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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/6517/2017

CAPH/32/2024 du 28.03.2024 sur JTPH/344/2022 ( OO ) , PARTIELMNT CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6517/2017 CAPH/32/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU JEUDI 28 MARS 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié p.a Etude A______ sarl, ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 10 novembre 2022,

et

Monsieur B______, domicilié p.a. ______, intimé, comparant par Me C______, avocat.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/344/2022 du 10 novembre 2022, le Tribunal des prud'hommes a déclaré recevable la demande formée le 6 juin 2017 par A______ contre B______ (ch. 1) et la modification de la demande formée par A______ le 9 février 2018 (ch. 2), déclaré irrecevables les modifications de la demande formées par A______ le 28 janvier 2021 (ch. 3) et son courrier du 14 novembre (recte: décembre 2021) (ch. 4). Il a déclaré recevable la demande reconventionnelle formée le 13 novembre 2017 par B______ contre A______ (ch. 5). Sur le fond, il a condamné B______ à verser à A______ la somme brute de 15'250 fr., avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015 (ch. 6), invité la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 7), condamné A______ à verser à B______ la somme nette de 2'190 fr., avec intérêts moratoires à 5% dès le 31 décembre 2015 (ch. 8), autorisé les parties à compenser leurs dettes avec leurs créances (ch. 9), débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 10). S'agissant des frais, le Tribunal a arrêté les frais (judiciaires) à 3'000 fr. et les a entièrement mis à charge de A______ (ch. 11), les a partiellement compensés avec l'avance de frais de 1'710 fr. versée par A______ et celle de 145 fr. versée par B______ (ch. 12), condamné A______ à verser 1'145 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 13), condamné A______ à verser 145 fr. à B______ (ch. 14), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 15) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 16).

B.            a. Par acte du 10 décembre 2022, A______ a déposé un appel contre le jugement. Il a conclu à la recevabilité de son appel (conclusion n°1), à la confirmation des chiffres 1, 2, 6, 7 et 15 du dispositif du jugement (2) et à l'annulation des chiffres 3, 4, 5, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14 et 16 (3). Préalablement, il a conclu à l'annulation de l'ordonnance du 7 février 2022 et a requis l'audition du témoin D______ (4); il a aussi conclu à enjoindre B______ à produire tous les time-sheets portant sur les services fournis à la mandante "E______" (5). Principalement, il conclut au paiement par B______ à A______ de 14'500 fr., avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015 (6), 11'781 fr. 25 avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2011 pour 13 jours de salaire/indemnité (10'210 fr. 40) et dès le 31 décembre 2015 pour 2 jours de salaire/indemnité (1'571 fr. 85) (7), 102'554 fr. 50 avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2014 (8), 4'850 fr. avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015, "sous réserve d'amplification en fonction de la teneur des documents dont la production est requise à titre préalable" (subsidiairement à 2'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015) (9), 40'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 10 février 2018 (10). Il a également conclu à l'irrecevabilité de l'action reconventionnelle de B______, alternativement à son déboutement, subsidiairement au constat que l'ordinateur [de marque] F______ a été acquis et utilisé comme outil de travail, enjoindre A______ à restituer cet ordinateur à B______ et à ordonner à ce dernier de le reprendre sans délai (11). Il a conclu à l'irrecevabilité des témoignages de G______, H______ et I______ (12), à la recevabilité de son courrier du 14 novembre (recte: décembre) 2021 au Tribunal des prud'hommes (13), au paiement par B______ à A______ de 1'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015 (14). Il a conclu au constat de la prescription des prétentions sur les faits antérieurs au 14 novembre 2012 (15), au constat que la chambre du Tribunal des prud'hommes ne respectait pas "dans la substance, les exigences d'une composition équilibrée entre juges employés et employeurs nécessaire à un procès équitable" (16). Il conclut enfin à la condamnation de B______ "en tous les dépens de la présente procédure, lesquels comprendront une indemnité équitable valant participation aux honoraires du conseil soussigné" (18).

b. Le 2 mars 2023, B______ a répondu à l'appel, a conclu à l'irrecevabilité des conclusions nouvelles 4, 5, 6, 7, 9, 14 et 15, à l'irrecevabilité des faits nouveaux présentés aux chiffres 4 à 111 de l'appel, à l'irrecevabilité des nouvelles réquisitions de preuve. Sur le fond, il a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation de l'arrêt attaqué, avec condamnation aux frais, ainsi qu'à une amende disciplinaire pour plaideur téméraire.

c. Le 3 avril 2023, A______ a répliqué et persisté dans ses conclusions du 10 décembre 2022. Au surplus, il a conclu à l'irrecevabilité de la réponse de B______ du 2 mars 2023 et à sa condamnation au paiement d'une amende disciplinaire. Il a également précisé sa conclusion n° 9 en réclamant le paiement "du montant de la commission selon la conclusion 9 de son mémoire d'appel pour le solde, à savoir la différence entre le montant de CHF 4'850 requis à titre principal, ou de CHF 2'000, requis à titre subsidiaire, et le montant de CHF 750 à confirmer (conclusion 2), plus intérêts moratoires de 5% l'an dès le 31 décembre 2015, cela sous réserve d'amplification en fonction de la teneur des documents dont la production est requise à titre préalable (time sheets du mandat E______)". Il a expliqué la structure de la partie "EN FAIT" de son mémoire d'appel.

d. Le 15 mai 2023, B______ a dupliqué et persisté dans ses conclusions.

e. Le 28 juillet 2023, A______ s'est adressé à la Présidence de la Cour de justice s'agissant de la composition de la chambre appelée à statuer dans la présente procédure, étant précisé que le nom du juge suppléant soussigné lui avait été communiqué par le greffe, les autres juges n'ayant pas encore été désignés.

f. Le 14 août 2023, A______ a complété son courrier précédent, en concluant notamment à l'irrecevabilité des écritures déposées par C______, conseil de B______, dès lors que ledit conseil était aussi juge suppléant à la Cour de justice.

g. Par décision ACJC/1080/2023, non contestée au Tribunal fédéral, du 23 août 2023, la délégation des Juges de la Cour de justice en matière de récusation a considéré que le courrier du 28 juillet 2023 était une demande de récusation conditionnelle, procédé qui n'était pas admissible. Elle a déclaré irrecevable la requête du 28 juillet 2023.

h. Le 31 août 2023, A______ a complété ses courriers des 28 juillet 2023 et 14 août 2023. Il considérait que C______, conseil de B______, devait être "qualifié juridiquement de juge suppléant prud'hommes". La pratique des présidents du Tribunal des prud'hommes devait être appliquée par analogie aux juges suppléants de la Cour de justice qui sont avocats, dans des litiges de droit du travail opposant des avocats.

i. Le 20 septembre 2023, A______ a écrit que son courrier du 31 août 2023 s'était croisé avec la décision du 23 août 2023 en matière de "révocation" (recte: récusation). La décision portait sur une conclusion qu'il n'avait jamais formulée. Le fait que le conseil de B______ soit aussi juge suppléant constituait un "élément devant être perçu comme susceptible d'affecter négativement la sérénité dans la prise de décision du juge suppléant" soussigné. Il n'y avait pas lieu de révoquer le juge soussigné, mais de conclure à "l'incompatibilité" de C______, conseil de B______ en raison de l'art. 10 LTPH.

j. Le 29 septembre 2023, B______ s'est déterminé sur la requête en incompatibilité. Ni le CPC, la LTPH, ni la LOJ, ni aucun autre texte fédéral ou cantonal ne prévoyait d'incompatibilité pour un juge suppléant en seconde instance cantonale de postuler en sa qualité d'avocat dans une procédure d'appel. Ensuite, la demande était tardive, car A______ connaissait depuis 2017 la qualité de juge suppléant du conseil de B______. Il concluait au déboutement des conclusions de A______.

k. Le 9 octobre 2023, A______ a persisté dans sa position: lorsque l'avocat C______ représentait l'avocat B______ (employeur) dans une procédure de droit du travail contre l'avocat A______ (employé), il y avait incompatibilité au sens de l'art. 10 LTPH, car l'avocat C______ assumait la fonction d'un juge suppléant agissant en cette capacité dans des litiges relevant de la juridiction des prud'hommes. Il n'avait appris la fonction de juge suppléant de C______ que le 28 juillet 2023, pendant les "vacances judiciaires". La fonction de juge suppléant de C______ n'apparaissait ni dans la réponse, ni dans la duplique déposée devant la Cour. De plus, la signature de C______ agissant au nom de B______ ne représentait pas un vice de forme qui pouvait être rectifié au sens de l'art. 132 CPC. Enfin, la violation du droit (à savoir la violation de l'art. 10 LTPH) ne saurait être réparée par le droit d'être entendu.

l. Le 16 octobre 2023, B______ a rappelé que son conseil exerçait la charge de juge suppléant depuis le 1er juin 1990.

m. Le 26 octobre 2023, A______ a considéré que les contestations de B______ étaient "en bloc" et "de manière tardive". L'incompatibilité au sens de l'art. 10 LTPH devait être constatée d'office. C______ n'avait utilisé son papier à lettre avec en-tête mentionnant sa qualité d'avocat et juge suppléant qu'à partir du 29 septembre 2023; tel n'avait pas été le cas lors de la réponse et de la duplique. Ensuite, ce même papier à lettres ("C______ Avocat Juge suppléant à la Cour de justice") avait été utilisé en 2017 devant le "Tribunal de première instance"; en 2017, le site Internet de C______ mentionnait une qualité de juge suppléant à la Chambre administrative. Son site Internet induisait en erreur le public, car il faisait croire que C______ restait exclusivement affecté aux Chambre administrative et Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice. C______ avait délibérément passé sous silence ses activités de juge suppléant à la Chambre des prud'hommes; il aurait dû se faire remplacer par un autre avocat avant le dépôt de ses écritures d'appel.

n. Le 9 novembre 2023, B______ a persisté et contesté la position de sa partie adverse.

o. Le 6 décembre 2023, la cause a été gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants résultent de la procédure:

a. Le 24 juin 2010 (recte: 2011), l'avocat B______ a engagé l'avocat A______ comme collaborateur à plein temps ("à cet égard, [vous] aurez la responsabilité de la conduite des dossiers qui vous seront confiés", art. 1), à partir du 8 août 2011 (art. 2). La rémunération initiale était fixée à 14'500 fr. bruts par mois, payable 13 fois par an (art. 3). A______ avait droit à 4 semaines de vacances, à prendre d'entente avec B______, en principe à l'intérieur des périodes de "féries scolaires" (art. 5). L'art. 6 portait sur les "occupations accessoires" et avait la teneur suivante: "comme convenu, vous consacrerez pour l'instant l'intégralité de votre temps de travail au traitement des dossiers de l'Etude. Dans le cas où un mandant vous était confié pour votre compte propre, vous veillerez à consulter le soussigné préalablement à toute acceptation, notamment au regard de possibles conflits d'intérêts. En cas d'accord quant au traitement d'un dossier pour compte propre, il est convenu une rétrocession en faveur de l'Etude, à hauteur de 50% du chiffre d'affaires brut que vous aurez ainsi réalisé".

b. Le 25 novembre 2013, D______, in-house counsel de l'entreprise canadienne J______ (ci-après: "J______"), a écrit à Me K______, avocat au sein de la même étude que les parties, que son nom et celui de son étude lui avaient été recommandés par un tiers: il avait besoin d'assistance pour une transaction commerciale en droit suisse; divers échanges de courriels et un entretien téléphonique ont suivi. Le 27 novembre 2013, Me K______ a écrit un courriel à B______, avec copie à A______ au sujet d'une nouvelle affaire. Il annonçait qu'il aurait un premier contact avec M. D______, puis "vous prendrez le relais dès lors que cela sort de mes compétences".

c. Le 9 décembre 2013, sur papier à en-tête de l'étude, B______ et A______ ont signé une lettre d'engagement destinée à D______, de l'entreprise "J______". La première page mentionne qu'elle contient les termes auxquels l'étude d'avocats L______ basée à Genève agira pour elle ("this letters sets out the terms on which the Geneva based law firm L______ Avocats ("L______") will act for you"); le chiffre 1, dont le titre est "L______'s Client", mentionne que "J______" sera la cliente de L______. Le chiffre 3 consacré au personnel engagé mentionnait B______ comme associé, A______ comme collaborateur senior, M______ comme collaborateur junior et des stagiaires non désignés nommément, avec le taux horaire hors TVA.

d. Le 1er décembre 2014, B______ a payé 2'199 fr. [au magasin] N______ pour l'acquisition d'un ordinateur [de marque] F______ destiné à A______. Un accès VPN pour se connecter à l'Etude y a été installé. Les parties divergent sur l'utilisation concrète de cet ordinateurs.

e. Le 27 octobre 2015, B______ a mis fin aux rapports de travail de A______ avec effet au 31 décembre 2015. Cette résiliation par l'employeur correspondait aussi au souhait du travailleur.

f. Par courriel du 30 décembre 2015, A______ s'est adressé à B______ au sujet de divers points en lien avec la fin des rapports de travail, à savoir le paiement de 10 jours de vacances, le paiement du 13ème salaire, la carte AVS et les ordinateurs. A ce sujet, il était disposé à reprendre l'ordinateur F______ à un prix actuel occasion raisonnable à discuter; il en était de même pour le petit ordinateur [de marque] O______ dans son ancien bureau.

g. Par courrier du 19 janvier 2016, A______ a notamment demandé à B______ de lui verser le 13e salaire 2015, ainsi que les deux jours de vacances non pris en 2015.

h. Les certificats de salaire mentionnaient le salaire annuel brut suivant: 78'541 fr. pour 2011 (août à décembre), 188'500 fr. pour 2012, 188'500 fr. pour 2013, 198'500 fr. pour 2014, 174'000 fr. pour 2015.

i. B______ a obtenu son brevet d'avocat en 1985 (fait notoire selon l'art. 151 CPC; source: https://odage.ch/fr/annuaire-des-membres/B______ [consulté le 13 février 2024]). Q______, greffier d'audience au Tribunal des prud'hommes, a obtenu son brevet d'avocat en 2015 (fait: notoire selon l'art. 151 CPC; source: https://odage.ch/fr/annuaire-des-membres/Q______).

