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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/908/2023

DCSO/541/2023 du 14.12.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : LP.245
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/908/2023-CS DCSO/541/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 14 DECEMBRE 2023

 

Plainte 17 LP (A/908/2023-CS) formée en date du 13 mars 2023 par A______.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______
à :

-       A______

______

______ [GE].

- ADMINISTRATION FEDERALE DES CONTRIBUTIONS TVA

Schwarztorstrasse 50
3003 Berne.

- ETAT DE GENEVE, ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

Service du contentieux
Case postale 3937
1211 Genève 3.

- A______ & ASSOCIES SA

______
______ [GE].

- CAISSE DE COMPENSATION B______

______
______ [GE].

- C______

______
______ [ZH].

- ETAT DE GENEVE, SERVICES FINANCIERS DU POUVOIR JUDICIAIRE

Place du Bourg-de-Four 3
1204 Genève.

-       D______

______

______ [GE].

- E______

______

______ [BE].

- Office cantonal des faillites
Faillite n° 2022 000
_1______

 

 


EN FAIT

A. a. La faillite de A______, né le ______ 1956, a été déclarée le 16 juin 2022. Elle est liquidée en la forme sommaire par l'Office cantonal des faillites (ci-après : l'Office).

b. Dans le délai imparti aux créanciers pour produire leurs prétentions (art. 232 al. 2 ch. 2 LP), les D______ ont fait valoir diverses créances, parmi lesquelles un montant de 82'360 fr. 80 en capital correspondant à des dépens dus par le failli aux D______ en vertu d'une ordonnance de séquestre prononcée le 3 juin 2022, ainsi que les intérêts moratoires y afférents.

Invité par l'Office à se déterminer sur les prétentions produites (art. 244 LP), A______, par lettre du 31 octobre 2022, a notamment contesté cette prétention, expliquant que l'ordonnance de séquestre du 3 juin 2022 avait fait l'objet d'un recours à la Cour de justice et que celle-ci, par arrêt ACJC/1385/2022 du 13 octobre 2022, avait réduit à 4'300 fr. les frais et dépens dus aux D______ en relation avec l'ordonnance de séquestre du 3 juin 2022. Selon le failli, la production ne devait donc être admise qu'à hauteur de 4'300 fr. en lieu et place de 82'360 fr. 80.

c. L'inventaire et l'état de collocation dans la faillite ont été déposés le 2 mars 2023.

d. Sous rubrique C29 de l'inventaire, l'Office a inventorié – pour une valeur estimée à 1 fr. – une prétention litigieuse d'un montant de 8'738'284 fr. 27 à l'encontre de la CAISSE DE PREVOYANCE PROFESSIONNELLE F______ (ci-après : la F______) au titre du compte de libre passage revenant au failli.

En relation avec cet actif, l'inventaire comporte la remarque suivante :

"Ces avoirs sont déclarés insaisissables conformément à l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_907/2021 du 20 avril 2022; aucune demande de clôture du compte n'ayant été déposée par le failli (cf. courrier de la F______ du 17.08.2022), les avoirs ne sont pas exigibles. Un éventuel litige quant au partage des fonds dans le cadre de la procédure de divorce entre Monsieur A______ et Madame G______ doit être réglé en dehors de la procédure de faillite."

e. L'état de collocation du 2 mars 2023 mentionne, sous rubrique n° 11, une prétention de 20'460'487 fr. des D______ fondée sur un arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 26 mai 2020, aujourd'hui définitif, par lequel cette instance a, notamment, reconnu A______ coupable de complicité de gestion déloyale et l'a condamné, conjointement et solidairement avec un autre prévenu, H______, à payer aux D______ une somme de 20'460'487 fr.; une créance compensatrice du même montant, avec intérêts, a par ailleurs été prononcée à l'encontre du failli en faveur de l'Etat de Genève et allouée aux D______.

