsprinzips im Haftrecht, Genève, Zurich, Bâle 2014, p. 230).
2.3. Selon l'art. 99 al. 1 let d et e CP, les peines se prescrivent par quinze ans si une peine privative de liberté de plus d'un an mais de moins de cinq ans a été prononcée, et par cinq ans pour les peines inférieures.
Conformément à l'art. 100 CP, la prescription court dès le jour où le jugement devient exécutoire.
2.4. En l'espèce, la peine à laquelle le cité A______ a été condamné se prescrivait par cinq ans. Ce délai, ayant commencé à courir dès le jour où l'arrêt du 15 juillet 2019 est devenu exécutoire, soit le 17 septembre 2019, est arrivé à échéance le 17 septembre 2024.
Le cité A______ s'est soustrait à l'exécution de la peine, avec succès, vu l'acquisition de la prescription, ce qui n'est pas contesté.
Bien que son père soit l'ayant droit économique des sûretés, il ne ressort pas du dossier que celui-ci ait fourni des informations utiles aux autorités pour appréhender son fils.
Il convient ainsi de constater que le principe de l'acquisition des sûretés est acquis. Reste à en déterminer l'affectation. Le lésé ne s'est pas manifesté à la suite des interpellations du MP et de la CPAR. Il n'a ainsi pas demandé l'affectation des sûretés au paiement de ses prétentions civiles. Les sûretés seront par conséquent affectées au paiement des frais de la procédure de première instance (CHF 1'644.-) et d'appel (CHF 1'755.-), ainsi que de rappel (CHF 20.-), le solde étant acquis à l'État.
3. Vu sa nature, la présente décision sera rendue sans frais.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Constate que les sûretés par CHF 11'460.- fournies par C______, pour A______, en date du 21 novembre 2017, en exécution de l’ordonnance OTMC/3549/2017 du Tribunal des mesures de contrainte du 21 novembre 2017, sont dévolues à l'État de Genève.
Affecte lesdites sûretés à la couverture des frais de la procédure et de rappel à hauteur de CHF 3'419.-.
Dit que le solde est acquis à l'État de Genève.
Dit qu'il n'est pas perçu de frais.
Notifie le présent arrêt aux parties.
La greffière : Linda TAGHARIST |
| La présidente : Gaëlle VAN HOVE |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.