D.           a. Le 21 mars 2017, A______ a déposé une requête de conciliation contre B______, R______ et K______.

b. Vu l'échec de la conciliation, l'autorisation de procéder a été délivrée le 2 juin 2017.

c. Le 6 juin 2017, A______ a déposé sa demande au fond contre B______, R______ et K______. Il concluait préalablement à ce que les notes d'honoraires adressées à la mandante "E______" soient produites, principalement au paiement de 14'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015, 11'781 fr. 25 avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2011, respectivement dès le 31 décembre 2015, 102'554 fr. 50 avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2014, 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015, "sous réserve d'amplification en fonction de la teneur des documents dont la production est requise", à lui "réserver […] la faculté d'amplifier le montant de sa demande". Les mêmes conclusions étaient prises à titre subsidiaire contre B______ seul.

d. Le 13 novembre 2017, B______ a répondu à la demande. Il a simultanément formé des conclusions reconventionnelles contre A______ pour 2'199 fr. et 12'169 fr. 10, avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015.

e. Lors de l'audience de débats d'instruction du 3 juillet 2018, le Tribunal a limité la procédure à la question de la légitimation passive de R______ et K______.

f. Lors de l'audience du 31 octobre 2018, toutes les parties ont confirmé leurs allégués concernant la légitimation (ou l'absence de légitimation) passive de R______ et K______. Les plaidoiries finales orales ont ensuite eu lieu sur cette question.

g. Par jugement JTPH/409/2018 du 21 décembre 2018, le Tribunal des prud'hommes a déclaré irrecevables les écritures et pièces déposées par A______ les 14 juin, 2 et 3 juillet 2018 et l'a débouté de ses conclusions en tant qu'elles étaient dirigées contre R______ et K______.

h. Par arrêt CAPH/209/2019 du 12 décembre 2019, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, l'appel de A______ contre le jugement du 21 décembre 2018.

i. Par ordonnance OTPH/823/2020 du 28 mai 2020, le Tribunal a constaté que l'arrêt de la Cour de justice précité était entré en force de chose jugée. Il a ensuite imparti un délai aux parties pour récapituler leurs conclusions et moyens de preuve.

j. Le 12 juin 2020, B______ a récapitulé ses conclusions et ses moyens de preuve.

k. Par courrier daté du 3 juin 2020, mais reçu le 16 juin 2020, A______ a souhaité que le Tribunal informe les parties sur la suite de la procédure.

l. Par courrier daté du 5 juin 2020, mais expédié le 17 juin 2020 et reçu le 18 juin 2020, A______ a écrit que son courrier s'était croisé avec l'ordonnance du 28 mai 2020 et qu'il se prononcerait d'ici au 22 juin 2020.

m. Par courrier daté des "11/19" juin 2020, mais expédié le 19 juin 2020 et reçu le 22 juin 2020, A______ a "persist[é] entièrement dans ses conclusions selon mémoires du 6 juin 2017 et 9 février 2018". Il a ensuite énuméré les témoins qu'il souhaitait entendre.

n. Par ordonnance d'instruction et de preuves OTPH/1374/2020 du 1er septembre 2020, le Tribunal a notamment imparti un délai à B______ pour produire les notes d'honoraires adressées à la mandante "E______". Il a également ordonné l'audition des témoins suivants: M______ (situation en fin de procédure: entendu), D______ (annulation par le Tribunal après première convocation infructueuse, contestation par l'appelant/demandeur), S______ (entendue), I______ (entendue), T______ (annulation par le Tribunal), U______ (annulation par le Tribunal), V______ (renonciation par intimé/défendeur), W______ (entendue), G______ (entendue), X______ (renonciation par intimé/défendeur), H______ (entendu) et Y______ (renonciation par intimé/défendeur).

o. Le 17 septembre 2020, B______ a répondu au Tribunal que le dossier "E______" n'avait jamais été facturé, mais que le client avait versé, le 16 mars 2015, une provision de 1'500 fr.

p. Ce courrier a été transmis à A______ par pli recommandé du Tribunal du 22 septembre 2020.

q. Lors de l'audience de débats principaux du 28 janvier 2021, A______ a modifié ses conclusions et a conclu au versement de 4'875 fr. avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015 en lien avec le dossier "E______". Dans son jugement du 10 novembre 2022, le Tribunal a déclaré cette modification de demande irrecevable.

r. Lors de l'audience de débats principaux du 19 avril 2021, le Tribunal a procédé à l'interrogatoire des parties (qui ont persisté dans leurs allégués) et a entendu la témoin S______.

s. Par courrier du 14 novembre (recte: décembre) 2021, A______ a écrit au Tribunal pour revenir sur la chronologie de la procédure. Ce courrier a été déclaré irrecevable dans le jugement du 10 novembre 2022.

t. Lors de l'audience du 7 février 2022, le Tribunal a entendu le témoin M______. L'ordonnance de preuves du 1er septembre 2020 a été modifiée dès lors qu'il a été renoncé à l'audition du témoin D______, qui – domicilié à Z______ (Canada) – avait été convoqué ce jour-là par l'intermédiaire du demandeur, mais ne s'était pas présenté.

u. Lors de l'audience du 22 février 2022, le Tribunal a entendu la témoin I______. A l'issue de l'audience, l'ordonnance de preuves du 1er septembre 2020 a été modifiée dès lors qu'il a été renoncé à l'audition des témoins T______ et U______.

v. Par courrier du 23 février 2022, B______ a renoncé à l'audition des témoins V______, X______ et Y______.

w. Lors de l'audience du 1er mars 2022, le Tribunal a entendu le témoin G______.

x. Lors de l'audience du 11 mai 2022, le Tribunal a entendu la témoin W______ et le témoin H______. Les plaidoiries finales orales ont eu lieu à la fin de cette audience.

EN DROIT

1.             1.1 L’appel est dirigé contre une décision finale de première instance rendue dans le cadre d’un litige portant sur une valeur litigieuse de plus de 10'000 fr. au dernier état des conclusions de première instance (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

Il a été déposé dans le délai de 30 jours à compter de la notification de la décision et respecte, au surplus, la forme prescrite (art. 130, 131, 142, 143 et 311 al. 1 CPC).

L’appel est par conséquent recevable de ce point de vue.

1.2 La procédure ordinaire s’applique aux affaires patrimoniales dont la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (art. 219 CPC, art. 243 al. 1 a contrario CPC).

La cause est soumise aux maximes des débats (art. 55 al. 1 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC). La Cour applique le droit d’office (art. 57 CPC).

2.             La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d’examen (art. 310 CPC). L'instance d'appel ne doit cependant pas traiter comme une juridiction de première instance toutes les questions de fait et de droit qui se posent, lorsque les parties n'en font plus mention (ATF 142 III 413, 417 consid. 2.2.4).

2.1 En l'espèce, l'appel contient une partie "EN FAIT", dans laquelle l'appelant résume les faits qu'il estime pertinents pour la résolution du litige. Même si, malgré les explications de l'appelant/demandeur, sa compréhension n'est pas aisée, la partie "EN FAIT" permet de comprendre que l'appelant/demandeur formule un certain nombre de critiques à la suite de l'établissement des faits par le Tribunal. Concrètement, ces critiques ne seront toutefois reprises que lorsqu'elles sont clairement compréhensibles et que les passages du jugement sont critiqués de manière limpide. A contrario, il n'y a pas lieu de s'écarter des faits établis par le premier juge, en l'absence de grief clair. Les faits ont ainsi été repris ci-dessus et seront aussi récapitulés ci-dessous, dans la mesure utile à la résolution du litige (voir aussi CAPH/117/2023 du 6 novembre 2023, consid. 2). Sous réserve de ce qui précède, le mémoire d'appel sera déclaré recevable.

2.2 L'appelant/demandeur conteste, dans sa réplique, la recevabilité du mémoire de réponse de l'intimé/défendeur du 2 mars 2023. Il serait "en partie incompréhensible, sans structure intelligible et incomplet; pour le reste, cette écriture est truffée de contre-vérités, d'éléments inconvenants et attentatoires à l'honneur", ce qui justifierait une amende selon l'art. 128 CPC.

En l'espèce, le mémoire de réponse de l'intimé/défendeur est parfaitement recevable quant à sa forme. Il contient en effet des conclusions (I.), un préambule (II.), un chapitre consacré aux faits (III.), qui conteste en réalité la recevabilité de la partie "EN FAIT" de l'appel, un chapitre concernant la recevabilité de l'appel (IV.), puis la réponse aux griefs de l'appel (V.), chapitre qui reprend la structure du mémoire d'appel. Dès lors que la structure du mémoire de réponse est largement dépendante du mémoire d'appel, il n'y a pas de problème de compréhension ou de structure. Le mémoire de réponse est donc recevable. S'agissant de son contenu, il sera repris ci-dessous, tout comme les griefs de l'appelant/demandeur contre le jugement du Tribunal.

L'établissement des faits par l'appelant/demandeur ne saurait donc être considéré comme "intégralement admis" par l'intimé/défendeur. Autrement dit, lorsqu'un appelant présente une partie "EN FAIT" dans un appel comprenant un texte de plus d'une trentaine de pages composée de 111 allégués, dont certains de plus d'une quinzaine de lignes (par exemple: §8, 10, 40, 48, 69), d'une vingtaine de lignes (§43, 50, 55, 61) ou même de plus d'une trentaine de lignes (§36) et que l'intimé/défendeur se réfère au jugement attaqué, la Cour ne saurait considérer que l'absence de détermination détaillée sur chaque paragraphe de l'appelant vaut acquiescement à sa présentation des faits.

2.3 L'appelant/demandeur conclut au paiement de 14'500 fr avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015 (conclusion n° 6). Cette somme correspond à son 13ème salaire pour l'année 2015, prétention à laquelle le Tribunal a fait droit (JTPH p. 22-23, §7). Dès lors que l'intimé/défendeur n'a pas déposé d'appel joint (art. 313 CPC) et que l'appelant/demandeur a conclu à la confirmation du chiffre 6 du jugement du Tribunal, il n'y a pas lieu d'examiner cette prétention qui est entrée en force.

2.4 Selon l'art. 128 al. 1 CPC, quiconque, au cours de la procédure devant le tribunal, enfreint les convenances ou perturbe le déroulement de la procédure est puni d’un blâme ou d’une amende disciplinaire de 1000 francs au plus. Le tribunal peut, en outre, ordonner l’expulsion de la personne concernée de l’audience.

Selon l'art. 128 al. 3 CPC, la partie ou son représentant qui usent de mauvaise foi ou de procédés téméraires sont punis d’une amende disciplinaire de 2000 francs au plus; l’amende est de 5000 francs au plus en cas de récidive.

La jurisprudence est sévère avec l'application de l'art. 128 al. 3 CPC. Autrement dit, ce n'est que rarement qu'une amende disciplinaire peut être prononcée (voir par exemple CAPH/27/2023 du 7 mars 2023, consid. 8; CAPH/16/2023 du 14 février 2023, consid. 2; CAPH/115/2022 du 27 juillet 2022, consid. 4).

En l'espèce, la Cour considère que, nonobstant la multiplicité des écritures des parties et les reproches réciproques de propos attentatoires à l'honneur, aucune amende disciplinaire au sens de l'art. 128 CPC ne doit être prononcée contre aucune des parties.

3.             Le premier grief de l'appelant porte sur la capacité de postuler en appel de C______, avocat de l'intimé/défendeur.

3.1 En premier lieu, il convient de confirmer la compétence de la Cour pour statuer à ce sujet.

En procédure civile, la décision sur la capacité de postuler de l'avocat vise à garantir la bonne marche du procès. Elle entre donc dans la catégorie des décisions relatives à la conduite du procès, au sens de l'art. 124 al. 1 CPC. Pour l'acte introductif d'instance, la capacité de postuler est en outre une condition de recevabilité de la demande (art. 59 al. 1 CPC). Partant, si la capacité de postuler est déniée à l'avocat, un délai doit être fixé à la partie concernée pour remédier à l'irrégularité (art. 132 CPC par analogie; arrêt TF 4A_87/2012 du 10 avril 2012 consid. 3.2.3). Il s'ensuit que, dans une procédure pendante, l'autorité qui doit statuer sur la capacité de postuler de l'avocat est le tribunal compétent sur le fond de la cause ou, sur délégation, un membre de ce même tribunal (art. 124 al. 2 CPC), à l'exclusion de l'autorité de surveillance (ATF 147 III 351, 356 consid. 6.3).

La Cour est par conséquent compétente pour statuer sur la capacité de postuler de C______.

