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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2310/2024

JTAPI/1208/2024 du 10.12.2024 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : TAXATION D'OFFICE;DÉCISION SUR OPPOSITION
Normes : LIFD.132.al3; LPFisc.39.al2
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2310/2024 ICCIFD

JTAPI/1208/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 9 décembre 2024

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Me Vincent SOLARI, avocat, avec élection de domicile

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne la taxation 2022 de A______ SA (ci-après : la société).

2.             La contribuable n’a pas retourné sa déclaration fiscale dans le délai prescrit, quoiqu’ayant été sommée de le faire par l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC‑GE). Celle-ci l’a ainsi taxée d’office, par bordereaux du 1er février 2024. Ce faisant, elle a fixé son capital et son bénéfice imposables à respectivement CHF 9'579'166.- et CHF 390'625.-.

3.             La société a élevé réclamation par lettre du 11 mars 2024. Les montants retenus excédaient largement les bénéfices qu’elle avait réalisés au cours de l’exercice 2022, ainsi que la valeur de ses actifs au cours de cette même période.

4.             Le 13 mars 2024, l’AFC-GE a invité la contribuable à lui transmettre copie de ses comptes au 31 décembre 2022.

5.             Le 12 avril 2024, la société a sollicité une prolongation de délai pour compléter sa réclamation et a transmis un relevé fiscal pour l’année 2022, précisant qu’il s’agissait de son seul actif et de ses seuls revenus.

6.             Par pli du 24 avril 2024, l’AFC-GE, constatant que les renseignements demandés dans sa lettre du 13 mars précédent ne lui avaient toujours pas été communiqués, a imparti à la contribuable un ultime délai au 17 mai 2024 pour les lui fournir.

7.             Par décisions du 4 juin 2024, l’AFC-GE a rejeté la réclamation, au motif que la société n’avait pas donné suite à ses demandes de renseignements.

8.             Par acte du 5 juillet 2024, la société, sous la plume de son administrateur, a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l’encontre des décisions susmentionnées en concluant à leur annulation.

Elle avait répondu à la demande de renseignements de l’AFC-GE, puisque le 12 avril 2024, elle lui avait transmis le relevé de son compte bancaire en exposant qu’il constituait son seul actif et qu’il faisait apparaître ses seuls revenus fiscalement taxables. Elle devait dès lors être imposée sur la base de ce document, qui faisait état d’une fortune de CHF 7'704'897.- et d’un revenu de CHF 66'807.60.

9.             Par réponse du 28 août 2024, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Puisque la recourante avait violé son obligation d’assurer une taxation complète et exacte et qu’elle n’avait pas remis les moyens de preuve permettant de se prononcer sur le caractère manifestement inexact de ses taxations d’office, c’était à juste titre que sa réclamation avait été rejetée.

10.         La société n’a pas produit d’écriture de réplique.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             À teneur des art. 124 al. 2 et 125 LIFD, ainsi que 26 al. 2 et 29 al. 2 LPFisc, le contribuable doit remplir la déclaration d’impôt de manière conforme à la vérité et complète ; il doit la signer personnellement et la remettre à l’autorité fiscale compétente avec les annexes prescrites, dans le délai qui lui est imparti

Les personnes physiques dont le revenu provient d’une activité lucrative indépendante et les personnes morales doivent joindre à leur déclaration :

a.    les comptes annuels signés (bilan, compte de résultats) concernant la période fiscale, ou

b.    en cas de tenue d’une comptabilité simplifiée en vertu de l’art. 957 al. 2 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) : un relevé des recettes et des dépenses, de l’état de la fortune, ainsi que des prélèvements et apports privés concernant la période fiscale.

4.             L'art. 132 al. 3 LIFD dispose que le contribuable qui a été taxé d'office peut déposer une réclamation contre cette taxation uniquement pour le motif qu'elle est manifestement inexacte. La réclamation doit être motivée et indiquer, le cas échéant, les moyens de preuve. L’art. 39 al. 2 LPFisc comporte une teneur similaire.

5.             Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_544/2018 du 21 décembre 2018 consid. 4.1.1 et les réf.), le contribuable qui forme une réclamation contre une taxation d'office doit se prêter d'entrée de cause à la collaboration qu'il a négligée jusqu'alors et communiquer tous les renseignements utiles à sa taxation. Il ne peut se limiter à une contestation globale ou à une contestation partielle de positions uniques, car cela ne permet pas d'examiner d'emblée si la taxation d'office est manifestement inexacte. Il doit bien plus exposer en quoi celle-ci ne correspond pas à la situation réelle et mentionner les moyens de preuve y relatifs. Ce n'est qu'ainsi que toute incertitude quant à l'état des faits peut être écartée. Cette preuve doit en outre être complète, de simples preuves partielles ne suffisant pas. Il s'agit là d'une exigence formelle, dont la violation entraîne l'irrecevabilité de la réclamation.

Si le contribuable a été taxé d’office parce qu’il n’a pas déposé de déclaration d’impôt malgré sommation, il satisfait en règle générale aux exigences formelles relatives à la motivation de la réclamation par le dépôt d’une déclaration d’impôt dûment remplie, ce à quoi le contribuable défaillant reste tenu dans la procédure de réclamation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_61/2021 du 22 décembre 2021 consid. 4.3).

6.             Lorsque l’art. 132 al. 3 2ème phr. LIFD parle d’« éventuels moyens de preuve », la loi ne vise ni la déclaration d’impôt, ni le bilan et le compte de résultat, car ceux-ci font de toute façon l’objet de l’obligation de collaborer. Il doit s’agir d’autres moyens de preuve susceptibles d’influencer le rapport litigieux. Il peut s’agir, par exemple, de la demande de procéder à une enquête comptable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2017 du 10 mai 2017 consid. 2.3.3 et les références citées).

7.             En l’espèce, ni durant la procédure de réclamation, ni devant le tribunal de céans, la recourante n’a accompli son obligation de collaboration qu’elle avait négligée avant d’être taxée d’office. En effet, elle n’a jamais déposé de déclaration fiscale. En outre, à aucun moment elle n’a transmis son bilan et son compte de résultat. Le relevé de compte qu’elle a remis le 12 avril 2024 ne répond même pas aux exigences d'une comptabilité simplifiée, dans la mesure où il ne comporte ni relevé des recettes et des dépenses, ni détail des prélèvements et apports privés.

Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que l’AFC-GE a rejeté la réclamation et maintenu les taxations d’office incriminées.

8.             En conséquence, le recours doit être rejeté.

9.             En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 5 juillet 2024 par A______ SA contre les décisions sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 4 juin 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Laetitia MEIER DROZ, présidente, Yuri KUDRYAVTSEV et Jean-Marc WASEM, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière