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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/10263/2021

CAPH/18/2024 du 29.02.2024 sur JTPH/291/2022 ( OS ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/10263/2021 CAPH/18/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU JEUDI 29 FEVRIER 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 19 septembre 2022 (JTPH/291/2022), représentée par Me B______, avocat, Étude C______,

et

Madame D______, domiciliée ______, intimée.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPH/291/2022 du 19 septembre 2022, reçu par A______ SA le lendemain, le Tribunal des prud'hommes, groupe 5, statuant par voie de procédure simplifiée, a déclaré recevable la demande formée le 31 août 2021 par D______ contre A______ SA (chiffre 1 du dispositif), déclaré recevable la demande reconventionnelle formée le 8 novembre 2021 par A______ SA contre D______ (ch. 2), condamné A______ SA à verser à D______ la somme brute de 28'075 fr. 26, avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er janvier 2021 (ch. 3), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 4), débouté A______ SA de toutes ses conclusions reconventionnelles (ch. 5), dit que la procédure était gratuite et qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 6) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 7).

B. a. Par acte expédié le 20 octobre 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a appelé de ce jugement, dont elle réclame l'annulation.

Elle a conclu, avec suite de frais, au rejet de la demande formée le 31 août 2021 par D______ et à la condamnation de la précitée à lui payer 9'991 fr. 65 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 23 septembre 2021, ainsi que 4'886 fr. 89 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 3 novembre 2021.

Elle a produit un chargé de 15 pièces figurant toutes au dossier de première instance.

b. D______ a conclu à l'irrecevabilité de l'appel formé par A______ SA, à la confirmation du jugement entrepris et au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions.

Elle a produit un chargé de 8 pièces figurant toutes au dossier de première instance, à l'exception des photographies produites sous pièce 6.

c. Par pli du 15 novembre 2022, le greffe de la Cour a imparti un délai de 30 jours à A______ SA pour répliquer.

d. A______ SA ne s'étant pas déterminée dans le délai imparti, les parties ont été informées par avis du 6 janvier 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les éléments pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour :

a. A______ SA est une société de droit suisse dont le but est, notamment, de faire, en Suisse et à l'étranger, du négoce, commerce, stockage, transport et distribution de marchandises ou de matières premières, ainsi que de fournir des services environnementaux, d'audit, d'évaluation de la conformité et de certification, y compris toutes les autres activités connexes (cf. extrait du Registre du commerce pour les buts complets). Son siège est à Genève.

b. B______ a été son unique administrateur du 29 mai 2020 au 30 novembre 2021. Depuis le 30 novembre 2021, E______ est administrateur, F______, G______ et H______ sont quant à eux directeurs avec signature collective à deux.

c. Au moment de la création de A______ SA, D______ et I______ détenaient chacun 50% du capital-actions par l'intermédiaire de leurs sociétés respectives, soit, pour D______, J______ SARL.

d. D______ a été engagée par A______ SA en qualité de chief executive officer (ci-après CEO) à 50%, à partir du 1er juillet 2020, par contrat de travail à durée indéterminée signé le 14 juillet 2020.

La durée de travail hebdomadaire contractuellement prévue était de 21 heures, les heures supplémentaires n'étant pas payées mais devant être compensées sous la forme de congés.

Le salaire annuel convenu était de 60'000 fr. bruts.

e. Par communiqué de presse du 20 novembre 2020, A______ SA a annoncé la mise en place d'une usine de masques chirurgicaux conformes à la norme EN 14783 dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

f. Par courrier du 16 novembre 2020, D______ a résilié son contrat de travail avec effet au 31 décembre 2020.

g. Par courrier électronique du 4 janvier 2021, B______ a notamment sollicité de D______ la remise des clefs de l'usine de A______ SA. Il a également invité la précitée à ne plus se présenter sur place sauf accord préalable de A______ SA, précisant que la violation de cette instruction serait constitutive de violation de domicile.

h. Au début du mois de janvier 2021, A______ SA a mandaté K______ SA afin de faire contrôler l'accès à l'usine par un agent de sécurité.

K______ SA a facturé à A______ SA 15 jours d'intervention pour un montant total de 8'533 fr. 60 en relation avec ces prestations.

i. Le 12 janvier 2021, D______ s'est rendue à l'usine de A______ SA en compagnie de plusieurs personnes. L'accès aux locaux lui a été refusé par l'agent de sécurité en poste. S'en est suivie une altercation entre cet agent et un dénommé "N______" [prénom] accompagnant D______. Cette dernière et ses accompagnants ont ensuite quitté les lieux sans pouvoir accéder à l'usine.

j. Par courrier du 9 mars 2021, A______ SA a reçu une facture de 213 fr. 25 de L______ SA correspondant au blocage du monte-charges et de l'ascenseur effectué à sa demande le 15 janvier 2021.

k. Par voie de décision circulaire de son conseil d'administration du 16 mars 2021, A______ SA a déchu J______ SARL de sa qualité d'actionnaire.