3.2 En deuxième lieu, il faut relever que la demande de l'appelant est tardive. En effet, elle n'a eu lieu qu'à partir de son courrier du 14 août 2023, alors que l'échange d'écritures d'appel sur le fond du dossier était terminé. De plus, l'appelant connaissait la qualité de juge suppléant de C______ depuis 2017 en tout cas; il tente d'expliquer que la fonction de juge suppléant à la Cour ne précisait pas qu'il pouvait être attribué à la Chambre des prud'hommes de la Cour civile. Depuis la création de la Cour unique, au 1er janvier 2011, les juges élus à la Cour de justice, qu'il s'agisse des magistrats titulaires ou suppléants, peuvent siéger aussi bien en matière civile que pénale ou administrative (art. 117 et 118 LOJ).

3.3 A titre subsidiaire, le grief de l'appelant aurait aussi dû être rejeté.

3.3.1 Selon l'art. 10 LTPH, un salarié et son employeur ne peuvent siéger ensemble dans le même groupe de prud’hommes (al. 1). Un juge prud’homme ne peut ni représenter, ni assister une partie en justice lorsque la cause est portée devant son propre groupe professionnel (al. 2). Les fonctions de juge prud’homme, de juge conciliateur et de juge conciliateur-assesseur sont incompatibles (al. 3).

Selon l'art. 123 LOJ, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2023, la Chambre des prud’hommes siège dans la composition d’un juge, qui la préside, d’un juge prud’homme employeur et d’un juge prud’homme salarié (al. 1). Lorsqu’une demande est fondée sur la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes, du 24 mars 1995 (LEg; 151.1), la Chambre des prud’hommes comprend au moins une personne de chaque sexe (al. 2). Lorsqu’elle connaît d’un appel ou d’un recours contre une décision du Tribunal des prud’hommes dans sa composition prévue à l’article 12, alinéa 5, LTPH, la Chambre des prud’hommes siège dans la composition d’un juge, qui la préside, de 2 juges prud’hommes employeurs et de 2 juges prud’hommes salariés (al. 3).

Selon l'art. 123 LOJ, en vigueur dès le 1er janvier 2024, à la suite de la loi 13160 adoptée par le Grand Conseil le 3 novembre 2022 (ROLG 2022 p. 839-846), la chambre des prud’hommes siège dans la composition d’un juge, qui la préside, d’un juge assesseur représentant les employeurs et d’un juge assesseur représentant les salariés (al. 1). Lorsqu’une demande est fondée sur la LEg, la Chambre des prud’hommes comprend au moins une personne de chaque sexe (al. 2). Un salarié et son employeur ne peuvent siéger ensemble (al. 3).

3.3.2 En l'espèce, il n'y a aucune base légale formelle qui limiterait la représentation par un avocat devant la Cour de justice. L'art. 10 LTPH, invoqué par l'appelant, concerne uniquement le Tribunal des prud'hommes, à savoir la juridiction de première instance. De plus, l'art 123 LOJ, ni dans sa version valable jusqu'au 31 décembre 2023, ni dans sa version applicable dès le 1er janvier 2024, ne prévoit qu'il y aurait des groupes de prud'hommes à la Cour de justice.

En réalité, sous le grief d'une "incompatibilité" au sens de l'art. 10 LTPH, l'appelant remet en cause le principe même des juges suppléants et en particulier la possibilité pour les avocats d'en faire partie.

Tout d'abord, l'appelant n'allègue aucune critique concrète contre le conseil de l'intimé/défendeur, C______. D'ailleurs, ce dernier n'a adopté aucun comportement qui conduirait à penser que son activité accessoire de juge suppléant aurait une influence sur le sort de la présente procédure. Elle est même tellement en retrait que l'appelant lui a (aussi) reproché d'avoir caché, dans la réponse et la duplique, sa fonction de juge suppléant. Autrement dit, jusqu'à ses recherches sur la récusation du président soussigné, l'appelant n'a nullement constaté que C______ se serait prévalu de sa fonction de juge suppléant dans la procédure.

Malgré le nombre de courriers adressés à la Cour par l'appelant au sujet de la qualité de juge suppléant du conseil de sa partie adverse, il n'y a pas davantage, à partir du 14 août 2023, de reproche concret formulé contre C______.

L'appelant conteste donc en réalité une modalité de l'organisation judiciaire cantonale genevoise qui prévoit que les juridictions comprennent des magistrats titulaires et des magistrats suppléants (non professionnels).

Or, dans l'ATF 139 I 121, le Tribunal fédéral a confirmé, sous l'angle de la récusation de tous les membres d'un tribunal, la constitutionnalité de l'exercice d'une fonction de juge suppléant par un avocat: Le fait qu'un représentant d'une partie dans d'autres procédures exerce une fonction judiciaire accessoire dans le tribunal n'est pas de nature à faire naître un doute quant à l'impartialité des membres du tribunal en général. S'il n'y a pas d'interdiction pour les juges suppléants de comparaître en qualité de représentant d'une partie, il doit exister, outre les aspects extérieurs de nature fonctionnelle et organisationnelle, des circonstances qui peuvent fonder une apparence de prévention et un risque de parti pris de la part d'un membre du tribunal en particulier.

Comme dans la présente situation, dans l'affaire soumise au Tribunal fédéral, l'avocat de l'une des parties était juge à titre accessoire ("nebenamtlicher Richter", que le Tribunal fédéral distingue du "Ersatzrichter", "juge suppléant", sans cependant expliquer la conséquence de la distinction). Dans un litige en matière d'assurance-accidents, la partie adverse a implicitement requis la récusation de tous les membres du Tribunal administratif du canton de Thurgovie, en réclamant que le dossier soit traité par le Tribunal administratif d'un autre canton. Cette demande ayant été rejetée, le Tribunal fédéral a été saisi. Le Tribunal fédéral a tout d'abord rappelé sa jurisprudence rendue dans la cause publiée à l'ATF 133 I 1: la collaboration générale de juges titulaires et de juges à titre accessoire n'était pas de nature à remettre en cause l'impartialité des juges, lorsqu'un juge à titre accessoire représente, dans son activité privée, une partie dans un litige. Un tel juge suppléant peut donc représenter une partie, lorsqu'il agit comme avocat. En l'absence de toutes circonstances concrètes qui remettraient en cause l'impartialité du juge administratif, le grief était infondé (ATF 139 I 121, 127 consid. 5.3; ATF 133 I 1, 8 consid. 6.4.4). Le Tribunal fédéral a considéré qu'une interdiction générale pour un avocat d'agir devant le Tribunal dont il est juge suppléant ne pouvait se déduire ni de l'art. 30 al. 1 Cst. féd., ni de l'art. 6 §1 CEDH et qu'il appartenait, cas échéant, au législateur de fixer des règles plus strictes, ce qui n'était pas le cas dans le canton de Thurgovie (ATF 139 I 121, 128 consid. 5.4.2). Dans ce cas, le recourant n'avait pas apporté de critique concrète contre l'impartialité des juges du Tribunal administratif du canton de Thurgovie (ATF 139 I 121, 128 consid. 5.4.2); le Tribunal fédéral a encore précisé que le juge suppléant thurgovien ne participait pas au plénum des juges du Tribunal et ne bénéficiait d'aucune infrastructure au Tribunal (ATF 139 I 121, 129 consid. 5.4.2). Le recours a donc été rejeté.

Ici, la situation factuelle est proche de celle de l'ATF 139 I 121 (avocat qui exerce aussi comme juge suppléant), mais la conclusion est différente: en effet, l'appelant ne demande pas (plus) la récusation du juge qui doit statuer sur son dossier, mais réclame que l'avocat de la partie adverse ne puisse plus représenter celle-ci en deuxième instance.

Les principes de l'ATF 139 I 121 peuvent être repris: le droit fédéral et conventionnel n'interdit pas qu'un avocat soit aussi juge suppléant, le droit cantonal pouvant prévoir des règles plus sévères. Tel n'est pas le cas en droit genevois. Les considérants de l'ATF 139 I 121 s'appliquent donc par analogie à la capacité de postuler de l'avocat, qui est aussi juge suppléant (évidemment dans d'autres dossiers). Ainsi, de manière générale, la qualité de juge suppléant à la Cour de justice de C______ ne l'empêche pas d'exercer son activité d'avocat représentant une partie devant la Cour de justice.

De plus, dans la présente procédure, l'appelant n'a présenté aucun élément concret qui remettrait en cause la qualité d'avocat de C______ ou qui ferait douter du respect des exigences de la LLCA ou de la LOJ.

La capacité de postuler de C______ est donc admise. Les déterminations faites par ce dernier au nom de l'intimé/défendeur sont donc recevables.

3.3.3 Le premier grief de l'appelant doit donc être écarté.

4.             Dans son dernier grief d'appel, mais qu'il convient d'examiner d'ores et déjà, l'appelant critique la composition du Tribunal (appel p. 67-68, §217-222; conclusion n° 16).

4.1 L'appelant conclut à ce qu'il soit constaté que la chambre du Tribunal ne respectait pas, "dans la substance", les exigences d'une composition équilibrée entre juges employés et employeurs, de sorte qu'il y avait violation de l'art. 6 CEDH.

L'appelant reproche aussi au juge employé de travailler comme cadre dans un service des ressources humaines. Il reproche également au greffier d'audience d'avoir fait son stage dans une étude située au no. 1______, rue 2______, à côté de l'étude où l'appelant/demandeur avait travaillé, au no. 3______, rue 2______. Le greffier d'audience était aussi lié par des liens de parenté à la famille AA______, où le défendeur avait fait son stage d'avocat et avec qui il gardait de bons rapports.

4.2 L'intimé/défendeur répond que l'appelant/demandeur ne démontre pas que le juge assesseur employé se serait montré partial ou aurait été à l'origine d'un prétendu déséquilibre dans la composition du Tribunal. Le grief serait aussi tardif. Le greffier d'audience et le défendeur avaient effectué leur stage à plusieurs années d'intervalle, car ils n'étaient pas de la même génération.

4.3 La garantie d'un juge indépendant et impartial telle qu'elle résulte des art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH – lesquels ont, de ce point de vue, la même portée (cf ATF 147 IV 274, 284 consid. 1.8.1; ATF 144 I 159, 162 consid. 4.3) – permet, indépendamment du droit de procédure (en l'occurrence l'art. 47 CPC), de demander la récusation d'un magistrat dont la situation ou le comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle vise à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation uniquement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de la part du juge ne peut être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence d'une prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat; cependant, seules les circonstances objectivement constatées doivent être prises en considération, les impressions purement individuelles n'étant pas décisives (parmi beaucoup: ATF 144 I 159, 162 consid. 4.3; ATF 142 III 732, 736-737 consid. 4.2.2 et les références citées). De jurisprudence constante, des liens d'amitié ou une inimitié peuvent créer une apparence objective de partialité à condition qu'ils soient d'une certaine intensité (ATF 144 I 159, 162 consid. 4.3; ATF 139 I 121, 125 consid. 5.1). En revanche, des rapports de voisinage, des études ou des obligations militaires communes ou des contacts réguliers dans un cadre professionnel ne suffisent en principe pas. Plus généralement, pour être à même de trancher un différend avec impartialité, un juge ne doit pas se trouver dans la sphère d'influence des parties (ATF 144 I 159, 163 consid. 4.3; ATF 139 I 121, 125-126 consid. 5.1).

L'exigence d'impartialité s'étend également aux greffiers (ATF 142 III 732, 736 consid. 4.2.2).

La partie qui a connaissance d'un motif de récusation doit toutefois l'invoquer aussitôt, sous peine d'être déchue du droit de s'en prévaloir ultérieurement (ATF 140 I 271, 275 consid. 8.4.3; arrêt TF 5A_379/2022 du 24 octobre 2023 consid. 2.1).

4.4 En l'espèce, les conclusions de l'appelant sont constatatoires s'agissant de la composition du Tribunal, de sorte qu'on peut déjà se demander si elles sont recevables (ATF 141 II 113, 123 consid. 1.7; arrêt TF 5A_295/2023 du 15 août 2023).

Quoi qu'il en soit, s'agissant des critiques contre le juge employé, la Cour retient qu'elles sont tardives, dès lors que le juge employé a siégé lors des audiences, auxquelles le demandeur a participé. La qualification de "fait notoire" par l'appelant/demandeur n'y change rien.

S'agissant des critiques contre le greffier d'audience, la Cour relève aussi que ce dernier a siégé lors des audiences. L'appelant/demandeur admet lui-même n'avoir fait des recherches sur la composition du Tribunal qu'après les plaidoiries finales, ce qui est tardif. Au demeurant, l'appelant/demandeur ne fait pas valoir des liens d'amitié ou d'inimité à son égard de la part du greffier d'audience: le simple fait que lui et l'intimé/défendeur aient effectué leur stage dans la même étude, à 30 années d'intervalle (en comparant les informations résultant de l'obtention du brevet en 1985 pour l'intimé/défendeur et en 2015 pour le greffier d'audience), ne permet pas d'en déduire un grief de partialité.

En tant que de besoin, l'audition du nouveau témoin AB______ sera rejetée. Outre le fait que cette demande est tardive (cf art. 317 CPC) dès lors qu'elle concerne une audience du 19 avril 2021, l'appelant/demandeur n'explique pas en quoi elle serait pertinente (cf art. 150 CPC) pour le grief traité ci-dessus; la "perception d'un manque d'impartialité de l'instance inférieure" mentionnée dans la réplique est insuffisamment claire. Il aurait à tout le moins fallu objectiver la critique contre le greffier d'audience.

