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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/3344/2022

DCSO/58/2023 du 16.02.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : lp.97.al1; lp.97.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3344/2022-CS DCSO/58/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 16 FEVRIER 2023

 

Plainte 17 LP (A/3344/2022-CS) formée en date du 10 octobre 2022 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Mathilde Ram-Zellweger, avocate.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______

c/o Me RAM-ZELLWEGER Mathilde

Etude ZELLWEGER

Route du Château 56

Case postale 21

2520 La Neuveville.

- B______

c/o Me ARPAGAUS Aurélie

REGO AVOCATS

Esplanade de Pont-Rouge 4

Case postale

1211 Genève 26.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Par ordonnance de séquestre du 5 septembre 2022, le Tribunal de première instance, faisant partiellement droit à une requête formée par B______, a ordonné le séquestre, à hauteur d'un montant de 442'354 fr. 20 plus intérêts au taux de 5% l'an à compter du 5 septembre 2022, de divers actifs considérés comme appartenant à A______, débiteur.

Le séquestre (n° 1______) a été exécuté le 5 septembre 2022 par l'Office cantonal des poursuites (office "leader"; ci-après : l'Office) et l'office des poursuites de Zürich 1 (office "délégué").

b. Le procès-verbal de séquestre a été établi le 26 septembre 2022 par l'Office et adressé le même jour au débiteur, qui l'a reçu le 28 septembre 2022.

Selon ce document, le séquestre a porté sur :

·         La quotité saisissable – arrêtée à toute somme excédant 6'785 fr. 65 par mois – du salaire versé au débiteur par son employeur, la société D______ SARL.

·         Les parts sociales de D______ SARL (représentant un capital social de 20'000 fr.).

·         Les actions de la société E______ AG, inscrite au Registre du commerce de Zoug, représentant un capital actions de 100'000 fr. libéré à hauteur de 50'000 fr.

·         D'éventuelles créances du débiteur à l'encontre des sociétés E______ AG et F______ GMBH, avec la précision que ce dernier, interpellé par l'Office, a indiqué ne détenir aucune créance contre lesdites sociétés au jour de l'exécution du séquestre.

·         Les immeubles immatriculés au Registre foncier de Genève sous feuillets 2______ et 3______ de la commune G______ [GE], correspondant à des parts de copropriété par étages conférant un droit d'usage exclusif sur un appartement et un emplacement de parking; la valeur de ces deux immeubles a été évaluée à 1'500'000 fr. par l'Office, étant précisé qu'ils sont grevés d'une cédule hypothécaire d'un montant de 1'260'000 fr.

·         D'éventuels actifs détenus par [la banque] H______ au nom des sociétés E______ AG et F______ GMBH, la banque dépositaire ayant toutefois indiqué qu'elle se déterminerait sur l'existence de tels actifs une fois le séquestre définitif.

B. a. Par acte adressé le 10 octobre 2022 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre le procès-verbal de séquestre, concluant à son annulation en tant qu'il était fondé sur une créance de 442'354 fr. 20 en capital, en tant qu'il avait porté sur le salaire qui lui était versé par son employeur et en tant que la quotité saisissable dudit salaire avait été fixée à toute somme excédant 6'785 fr. 65 par mois.

A l'appui de ses conclusions relatives au montant pour lequel le séquestre avait été exécuté, A______ a exposé s'être d'ores et déjà acquitté en faveur de la poursuivante de diverses sommes s'élevant à un total de 220'000 fr. Selon lui, l'Office aurait dû tenir compte de ces versements en les imputant sur le montant de 442'354 fr. 20 pour lequel le séquestre avait été ordonné, et donc en n'exécutant le séquestre que sur un montant d'environ 240'000 fr.

En relation avec le séquestre de son salaire et du calcul de la quotité saisissable, le plaignant a allégué (dans la partie "en fait" de ses écritures) que la valeur des actifs séquestrés était largement supérieure à la créance pour laquelle le séquestre devait être exécuté, les immeubles 2______ et 3______ de la commune G______ valant à eux seuls environ 2'200'000 fr.. Il n'a émis aucune critique sur le calcul de son minimum vital par l'Office et n'a produit aucune pièce à cet égard.

b. Par ordonnance du 13 octobre 2022, la Chambre de surveillance a rejeté la requête d'effet suspensif formulée à titre préalable par le plaignant.

c. Dans ses observations du 2 novembre 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte dans la mesure de sa recevabilité. Selon lui, la plainte était irrecevable en tant qu'elle était dirigée contre le montant pour lequel le séquestre avait été exécuté. Elle était mal fondée en tant que le plaignant faisait valoir que la valeur des actifs saisis excédait l'assiette du séquestre, dès lors que la saisie du salaire du débiteur ne portait que sur un faible montant et que les immeubles, d'une valeur estimée de 1'500'000 fr., faisaient l'objet de gages à hauteur de 1'260'000 fr.

d. Par détermination du 27 octobre 2022, B______ a conclu au rejet de la plainte "avec suite de frais et dépens". Seul le juge, et non l'Office, aurait pu tenir compte des versements invoqués par A______, au demeurant contestés. Ce dernier n'apportait du reste aucun élément de preuve en relation avec la valeur prétendument élevée des actifs séquestrés.

e. En l'absence de réplique de la part du plaignant, la cause a été gardée à juger le 21 novembre 2022.

 

EN DROIT

1. 1.1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.1.2 L'ordonnance de séquestre est rendue par le juge sur la base de la seule requête du créancier (art. 271 al. 1 et 272 al. 1 LP). Le juge doit notamment vérifier, au stade de la vraisemblance, que la créance invoquée par le créancier existe, et quel est son montant (art. 272 al. 1 ch. 1 LP; Stoffel/Chabloz, in Voies d'exécution, 3ème édition, 2016, p. 249 n° 22). Le montant pour lequel le séquestre est autorisé doit figurer dans l'ordonnance de séquestre (art. 274 al. 2 ch. 2 LP; Stoffel/Chabloz, op. cit., p. 248 n° 13).

L'ordonnance autorisant le séquestre ne peut être contestée que par la voie de l'opposition (art. 278 al. 1 LP), dont le but est de permettre au juge de vérifier le bien-fondé du séquestre après avoir entendu le débiteur. De son côté, l'office des poursuites exécute l'ordonnance de séquestre (art. 275 LP), ses décisions en la matière devant être entreprises par la voie de la plainte (art. 17 LP) auprès de l'autorité de surveillance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_731/2016 du 20 décembre 2016 consid. 3, publié in SJ 2017 I p. 325; arrêt 5A_150/2015 du 4 juin 2015 consid. 5.2.3, publié in SJ 2016 I p. 138). Les compétences de l'office des poursuites et des autorités de surveillance sont limitées aux mesures proprement dites d'exécution du séquestre, ainsi qu'au contrôle de la régularité formelle de l'ordonnance de séquestre. A cet égard, l'office vérifiera que toutes les mentions prescrites par l'art. 274 al. 2 ch. 1 à 4 LP figurent dans l'ordonnance ou encore que la désignation des biens y soit suffisamment précise pour permettre une exécution sans risque de confusion ou d'équivoque. Ce pouvoir d'examen entre par définition dans les attributions d'un organe d'exécution qui ne peut donner suite à un ordre lacunaire, imprécis ou entaché d'un défaut qui le rend inopérant, ni exécuter un séquestre nul (ATF 142 III 291 consid. 2.1 et les références). Tel pourrait être le cas si l'ordonnance ne désigne pas les biens à séquestrer avec suffisamment de précision ou qu'elle ne contient pas toutes les informations requises par l'art. 274 LP. En revanche, l'office des poursuites est tenu d'obtempérer à une ordonnance de séquestre régulière en la forme. Il n'a pas la compétence d'en examiner le bien-fondé, notamment de vérifier les conditions justifiant l'octroi de la mesure (Reiser, in BSK SchKG II, 3ème édition, 2021, N 11 ad art. 275 LP et arrêts cités).

1.1.3 L'autorité de surveillance constate les faits d'office, apprécie librement les preuves et ne peut, sous réserve de l'art. 22 LP, aller au-delà des conclusions des parties (art. 20a al. 2 ch. 2 et 3 LP). Celles-ci ont néanmoins une obligation de collaborer (art. 20a al. 2 ch. 2 2ème phrase LP), qui implique en particulier qu'elles décrivent l'état de fait auquel elles se réfèrent et produisent les moyens de preuve dont elles disposent (ATF 123 III 328 consid. 3). Il en est ainsi, notamment, lorsque la partie saisit dans son propre intérêt l'autorité de surveillance ou qu'il s'agit de circonstances qu'elle est le mieux à même de connaître ou qui touchent à sa situation personnelle, surtout lorsqu'elle sort de l'ordinaire (arrêts du Tribunal fédéral 5A_898/2016 du 27 janvier 2017 consid. 5.2; 5A_253/2015 du 9 juin 2015 consid. 4.1). A défaut de collaboration, l'autorité de surveillance n'a pas à établir des faits qui ne résultent pas du dossier (ATF 123 III 328 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_898/2016 précité consid. 5.2).

1.2.1 La plainte, qui respecte les formes exigées par la loi, a en l'espèce été formée en temps utile contre une mesure de l'Office – le procès-verbal de séquestre – susceptible d'être contestée par cette voie et émane d'une partie à la procédure de poursuite potentiellement touchée dans ses intérêts juridiquement protégés. Elle est donc en principe recevable.

1.2.2 Le plaignant invoque deux arguments.

Le premier a trait au montant pour lequel le séquestre a été ordonné. Or, comme exposé ci-dessus, la vérification de l'existence et du montant de la créance invoquée par la créancière incombait exclusivement au Tribunal, dont la décision à cet égard devait figurer dans l'ordonnance de séquestre, laquelle ne pouvait être contestée que par la voie de l'opposition de l'art. 278 al. 1 LP. Chargé d'exécuter cette ordonnance, l'Office se devait certes d'en vérifier la régularité formelle – que la plaignante à juste titre ne remet pas en cause – mais était lié par son contenu. Il ne pouvait donc en aucun cas modifier le montant pour lequel le séquestre avait été autorisé. Le grief est ainsi irrecevable dans la présente procédure de plainte.