B______ a adressé une copie de ladite décision à D______ par courrier du 6 avril 2021.

l. Le 3 juin 2021, A______ SA a reçu de [la serrurerie] M______ SARL une offre se rapportant au changement des cylindres de ses locaux, d'un montant total de 1'031 fr. 35.

m. En date du 4 juin 2021, A______ SA a émis à l'attention de D______ une facture d'un montant total de 9'991 fr. 65, libellée comme suit:

 

Rubrique

HT

TVA (7.7%)

TTC

Frais de protection du site et des employés suite à menaces avérées 

7923.49

610.10

8533.60

Sécurisation monte-charge : protection de site et des employés

198.00

15.24

213.25

Sous total-I

8121.49

625.34

8746.85

 

 

 

 

Frais de changement de serrures

957.60

73.73

1031.55

Pose des cylindres monte-charge et mise en service (estimé)

198.00

15.24

213.25

Sous total-II

1155.60

88.98

1244.80

 

HT

TVA (7.7%)

TTC

Montant Total à payer :

9'277.09

714.32

9'991.65

 

n. Par courrier du 23 septembre 2021, A______ SA a mis en demeure D______ de régler la facture susmentionnée d'ici au 4 octobre 2021.

o. Par courrier du 14 octobre 2021, D______ a répondu à A______ SA ne jamais avoir eu connaissance de la facture précitée. Elle contestait en toute hypothèse le bien-fondé des montants réclamés.

p. Le 3 novembre 2021, l'étude d'avocats C______ a émis à l'attention de A______ SA une note d'honoraires de 4'886 fr. 89 "pour l'activité déployée au 3 novembre 2021" dans le cadre du "litige c/ Mme D______ (troubles, droit du travail)".

D. a. Par requête en conciliation du 11 mai 2021, D______ a assigné A______ SA en paiement de la somme totale de 37'433 fr. 16.

La tentative de conciliation effectuée le 24 juin 2021 ayant échoué, l'autorisation de procéder a été délivrée à D______.

b. Par demande du 31 août 2021, D______ a conclu à la condamnation de A______ SA à lui verser la somme de 28'075 fr. 26, avec intérêts moratoires moyens, à titre d'heures supplémentaires non payées, et à lui remettre un certificat de salaire 2020 adapté en conséquence.

Elle a allégué, en substance, que son contrat de travail prévoyait un taux d'activité de 4 heures par jour. Or, elle avait travaillé en moyenne 12 heures par jour entre le 1er mai et le 31 décembre 2020.

c. Par mémoire de réponse et demande reconventionnelle du 8 novembre 2021, A______ SA a conclu au rejet de la demande formée par D______ et à la constatation qu'elle n'était débitrice d'aucune prestation pécuniaire à l'égard de la précitée.

Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à ce que D______ soit condamnée à lui payer la somme de 9'991 fr. 65, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 23 septembre 2021, et la somme de 4'886 fr. 89, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 3 novembre 2021, à titre de dommage.

Elle a notamment allégué n'avoir jamais demandé à D______ qu'elle exécute des heures supplémentaires, ni n'avoir eu connaissance de l'accomplissement de telles heures.

Elle a en outre reproché à D______ son refus de restituer les clés de l'usine, malgré les injonctions et rappels de son administrateur, B______, ainsi que ses "visites intempestives et à tout le moins illicites". Ce comportement l'avait contrainte à solliciter les conseils d'un avocat et à sécuriser les lieux (changement des cylindres de l'entrée principale de l'usine ainsi que du local cuisine/vestiaire, blocage de l'accès aux locaux par les deux monte-charges et déploiement d'agents de sécurité).

d. Par mémoire du 13 décembre 2021, D______ a conclu au rejet de la demande reconventionnelle.

Elle a notamment allégué s'être rendue dans les locaux de A______ SA en sa qualité d'actionnaire tout comme I______, ce dernier n'ayant lui non plus pas rendu ses clés de l'usine malgré l'injonction de B______. Elle a en outre contesté le dommage allégué par A______ SA.

e. Par mémoire du 12 janvier 2022, D______ a amplifié ses conclusions à concurrence de 50'000 fr., soit 10'000 fr. à titre de salaires impayés et 40'000 fr. à titre d'heures supplémentaires, avec intérêts moratoires.

f. Par courrier du 19 janvier 2022, A______ SA a produit une pièce complémentaire.

g. Dans ses déterminations du 26 janvier 2022 relatives à la pièce susmentionnée, D______ a allégué que la présence de N______ à ses côtés lors de l'incident du 12 janvier 2022 n'était pas destinée à terroriser, intimider ou faire scandale mais à la rassurer, car elle-même se sentait menacée par I______ et B______.

h.a A l'audience de débats du 2 mars 2022, D______ a retiré ses conclusions amplifiées du 12 janvier 2022 et persisté dans sa demande initiale, se réservant toutefois le droit de réclamer par voie judiciaire les prétentions figurant dans son écriture du 12 janvier 2022.

h.b Sur question du Tribunal, elle a déclaré qu'elle-même et I______ détenaient A______ SA à raison de 50% chacun. I______ ne voulant pas qu'elle soit engagée à un taux d'activité supérieure à 50%, elle avait accepté de travailler à ce taux tout en lui indiquant que son activité au sein de A______ SA nécessiterait plus d'heures de travail que celui prévu contractuellement. Tout le monde avait en outre connaissance de ses heures supplémentaires, elle-même en ayant par ailleurs informé I______ par oral et probablement par écrit dès juillet 2020, ainsi que B______ lors de sa visite à l'usine mi-août 2020.

Elle avait gardé les clés de l'usine car elle ne comprenait pas pourquoi, en sa qualité d'actionnaire, elle devait les rendre, alors que son associé, I______, les avait conservées. Elle les avait également conservées afin de pouvoir faire visiter l'entreprise à des repreneurs potentiels et de ne pas céder aux pressions qu'on lui faisait subir pour qu'elle cède ses parts de A______ SA pour une valeur nulle.

Elle a demandé que A______ SA produise le relevé d'activité relatif à la note d'honoraires de l'étude C______. A______ SA a répondu ne pas souhaiter produire cette pièce en l'état, étant précisé qu'une description de l'activité de l'étude figurait sur la facture et qu'elle n'avait pas produit de faux.

h.c Sur question du Tribunal, A______ SA a déclaré avoir dû faire appel aux services de K______ SA en janvier 2021 afin de protéger les employés qui étaient menacés par les apparitions intempestives de D______, ou pour empêcher l'intervention de tiers comme lors des événements du 12 janvier 2021. Les cylindres des locaux avaient été changés après le 3 juin 2021, à savoir après l'établissement de l'offre de [la serrurerie] M______ SARL. Selon A______ SA, ce remplacement était intervenu en temps opportun.

i. Le Tribunal a entendu divers témoins lors des audiences de débats des 27 avril, 4 mai, 10 mai et 2 juin 2022. Leurs déclarations ont été reprises ci-après dans la mesure utile.

i.a O______ a déclaré avoir été employé par A______ SA de septembre 2020 à décembre 2021 en qualité de mécanicien régleur CNC. Il travaillait, en moyenne, de 7h30 à 17h30-18h, voire 21h du lundi au vendredi. D______ était présente lorsqu'il travaillait, bien qu'elle puisse parfois s'absenter pour des raisons administratives. Elle ouvrait l'entreprise à 7h30 et la fermait même lorsque les employés finissaient leur travail à 21h.

D______ était revenue dans les locaux deux fois après la fin de ses rapports de travail, une première fois à la fin de l'été, une seconde fois avec des personnes désireuses d'acheter l'entreprise. Lors de cette dernière visite, elle avait eu une attitude normale. O______ avait toutefois entendu que lors de la visite en question, une altercation était survenue à l'entrée de l'usine. Il n'en avait cependant pas eu de perception directe. Il lui avait été rapporté que D______ s'était vue refuser l'accès aux locaux car elle n'était plus CEO.

Il avait enfin vu I______ à l'usine à raison d'une fois toutes les deux semaines en moyenne.

i.b P______ a déclaré avoir été employé par A______ SA du 1er septembre au 31 décembre 2020 en qualité de technicien de maintenance. Il travaillait de 7h à 17h du lundi au vendredi. Il voyait D______ la moitié du temps, soit deux à trois jours en moyenne par semaine. Il a précisé que celle-ci ouvrait l'usine le matin, à raison également de deux à trois fois par semaine en moyenne. Il ne l'avait pas vue sur place en décembre 2020.

Il avait été témoin d'une altercation entre un agent de sécurité et D______. L'agent en question était présent pour empêcher l'entrée de personnes qui n'étaient pas employés de A______ SA. D______ était arrivée en compagnie de son associé, de E______, d'une personne de "deux mètres et 120 kilos" et d'une autre personne, dont P______ ignorait l'identité.

Selon P______, l'agent de sécurité avait indiqué à D______ et ses accompagnants avoir reçu pour instruction de ne laisser entrer que les employés. En réponse à cela, le "grand monsieur" avait agressé l'agent en le plaquant au mur et en lui disant "on rentre". L'agent de sécurité avait sorti sa matraque télescopique et s'était mis en position. D______ et les autres personnes présentes avaient "calmé le jeu" et la situation s'était résorbée.

i.c Q______ a déclaré avoir été employée par A______ SA de juillet 2019 à janvier 2021, puis d'avril 2021 à février 2022, en qualité de manager des opérations. Elle travaillait du lundi au vendredi de 7h30 à 16h30 avec une heure de pause. D______ était en moyenne présente "en tout cas trois fois par semaine" pendant ses horaires de travail. Selon le témoin, D______ venait plus qu'elle, parfois elle venait moins et parfois elle ne venait pas du tout. Les horaires de D______ étaient très irréguliers, celle-ci étant très présente à certaines périodes et "un petit peu moins" à d'autres. Elle ouvrait et fermait souvent les locaux. Le témoin a encore précisé que D______ était physiquement présente "plus qu'à 50% dans les locaux".

Q______ ne connaissait pas les raisons exactes de la fin des rapports de travail entre D______ et A______ SA. Elle savait qu'il avait été demandé à D______ de rendre ses clés. Elle l'avait toutefois vue revenir à plusieurs reprises sur place. Une altercation à l'entrée de l'usine impliquant D______ et d'autres personnes lui avait été rapportée. Elle n'en avait toutefois pas eu de perception directe.

Les autres fois où D______ s'était rendue à l'usine après la fin des rapports de travail, en dépit de l'interdiction qui lui en avait été faite, ses visites étaient mouvementées et chaotiques. La décision de lui avoir interdit l'accès aux locaux avait été salutaire pour l'atmosphère de travail. Q______ avait en effet ressenti progressivement une pression psychologique de D______ sur elle et ses collègues.

i.d R______ a déclaré avoir rencontré D______ pendant la pandémie de COVID-19. Il avait été intéressé par le rachat de A______ SA ou par la possibilité d'être apporteur d'affaires pour celle-ci. Il avait visité quatre fois les locaux, la première fois pour les voir, la seconde fois avec un acheteur potentiel de masques, la troisième fois avec un politicien pour réaliser un reportage TV et la quatrième fois avec des investisseurs intéressés par le rachat de l'usine. A chaque visite, D______ se comportait bien tant avec ses accompagnants qu'avec les employés de A______ SA. Il s'était fait remplacer lors d'une des visites par l'un de ses employés, N______. Ce dernier lui avait rapporté une altercation entre D______ et l'agent de sécurité, au cours de laquelle celui-ci avait sorti un bâton de sécurité pour frapper D______. Il avait pu s'interposer et bloquer le geste de l'agent.

i.e S______ a déclaré avoir rencontré D______ en 2003 dans le cadre de leur travail chez T______ CO. Celle-ci l'avait sollicité en 2018 en tant que médiateur car elle était en désaccord avec I______ au sujet d'une recapitalisation. Il l'a décrite comme une personne ayant beaucoup d'ambition et souhaitant toujours aller au-delà de ses objectifs.

i.f I______ a déclaré que D______ et lui-même avaient été associés dans A______ SA à raison de 50% chacun. Il avait participé à la négociation de son contrat. A son sens, les tâches que devait accomplir D______ en sa qualité de CEO étaient réalisables en travaillant à 50%. Un taux de 100% n'était pas nécessaire. Les tâches de D______ consistaient à trouver des fournisseurs de matières premières et à s'assurer de leur qualité, étant précisé qu'elle n'était pas la seule à avoir cette responsabilité. Il n'avait pas été informé que D______ travaillait du matin au soir. Sur dix visites de l'usine effectuées par ses soins, D______ était en moyenne présente deux à trois fois. Selon la période, il venait à l'usine tous les jours ou une seule fois par semaine.

Il a encore déclaré que D______ avait mis fin à son contrat de travail car il le lui avait demandé, étant précisé qu'en sa qualité d'associé à parts égales, il ne pouvait ni la licencier, ni l'obliger à démissionner. B______ avait demandé à D______, ainsi qu'à deux employés, qu'elle restitue ses clés au moment de sa démission. Il avait demandé à D______ pourquoi elle ne les avait pas rendues. Elle lui avait répondu que c'était son usine.

D______ s'était rendue trois à quatre fois sur place depuis le mois de janvier 2021, sans qu'il soit présent. Les employés lui avaient demandé de prendre des mesures suite à l'événement survenu le 11 janvier 2021, faute de quoi ils ne viendraient plus travailler.

Il lui avait été relaté que, ce 11 janvier 2021, D______ était venue à l'usine et que ses accompagnants avaient intimidé les employés, respectivement les avaient menacés de licenciement. Il avait appelé B______ pour trouver une solution car l'usine était ouverte et avait trois entrées possibles. Il avait ensuite contacté K______ SA qui lui avait proposé de dépêcher sur place un agent de sécurité, ce qui avait été fait dès le 12 janvier 2021. Il ne se sentait en effet plus en sécurité. B______ et lui-même avaient, à cette même époque, demandé à la régie de changer les cylindres des portes d'accès de l'usine.

i.g U______, directeur industriel de la société Y______, a déclaré que D______ l'avait contacté début janvier 2021 car elle désirait que Y______ reprenne tout ou partie des activités de A______ SA. Elle l'avait prévenu qu'il y avait des tensions avec son coactionnaire. Le 12 janvier 2021, il avait rencontré D______ à l'usine en compagnie de E______ et d'une tierce personne. Lors de cette visite, la porte d'accès était fermée et gardée par un vigile. D______ avait dit vouloir entrer car elle en avait le droit. La personne qui l'accompagnait avait essayé de "déplacer physiquement" le vigile pour libérer la porte et les précités en étaient rapidement venus aux mains. D______ était déterminée et se sentait dans son bon droit; elle était verbalement virulente mais ne manifestait pas d'agressivité physique. U______ était retourné ultérieurement à l'usine en compagnie de I______ et du nouveau directeur général de la division Y______.

i.h V______ a déclaré avoir été employé par A______ SA de septembre 2020 à mi-janvier 2021 en tant que responsable d'équipe (team leader). Il travaillait du lundi au vendredi de 7h30 à 16h30. D______ était présente "99% du temps". Elle effectuait des appels et des visites auprès de clients potentiels, discutait de la fabrication de pièces pour l'usine, dirigeait l'équipe et formait les responsables d'équipe. Elle s'occupait normalement de l'ouverture de l'usine. Il lui était arrivé de faire des heures supplémentaires et de partir à 17h30, voire 21h30. D______ était alors toujours présente. Elle pouvait s'absenter, en moyenne deux à trois fois par semaine entre trente minutes et une heure, pour s'occuper de son autre activité de nettoyage. Il n'avait presque jamais vu I______ au début de son contrat. Ce dernier était toutefois plus impliqué et venait plus souvent vers la fin de son contrat.

i.i W______ a déclaré avoir été présent lorsque D______ et I______ avaient discuté de la fondation de A______ SA. D______ avait proposé de baisser son salaire à 50% tout en travaillant à 100% voire 200%. Il avait entendu que les 50% de participation dans l'entreprise de D______ étaient liées à la baisse de son salaire à 50%.

W______ travaillait pour l'entreprise de nettoyage de D______. A______ SA n'ayant pas d'accès internet propre, D______ avait installé la borne wifi de son entreprise de nettoyage au sein des locaux de A______ SA, raison pour laquelle il avait travaillé dans lesdits locaux d'avril à juin 2020. Il travaillait de 8h ou 8h30 jusqu'à 18h30-19h voire parfois 20h. D______ était systématiquement présente, y compris les samedis. Elle ne venait jamais travailler pour le compte de son entreprise de nettoyage car elle n'en avait pas le temps; elle venait toutefois ponctuellement pour répondre à des questions précises. Lorsqu'il était présent, il la voyait gérer les employés et s'occuper des machines. Pour lui, elle était la directrice de l'usine et celle vers qui on se tournait en cas de problème. Il avait vu I______ sur place à deux occasions.

Il avait également vu un certain "N______" [prénom] à deux reprises. La première fois en compagnie de D______ et R______ lors d'une visite des locaux qui s'était bien déroulée. La seconde lors d'une visite avec E______ et D______. Lors de cette seconde visite, un agent de sécurité d'une "agressivité hors du commun" avait refusé de les laisser passer. D______ et ses accompagnants n'avaient pas compris pourquoi un associé ne pouvait pas accéder à son usine et avaient essayé d'entrer. L'agent de sécurité avait alors sorti sa matraque. Celui-ci et "N______" s'étaient alors empoignés, sans toutefois se porter de coups. D______ et ses accompagnants avaient appelé la police. Le gendarme leur avait indiqué, renseignements pris auprès de l'agent de sécurité, que celui-ci ne laissait entrer que les employés de A______ SA.

i.j X______ a déclaré avoir été employé par A______ SA de septembre 2020 à janvier 2021 et de mai à juin 2021 en tant qu'automaticien. Il travaillait de 7h30 ou 8h à 16h30 du lundi au jeudi. D______ était souvent là à ses débuts, à savoir 3 à 4 jours par semaine lorsqu'il travaillait. Vers novembre-décembre 2020, elle venait moins souvent, à savoir 2 à 3 jours pendant sa semaine de 4 jours. Lorsqu'elle était là, D______ ne passait pas forcement toute la journée à l'usine. Parfois elle était là uniquement le matin ou alors le matin et la fin de journée.

i.k E______ a déclaré que l'une de ses sociétés avait racheté A______ SA il y a environ un an. D______ avait voulu lui faire visiter l'entreprise en 2021. Le garde posté devant la porte lui avait toutefois interdit l'accès et affirmé avoir reçu l'ordre de ne pas la laisser entrer. Une altercation était alors survenue entre le garde et la personne accompagnant D______.

E______ a encore déclaré que D______ l'avait contacté en sa qualité de coactionnaire et de directrice de A______ SA. Il était quant à lui venu visiter l'entreprise en tant qu'acheteur potentiel. Il avait finalement pu visiter les locaux 2 à 4 semaines après l'altercation en compagnie de I______. A son souvenir, un agent de sécurité était encore présent lors de cette seconde visite.

j. A l'issue de l'audience de débats principaux du 2 juin 2022, les parties ont plaidé et le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel a été interjeté contre une décision finale (308 al. 1 let. a CPC), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans le délai utile de 30 jours (art. 142 al. 1, 143 al. 1 et 311 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131 et 311 CPC). Il est dès lors recevable de ce point de vue (cf. pour le surplus infra, consid. 2.2.1 s.).

1.2 Est également recevable la réponse à l'appel, déposée dans le délai légal (art. 312 al. 2 CPC).

1.3 A______ SA sera désignée, ci-après, en tant qu'appelante et D______ en tant qu'intimée.

1.4 La valeur litigieuse étant inférieure à 30'000 fr. et le litige portant sur un contrat de travail, la cause est soumise à la procédure simplifiée (art. 243 al. 1 CPC) et à la maxime inquisitoire sociale (art. 247 al. 2 let. b CPC). Cette maxime implique notamment que le tribunal n'est pas lié par les offres de preuves et les allégués de fait des parties (ATF 139 III 457 consid. 4.4.3.2), et qu'il peut fonder sa décision sur des faits qui n'ont certes pas été allégués, mais dont il a eu connaissance en cours de procédure en consultant le dossier (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2021 du 14 décembre 2021 consid. 5.1 s. résumé in CPC Online, ad art. 247 CPC).

Selon la volonté du législateur, le tribunal n'est toutefois soumis qu'à une obligation d'interpellation accrue. Comme sous l'empire de la maxime des débats, applicable en procédure ordinaire, les parties doivent recueillir elles-mêmes les éléments du procès. Le tribunal ne leur vient en aide que par des questions adéquates afin que les allégations nécessaires et les moyens de preuve correspondants soient précisément énumérés. En revanche, il ne se livre à aucune investigation de sa propre initiative. Lorsque les parties sont représentées par un avocat, il peut et doit faire preuve de retenue, comme dans un procès soumis à la procédure ordinaire (ATF 141 III 569 consid. 2.3.1).

La maxime inquisitoire ne dispense donc pas les parties de collaborer activement à l'établissement des faits. Il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles (arrêts du Tribunal fédéral 5A_925/2016 du 5 septembre 2017 consid. 4.1; 5A_138/2015 du 1er avril 2015, consid. 3.1). Cette maxime ne sert pas non plus à suppléer les carences d'une partie négligente (Dietschy, Les conflits de travail en procédure civile, thèse 2011, p. 145 n. 284).

2. 2.1 La Cour revoit le fond du litige avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC) et applique le droit d'office (art. 57 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelante estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante – et, partant, recevable –, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

Pour satisfaire à l'obligation de motivation résultant de l'art. 311 al. 1 CPC, l'appelante doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'elle attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_356/2020 du 9 juillet 2020 consid. 3.2). L'appelante doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Elle ne saurait se borner simplement à reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Elle ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. Si ces conditions ne sont pas remplies, l'appel est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_356/2020 précité, ibidem).

Les exigences de motivation de l'acte d'appel sont applicables sans égard à la maxime applicable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_339/2023 du 6 juillet 2023 consid. 3.3; ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1; 137 III 617 consid. 4.2.2 et 4.5.1).