Cette production a été intégralement admise à l'état de collocation, en troisième classe.

f. Etait également intégralement admise à l'état de collocation, sous rubrique 15, en troisième classe, le montant de 82'360 fr. 80 en capital correspondant à des dépens dus par le failli aux D______ en vertu de l'ordonnance de séquestre prononcée le 3 juin 2022. L'état de collocation ne comporte aucune explication sur les motifs de la décision de l'Office, en particulier sur le rejet de l'argument du failli selon lequel l'ordonnance de séquestre invoquée par le créancier avait été modifiée sur recours (cf. ci-dessus let. A.b).

g. L'état de collocation a été redéposé le 22 mars 2023. Sa nouvelle version ne comporte aucun changement pour les rubriques 11 et 15 mais mentionne, sous rubriques nouvelles 24 et 21, les intérêts moratoires sur ces prétentions jusqu'à la déclaration de faillite, chiffrés par les D______ à 9'846'609 fr pour la prétention colloquée sous rubrique 11 et à 148 fr. 71 pour la prétention colloquée sous rubrique 15 et intégralement admis à l'état de collocation.

B. a. Par acte adressé le lundi 13 mars 2023 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre les inventaire et état de collocation du 2 mars 2023.

Dans la partie de sa plainte dirigée contre l'inventaire, A______ a conclu à ce que le montant de la prétention contre la F______ inventoriée sous rubrique C29 soit corrigé, le montant correct étant de 4'678'362 fr. En relation avec cette conclusion, il a expliqué que, dans le cadre d'un séquestre exécuté le 22 janvier 2021, la F______ avait estimé à 4'490'191 fr. 65 sa prestation de libre passage. Depuis cette date et jusqu'à la déclaration de faillite, ce montant avait dû être crédité d'intérêts le portant à 4'678'362 fr.

Dans la partie de sa plainte dirigée contre l'état de collocation, A______ a conclu d'une part à ce que la production des D______ faisant l'objet de la rubrique n° 15 de l'état de collocation ne soit admise qu'à hauteur de 4'300 fr., expliquant qu'il s'agissait là du montant auquel les dépens dus en relation avec le prononcé de l'ordonnance de séquestre du 3 juin 2022 avaient été réduits par arrêt de la Cour de justice du 13 octobre 2022 (ACJC/1385/2022), et d'autre part que l'Office soit invité à mentionner, en regard de la rubrique n° 11 de l'état de collocation, une réserve précisant que le montant admis (soit 20'460'487 fr.) devait être réduit par imputation des paiements que les D______ avaient obtenu ou pourraient à l'avenir obtenir de son codébiteur solidaire H______, ceux-ci ne pouvant lui réclamer que la part de sa prétention non déjà couverte.

b. Dans ses observations du 5 avril 2023, l'Office a conclu à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'il réduirait à 4'300 fr. la créance admise sous rubrique 15 de l'état de collocation et à ce que la plainte soit rejetée pour le surplus. La prétention inventoriée sous rubrique C29 de l'inventaire avait été déclarée insaisissable et, en cas de solidarité entre plusieurs coobligés, l'art. 217 LP permettait au créancier de produire dans la faillite pour l'intégralité du montant originel, quand bien même il aurait déjà perçu, ou devrait encore percevoir, des acomptes des autres coobligés.

c. Par détermination du 19 avril 2023, les D______ ont conclu au rejet de la plainte. Ils ont toutefois admis, en relation avec la créance colloquée sous rubrique 15 de l'état de collocation, que le montant initialement fixé par le Tribunal à titre de dépens avait été réduit sur recours par la Cour. En relation avec la créance colloquée sous rubrique 11, ils ont indiqué n'avoir encore perçu aucun montant du coobligé du failli, H______.

d. D'autres créanciers dans la faillite (B______ [caisse de compensation], par lettre du 27 mars 2023, A______ & ASSOCIES SA, par lettre du 30 mars 2023, E______ [banque], par lettre du 28 mars 2023, et le Pouvoir judiciaire, par lettre du 5 avril 2023), s'en sont rapportés à justice sur l'issue de la plainte.

e. Par lettre du 2 mai 2023, les D______ ont informé la Chambre de surveillance avoir adressé à l'Office une production rectifiée et complétée.

f. Par ordonnance du 23 mai 2022, la Chambre de surveillance a rejeté la requête de suspension de la procédure de plainte formée par les D______.

g. La cause a été gardée à juger le 9 juin 2023.

