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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2916/2023

DCSO/484/2023 du 09.11.2023 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2916/2023-CS DCSO/484/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 9 NOVEMBRE 2023

 

Plainte 17 LP (A/2916/2023-CS) formée en date du 14 septembre 2023 par A______ SA.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______ SA

______

______ [GE].

- B______ SA

c/o C______ SA [société de recouvrement]

______

______ [VD].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ SA est une société anonyme ayant son siège route 1______ no. ______, [code postal] Genève, depuis le ______ 2022. Elle a pour seul administrateur D______.

b. Le 28 mars 2023, B______ SA a requis la poursuite de A______ SA pour 5'567 fr. 65, plus intérêts, 634 fr. 35 et 73 fr. 30.

c. Après plusieurs tentatives infructueuses de notification du commandement de payer, poursuite n° 2______, au siège de la société poursuivie, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) l'a notifié au domicile de son administrateur, chemin 3______ no. ______, [code postal] Genève, le 21 juin 2023. L'agent notificateur l'a remis à la belle-sœur de D______, E______, domiciliée à la même adresse.

Aucune opposition au commandement de payer n'a été enregistrée par l'Office dans le délai de dix jours dès sa notification.

d. Le 27 juillet 2023, D______, agissant pour A______ SA, a annoncé à l'Office former opposition totale au commandement de payer.

e. Le 28 juillet 2023, l'Office a rendu une décision de rejet d'opposition pour cause de tardiveté, le délai d'opposition au commandement de payer, poursuite n° 2______, ayant expiré le 1er juillet 2023. Cette décision a été communiquée à A______ SA, route 1______ no. ______, [code postal] Genève, par pli recommandé du même jour. Un avis de retrait a été déposé le 2 août 2023, invitant A______ SA à retirer l'envoi dans un délai de 7 jours, expirant le 9 août 2023. A______ SA n'a pas retiré le pli recommandé, qui a été retourné à l'Office le 10 août 2023.

f. Le 2 août 2023, B______ SA a requis la continuation de la poursuite.

g. Le 5 septembre 2023, l'Office a fait notifier à A______ SA une commination de faillite établie le 8 août 2023 dans la poursuite n° 2______, qui a été remise en mains de D______.

B. a. Par acte daté du 13 septembre 2023, expédié le lendemain, A______ SA a formé plainte au sens de l'art. 17 LP auprès de la Chambre de surveillance contre la commination de faillite. Elle conclut à l'annulation de la poursuite n° 2______, notamment au motif que le commandement de payer avait été remis à la belle-sœur de son administrateur. La date à laquelle A______ SA aurait eu connaissance de l'acte litigieux ne résulte pas de la plainte. L'exemplaire pour le débiteur du commandement de payer a été joint à la plainte.

b. Dans son rapport, l'Office a exposé qu'il avait d'abord effectué sans succès plusieurs tentatives de notifications du commandement de payer au siège de la société. Le commandement de payer avait ensuite été valablement notifié à la belle-sœur de l'administrateur de la plaignante, qui faisait ménage commun avec ce dernier. A______ SA ne faisait au demeurant valoir aucun empêchement non fautif justifiant la restitution du délai d'opposition. Mal fondée, la plainte devait être rejetée.

c. La créancière a aussi conclu au rejet de la plainte.

d. Le rapport de l'Office et la détermination de B______ SA ont été communiqués à A______ SA par courrier du 26 septembre 2023.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al. 1), ainsi qu'en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP).

L'autorité de surveillance n'est en revanche pas compétente pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite qui relèvent de la compétence du juge ordinaire; elle n'est notamment pas compétente pour déterminer si le poursuivi est bien le débiteur du montant qui lui est réclamé; ce dernier doit faire valoir les moyens que lui offre la procédure de poursuite, soit notamment l'opposition au commandement de payer, l'action en libération de dette, l'annulation de la poursuite ou l'action en constatation de l'inexistence de la dette (parmi d'autres ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée; 115 III 18 consid. 3b; 113 III 2 consid. 2b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1; 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1; 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3).