2.2 En l'espèce, l'appel débute par une partie "En fait" qui s'étend sur une dizaine de pages et qui s'apparente à un mémoire de plaidoiries finales de première instance. L'appelante y résume sa propre version des faits, en s'appuyant sur les pièces produites ainsi que sur les déclarations des témoins auditionnés par le Tribunal. Ce faisant, elle omet toutefois d'indiquer si elle conteste les constatations de fait du premier juge et de désigner, avec la précision requise, celles qui seraient inexactes, en mentionnant les moyens de preuve étayant sa critique. Elle ne prend pas non plus la peine de démontrer que les corrections de l'état de fait qu'elle sollicite – par hypothèse – seraient susceptibles d'influer sur le sort de la cause, en procédant à des renvois clairs entre ses griefs de constatation inexacte des faits et d'application erronée du droit. Ce faisant, elle ne se conforme pas aux exigences de motivation auxquelles est soumis tout plaideur qui entend remettre en question l'état de fait arrêté par le premier juge. Cette partie de l'appel ne sera dès lors pas prise en considération.

La recevabilité des autres arguments de l'appelante à l'encontre du jugement entrepris sera examinée ci-après (cf. consid. 4 et 5).

3. 3.1 La Cour examine d'office la recevabilité des faits et moyens de preuve nouveaux en appel (Reetz/Hilber, op. cit., n. 26 ad art. 317 CPC).

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Ces conditions sont cumulatives (arrêt 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.1). S'agissant des vrais nova ("echte Noven"), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova ("unechte Noven"), il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

3.2 En l'espèce, les pièces produites par les parties devant la Cour figurent toutes, à l'exception de la pièce 6 intimée, au dossier du Tribunal. Il ne s'agit dès lors pas de pièces nouvelles dont la recevabilité serait conditionnée à la réalisation des conditions de l'art. 317 al. 1 CPC.

S'agissant de la pièce 6 intimée, celle-ci consiste en deux photographies de I______ prises au mois de janvier 2021. Elle concerne dès lors des faits s'étant produits avant que la cause ne soit gardée à juger. L'intimée n'expliquant d'aucune manière pourquoi elle ne pouvait pas produire ces pièces devant le Tribunal, celles-ci sont irrecevables.

4. L'appelante conclut au rejet de la demande formée le 31 août 2021 par l'intimée tendant à la rétribution de ses heures supplémentaires.

4.1.1 Selon l'art. 321c al. 3 CO, l'employeur est tenu de rétribuer les heures de travail supplémentaires qui ne sont pas compensées par un congé en versant le salaire normal majoré d'un quart au moins, sauf clause contraire d'un accord écrit, d'un contrat-type de travail ou d'une convention collective. Les parties peuvent prévoir que les heures supplémentaires seront rémunérées sans supplément ou ne seront pas rémunérées, à tout le moins lorsque la rémunération des heures supplémentaires est forfaitairement comprise dans le salaire de l'intéressé (ATF 124 III 469 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_485/2019 du 4 février 2020 consid. 6.2.2.2 et les références, publié in Newsletter DroitDuTravail.ch, avril 2020).

Conformément à l'art. 8 CC, il incombe au travailleur de prouver qu'il a effectué les heures supplémentaires dont il réclame la rétribution (ATF 129 III 171; arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2018 du 12 septembre 2018 consid. 3). S'il n'est pas possible d'établir le nombre exact d'heures effectuées, le juge peut, par application analogique de l'art. 42 al. 2 CO, en estimer la quotité. L'évaluation se fonde sur le pouvoir d'appréciation des preuves et relève donc de la constatation des faits (ATF 131 III 360 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2018 précité, ibidem). Si l'art. 42 al. 2 CO allège le fardeau de la preuve, il ne dispense pas le travailleur de fournir au juge, dans la mesure raisonnablement exigible, tous les éléments constituant des indices du nombre d'heures supplémentaires accomplies (ATF 133 III 462 consid. 4.4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2018 précité, ibidem). La conclusion selon laquelle les heures supplémentaires ont été réellement effectuées dans la mesure alléguée doit s'imposer au juge avec une certaine force (ATF 132 III 379 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2012 du 19 février 2013 consid. 2.2).

4.1.2 La qualification juridique d'un contrat se base sur le contenu de celui-ci (ATF 144 III 43 consid. 3.3). Dans une première étape, il s'agit de déterminer le contenu du contrat en recherchant la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO). Si une telle intention ne peut être constatée, le contenu du contrat doit être interprété selon le principe de la confiance (ATF 145 III 365 consid. 3.2.1; 144 III 43 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2).

La jurisprudence prévoit à cet égard que le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO; ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 du 27 février 2020 consid. 5.1 et les références). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l'attitude des parties après la conclusion du contrat, établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 140 III 86 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_152/2017 du 2 novembre 2017 consid. 4.1).

Ce n'est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties – parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes – ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves –, qu'il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 précité, ibidem et les références).

4.1.3 Une fois le contenu du contrat déterminé, il s'agit, dans une seconde étape et sur cette base, de catégoriser juridiquement la convention (arrêt du Tribunal fédéral 4A_64/2020 du 6 août 2020 consid. 5 et les références). La qualification juridique d'un contrat étant une question de droit, le juge détermine d'office les règles légales applicables à la convention des parties. Il n'est lié ni par la qualification effectuée par les parties ni par les expressions ou dénominations inexactes dont les parties ont pu se servir soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO; ATF 131 III 217 consid. 3; 129 III 664 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_64/2020 du 6 août 2020, consid. 5 et les références).

Par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d'après le temps ou le travail fourni (art. 319 al. 1 CO). Les éléments caractéristiques de ce contrat sont une prestation de travail, un rapport de subordination, un élément de durée et une rémunération (arrêt du Tribunal fédéral 4A_53/2021 du 21 septembre 2021, consid. 5.1.3 et les arrêts cités).