Le second argument invoqué par le plaignant a trait à la valeur des actifs séquestrés, très supérieure selon lui au montant pour lequel le séquestre a été ordonné. Le plaignant se plaint en d'autres termes d'une violation de l'art. 97 al. 2 LP, applicable par analogie au séquestre en vertu de l'art. 275 LP. Ce grief concernant l'exécution du séquestre, il est recevable et sera examiné sous consid. 2 ci-dessous.

2. 2.1 Selon les art. 97 al. 1 et 275 LP, l'office des poursuites appelé à exécuter un séquestre ne doit le faire porter que sur les biens nécessaires pour satisfaire, en capital, intérêts et frais, les créanciers séquestrants. Afin de respecter cette injonction, l'office doit d'une part estimer la valeur des actifs séquestrés (art. 97 al. 1 LP) et la mentionner au procès-verbal de séquestre (art. 276 al. 1 LP). Il doit d'autre part fixer l'assiette du séquestre, soit le montant nécessaire et suffisant pour satisfaire les créancier séquestrants, compte tenu de la durée probable et du coût de la procédure d'exécution forcée.

L'art. 95 al. 1 LP, qui règle l'ordre dans lequel les avoirs d'un débiteur doivent être saisis, est applicable par analogie à l'exécution du séquestre (art. 275 LP).

2.2 Le plaignant fait valoir en l'espèce qu'il serait "patent" que la valeur des avoirs séquestrés excéderait "très largement" le montant pour lequel le séquestre a été ordonné. Il invoque en particulier, sans produire aucune pièce à cet égard, que l'immeuble séquestré aurait à lui seul une valeur de 2'200'000 fr.

Il résulte du procès-verbal de séquestre contesté que l'Office a évalué la valeur de l'immeuble séquestré à 1'500'000 fr. et a tenu compte de l'existence d'un droit de gage immobilier à hauteur de 1'260'000 fr., de telle sorte que la valeur nette de l'actif séquestré n'était que de 240'000 fr. Au-delà d'une simple pétition de principe, le plaignant n'explique en rien en quoi cette appréciation serait erronée, ni pour quelle raison sa propre évaluation, qui ne tient pas compte des droits de gage grevant l'immeuble, devrait être privilégiée. Sa critique doit donc être écartée sur ce point.

Il résulte de même du procès-verbal de séquestre que le plaignant a indiqué à l'Office que son salaire net s'élevait en moyenne à environ 7'050 fr. par mois. Dans la mesure où la quotité saisissable a été fixée à toute somme excédant 6'785 fr. 65 par mois, et que la durée du séquestre est limitée à un an (art. 93 al. 2 LP), le produit de réalisation de cet actif ne devrait pas excéder 4'000 fr.

Le plaignant a par ailleurs indiqué qu'il ne détenait aucune créance à l'encontre des sociétés E______ SA et F______ GMBH au jour de l'exécution du séquestre, de telle sorte que, jusqu'à réception d'une détermination précise de la part de ces deux personnes morales sur la portée du séquestre, c'est à juste titre que l'Office n'a pas tenu compte de ces actifs dans le calcul de la couverture du montant séquestré.

Le même raisonnement s'applique aux éventuels actifs séquestrés en mains de H______, cette banque ne s'étant pas encore déterminée sur leur existence et leur montant.

S'il est vrai enfin que l'Office n'a pas expressément procédé à l'estimation de la valeur des parts sociales de la société F______ GMBH ni de celle des actions de la société E______ SA, le plaignant n'y consacre aucun développement, n'expliquant pas quelle serait leur activité et ne produisant aucune pièce comptable. Pour autant qu'il y ait lieu de retenir une valeur de réalisation, on voit mal dans ces conditions comment elle pourrait excéder la valeur nominale de ces titres de participation, soit 20'000 fr. pour les parts de F______ GMBH et 50'000 fr. pour les actions de E______ SA (capital actions de 100'000 fr. libéré à hauteur de 50%).

En l'état des informations en possession de l'Office au moment de l'établissement du procès-verbal de séquestre, la valeur des actifs séquestrés n'excédait ainsi pas 314'000 fr. (240'000 fr. + 4'000 fr. + 20'000 fr. + 50'000 fr.), soit un montant inférieur à l'assiette du séquestre.

Le grief est ainsi mal fondé.

3. La formulation des conclusions du plaignant pourrait laisser entendre que celui-ci contesterait la manière dont la quotité saisissable de son salaire a été calculée. Quand bien même tel serait le cas, force serait de constater que le plaignant n'expose nullement en quoi ses revenus auraient été mal établis ou que ses charges auraient été sous-estimées, ni ne produit aucune pièce à cet égard.

Il n'y a donc pas lieu d'entrer en matière sur ce point.

La plainte doit donc être rejetée.

4. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucun dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 10 octobre 2022 par A______ contre le procès-verbal de séquestre n° 1______ du 26 septembre 2022.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Monsieur Luca MINOTTI et
Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.