Par conséquent, ce grief sera rejeté dans la mesure de sa recevabilité.

5.             L'appelant critique l'irrecevabilité de sa (première) conclusion nouvelle du 28 janvier 2021 (cf JTPH p. 14-16, appel p. 39-41, §112-120), qui portait sur le paiement en sa faveur de 4'875 fr. avec intérêts à 5% dès le 31 décembre 2015, et dont il conclut au paiement (conclusion n° 9, à hauteur de 4'850 fr.). Cette conclusion était en lien avec ses prétentions dans le dossier "E______". Elle est complétée d'une conclusion procédurale en production des time-sheets dans ledit dossier (conclusion n° 5).

5.1 Selon l'appelant, cette conclusion était déjà contenue dans les conclusions du 6 juin 2017 et celles du 9 février 2018. B______ avait tardivement, c'est-à-dire après l'expiration du délai de prescription applicable au mandat d'avocat, informé le Tribunal et A______ qu'il n'avait pas envoyé de facture à la cliente dans le dossier "E______". Ce n'était que par le fait nouveau du courrier du 17 septembre 2020 que l'appelant/demandeur avait compris que l'intimé/défendeur avait violé l'art. 6 du contrat de travail. L'appelant/demandeur avait subi un dommage correspondant à la totalité des honoraires que l'intimé/défendeur aurait dû facturer, puis encaisser en temps utile et verser la moitié à l'appelant/demandeur.

Il ignorait cependant le nombre d'heures précises que B______ aurait dû prendre en considération, mais de mémoire les évaluait à une quinzaine. Il n'avait pas accès au logiciel de time-sheet qui était "sous contrôle exclusif de B______".

Il prenait également une conclusion procédurale (n° 5) tendant à la production des time-sheets du mandat "E______", tout en rappelant que "ceux-ci sont sous le contrôle exclusif [de B______] et ainsi modifiables par lui".

Le Tribunal avait "récompens[é]" le comportement "manifestement abusif et déloyal" de B______. Il avait ainsi passé outre le fait qu'il avait "réservé" dans ses conclusions initiales du 6 juin 2017 et 9 février 2018 son droit d'"amplification en fonction de la teneur des documents dont la production est requise à titre préalable".

5.2 L'intimé/défendeur explique l'appelant/demandeur n'avait pas respecté les conditions de l'art. 227 al. 1 CPC en première instance. En outre, l'appelant/demandeur avait accès au logiciel informatique pour suivre les dossiers clients et accéder aux time-sheets.

5.3 En premier lieu, il faut relever que la "réserve" de l'"amplification" des conclusions n'est pas un concept prévu par le Code de procédure civile. Par conséquent, soit les conditions de modification de la demande – concrètement des conclusions – sont remplies selon les art. 227, 230 et 317 CPC, soit elles ne le sont pas. Les conclusions procédurales du 6 juin 2017 et 9 février 2018 sont donc inutiles. Il faut donc uniquement examiner les conditions des art. 227 et 230 CPC.

5.3.1 Selon l'art. 227 al. 1 CPC, la demande ne peut être modifiée que si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et que l'une des conditions suivantes est remplie: la prétention nouvelle ou modifiée présente un lien de connexité avec la dernière prétention (let. a); la partie adverse consent à la modification de la demande (let. b). Dans la phase des débats principaux, la modification de la demande est soumise à une condition supplémentaire: elle doit reposer sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (art. 230 al. 1 let. b CPC). L'admissibilité d'une modification des conclusions est une condition de recevabilité au sens de l'art. 59 CPC (arrêt TF 5A_456/2022 du 19 septembre 2023, consid. 3.3.1; 4A_395/2017 du 11 octobre 2018 consid. 4.3 et la doctrine citée). Si les conditions d'une modification ne sont pas réunies, le tribunal n'entre pas en matière sur ladite modification et statue sur la demande initiale, pour autant que celle-ci n'ait pas été retirée (arrêt TF 5A_456/2022 du 19 septembre 2023, consid. 3.3.1 et les références citées).

5.3.2 En l'espèce, comme le Tribunal l'a constaté à juste titre, la conclusion en paiement de 4'875 fr. relève de la même procédure (ordinaire en l'espèce) et présente un lien de connexité avec le reste du dossier. En revanche, la simple information par B______ que le dossier "E______" n'a pas été facturé ne représente pas un fait nouveau utile pour la conclusion. L'évaluation à quinze (15) des heures passées par A______ n'a pas de lien logique avec l'absence de facturation. On ne voit pas ce qui empêchait A______ de formuler déjà une telle conclusion dans sa demande du 6 juin 2017 ou dans sa réplique du 9 février 2018.

L'appelant aurait pu – mais il ne le fait pas – argumenter que le courrier du 17 septembre 2020 de B______ indiquant que le dossier n'avait pas été facturé représentait le résultat d'une mesure d'instruction, à savoir d'une production de titre (art. 160 al. 1 let. b CPC), dont le contenu ne répondait pas à ses interrogations. Cela étant, l'administration des preuves a pour but de prouver des faits déjà allégués et non pas de compléter les allégués (cf ATF 144 III 67, 69 consid. 2.1).

L'appelant/demandeur aurait donc déjà précédemment pu évaluer le nombre d'heures qui auraient dû être facturées, quitte à en modifier l'appréciation après la production (éventuelle) du décompte des heures. L'absence de production du décompte ne permet pas de déduire de manière logique combien d'heures ont été effectuées, puisque justement l'information y relative n'est pas obtenue.

Un autre raisonnement permet d'arriver au même résultat: en effet, il faut considérer que l'appelant/demandeur avait formulé sur ce point une demande en paiement non chiffrée (art. 85 CPC), cumulée à d'autres prétentions chiffrées (art. 90 CPC). Or, l'art. 85 CPC exige, dans sa teneur applicable jusqu'au 31 décembre 2024 (cf les modifications selon la loi fédérale du 17 mars 2023, entrant en vigueur le 1er janvier 2025 [RO 2023 n° 491]), que le demandeur chiffre sa demande "dès qu'il est en état de le faire". D'ailleurs, même dans l'ATF 148 III 322, qui a conduit à la modification législative à venir sur l'art. 85 CPC, le demandeur avait chiffré, dès le dépôt de sa demande, son dommage à une valeur minimale de 100'000 fr. Par conséquent, si le time-sheet ou une facture avaient été produits au cours de l'administration des preuves, il se serait agi d'un fait nouveau qui aurait permis une adaptation de la conclusion par l'appelant/demandeur. Ici, il n'y a, à l'inverse, eu aucun fait nouveau chiffré qui permettrait d'augmenter les conclusions. En effet, le courrier du 17 septembre 2020 ne contient aucun élément objectif permettant une augmentation des conclusions; en effet, l'absence de facturation ne permet pas de déduire qu'il y aurait eu quinze heures travaillées par l'appelant/demandeur; ce dernier dispose ainsi d'aussi peu d'informations tant avant qu'après la prise de connaissance du courrier du 17 septembre 2020; ainsi, l'auto-évaluation, respectivement l'estimation des heures effectuées dans le dossier pouvait déjà être faite dans la demande du 6 juin 2017 ou la réplique du 9 février 2018. D'ailleurs, avec l'écoulement du temps, les souvenirs s'estompent, de sorte que l'évaluation plus récente de janvier 2021 aurait dû être considérée comme moins crédible que l'évaluation initiale, plus proche temporellement de l'activité effectuée.

Ce qui précède a pour conséquence que la conclusion préalable d'appel n° 5 (ordonner la production des time-sheets liés au dossier "E______") est sans objet, et doit subsidiairement être rejetée, car tardive.

Par conséquent, ce grief sera écarté.

6.             L'appelant critique également l'irrecevabilité de sa (deuxième) conclusion nouvelle du 28 janvier 2021 tendant au paiement de 1'000 fr. pour l'utilisation de son ordinateur personnel à des fins professionnelles (JTPH p. 15-16, §2f; appel p. 40-41, §118-120; conclusion n° 14).

6.1 La demande contient les conclusions (art. 221 al. 1 let. b CPC). Selon la jurisprudence, les conclusions sont le cœur de la procédure: elles déterminent l'objet du litige; sans conclusions, il n'y a pas de procès. Les conclusions doivent être formulées de manière aussi précise que possible, de sorte qu'en cas d'admission de la demande les conclusions puissent être reprises dans le dispositif
(ATF 148 III 322, 325 consid. 3.2; voir aussi ATF 142 III 102, 108-109 consid. 5.3.1). C'est la raison pour laquelle l'art. 84 al. 2 CPC prévoit que l'action tendant au paiement d'une somme d'argent doit être chiffrée. Ce principe, qui découle de la maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC), n'a pas seulement de l'importance pour l'exécution de la décision, mais aussi pour le déroulement du procès depuis le début: les conclusions ont un impact sur la compétence matérielle et le type de procédure. Elles sont aussi importantes sous l'angle du droit d'être entendu, car la partie adverse doit comprendre ce qu'on lui demande
(AF 148 III 322, 325 consid. 3.2; ATF 142 III 102, 108-109 consid. 5.3.1).

6.2 Selon l'appelant, sa réplique du 9 février 2018 contenait, dans le corps du texte, une prétention à hauteur de 1'000 fr., qui avait cependant "par simple erreur d'inadvertance" été oubliée dans les conclusions formelles. L'appelant/demandeur avait signalé cette erreur lors de l'audience du 28 janvier 2021, en indiquant précisément où elle figurait dans son écriture.

Ainsi, le simple rappel d'une conclusion lors de l'audience devait être considéré comme recevable.

6.3 Selon l'intimé/défendeur, cette conclusion nouvelle de l'appelant/demandeur ne reposait sur aucun fait nouveau, de sorte que l'art. 227 CPC avait été correctement appliqué.

6.4 En l'espèce, comme le Tribunal l'a relevé à juste titre, les conclusions doivent être suffisamment claires et précises. Tel n'était pas le cas de la prétention (supplémentaire) de l'appelant/demandeur de 1'000 fr. pour l'utilisation d'un ordinateur, qui ne se trouvait pas dans les conclusions (p. 53 à 56 de la réplique du 9 février 2018), mais dans un paragraphe (p. 12, 2ème paragraphe) lié à une détermination sur les allégations des parties adverses ("ad 41-46 B______, K______, AF______ [monogrammes]"). Il n'y avait donc aucun formalisme excessif du Tribunal de ne pas tenir compte d'une prétention formulée dans une détermination sur allégués (cf art. 222 al. 2, 2ème phrase CPC).

L'appelant/demandeur fait valoir qu'il avait attiré l'attention du Tribunal lors de l'audience du 28 janvier 2021. Il n'en demeure pas moins que cette "inadvertance" (selon la terminologie de l'appelant/demandeur) n'a été signalée que trente-cinq (35) mois plus tard. Surtout, alors que le Tribunal avait expressément demandé aux parties, par ordonnance du 28 mai 2020, de récapituler leurs conclusions, ce qui a été fait expressément par B______, A______ s'est limité à persister dans ses conclusions, malgré trois courriers au Tribunal en réponse à l'ordonnance précitée (5 juin 2020, 11/19 juin 2020, 23 juin 2020).

Même si le CPC n'impose pas expressément différentes parties dans un mémoire juridique, il faut encore relever que l'art. 221 al. 1 CPC est très précis sur le contenu de la demande: il faut non seulement désigner les parties et, cas échéant, leur représentant (let. a), mais aussi les conclusions (let. b), la valeur litigieuse (let. c), les allégations de fait (let. d), l'indication, pour chaque allégation, des moyens de preuve (let. e), la date et la signature (let. f). Selon l'art. 221 al. 3 CPC, la demande peut contenir une motivation juridique. Il faut en déduire de bonne foi (cf. art. 52 CPC) que, dans un mémoire de 57 pages (longueur de la réplique), les "conclusions" se trouvent dans un chapitre avec le titre y relatif.

C'est donc à juste titre que le Tribunal a retenu que la conclusion visant au paiement de 1'000 fr. était irrecevable.

Par conséquent, ce grief sera écarté.

7.             L'appelant critique ensuite l'admission de la recevabilité de la demande reconventionnelle (JTPH p. 16-17, §3; appel p. 41, §121-123 et p. 43-44, §132-137; conclusions n° 11 et 12) en raison de sa valeur litigieuse inférieure à 30'000 fr., qui aurait impliqué un traitement séparé en procédure simplifiée.

7.1 Selon l'appelant, la recevabilité de la demande reconventionnelle d'une procédure simplifiée alors que la demande principale est traitée en procédure ordinaire ne reposerait sur "aucune jurisprudence solide ancrée du Tribunal fédéral", ni sur "aucune opinion majoritaire et fondée en la matière". Le Tribunal aurait arbitrairement refusé d'adopter l'avis "argumenté" de DIETSCHY. Il y avait "deux poids, deux mesures" si on comparait la solution prise pour ses propres conclusions dans les griefs précédents.

7.2 Selon l'intimé/défendeur, le raisonnement de l'appelant est à peine compréhensible et purement appellatoire.

7.3 Selon l'art. 224 al. 1 CPC, le défendeur peut déposer une demande reconventionnelle dans sa réponse si la prétention qu'il invoque est soumise à la même procédure que la demande principale. Selon la jurisprudence, le dépôt d'une demande reconventionnelle n'est plus possible après le dépôt de la réponse (ATF 146 III 413, 414 consid. 4.2).