Le contrat de travail se distingue avant tout des autres contrats de prestation de services, en particulier du mandat, par l'existence d'un lien de subordination, qui place le travailleur dans la dépendance de l'employeur sous l'angle personnel, organisationnel et temporel ainsi que, dans une certaine mesure, économique. Les critères formels, tels l'intitulé du contrat, les déclarations des parties ou les déductions aux assurances sociales, ne sont pas déterminants (ATF 125 III 78 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 4A_500/2018 précité, ibidem et les arrêts cités).

S'agissant des rapports juridiques entre une personne morale et ses organes, singulièrement entre une société anonyme et les membres du conseil d'administration ou de la direction, ils peuvent relever à la fois du droit des sociétés et du droit des contrats. Sous ce dernier aspect, la tendance est plutôt de considérer que les directeurs sont liés par un contrat de travail et les administrateurs par un mandat ou un contrat sui generis analogue au mandat. En tous les cas, lorsque l'organe dirigeant exerce son activité à titre principal, le critère décisif en faveur du contrat de travail est le rapport de subordination, l'intéressé étant alors soumis à des instructions, par exemple du conseil d'administration (ATF 130 III 213 consid. 2.1; 128 III 129 consid. 1a/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4A_500/2018 précité, ibidem). Par définition, il n'existe aucun rapport de subordination lorsqu'il y a identité économique entre la personne morale et son organe dirigeant; un contrat de travail ne saurait ainsi lier une société anonyme et son actionnaire et administrateur unique (ATF 125 III 78 précité, ibidem; arrêt du Tribunal fédéral 4A_500/2018 précité, ibidem).

Seul l'examen de l'ensemble des circonstances du cas concret permet de déterminer si l'activité en cause est exercée de manière dépendante ou indépendante (ATF 130 III 213 consid. 2.1; 129 III 664 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_500/2018 précité, ibidem).

4.2 Aux termes du jugement entrepris, le Tribunal a relevé le contexte extraordinaire dans lequel les rapports de travail s'étaient inscrits. L'intimée et I______ avaient en effet décidé de créer A______ SA pour produire localement des masques chirurgicaux pendant la pandémie de COVID-19, alors que la Suisse faisait face à une pénurie en la matière. La création et le fonctionnement de cette entreprise s'étaient ainsi faits dans l'urgence. Sous cet angle, le taux d'occupation à 50% prévu par le contrat de travail de l'appelante ne paraissait pas réaliste. L'affirmation de I______ selon laquelle l'intimée pouvait accomplir ses tâches de directrice en travaillant à 50% n'emportait dès lors pas conviction. Il apparaissait bien plus que le taux d'activité de l'intimée avait été ramené à 50% en contrepartie de ses parts dans la société appelante, ce qui avait été confirmé par le témoin W______.

Les témoins auditionnés par le Tribunal avaient par ailleurs tous contredit, d'une certaine manière, les dires de I______, selon lesquels les tâches de l'intimée se limitaient à trouver des fournisseurs de matières premières et à s'assurer de la qualité de ces dernières, tâches pour lesquelles elle aurait encore partagé la responsabilité avec des subalternes. Selon les témoignages O______, P______, Q______, V______, W______ et X______, l'intimée s'occupait également de l'ouverture et de la fermeture de l'usine plusieurs fois par semaine, des appels et des visites auprès des clients, du suivi de la fabrication des pièces pour l'usine, de la direction des équipes ainsi que de la formation des responsables d'équipes. Un tel cahier des charges n'était pas réalisable en travaillant à 50%. L'affirmation de l'intimée, selon laquelle elle avait accepté ledit taux uniquement parce que I______ ne voulait pas l'engager à un taux supérieur et non en raison d'un éventuel cahier des charges qui aurait justifié une activité à temps partiel, était ainsi digne de foi.

L'appelante ne pouvait en outre ignorer le travail à effectuer et celui effectivement accompli par l'intimée, de sorte qu'il n'était pas nécessaire de déterminer si celle-ci avait informé I______ puis B______ de la nécessité de fournir des heures supplémentaires.

S'agissant du nombre d'heures supplémentaires allégué par l'intimée, il était établi que l'appelante n'avait pas tenu de registre des durées quotidienne et hebdomadaire du travail, ce qui avait pour effet d'alléger le fardeau de la preuve en la matière. A cet égard, l'ensemble des témoins avait globalement confirmé la présence de l'intimée dans les locaux durant les horaires habituels de travail. Le nombre d'heures supplémentaires réellement effectuées par l'intéressée ne pouvait en revanche être déterminé avec précision. Certains témoins, à savoir P______, Q______ et X______, l'avaient ainsi vue sur le lieu de travail entre 7h et 16h30 à raison de deux à trois jours par semaine. D'autres témoins, soit O______, V______ et W______, avaient déclaré qu'elle était présente pendant l'intégralité des heures de travail voire même les samedis. Malgré l'allégement du fardeau de la preuve, l'intimée n'avait ainsi pas établi avoir travaillé à raison de 12h par jour et de 60h par semaine. Il était en revanche acquis qu'elle avait régulièrement excédé l'horaire contractuel, de sorte qu'il se justifiait d'apprécier le nombre d'heures supplémentaires effectuées en équité.