C. Par décision DCSO/539/2023 rendue le 14 décembre 2023 dans la cause A/921/2023, relative à une plainte formée par les D______ contre, notamment, l'inventaire du 2 mars 2023, la Chambre de surveillance a retenu que la prétention inventoriée sous rubrique n° C29 de l'inventaire correspondait en réalité à deux prétentions distinctes devant être inventoriées séparément, l'une, insaisissable et ne tombant donc pas dans la masse active, correspondant à une créance du failli à l'encontre de la F______ à hauteur de la prestation de sortie lui revenant, et la seconde, en principe saisissable et tombant donc dans la masse active pour autant que le failli en soit titulaire, correspondant à une créance contre l'Office des poursuites et/ou G______ à hauteur du montant consigné en mains de l'Office des poursuites dans la poursuite n° 2______.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.2.1 La plainte a en l'occurrence été déposée en temps utile contre des mesures de l'Office des faillites – inventaire et état de collocation – pouvant – en principe et sous réserve des griefs invoqués – être contestées par cette voie. Elle respecte par ailleurs la forme écrite et comporte une motivation ainsi que des conclusions. Elle est donc formellement recevable.

1.2.2.1 A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'Office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_48/2022 du 10 mai 2022 consid. 4.2.1). Le débiteur et le créancier à la poursuite disposent toujours de la qualité pour former une plainte contre une décision de l'Office qui les atteint dans leurs intérêts (Cometta/Möckli, Basler in BSK SchKG I, 2021, n° 41 ad art. 17 LP; Dieth/Wohl, in KUKO SchKG, 2014, n° 11 et ss ad art. 17 LP; Erard, in CR LP, 2005, n° 25 ss ad art. 17 LP). Le plaignant doit dans tous les cas poursuivre un but concret; il doit être matériellement lésé par les effets de la décision attaquée et avoir un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation (ATF 139 III 384 consid. 2.1; 138 III 219 consid. 2.3; ATF 120 II 5 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_483/2012 du 23 août 2012 consid. 5.3.1 et les références citées).

1.2.2.2 L'établissement de l'inventaire est une mesure interne de l'administration de la faillite, qui n'a aucun effet sur la situation juridique des tiers (ATF 114 III 21 cons. 5b; 90 III 18 cons. 1). L'office doit porter à l'inventaire l'ensemble des éléments du patrimoine du failli, quelle que soit leur nature et leur lieu de situation, et que leur appartenance au failli soit contestée ou non. Il en va notamment ainsi des créances du failli, que celles-ci soient ou non contestées, exigibles ou liquides (Lustenberger, in BaK SchKG II, 2010, n. 21 ad art. 221 LP). Les litiges relatifs à l'existence ou au montant d'un droit supposé tombé dans le patrimoine du failli ne relèvent pas de la compétence de l'administration de la faillite – ni de celle de l'autorité de surveillance – mais de celle du juge civil (Lustenberger, op. cit. n. 21a ad art. 221 LP).

1.2.2.3 Le failli conclut en l'espèce à la rectification de l'inventaire quant au montant de la prétention dont il dispose à l'encontre de la F______. Dans la mesure toutefois où le caractère insaisissable de cette prétention a été confirmé par la Chambre de céans dans le cadre de la procédure A/921/2023 et que l'inventaire ne déploie aucun effet externe, on ne voit pas en quoi l'indication d'un montant par hypothèse erroné porterait atteinte à des intérêts dignes de protection du failli. L'insaisissabilité de sa prétention a en effet pour conséquence que cet actif ne pourra être affecté au désintéressement de ses créanciers dans la procédure de faillite, et que son éventuel montant demeurera donc sans influence sur le découvert, alors qu'un éventuel litige entre le failli et la F______ sur le montant exact de sa prétention devra être porté devant le juge compétent.

Faute d'intérêt concret du plaignant à la modification de l'acte contesté, la plainte dirigée contre l'inventaire doit ainsi être déclarée irrecevable.