En l'espèce, la demande reconventionnelle a été déposée à temps. En revanche, la prétention reconventionnelle se trouvait dans une procédure différente (simplifiée) de celle de la demande principale (ordinaire). L'interprétation littérale donnerait raison à l'appelant.

Selon le Tribunal fédéral, lorsque la demande principale est instruite en procédure simplifiée, il n'est pas possible de déposer une demande reconventionnelle avec une valeur litigieuse supérieure à 30'000 fr., donc en procédure ordinaire
(ATF 147 III 172, 173-174 consid. 2.1; ATF 145 III 299, 300 consid. 2.1;
ATF 143 III 506, 513 consid. 3.2.4).

Dans son arrêt initial, le Tribunal fédéral a expressément laissé ouverte la solution inverse, à savoir l'admission ou non d'une prétention reconventionnelle de moins de 30'000 fr. en procédure ordinaire (ATF 143 III 506, 513 consid. 3.2.4; arrêt TF 4A_32/2019 du 2 avril 2019, consid. 1.3).

La Chambre de céans a cependant tranché la question en faveur de l'admissibilité de la demande reconventionnelle (CAPH/79/2019 du 2 mai 2019, consid. 7.2.7, avec de nombreuses références).

De très nombreux auteurs considèrent qu'une prétention reconventionnelle valant moins de 30'000 fr. doit être possible dans un procès en procédure ordinaire portant sur un montant supérieur (Karl SPÜHLER, in: Karl Spühler [éd.], Schweizerische Zivilprozessordnung – ZPO annotée – Kurzkommentar, Schulthess, Zurich 2023, p. 604, §2 ad art. 224; François BOHNET, Procédure civile, 3ème éd., Helbing Lichtenhahn, Bâle 2021, p. 314, §1157; Roman RICHERS / Georg NAEGELI, in: Paul Oberhammer/ Tanja Domej/ Ulrich Haas [éd.], Kurzkommentar ZPO, Helbing Lichtenhahn, Bâle 2021, p. 1248, §3 ad art. 224; Bernhard BERGER/ Andreas GÜNGERICH/ Christoph HURNI/ Reto STRITTMATTER, Zivilprozessrecht, 2ème éd., Stämpfli, Berne 2021, p. 267, §957; Benedikt SEILER, in: Thomas Sutter-Somm/ Benedikt Seier [éd.], Handkommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, Schulthess, Zurich 2021, p. 892, §7 ad art. 224 CPC; Denis TAPPY, in: François Bohnet/ Jacques Haldy/ Nicolas Jeandin/ Philippe Schweizer/ Denis Tappy, Commentaire romand CPC, 2ème éd., Helbing Lichtenhahn, Bâle 2019, p. 999, §14 ad art. 224 CPC; Thomas SUTTER-SOMM, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3ème éd., Schulthess, Zurich 2017, p. 292, §1090; Christoph LEUENBERGER/ Beatrice UFFER-TOBLER, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 2ème éd., Stämpfli, Berne 2016, p. 355, §11.91; Christoph LEUENBERGER, in: Thomas Sutter-Somm/ Franz Hasenböhler/ Christoph Leuenberger [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, Schulthess, 3ème éd., Zurich 2016, p. 1629, §14 ad art. 224 CPC; Alain GRIEDER, Die Widerklage nach der Schweizerischen Zivilprozessordnung (ZPO), Helbing Lichtenhahn, Bâle 2016, p. 236, §615; Thomas ENGLER, in: Myriam A. Gehri/ Ingrid Jent-Sörensen/ Martin Sarbach [éd.], ZPO – Kommentar, 2ème éd, Orell Füssli Zurich 2015, p. 482, §10 ad art. 224 CPC; David HOFMANN/ Christian LÜSCHER, Le Code de procédure civile, 2ème éd., Stämpfli, Berne 2015, p. 203; Nicolas JEANDIN / Aude PEYROT, Précis de procédure civile, Schulthess, Zurich 2015, p. 109, §295; Dominik GASSER/ Brigitte RICKLI, Schweizerische Zivilprozessordnung – Kurzkommentar, 2ème éd., Dike, Zurich 2014, p. 225, §3 ad art. 224 CPC; Manuela RAPOLD/ Reto FERRARI-VISCA, Die Widerklage nach der Schweizerischen Zivilprozessordnung, PJA 2013 p. 387-403, en particulier p. 390-391; Laurent KILLIAS, in: Andreas Güngerich (éd.), Berner Kommentar – Schweizerische Zivilprozessordnung – Band II, Stämpfli, Berne 2012, p. 2269, §25 ad art. 224 CPC; Mercedes NOVIER, Demande et réponse en procédure ordinaire selon le CPC: quelques observations, JT 2010 III p. 195-223, en particulier p. 219).

Leur argumentation principale est l'économie de procédure et la circonstance que le demandeur reconventionnel a délibérément renoncé aux conditions de la procédure simplifiée.

Même DIETSCHY, pourtant citée par l'appelant, est favorable à cette position: "lorsque la procédure ordinaire est applicable à la demande initiale, une prétention reconventionnelle soumise à la procédure simplifiée doit être admise si la partie qui l'invoque renonce à l'application de la procédure simplifiée" (Patricia DIETSCHY, Le déroulement de la procédure simplifiée, in: François Bohnet [éd.], Procédure civile suisse – Les grands thèmes pour les praticiens, Schulthess, Zurich 2010, p. 173-192, en particulier p. 176, §7).

Quelques auteurs de procédure civile s'y opposent (Michel HEINZMANN/ Christelle HERRMANN-HEINIGER, in: Isabelle Chabloz/ Patricia Dietschy-Martenet/ Michel Heinzmann [éd.], Petit commentaire CPC, Helbing Lichtenhahn, Bâle 2021, p. 1066, §44-45 ad art. 224 CPC; Michel HEINZMANN, La procédure simplifiée – Une émanation du procès civil social, Schulthess, Zurich 2018, p. 144-146, §236; Daniel WILLISEGGER, Schweizerische Zivilprozessordnung – Basler Kommentar, 3ème éd., Helbing Lichtenhahn, Bâle 2017, p. 1243, §43 ad art. 224; Eric PAHUD, in: Alexander Brunner/ Dominik Gasser/ Ivo Schwander [éd.], Schweizerische Zivilprozessordnung – Kommentar, 2ème éd., Dike, Zurich 2016, p. 1825-1826, §15 ad art. 224).

La solution majoritaire sera concrétisée dans la révision du CPC du 17 mars 2023, à l'art. 224 al. 1bis, lettre a CPC ("La demande reconventionnelle est également admise et jugée avec la demande principale dans la procédure ordinaire dans les cas suivants: a. la prétention invoquée reconventionnellement relève de la procédure simplifiée du seul fait de la valeur litigieuse alors que la demande principale est jugée dans la procédure ordinaire; […]"), qui entrera en vigueur le 1er janvier 2025 (RO 2023 n° 491).

Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit (et ce n'est donc pas un "exemple de parti-pris évident résultant de la composition déséquilibrée de la première instance", comme s'en plaint l'appelant/demandeur au §72 de sa réplique) que le Tribunal est entré en matière sur les conclusions reconventionnelles du défendeur. Cela a principalement pour avantage de purger le litige dans une seule procédure. L'appelant/demandeur n'indique d'ailleurs pas quel serait son avantage d'une procédure (simplifiée) séparée pour traiter des prétentions de son ancien employeur; dès lors que la procédure ordinaire et la procédure simplifiée ont chacune des avantages et des inconvénients, l'appelant/demandeur ne fait valoir aucun droit dont il aurait été privé par le traitement des conclusions reconventionnelles en procédure ordinaire. Il n'expose pas non plus en quoi, concrètement, sa situation procédurale aurait été meilleure, de sorte qu'on peut même demander s'il dispose d'un intérêt digne de protection (art. 59 al. 2, let. a CPC) à formuler un tel grief. Quoi qu'il en soit, la question peut rester ouverte, dès lors que le grief procédural sera rejeté.

L'appelant/demandeur se plaint encore, en substance, d'un formalisme différencié, entre l'irrecevabilité de ses conclusions nouvelles tardives et la recevabilité des conclusions reconventionnelles du défendeur: tout d'abord, les prétentions reconventionnelles de l'ancien employeur n'étaient pas tardives (cf art. 224 CPC), de sorte que le traitement différent des deux incidents se justifie déjà pour ce motif-là. Ensuite, la problématique était différente: les conclusions nouvelles irrecevables de l'appelant/demandeur l'ont été en raison des exigences strictes en matière de formulation claire et précise des conclusions; à l'inverse, la souplesse s'agissant du type de procédure pour les conclusions reconventionnelles était encouragée par une doctrine très majoritaire et la jurisprudence de la Cour de justice. Enfin, dans les deux situations, même si la révision à venir du CPC porte sur un allègement du formalisme, le législateur a maintenu la règle selon laquelle il n'y avait que deux possibilités d'alléguer (et donc aussi de formuler sa demande).

L'appelant prend encore (appel p. 43-44, chapitres 4 et 5; conclusion n° 12) des conclusions en irrecevabilité des témoignages I______, G______ et H______ car ils porteraient sur des conclusions irrecevables. Dès lors que la recevabilité de la demande reconventionnelle a été admise, les témoignages y relatifs sont également admis.

Ce grief sera donc rejeté.

8.             L'appelant critique ensuite le refus de l'audition du témoin D______ (JTPH p. 17-18, §4; appel p. 41-43, §124-131; conclusion n° 4).

8.1 L'appelant critique le point que le Tribunal ait renoncé à entendre son témoin D______, alors qu'il avait maintenu l'audition des témoins H______ et G______ cités par son ancien employeur. La motivation du Tribunal serait "foncièrement absurde" et n'aurait fait de sens que si le Tribunal avait donné entièrement raison à l'appelant. La modification de l'ordonnance de preuves initiales et la renonciation à l'audition du témoin D______ aurait permis au Tribunal de minimiser grossièrement la tentative de sabotage du closing dans la transaction "A" par l'employeur. Cela avait mis en péril l'encaissement de plus de 200'000 fr. d'honoraires. Il faudrait interroger D______ sur les circonstances qui l'ont conduit à conclure un mandat avec l'appelant/demandeur et sur les risques et dégâts que le comportement du défendeur a eus lors du closing.

8.2 Selon l'intimé/défendeur, l'éventuel témoignage de D______ n'aurait eu aucun impact sur l'issue du litige, car il n'avait aucune connaissance des rapports internes des parties. Il aurait uniquement pu se prononcer sur les rapports externes, à savoir sa prise de contact initiale avec K______, ce qui n'est pas contesté.

8.3 Selon l'art. 150 al. 1 CPC, la preuve a pour objet les faits pertinents et contestés. Selon l'art. 152 al. 1 CPC, toute partie a droit à ce que le tribunal administre les moyens de preuve adéquats proposés régulièrement et en temps utile. Selon l'art. 154 CPC, les ordonnances de preuves sont rendues avant l’administration des preuves. Elles désignent en particulier les moyens de preuve admis et déterminent pour chaque fait à quelle partie incombe la preuve ou la contre-preuve. Elles peuvent être modifiées ou complétées en tout temps. Selon l'art. 157 CPC, le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées.

8.4 En l'espèce, il faut tout d'abord rappeler que le Tribunal dispose du droit de modifier en tout temps son ordonnance de preuve (art. 154 CPC). Ensuite, la convocation (ou la non-annulation) des témoins H______ et G______ ne permet pas d'obtenir la convocation d'un autre témoin (ici D______): en effet, la renonciation à entendre un témoin ne conduit pas à refuser mathématiquement l'audition d'un autre témoin. Ensuite, le Tribunal peut procéder en tout temps à une appréciation anticipée des preuves; il est donc envisageable – ce que le Tribunal a fait – qu'au cours de l'instruction, certaines mesures d'instruction rendent inutile le maintien d'autres mesures. De plus, le témoin D______ avait été convoqué pour l'audience du 7 février 2022, mais il ne s'est pas présenté, expliquant que sa famille avait le COVID: c'est probablement pour cette raison que le Tribunal a renoncé à le convoquer à nouveau, d'autant plus qu'il est domicilié à Z______, sur la côte est du Canada. Enfin, aucune confirmation de réservation d'un billet d'avion ne ressort du dossier.

L'appelant ne fournit aucun élément concret et probant qui démontrerait que le témoin D______ se présenterait devant la Cour ou le Tribunal; il ne fournit pas davantage des preuves d'éventuels échanges avec le témoin s'agissant de sa citation à comparaître à la date initialement fixée (ou un engagement pour une future autre date).

Enfin, comme le fait valoir de façon pertinente l'intimé/défendeur, le témoin D______ n'avait pas connaissance des rapports internes entre les parties. C'était en effet un client de l'étude et il aurait uniquement pu expliquer comment l'étude interagissait avec lui, problématique au sujet de laquelle il n'y a pas de contestations. Il est en effet admis par les parties que le client D______ a contacté tout d'abord K______, avant d'être redirigé vers B______ et A______; B______ ne conteste pas non plus que l'essentiel (si ce n'est la totalité) des échanges directs avec le client D______ ont été effectués par A______ et qu'il y a eu du retard dans le closing en raison de l'indisponibilité, sur ordre de B______, du collaborateur M______. L'appréciation concrète de ces éléments (mandat de l'étude ou mandat personnel) sera effectuée ci-dessous au considérant 11.

Ce grief doit donc être rejeté.