1.2 La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l'acte contesté (art. 22 al. 1 LP), de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP).

Sauf disposition contraire de la LP, les règles du CPC s'appliquent à la computation et à l'observation des délais. En application de l'art. 138 al. 3 let. a CPC, l'acte est réputé notifié, en cas d'envoi recommandé, lorsque celui-ci n'a pas été retiré à l'expiration d'un délai de 7 jours à compter de l'échec de la remise, si le destinataire devait s'attendre à recevoir la notification. Ainsi, l'acte de poursuite communiqué sous pli recommandé qui n'a pas été délivré au destinataire (parce qu'il a omis de le retirer ou de l'accepter) est considéré comme reçu le dernier jour du délai de garde postal de 7 jours pour autant qu'un avis de retrait ait été déposé dans la boîte aux lettres ou la case postale du destinataire (ATF 116 III 59, JdT 1992 II 148; 116 III 8; 123 III 492, JdT 1999 II 109) et pour autant que la personne ait dû s'attendre à l'envoi. Il en est de même en cas de remise dans une case postale (ATF 117 III 4, JdT 1993 II 47) ou de garde du courrier (ATF
123 III 492, JdT 1999 II 109; Erard, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 14 ad art. 31 LP).

1.3 En l'espèce, les contestations de la plaignante concernant la validité du contrat conclu avec la société poursuivante ou relatives aux factures émises par cette dernière ne peuvent être examinées par la Chambre de surveillance qui n'en a pas la compétence matérielle.

Par ailleurs, en tant qu'elle vise la décision rejetant son opposition pour tardiveté, sa plainte a été formée au-delà du délai de 10 jours prévu par l'art. 17 LP et elle est irrecevable. En effet, la décision attaquée a été notifiée à la plaignante par pli recommandé du 28 juillet 2023, adressé au siège légal de la société. Celle-ci a été avisée du pli recommandé le 2 août 2023, ce qui a fait courir le délai de garde de 7  jours à l'issue duquel l'acte notifié est considéré comme reçu; en l'occurrence, la réception de la décision attaquée est ainsi réputée intervenue le 9 août 2023; le délai de plainte de 10 jours courrait par conséquent dès cette date et est parvenu à échéance le lundi 21 août 2023, le 19 août étant un samedi. Le dépôt de la plainte le 14 septembre 2023 est donc largement hors délai en tant qu'elle vise le rejet de l'Office de prendre en considération l'opposition.

2. La plainte a certes été formée dans les dix jours dès la réception par la plaignante de la commination de faillite. Les griefs soulevés par la plaignante ne concernent toutefois pas la commination de faillite mais bien la décision de rejet de l'opposition et le processus de notification du commandement de payer. La plaignante est du reste soumise à la poursuite par voie de faillite et l'Office pouvait de bon droit donner suite à la réquisition de continuer la poursuite, compte tenu du rejet de l'opposition pour cause de tardiveté. D'ailleurs, la sanction de la violation des dispositions sur la notification des actes de poursuite ne réside pas nécessairement dans la nullité des notifications viciées. La notification qui n’aurait pas été effectuée selon les règles imposées par les art. 64 à 66 LP, n’est en effet frappée de nullité que dans la mesure où l’acte de poursuite n’est pas parvenu à la connaissance du débiteur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, la plaignante ayant eu connaissance du commandement de payer au plus tard le jour où elle a déclaré y former opposition, le 27 juillet 2023.

La recevabilité de la plainte en tant qu'elle vise la commination de faillite est ainsi douteuse.

3. Eût-elle été recevable que la plainte aurait dû être rejetée.

3.1 Un commandement de payer est un acte de poursuite qui doit faire l'objet d'une communication revêtant la forme qualifiée de la notification (art. 72 LP).

Cette notification consiste en la remise de l’acte en mains du poursuivi ou, en l’absence de ce dernier, en mains d’une des personnes de remplacement désignées par la loi et aux lieux prévus par la loi, au besoin au terme d’une recherche sérieuse du poursuivi ou, à défaut, d’une des personnes de remplacement (ATF 117 III 7, consid. 3b; Kren-Kostkiewicz, Zustellung von Betreibungsurkunden, in BlSchK 1996, p. 201 ss, 204; Donzallaz, La notification en droit interne suisse, Berne 2002, p. 212 s. n° 378 s.).

L'art. 65 LP dresse une liste des personnes qui sont réputées être les destinataires directs autorisés à recevoir des actes de poursuite dirigés contre les personnes morales ou les sociétés. Le but de cette disposition est, compte tenu des lourdes conséquences attachées à la notification d'un acte de poursuite, de garantir une notification effective à l'un ou l'autre des représentants autorisés afin qu'il puisse, par exemple pour le commandement de payer, examiner l'opportunité d'y former opposition en pleine connaissance de cause (ATF 118 III 10 consid. 3a; ATF 117 III 10 consid. 5a; ATF 116 III 8 consid. 1b).

S'agissant des sociétés anonymes, l'art. 65 al. 1 ch. 2 LP prescrit que les actes de poursuite doivent être notifiés à leur représentant, c'est-à-dire à un membre de l'administration, à un directeur ou à un fondé de procuration. Est déterminant à cet égard le fait que le représentant soit inscrit ès qualités au Registre du commerce, sans qu'il soit nécessaire qu'il dispose d'un pouvoir de signature individuel (Jaques, De la notification des actes de poursuite, in BlSchK 2011 pp. 177 ss., § 4.3).

A titre subsidiaire, soit lorsqu'aucun représentant de la personne morale au sens de l'art. 65 al. 1 LP ne peut être trouvé dans ses bureaux, l'acte de poursuite peut être notifié à un employé s'y trouvant (art. 65 al. 2 LP; ATF 117 III 10 consid. 5a). Par bureaux au sens de cette disposition, il faut entendre l'endroit où à tout le moins un représentant autorisé de la société accomplit régulièrement ses tâches pour le compte de la personne morale (ATF 88 III 12 consid. 2).

Lorsque la personne morale poursuivie n'a pas de bureaux ou que la notification intervient hors de ces bureaux mais que le représentant n'est pas trouvé à son domicile ou à l'endroit où il exerce habituellement sa profession, l'acte de poursuite peut être remis à une personne adulte de son ménage ou à un employé : l'art. 64 al. 1 LP contient en effet un principe général qui vient compléter l'art. 65 al. 1 LP (arrêt du Tribunal fédéral 5A_905/2016 du 30 mars 2017 consid. 3.3).

3.2 En l'espèce, il résulte du dossier que l'Office a tenté de notifier le commandement de payer au siège de la société sans succès, plusieurs passages ayant été effectués par des agents postaux et de l'Office. La société étant inconnue à l'adresse indiquée, l'Office a ensuite fait notifier le commandement de payer au domicile de son administrateur. L'acte a été réceptionné par la belle-sœur de ce dernier, dont il n'est pas contesté qu'il s'agit d'une adulte qui fait ménage commun avec lui. Partant, le commandement de payer a été valablement notifié à la plaignante le 21 juin 2023, de sorte que l'opposition formée le 27 juillet 2023 était tardive.

La plaignante ne fait enfin valoir aucun empêchement non fautif justifiant la restitution du délai d'opposition au sens de l'art. 33 al. 4 LP.

4. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

 

Déclare irrecevable la plainte formée le 14 septembre 2023 par A______ SA contre la décision de rejet d'opposition prononcée par l'Office cantonal des poursuites le 28 juillet 2023 dans la poursuite n° 2______.

Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la plainte formée le 14 septembre 2023 par A______ SA contre la commination de faillite du 8 août 2023 dans la poursuite n° 2______.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.