1.3.1 En matière de collocation des créanciers dans la faillite, dans le cadre du processus de vérification des créances avant leur collocation, les violations de l'art. 244 LP peuvent être dénoncées par la voie de la plainte, en particulier s'agissant de l'admission d'une prétention en l'absence de tout moyen de preuve, de l'insuffisance de la vérification d'une créance admise ou des exceptions du failli retenues à l'appui d'un rejet, de l'omission d'entendre le failli ou de l'indication erronée de la reconnaissance d'une créance par le failli (Jaques, in CR LP, 2005, n° 32 ad art. 244 LP).

La voie de la plainte est également ouverte pour toute violation de l'art. 245 LP contre les décisions de collocation de l'Office, notamment en cas d'absence de décision ou de décisions équivoques, conditionnelles, inintelligibles ou contradictoires, interprétées selon le principe de la confiance (Jaques, op. cit., n° 43 ad art. 245 LP).

En définitive, la voie de la plainte auprès de l'autorité de surveillance en matière d'état de collocation est exclusivement ouverte pour régler des questions relevant du droit de la procédure de faillite pour toute violation des règles légales formelles. Une plainte ne soulevant que des problèmes de droit matériel liés à l'existence, au montant, au rang, ou à l'exigibilité d'un droit porté à l'état est en principe irrecevable et relève exclusivement du juge dans le cadre d'une action en contestation de l'état de collocation au sens de l'art. 250 LP (Jaques, op. cit., n° 2, 14 et 15 ad art. 250 LP).

1.3.2 En l'occurrence, les griefs invoqués par le plaignant en relation avec la rubrique n° 11 de l'état de collocation sont de nature formelle, puisqu'il est fait reproche à l'Office d'avoir omis de mentionner une réserve portant sur l'imputation d'acomptes versés par un coobligé. La plainte est donc, à cet égard, recevable.

Elle l'est également en tant qu'elle concerne la rubrique n° 15 de l'état de collocation : le plaignant y conteste certes le montant admis au passif mais son grief porte sur l'absence de prise en considération par l'Office, sans motivation, d'une décision judiciaire qu'il avait portée à sa connaissance; dans cette mesure, il concerne l'application par l'Office des règles régissant l'établissement de l'état de collocation.

2. 2.1.1 Après avoir consulté le failli (art. 244 LP), l'administration de la faillite doit examiner le bien-fondé de chacune des productions reçues sur la base, d'une part, des pièces justificatives fournies par le créancier lui-même et, d'autre part, des éléments de preuve dont elle aura eu connaissance par le failli, les documents du failli, ou qu'elle aura recueillis elle-même (Sprecher, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, N 26 à 28 ad art. 244 LP). Il lui incombe ensuite de statuer sur l'admission au passif – soit à l'état de collocation dans la faillite – de chacune des créances produites (art. 245 LP; Jaques, op. cit., N 5 et 20 ad art. 245 LP et N 1 ad art. 247 LP) en l'admettant, en l'écartant ou, dans certaines hypothèses particulières, en suspendant sa décision (art. 59 al. 3 OAOF). La décision d'admission ou de rejet rendue par l'administration doit être claire et sans réserve (Jaques, op. cit., N 22 ad art. 245 LP). Elle doit comporter une motivation, même sommaire, et figurer dans l'état de collocation à la suite de la créance invoquée (art. 248 LP; art. 58 al. 2 OAOF).

Lorsqu'il établit l'état de collocation, l'Office, en qualité d'administration de la faillite, est lié par les décisions définitives et exécutoires rendues par les Tribunaux ou autorités administratives suisses dans la mesure où elles tranchent les questions de l'existence et du montant d'une créance contre le failli (Hierholzer/Sogo, in BSK SchKG, 3ème édition, 2021, N 6 ad art. 245 LP). Les circonstances postérieures à l'entrée en force de ces décisions doivent toutefois être prises en considération (Hierholzer/Sogo, op. cit., N 6a ad art. 245 LP).