9.             L'appelant critique également l'irrecevabilité de son courrier du 14 novembre (recte: décembre) 2021 (JTPH p. 22, §6b.iii; appel p. 44, §136; conclusion n° 13).

9.1 L'appelant/demandeur indique que son courrier ne contenait aucun fait nouveau. Il constatait uniquement le fait que la procédure n'avait pas avancé depuis l'audience du 21 avril 2021 et faisait état de manœuvres dilatoires de sa partie adverse. Il critiquait le mode d'interrogatoire de la témoin S______ et expliquait qu'il avait été contraint de mandater une avocate pour le reste de la procédure. Il critiquait aussi l'absence d'audition des parties.

9.2 L'intimé/défendeur explique que l'appelant/demandeur lui-même admet n'avoir pas invoqué de fait nouveau.

9.3 En l'espèce, dès lors que l'appelant/demandeur reconnaît lui-même que son courrier ne contenait aucun fait nouveau, la question de l'applicabilité de l'art. 229 CPC ne se pose même pas. De même, la conclusion n°13 de l'appel portant sur la recevabilité d'un courrier doit être déclarée irrecevable, dès lors que le contenu du courrier qui a été déclaré irrecevable n'a plus de portée sur la présente procédure: la procédure a continué, les parties ont été entendues et un jugement a été rendu.

Les autres éléments figurant dans ce chapitre du recours (p. 44, §136 et 137) ne concernent pas une partie précise du jugement attaqué, dès lors qu'il s'agit d'une critique très générale sur la manière du président du Tribunal de poser les questions. Il ne pourra donc pas y être donné suite.

9.4 Ce grief sera donc rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.

10.         Sur le fond du dossier, l'appelant critique le rejet de ses prétentions en paiement de 10'210 fr. 40 et de 1'571 fr. 85 à titre d'indemnité pour vacances non prises en 2011 et 2015 (JTPH p. 23-27, §8; appel p. 45-48, §138-155, §136; conclusion n° 7).

10.1 L'appelant réclame le paiement de 9 jours de vacances pour 2011, 4 jours de vacances pour 2012 et 2 jours de vacances pour 2015.

S'agissant des vacances 2011 à 2013, il critique notamment la prise en considération par le Tribunal du témoignage des témoins H______, G______ et W______ qui n'ont commencé à travailler qu'en 2014 pour l'employeur. Il critique également la crédibilité du témoignage du témoin I______, sœur du défendeur. Il se réfère à des "rappels et sommations notifiés à B______ début janvier 2016", sans fournir cependant la référence exacte à ces documents, ni à en déduire immédiatement un nombre de jours de vacances qui lui seraient encore dus (p. 46, §142). Il explique encore que le logiciel informatique de traitement des vacances serait "notoirement dysfonctionnel" et sous contrôle exclusif de la partie adverse; selon une règle d'expérience, il y a des périodes creuses dans tout bureau d'avocat, ce qui implique que le time-sheet ne saurait valablement prouver une absence de bureau (p. 47, §145). Enfin, dès le 1er janvier 2012, seuls les formulaires de vacances signés par les deux parties seraient pertinents.

10.2 L'intimé/défendeur explique que les critiques de l'appelant/demandeur ne sont pas pertinentes, se limitant à substituer sa propre appréciation à celle du Tribunal.

10.3 Selon l'art. 169 CPC, toute personne qui n'a pas la qualité de partie peut témoigner sur des faits dont elle a eu une perception directe.

La suspicion de partialité d'un témoin, résultant par exemple d'un lien conjugal, de parenté, d'alliance ou d'amitié avec une partie, doit être prise en considération au stade de l'appréciation du témoignage; néanmoins, la suspicion n'exclut pas d'emblée que la déposition soit tenue pour digne de foi et il incombe au juge du fait d'apprécier sa force probante (arrêt TF 4A_181/2012 du 10 septembre 2012 consid. 3; voir aussi arrêt TF 4A_395/2015 du 2 novembre 2015, consid. 3.3.2.1; CAPH/100/2023 du 22 septembre 2023, consid. 4.1.3). De même, le fait qu'un témoin puisse paraître plus enclin à défendre les intérêts de l'une des parties n'implique pas nécessairement que son témoignage doive d'emblée être écarté (arrêt du Tribunal fédéral 5P.312/2005 du 14 décembre 2005 consid. 3.1.2; CAPH/100/2023 du 22 septembre 2023, consid. 4.1.3). C'est notamment le cas pour un témoin employé au service d'une partie (arrêt TF 4A_29/2011 du 21 mars 2011, consid. 1.1; CAPH/100/2023 du 22 septembre 2023, consid. 4.1.3).

Le droit à la preuve - qui découle tant du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. que, en droit privé fédéral, de l'art. 8 CC et qui est, depuis l'entrée en vigueur du CPC, également consacré à l'art. 152 CPC -, octroie à toute personne à laquelle incombe le fardeau de la preuve le droit, pour établir un fait pertinent contesté, de faire administrer les moyens de preuve adéquats, pour autant qu'ils aient été proposés régulièrement et en temps utile (ATF 143 III 297, 332 consid. 9.3.2; arrêt TF 4A_453/2022 du 29 août 2023, consid. 3.1).

Conformément à l'art. 157 CPC, le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées. Il apprécie aussi librement leur force probante, selon son intime conviction. Il n'y a violation du principe de la libre appréciation des preuves que si le juge dénie d'emblée toute force probante à un moyen de preuve ou s'il retient un fait contre son intime conviction
(ATF 143 III 297, 332 consid. 9.3.2; arrêt TF 4A_292/2022 du 22 décembre 2022 consid. 7.1.3 et les références citées). En revanche, une appréciation des preuves fausse, voire arbitraire, ne viole pas le principe de la libre appréciation des preuves (ATF 143 III 297 consid. 9.3.2; arrêt 4A_234/2017 du 19 septembre 2017 consid. 4.2.2 et les références citées); il peut s'agir cas échéant d'une violation des règles de preuve prévues par l'art. 8 CC.

10.4 En l'espèce, I______, dès lors qu'elle n'est pas partie à la procédure, pouvait être entendue comme témoin au sens de l'art. 169 CPC. Sa qualité de sœur et d'ancienne employée du défendeur ne lui ôte pas le statut de témoin, mais peut cas échéant avoir un impact sur la crédibilité de son témoignage, que le Tribunal apprécie librement (art. 157 CPC).

A l'issue de l'administration des preuves, le Tribunal a tenu pour établi que le demandeur ne respectait pas systématiquement la procédure mise en place pour la validation des vacances (JTPH p. 26, avant-dernier paragraphe); il a également retenu que l'appelant/demandeur n'avait pas apporté la preuve qu'il avait travaillé les jours comptabilisés par l'employeur comme jours de vacances (JTPH p. 27, 2ème paragraphe). Contrairement à ce qu'affirme l'appelant/demandeur, il paraît difficile à croire que, dans une profession où le time-sheet représente le fondement de la facturation, un avocat soit présent au bureau sans rien facturer du tout pendant la journée.

Le Tribunal a également établi (JTPH p. 26, 4ème paragraphe) que l'intimé/défendeur avait produit des décomptes indiquant les jours de vacances pris par année.

L'appelant indique (p. 46, §142) avoir "ultérieurement re-vérifié l'ensemble des décomptes" des jours de vacances. Il ne se réfère cependant concrètement à aucune pièce du dossier, à aucune écriture et encore moins au jugement attaqué. Dans un procès soumis à la procédure ordinaire, il n'appartient pas à la Cour de justice, juridiction de deuxième instance, de rechercher – en l'absence de tout grief précis formulé par une partie – dans toutes les pièces du dossier quel décompte aurait été transmis à quel moment. Il faut néanmoins noter que le courrier de l'appelant/demandeur du 19 janvier 2016 ne réclamait que le paiement de 2 jours de vacances pour l'année 2015. Il n'y avait pas de mention que les jours de vacances des autres années n'étaient pas inclus ou feraient l'objet d'un autre décompte. Quant à la demande du 6 juin 2017, elle se référait certes à une pièce 7, intitulée "décompte du 10 décembre 2015": il s'agit cependant d'un tableau difficile à comprendre, car d'une part, il a été établi informatiquement et aboutit à un "grand total" de 0 jours, et, d'autre part, il comprend beaucoup de commentaires manuscrits. Les pièces du dossier conduisent donc aux décomptes produits par l'employeur et retenus par le Tribunal.

L'appelant/demandeur insiste ensuite sur le formalisme selon lequel les jours de vacances ne pourraient être décomptés que si, conformément aux instructions de l'employeur, le formulaire y relatif était rempli et contenait une double signature (travailleur et employeur): il ressort cependant du jugement du Tribunal que l'appelant lui-même a demandé plusieurs jours de vacances par courriel et non pas au moyen dudit formulaire. L'appelant ne peut donc pas simultanément demander l'application de règles strictes, puis s'en affranchir. Même s'il n'est pas certain qu'il y ait eu un allégation conforme au CPC s'agissant de la pièce 7 déf., la Cour a constaté que, la pièce 7 déf. à laquelle l'appelant/demandeur se réfère est un courriel du 31 janvier 2012 à I______, AC______ et S______, qui précise que "veuillez trouver en annexe, le formulaire que vous voudriez bien SVP remplir et donner à Me B______ pour approbation" et en annexe duquel il y a un formulaire pour demander un congé. A l'inverse, ce courriel n'est pas expédié directement à l'appelant/demandeur; il ne dit pas non plus que seul le formulaire doit être utilisé et/ou que les demandes par courriers électroniques ne seraient pas admises. L'appelant/demandeur ne peut donc rien tirer de l'argumentation sur le formalisme des règles de vacances.

Enfin, l'appelant/demandeur ne fournit aucune critique concrète contre l'argumentation du Tribunal. Il se limite à réaffirmer sa position de première instance, selon laquelle il aurait droit au paiement de 15 jours de vacances.

Dans son appel, l'appelant/demandeur ne réussit pas à convaincre la Cour que l'appréciation des preuves (art. 157 CPC) effectuée par le Tribunal au sujet des vacances serait erronée.

Ce grief sera donc rejeté.

11.         L'appelant critique également le rejet de ses prétentions en paiement de 102'554 fr. 50 à titre de participation au dossier "J______", qu'il considère comme un dossier personnel (JTPH p. 27-31, §9; appel p. 49-57, §156-188; conclusion n° 8).

11.1 Vu l'importance des prétentions, il se justifie de résumer ici la position du Tribunal: D______ s'était tout d'abord adressé à K______, l'un des associés du défendeur. C'est K______ qui a mis D______ en relation avec les parties; l'appelant/demandeur a ensuite contacté D______ pour l'informer que lui-même et le défendeur seraient ravis de pouvoir l'assister. Le Tribunal considère aussi que l'employeur doit pouvoir attendre de son collaborateur (avocat) qu'il gère de manière autonome les dossiers qui lui sont confiés. De plus, la formalisation du contrat de mandat permet aussi de confirmer que le dossier n'était pas un dossier personnel du demandeur: en effet, le contrat précisait que le demandeur et le défendeur seraient les principaux responsables du travail. Plusieurs collaborateurs du défendeur avaient été mis à contribution sur le mandat "J______", ce qui était incompatible avec le fonctionnement des dossiers personnels. L'épisode du closing (transaction "A"), où l'avocat M______ n'avait pas eu le droit d'assister l'appelant/demandeur en raison d'un dossier jugé prioritaire par le défendeur, est considéré par le Tribunal comme "anecdotique" et ne transformant pas le dossier "J______" en dossier personnel de l'appelant/demandeur. Enfin, la prétention du demandeur au sujet de ce dossier n'avait été élevée la première fois que le 19 janvier 2016 par l'appelant/demandeur, alors que la facture finale avait été envoyée au client le 16 mai 2014 déjà.

11.2 L'appelant/demandeur considère que le dossier "J______" serait un dossier personnel. Il explique que l'utilisation de ressources humaines de l'étude était expressément prévue par la lettre d'engagement. Il critique les témoins G______ et H______ qui n'avaient qu'un statut de simples stagiaires pendant toute la période du mandat "J______"; ces témoins n'avaient donc pas d'avis sur la mise en œuvre de l'art. 6 du contrat de travail de l'appelant/demandeur. Il se réfère également à la co-responsabilité du mandat figurant dans la lettre d’engagement signée vis-à-vis de "J______", ainsi qu'à la teneur des factures; le mandat a impliqué un énorme travail supplémentaire de sa part; en outre, dans les relations extérieures, la signature d'un associé était nécessaire, celle d'un collaborateur salarié était insuffisante. Il formule différentes critiques sur le logiciel informatique et les données y figurant s'agissant des différents dossiers. Il relève encore que le dossier était rangé dans son bureau. Il insiste ensuite sur la tentative de "sabotage" du closing par l'intimé/défendeur.

11.3 L'intimé/défendeur explique que les témoins H______, G______ et M______ avaient confirmé que les stagiaires et autres collaborateurs ne pouvaient pas être mis à disposition pour le traitement de dossiers personnels. Le dossier "J______" prévoyait justement que les parties pourraient être assistées par d'autres collaborateurs. Le fait que l'appelant/demandeur aurait travaillé de manière autonome sur le dossier ne lui était d'aucune aide pour démontrer qu'il s'agissait d'un dossier personnel, vu que l'art. 1 de son contrat de travail prévoyait qu'il aurait la conduite de dossiers qui lui seraient confiés.

11.4 La Cour considère tout d'abord que le point principal est l'arrivée du dossier à l'Etude: en effet, D______ a contacté K______ qui lui avait été recommandé par un tiers; après un premier échange avec le client, K______ s'est adressé à B______, avec copie à A______ pour leur annoncer l'arrivée d'un nouveau potentiel client. Le client n'a donc nullement contacté A______, mais un autre avocat (associé au demeurant) de l'étude, qui a transmis la proposition de mandat à B______, avec copie à A______. A l'origine, il ne s'agissait donc pas d'un dossier personnel de l'appelant/demandeur.

Il ne l'est pas non plus devenu ultérieurement: en effet, l'appelant/demandeur admet que la lettre d'engagement a été co-signée, du côté de l'étude par B______ et A______. B______ était expressément mentionné dans l'équipe de l'Etude comme (seul) associé engagé sur le dossier.

Il n'est donc pas déterminant de savoir si, de manière générale et abstraite, des stagiaires pouvaient travailler (ou non) sur des dossiers personnels de collaborateurs. En effet, la lettre d'engagement avec le client "J______" mentionnait expressément le taux horaire d'éventuels avocats-stagiaires. Cela a pour conséquence que la critique du demandeur sur la notion de témoin doit être écartée pour les mêmes motifs que ci-dessus; de plus, la Cour conçoit aisément que des avocats-stagiaires sans dossiers personnels ne puissent pas se prononcer sur le contenu du contrat de travail d'un collaborateur senior. Il ne s'agit donc pas d'un point relevant pour savoir s'il s'agissait d'un dossier personnel de l'appelant/demandeur ou d'un dossier de l'Etude, respectivement du défendeur.

Le dernier point qui emporte la conviction de la Cour selon laquelle il ne s'agissait pas d'un dossier personnel de l'appelant/demandeur est que ce dernier a attendu la fin de son contrat de travail (19 janvier 2016) pour réclamer sa participation, alors même que le mandat avec le client était terminé depuis le 16 mai 2014.

Il convient encore de prendre position sur les critiques de l'appelant/demandeur: il a déjà été écrit ci-dessus que le témoignage des stagiaires d'alors n'est pas relevant et n'est pas pris en considération par la Cour. S'agissant des factures du 12 mai 2014 (pièce 18 A______) ou du 27 février 2014 (pièce 12 B______), elles mentionnent en en-tête le nom de B______: la Cour considère que le travail effectif n'est pas déterminant, même si elle note le très grand nombre d'heures effectuées par l'appelant/demandeur. La signature par B______ du contrat de mandat, sa co-responsabilité externe ou l'absence d'assurance responsabilité civile de A______ n'ont pas d'impact sur les considérations précédentes: il est en effet incontesté que B______ était associé et que A______ était salarié de l'Etude: les arguments ci-dessus conservent toute leur pertinence et leur importance dans la qualification comme mandat de l'Etude et non comme mandat personnel. Contrairement à ce qu'explique l'appelant/demandeur, l'activité importante du collaborateur M______ sur le dossier confirme, pour la Cour, qu'il s'agissait d'un dossier de l'étude. Les éléments informatiques, d'ailleurs critiqués par l'appelant/demandeur, n'ont qu'une portée réduite; il en est de même de l'emplacement physique d'un dossier: il est en effet usuel qu'un dossier sur lequel on travaille beaucoup soit rangé dans son propre bureau: à l'inverse, tous les dossiers rangés dans un bureau ne sont pas des dossiers personnels de la personne occupant ledit bureau.

L'appelant/demandeur insiste beaucoup sur le sabotage du closing par l'intimé/défendeur, qui a interdit au collaborateur M______ d'aider l'appelant/demandeur pendant une phase cruciale de la finalisation de la transaction. L'appelant/demandeur considère que le désintérêt de l'intimé/défendeur pour le dossier confirme qu'il ne s'agissait pas d'un dossier de l'étude: cette attitude de l'intimé/défendeur est effectivement problématique et peu commune vu l'importance du moment (de sorte qu'il n'est probablement pas aussi "anecdotique" que l'a considéré le Tribunal), même si le supérieur (associé en l'espèce) est responsable du fonctionnement de l'étude et peut par conséquent donner des instructions, y compris s'agissant des priorités des collaborateurs. Il convient donc de prendre cet élément en compte dans la pesée des intérêts et il est en faveur du dossier personnel.

S'agissant de la demande tardive de ses prétentions financières en lien avec ce dossier, l'appelant/demandeur l'explique avec les rumeurs liées à l'avenir de l'étude et avec une éventuelle fusion. La Cour ne comprend pas en quoi une éventuelle fusion de l'étude ou une réorganisation de celle-ci auraient impliqué de renoncer pendant une année au moins au versement de la participation pour ce dossier que l'appelant/demandeur considérait comme essentiel.

De manière récapitulative, il n'est pas nécessaire, pour la Cour, que tous les éléments retenus par le Tribunal soient confirmés pour que sa position soit confirmée: les circonstances de l'arrivée du client, la formulation du contrat de mandat et l'absence de toute prétention à ce sujet avant la fin des rapports de service suffisent à la Cour pour considérer que la solution retenue par le Tribunal est correcte: il ne s'agissait pas d'un mandat personnel de l'appelant/demandeur.

Ce grief sera donc rejeté.

12.         L'appelant critique également le rejet partiel de ses prétentions en paiement à titre de participation au dossier "E______", qu'il considère comme un dossier personnel (JTPH p. 31, §9b; appel p. 57-58, §189-190; conclusion n° 9), dès lors que le Tribunal ne lui a accordé que 750 fr.

12.1 L'appelant/demandeur fait valoir qu'il n'est pas contesté que le dossier "E______" était un dossier personnel, que la provision initiale de 1'500 fr. avait été encaissée, mais que le dossier n'avait pas été facturé. Il fait valoir à ce titre une prétention de 4'850 fr., correspondant à la moitié des honoraires qui auraient dû être facturés, c'est-à-dire une quinzaine d'heures à 650 fr. (15 x 650 = 9'750; 50% de 9'750 = 4'875).

Subsidiairement, il fait valoir que l'entier de la provision doit lui être versée; cette provision est chiffrée à 1'500 fr. au §189 de l'appel, mais chiffrée à 2'000 fr. dans la conclusion n° 9.

12.2 L'intimé/défendeur explique que le dossier "E______" n'était pas un dossier personnel de l'appelant/demandeur. Les time-sheets n'avaient jamais été requis en première instance.

12.3 En l'espèce, le volet procédural de la conclusion n° 9 a déjà été traité ci-dessus au considérant 5. La Cour a confirmé que l'amplification des conclusions à 4'850 fr. (ou 4'875 fr.) en lien avec le mandat "E______" était irrecevable devant le Tribunal. Le grief est donc certes recevable en appel, mais doit donc être rejeté sur le fond. En effet, s'il n'avait pas le droit de réclamer ce montant en première instance, l'appelant/demandeur n'a pas davantage le droit de le réclamer en deuxième instance.

S'agissant de la conclusion subsidiaire, dès lors que l'appelant/demandeur lui-même admet que la provision encaissée n'était que de 1'500 fr., sa conclusion au paiement de 2'000 fr. devra être rejetée en tant qu'elle dépasse 1'500 fr. S'agissant du différentiel (à savoir la perception de l'intégralité de la provision, soit 750 fr. de plus que les 750 fr. déjà accordés par le Tribunal), l'art. 6 du contrat prévoit une participation de 50% sur le chiffre d'affaires: en l'espèce, le chiffre d'affaires n'est, selon la procédure, que de 1'500 fr. (encaissement réalisé), de sorte que la part de l'appelant/demandeur ne saurait être supérieure à 50%, soit les 750 fr. déjà accordés par le Tribunal (et qui, en tant que de besoin, seront confirmés); la critique de mauvaise gestion du dossier par l'intimé/défendeur, à savoir l'absence de facturation d'un montant supérieur, ne permet pas d'obtenir un montant supérieur.

Ce grief devra donc être rejeté.

13.         L'appelant critique également le rejet de ses prétentions en paiement de 40'000 fr. à titre de dommage à la réputation et de violation du droit à la personnalité (JTPH p. 32-34, §10; appel p. 58-64, §191-207; conclusion n° 10).

13.1 Selon le Tribunal, l'appelant/demandeur n'est pas parvenu à démontrer que la révélation des "panama papers" lui aurait porté préjudice, ni que l'employeur aurait failli à son devoir de protection. Le Tribunal en retient que l'appelant/demandeur n'a subi aucune atteinte à sa personnalité justifiant l'octroi d'une indemnité pour tort moral.

13.2 L'appelant/demandeur fait valoir que l'obligation de protection de la personnalité persiste au-delà de la fin des rapports de travail. Il allègue n'avoir pas pu postuler "utilement" pour un poste de juge au Tribunal administratif fédéral en 2017, car il aurait dû révéler avoir été employé de sa partie adverse de 2011 à 2015, ce qui aurait gravement nuit à sa candidature. Cet exemple est emblématique et les mêmes causes et effets l'affectent pour toute autre postulation dans le secteur public. Il s'était retrouvé devant le dilemme de devoir taire son activité auprès de l'intimé/défendeur ou de révéler cette réalité et d'être stigmatisé comme "avocat d'affaires". Plus de quatre années déterminantes de sa carrière professionnelle étaient liées, sans la moindre faute de sa part, aux "panama papers". En tant que collaborateur senior de l'étude du défendeur, il donnait l'impression erronée d'avoir été complice de pratiques abusives; cela lui causait une souffrance morale insupportable, dès lors qu'il avait toujours été opposé aux pratiques d'abus du secret d'affaires. Il ne pouvait pas se prévaloir d'un certificat de travail utile. En postulant dans le secteur public, il pourrait avoir une augmentation d'au moins 20'000 fr. par an par rapport à son salaire dans l'étude du défendeur. Il restait ainsi "confiné" dans le secteur privé, malgré ses compétences et expériences professionnelles beaucoup plus larges.

13.3 L'intimé/défendeur explique que l'appelant/demandeur n'avait jamais produit une quelconque preuve pour un refus de poste et qu'il avait lui-même retiré sa candidature au Tribunal administratif fédéral. Il n'avait jamais produit de certificats médicaux à l'appui de ses allégations.

13.4 L'art. 328 al. 1 CO impose à l'employeur de protéger et respecter, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur, et de manifester les égards voulus pour sa santé. La violation de l'art. 328 CO est une inexécution contractuelle, qui permet à la victime de réclamer la réparation du dommage, lequel peut consister en une réparation pour tort moral aux conditions posées par l'art. 49 CO (Rémy WYLER/ Boris HEINZER, Droit du travail, 4ème éd., Stämpfli, Berne 2019, p. 397-398).

Selon l'art. 49 al. 1 CO celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement. N'importe quelle atteinte ne justifie pas une indemnité (ATF 130 III 699 consid. 5.1; ATF 125 III 70 consid. 3a). L'atteinte doit revêtir une certaine gravité objective et être ressentie par la victime, subjectivement, comme une souffrance morale suffisamment forte pour qu'il apparaisse légitime de s'adresser au juge afin d'obtenir réparation (cf. ATF 129 III 715 consid. 4.4 et 120 II 97 consid. 2a et b; arrêt TF 4A_310/2019 du 10 juin 2020 consid. 4.1.1; CAPH/117/2021 du 16 juin 2021 consid. 5.1). Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer si les circonstances d'espèce justifient une indemnité pour tort moral dans le cas particulier (ATF 137 III 303, consid. 2.2.2; 129 III 715 consid. 4.4; arrêt TF 4A_310/2019 du 10 juin 2020 consid. 4.1.1; CAPH/117/2021 du 16 juin 2021 consid. 5.1).

L'atteinte objectivement grave doit être ressentie par la victime comme une souffrance morale, à défaut de quoi aucune indemnisation ne peut lui être accordée. Comme chaque être humain ne réagit pas de la même manière à une atteinte portée à son intégrité psychique, le juge doit se déterminer à l'aune de l'attitude d'une personne ni trop sensible, ni particulièrement résistante. Pour que le juge puisse se faire une image précise de l'origine et de l'effet de l'atteinte illicite, le lésé doit alléguer et prouver les circonstances objectives desquelles on peut inférer la grave souffrance subjective qu'il ressent, malgré la difficulté de la preuve dans le domaine des sentiments (ATF 125 III 70 consid. 3a; ATF 120 II 97 consid. 2b; CAPH/117/2021 du 16 juin 2021 consid. 5.1).