2.1.2 Dans le cas d'espèce, il résulte de l'arrêt ACJC/1385/2022 du 13 octobre 2022, lequel était définitif et exécutoire lors de l'établissement et du dépôt de l'état de collocation du 2 mars 2023, que les frais et dépens dus par le failli aux D______ en relation avec l'ordonnance de séquestre du 3 juin 2022 n'étaient pas de 82'360 fr. 80, comme invoqué (avant le prononcé de la décision précitée) par les D______, mais de 4'300 fr. En ne prenant pas en compte, sans explication, cette décision, l'Office a violé les règles de forme régissant l'établissement de l'état de collocation. La plainte est donc, sur ce point, bien fondée.

Concrètement, la décision de l'Office consignée sous rubrique n° 15 de l'état de collocation du 2 mars 2023 sera annulée. Il en ira de même, pour des motifs de cohérence, des décisions consignées sous rubriques n° 15 et 21 de l'état de collocation redéposé le 22 mars 2023, bien qu'il n'ait pas été contesté en tant que tel par le plaignant : la première est en effet inchangée par rapport à l'état de collocation litigieux et la seconde concerne les intérêts courus sur la créance admise à la rubrique n° 15. Il appartiendra à l'Office de rendre de nouvelles décisions concernant les productions examinées sous ces rubriques.

2.2.1 Il y a solidarité passive lorsque plusieurs débiteurs répondent, chacun pour le tout, de la même dette (art. 143 CO).

La manière dont le créancier d'une telle obligation peut la faire valoir dans la faillite de l'un des coobligés est régie par l'art. 217 LP. Selon l'al. 1 de cette disposition, la dette solidaire doit être admise au passif de l'état de collocation pour son montant original, lors même qu'un coobligé du failli aurait déjà versé un acompte. Au moment de la distribution des deniers, le dividende revient au créancier solidaire jusqu'à complet désintéressement de celui-ci, seul un éventuel excédent étant affecté au désintéressement du créancier récursoire qui aurait versé plus que sa part (art. 217 al. 3 LP: Jeanneret, in CR LP, 2005, N 15 à 17 ad art. 217 LP).

2.2.2 Le plaignant considère en l'espèce que l'Office aurait dû préciser en regard de la rubrique n° 11 de l'état de collocation que les acomptes versés par son coobligé H______ seraient imputés sur le montant admis de la créance solidaire produite par les D______. Or, outre le fait qu'aucune disposition de la loi ou de son ordonnance d'application (OAOF) ne prescrit une telle mention, son contenu s'inscrirait en directe contradiction du système prévu par l'art. 217 LP : comme exposé ci-dessus, cette disposition prévoit en effet que les éventuels paiements (ou acomptes) effectués par des coobligés du failli en exécution d'une obligation solidaire ne sont pas imputés sur la créance admise à l'état de collocation – ce qui diminuerait d'autant les perspectives de désintéressement complet du créancier – mais sont uniquement pris en compte au moment de la distribution des deniers, de manière à éviter que le créancier ne perçoive plus que le montant de sa créance. Il s'agit par là de favoriser les intérêts du créancier dont la créance est dirigée contre plusieurs débiteurs solidairement responsables (Jeanneret, op. cit., N 2 ad art. 217 LP).

La plainte est donc, sur ce point, mal fondée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

 

A la forme :

Déclare irrecevable la plainte formée le 13 mars 2023 par A______ en tant qu'elle est dirigée contre l'inventaire déposé le 2 mars 2023 dans sa faillite.

Déclare recevable la même plainte en tant qu'elle est dirigée contre l'état de collocation dans sa faillite déposé le même jour.

Au fond :

Admet partiellement la plainte.

Annule les décisions de l'Office cantonal des faillites consignées sous rubriques nos 15 de l'état de collocation du 2 mars 2023 et 15 et 21 de l'état de collocation redéposé le 22 mars 2023.

Invite l'Office cantonal des faillites à statuer une nouvelle fois sur les productions faisant l'objet de ces rubriques, dans le sens des considérants.

Rejette la plainte pour le surplus.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Messieurs Luca MINOTTI et
Eric DE PREUX, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 


 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.