13.5 Comme le Tribunal, la Cour considère qu'il n'y a pas d'atteinte à la personnalité de l'appelant/demandeur. L'appelant/demandeur n'a pas rendu vraisemblable un quelconque comportement répréhensible de l'employeur à son sujet: les activités d'une étude d'avocats sont, en principe, diverses et l'appelant/demandeur insiste sur le fait que l'étude dans laquelle il travaillait était une étude non intégrée, où chaque associé disposait de ses propres dossiers. Il est ensuite fréquent que, lorsqu'un associé dispose d'un ou plusieurs collaborateurs, tous les dossiers de l'associés ne sont pas traités par le même collaborateur: autrement dit, un avocat collaborateur ne traite qu'une partie des dossiers de l'associé. De plus, en raison du pouvoir de subordination du travailleur à l'employeur, les choix de l'employeur ne peuvent justement pas être reprochés au travailleur. Ici, l'appelant/demandeur insiste d'autant plus sur l'absence de toute activité de sa part sur le type de dossiers révélés par les "panama papers". La question abstraite de savoir si un travailleur subit une atteinte à sa personnalité lorsque son étude a traité des dossiers cités dans les panama papers peut rester ouverte; en effet, de manière concrète, l'appelant/demandeur n'a pas prouvé avoir subi une atteinte à la personnalité pendant son activité. S'agissant d'une éventuelle atteinte à la personnalité postérieurement à son activité, elle doit être niée, faute d'avoir été prouvée: en effet, l'appelant/demandeur croit que ses chances sur le marché du travail seraient désormais réduites; il ne le prouve cependant pas. Il fait grand cas de savoir s'il doit ou non cacher les quatre années passées dans l'étude de l'intimé/défendeur: tout en respectant le secret professionnel, l'appelant/demandeur pourrait expliquer à un éventuel futur employeur la nature purement juridique de ses activités passées, y compris en présentant les domaines d'expertise où il excelle. Il doit en être de même en cas de postulation dans l'administration publique ou dans la magistrature. Quant à la "grande détresse sur le plan moral", le demandeur n'en fournit aucune preuve: que le demandeur ait été surpris, voire choqué, par certains dossiers traités par son ancien employeur est une chose, que cela crée un tort moral en sens du droit suisse en est une autre: le demandeur n'allègue d'ailleurs ni incapacité de travail, ni traumatisme ou suivi médical qui en aurait suivi.

De plus, l'appelant/demandeur n'a pas prouvé qu'il aurait subi un dommage concret. Il se limite à affirmer qu'il aurait pu gagner 20'000 fr. supplémentaires par an en cas d'activité dans le secteur public. D'ailleurs, postuler comme juge au Tribunal administratif fédéral (ou ailleurs) ne signifie pas encore que l'on soit élu ou choisi; l'appelant/demandeur n'a pas produit de document l'informant que sa candidature n'aurait pas été retenue en raison de son activité antérieure dans l'étude de l'intimé/défendeur. De plus, l'appelant/demandeur a lui-même retiré sa candidature, de sorte qu'il ne peut en faire aucun reproche à l'intimé/défendeur. Enfin, l'appelant/demandeur n'explique pas, dans son appel, sur quoi sa prétention concrète de 40'000 fr. se fonde: il n'a pas allégué et encore moins prouvé qu'il aurait immédiatement gagné un salaire annuel net supérieur à 200'000 fr.

Ce grief doit donc être rejeté.

14.         L'appelant critique ensuite la décision du Tribunal en lien avec l'ordinateur (JTPH p. 34-36, §11-12; appel p. 64-67, §208-216; conclusions n° 11 et 14).

14.1 Selon le Tribunal, un ordinateur portable [de marque] F______ a été acquis en novembre 2014 au prix de 2'199 fr. et payé par débit du compte de l'Etude. L'ordinateur n'a pas été restitué à la fin des rapports de travail. Pour le Tribunal, l'appelant/demandeur n'a pas démontré que la valeur résiduelle de l'ordinateur serait désormais de 200 fr.

14.2 L'appelant/demandeur fait valoir qu'il avait demandé en novembre 2014 à son employeur un ordinateur pour pouvoir travailler depuis son domicile. L'employeur lui avait ensuite acheté un ordinateur portable F______ au prix de 2'199 fr. et fait procéder au paramétrage de l'ordinateur pour accès à distance (VPN) au système informatique de l'étude. L'intimé/défendeur avait renoncé à faire entendre le témoin V______ de la société informatique AD______ qui avait procédé au paramétrage de l'ordinateur. Il avait proposé dès le 30 décembre 2015 de racheter les ordinateurs, mais n'avait pas eu de réponse de l'intimé/défendeur. Il restait disposé à rendre l'ordinateur F______ tel quel au défendeur. Enfin, le Tribunal avait, par "formalisme excessif", refusé de l'indemniser à hauteur de 1'000 fr. pour son ordinateur P______/4______ [marque, modèle].

14.3 L'intimé/défendeur explique que les parties s'étaient accordées pour dire que l'ordinateur avait été acquis pour le prix de 2'199 fr. Il importait donc peu de savoir s'il avait été utilisé pour des fins professionnelles ou privées. Enfin, aucune preuve de la valeur actuelle de 200 fr. de l'ordinateur n'avait été apportée.

14.4 Selon l'art. 327 al. 1 CO, sauf accord ou usage contraire, l’employeur fournit au travailleur les instruments de travail et les matériaux dont celui-ci a besoin. Selon l'art. 327 al. 2 CO, si, d’entente avec l’employeur, le travailleur fournit lui-même des instruments de travail ou des matériaux, il est indemnisé convenablement, sauf accord ou usage contraire.

Le principe posé par la loi reprend la logique de l'adage ubi emolumentum ibi onus: l'employeur étant le propriétaire et le bénéficiaire de l'entreprise, il doit assumer les coûts de production (Aurélien WITZIG, in: Luc Thévenoz/ Franz Werro (éd.), Code des obligations I , Art. 253-529 CO – Commentaire romand, 3ème éd., Helbing Lichtenhahn, Bâle 2021, p. 245, §1 ad art. 327 CO).

La notion d'instruments de travail et de matériaux doit être comprise dans un sens large et recouvre tous les moyens devant être mis à disposition du travailleur pour l'accomplissement du travail (Marie-Gisèle DANTHE, in: Jean-Philippe Dunand/ Pascal Mahon (éd.), Commentaire du contrat de travail, 2ème éd., Stämpfli, Berne 2022, p. 298, §4 ad art. 327 CO).

Selon l'art. 327a al. 1 CO, l’employeur rembourse au travailleur tous les frais imposés par l’exécution du travail et, lorsque le travailleur est occupé en dehors de son lieu de travail, les dépenses nécessaires pour son entretien. Selon l'art. 327a al. 2 CO, un accord écrit, un contrat-type de travail ou une convention collective peut prévoir que les frais engagés par le travailleur lui seront remboursés sous forme d’une indemnité fixe, telle qu’une indemnité journalière ou une indemnité hebdomadaire ou mensuelle forfaitaire, à la condition qu’elle couvre tous les frais nécessaires. Selon l'art. 327a al. 3 CO, les accords en vertu desquels le travailleur supporte lui-même tout ou partie de ses frais nécessaires sont nuls.

Les frais imposés par l'exécution du travail comprennent toutes les dépenses nécessaires, occasionnées par le travail. Il peut s'agir de frais courants (téléphone, matériel de bureau, frais d'affranchissement), de frais de déplacement et de voyage, de frais d'hébergement et de repas si le travailleur est occupé en dehors de son lieu de travail, de frais de vêtements, de frais mis à la charge de l'employeur par le droit public (DANTHE [2022], p. 303, §4 ad art. 327a CO).

14.5 En l'espèce, il est admis par toutes les parties et le Tribunal que l'ordinateur F______ a été payé par l'employeur (le prix d'acquisition de 2'199 fr étant incontesté) et qu'il n'a pas été restitué par le travailleur à la fin du contrat. Cela étant, il ressort d'un courriel du 30 décembre 2015 (pièce 8 du chargé du 6 juin 2017) produit à l'appui d'un allégué de la demande initiale que l'appelant/demandeur avait contacté son employeur pour régler notamment le sort de son matériel informatique. Il ne ressort pas de la procédure que l'employeur lui aurait répondu avant de formuler ses conclusions reconventionnelles le 13 novembre 2017. La Cour considère donc qu'il s'agit d'un outil de travail, à charge de l'employeur; la question de l'utilisation ou non du logiciel AE______ sur l'ordinateur F______ n'est pas déterminante, dès lors qu'il n'est pas contesté que l'appelant/demandeur a pu l'utiliser pendant plus d'une année; à l'inverse, on peine à croire que l'employeur aurait acheté (offert) et fait configurer un ordinateur à son travailleur qui aurait été incompatible avec le système informatique de l'Etude. La Cour retient donc que l'ordinateur portable F______ est un outil de travail à charge de l'employeur.

Il y a donc théoriquement deux solutions: soit l'appelant/demandeur conserve l'ordinateur F______ et indemnise son employeur, soit l'appelant/demandeur restitue l'ordinateur à son employeur.

Il est cependant contraire à l'art. 327 CO que le Tribunal condamne l'appelant/demandeur à rembourser à l'employeur l'intégralité du prix d'achat, alors même que l'ordinateur a été utilisé pendant plus d'une année. Si le prix d'achat de 2'199 fr a été prouvé, il est notoire que le matériel informatique connaît une dépréciation rapide et l'appelant/demandeur a suffisamment clairement contesté la valeur dudit ordinateur (fardeau de l'allégation: ATF 144 III 519, 522 consid. 5.1). La condamnation de l'appelant/demandeur au paiement de 2'199 fr. sera donc annulée. S'il a réussi de manière convaincante à remettre en cause le prix de 2'199 fr. l'appelant/demandeur n'a en revanche pas réussi à prouver que l'ordinateur n'aurait plus qu'une valeur résiduelle de 200 fr. L'appelant/demandeur ne saurait donc conserver l'ordinateur pour ce prix très réduit. Ce sera donc la deuxième solution qui sera appliquée, dès lors qu'elle se trouve aussi dans une conclusion subsidiaire d'appel (n° 11), le tribunal (ou la Cour) ne pouvant accorder à une partie ni plus ni autre chose que ce qui est demandé, ni moins que ce qui est reconnu par la partie adverse (art. 58 al. 1 CPC): ici, il s'agit concrètement d'un minus et non d'un novum par rapport à la procédure de première instance, auquel il peut être donné suite. Cette restitution de l'ordinateur se justifie aussi par le fait que l'intimé/défendeur demande à être indemnisé à hauteur de 2'199 fr. pour l'ordinateur; s'il estime en procédure que l'ordinateur possédait encore une telle valeur (à tout le moins à la fin des rapports de travail), alors il a un intérêt à le récupérer.

L'appelant/demandeur sera donc condamné à restituer l'ordinateur à l'intimé/défendeur dans un délai de 30 jours après que le présent arrêt sera définitif (un éventuel recours au Tribunal fédéral n'ayant pas d'effet suspensif, et pour éviter des difficultés d'interprétation, le délai ne commencera pas à courir après l'entrée en force du présent arrêt).

L'appel sera donc admis sur ce point et le chiffre 8 du jugement sera annulé. Par effet logique, dès lors que B______ n'a pas de créance contre l'appelant/demandeur, le chiffre 9 devient aussi sans objet et sera donc aussi annulé.

L'appelant/demandeur fait encore valoir une prétention de 1'000 fr. pour son ordinateur portable P______/4______. L'irrecevabilité de cette conclusion a été confirmée ci-dessus au considérant 6.

15.         L'appelant conclut à l'annulation des chiffres 11, 12, 13, 14 et 16 en matière de frais judiciaires de première instance (conclusion n° 3) et à la condamnation de l'intimé aux dépens (conclusion n° 18). Il ne motive cependant pas sa critique. Cela étant, ce n'est pas problématique dès lors que les frais judiciaires sont fixés et répartis d'office (art. 105 al. 1 CPC).

La Cour confirmera la répartition des frais judiciaires de première instance. En effet, le jugement du Tribunal est pour l'essentiel largement confirmé. Il n'y a donc pas de raison de fixer autrement la répartition des frais judiciaires fixée par le Tribunal. S'agissant de la quotité desdits frais, le volume des écritures et l'ampleur de l'instruction effectuée par le Tribunal la justifient largement.

S'agissant des frais d'appel, des frais judiciaires sont fixés entre 200 fr. et 10'000 fr. lorsque la valeur litigieuse excède 50'000 fr. devant la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice (art. 19 al. 3, let. d LaCC). L'émolument forfaitaire de décision est fixé entre 1'000 fr. et 3'000 fr. pour une valeur litigieuse entre 100'001 fr. et 300'000 fr. (art. 71 RTFMC). En l'occurrence, vu l'ampleur de la procédure et les écritures multiples, il se justifie de fixer l'émolument à 1'500 fr., correspondant à l'avance de frais.

L'appelant/demandeur succombe pour l'essentiel, à l'exception de la question de l'ordinateur portable. La valeur de l'ordinateur oscille entre 200 fr. et 2'100 fr. selon les parties, alors que le reste des prétentions dépasse 170'000 fr.; l'intimé/défendeur succombe donc pour une valeur litigieuse entre 0.11% et 1,23%. De ce point de vue, il se justifie de mettre l'intégralité des frais judiciaires à charge de l'appelant/demandeur.

Les frais judiciaires seront compensés avec l'avance de frais de 1'500 fr. versée par l'appelant/demandeur.

Il n'y a pas de dépens pour la représentation en justice dans les causes soumises à la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


A la forme
:

Déclare recevable, dans le sens des considérants ci-dessus, l'appel du 10 décembre 2022 de A______ contre le jugement JTPH/344/2022 du Tribunal des prud'hommes du 10 novembre 2022 dans la cause C/6517/2017-5.

Au fond :

Annule les chiffres 8 et 9 du jugement.

Cela fait, statuant à nouveau, condamne A______ à restituer à B______ l'ordinateur [de marque] F______ dans un délai de 30 jours après que le présent arrêt sera devenu définitif.

Confirme le jugement pour le surplus.

Sur les frais :

Fixe les frais judiciaires à 1'500 fr. et les met à charge de A______.

Dit qu'ils sont compensés avec l'avance de frais du même montant.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur David HOFMANN, président; Monsieur Claudio PANNO, Madame
Karine RODRIGUEZ, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.