Compte tenu des tâches incombant à un directeur d'usine de masques chirurgicaux en période de pandémie et des témoignages O______, P______, Q______, V______, W______ et X______, il paraissait ainsi équitable de retenir que l'intimée avait travaillé à 100%, soit à raison de 42 heures hebdomadaires durant les rapports de travail. Elle avait ainsi effectué 545.58 heures supplémentaires entre juillet et décembre 2020 (21 heures x 4.33 semaines x 6 mois). Etant donné qu'elle avait travaillé jusqu'à la fin de son préavis, ces heures supplémentaires n'avaient pas pu être compensées par des jours de repos et devaient être rétribuées. Le salaire horaire de l'intimée s'élevait à 54 fr. 98 (60'000 fr. / 12 mois = 5'000 fr.; 21 heures x 4.33 = 90.93 heures mensuelles ; 5'000 fr. / 90.93 heures = 54 fr. 98) et à 68 fr. 72 une fois majoré de 25%. La créance de l'intimée à l'encontre de l'appelante se montait ainsi à 37'492 fr. 25 (545.58 heures x 68 fr. 72). Afin de ne pas statuer ultra petita, l'appelante devait dès lors être condamnée à verser 28'075 fr. 26 à l'intimée, soit le montant auquel celle-ci avait conclu. Le contrat de travail ayant pris fin le 31 décembre 2020, les intérêts moratoires couraient dès le 1er janvier 2021.

4.3 Se prévalant d'une constatation arbitraire des faits et d'une violation du droit, l'appelante reproche en substance au Tribunal d'avoir ignoré le fait que l'intimée disposait d'une "double casquette", étant à la fois CEO de A______ SA et coactionnaire de cette dernière. L'activité pour laquelle l'intimée était employée et répondait aux instructions du conseil d'administration se limitait à trouver de la matière première et à contrôler sa qualité, ainsi que l'avait déclaré I______. En tant que coactionnaire, son rôle consistait à "co-créer" la société et à la rendre opérationnelle en formant les responsables d'équipes et en trouvant des clients potentiels. Ces tâches ne relevaient pas de son contrat de travail mais constituaient son apport d'actionnaire en nature, I______ ayant quant à lui effectué un apport en capital.

L'intimée effectuait en outre ses tâches de coactionnaire librement, sans recevoir d'instruction ni devoir rendre de comptes à quiconque, et sans être intégrée dans l'organisation de travail d'autrui. Elle avait d'ailleurs admis que l'administrateur de la société n'était pas présent, ce qui confirmait que son travail ne faisait l'objet ni de directives particulières ni d'une quelconque surveillance. Les témoins P______, Q______ et V______ s'accordaient également sur le fait que sa présence à l'usine n'était pas régulière. Elle était en effet "sa propre patronne" et organisait sa semaine librement, gérant notamment deux autres entreprises en parallèle. Eu égard à ce dernier élément, le taux d'activité allégué par l'intimée n'était pas concevable. En toute hypothèse, l'intéressée était en droit de demander que ses horaires soient adaptés ou de convoquer une assemblée générale pour remplacer le conseil d'administration. Or, elle n'avait rien entrepris en ce sens.

4.4 En l'espèce, le Tribunal a retenu que l'activité de l'intimée consistait non seulement à trouver des fournisseurs de matières premières et à s'assurer de la qualité de ces dernières, mais aussi à fermer et à ouvrir l'usine plusieurs fois par semaine, à gérer les appels et les visites auprès des clients, à suivre la fabrication des pièces pour l'usine, à diriger les équipes et à former les responsables. Il a dès lors considéré implicitement que ces tâches faisaient toutes partie du cahier des charges de l'intimée en tant que CEO de A______ SA. Comme le relève l'appelante, le Tribunal n'a en revanche pas examiné si les parties étaient convenues, de manière expresse ou tacite, que l'intimée effectuerait une partie des tâches susmentionnées en sa qualité de coactionnaire de la société, ce travail constituant son apport en nature à la création de l'entreprise, et qu'elle ne serait par conséquent engagée comme directrice qu'à 50%.

Comme rappelé ci-avant, le contenu de la convention des parties constitue cependant une question de fait, le principe de confiance ne devant être appliqué que si qu'aucun accord des volontés ne peut être établi. Il incombait par conséquent à l'appelante, si elle entendait se prévaloir d'un établissement lacunaire des faits sur ce point, d'exposer dans son mémoire d'appel, par des renvois clairs et complets à ses écritures de première instance, quels allégués et quelles offres de preuves en lien avec le contenu de l'accord des parties le Tribunal avait ignorés, respectivement écartés. L'intéressée ayant été assistée d'un conseil tout au long de la procédure, la soumission du présent litige à la maxime inquisitoire sociale ne la libérait en effet ni d'étayer la thèse sur laquelle elle se fondait, en renseignant le juge sur les faits de la cause et en lui indiquant les moyens de preuve disponibles, ni de motiver son appel sur ce point.

La précitée se contente toutefois de mentionner, dans son mémoire d'appel, les faits entourant la création de la société et la conclusion du contrat de travail que le Tribunal aurait, selon elle, ignorés. Ce faisant, elle ne se livre aucunement à l'exercice décrit ci-dessus. Son grief selon lequel le Tribunal aurait versé dans l'arbitraire et violé l'art. 319 al. 1 CO en considérant que l'ensemble de l'activité de l'appelante s'inscrivait dans le cadre de son contrat de travail sera dès lors écarté, faute de motivation suffisante.

A supposer que cette question doive néanmoins être examinée, l'issue du litige ne serait au demeurant pas modifiée. En l'état du dossier, seul le témoin W______ a en effet déclaré, lors des discussions relatives à la création de A______ SA, "que les 50% de participation dans l'entreprise de l'intimée étaient liées à la baisse de son salaire à 50%". Pareils propos ne sauraient toutefois suffire pour retenir que les parties étaient convenues que l'intimée ne serait rémunérée que pour l'activité consistant à trouver de la matière première et à contrôler sa qualité et que le reste de son travail constituerait son apport en nature à la création de la société.

S'agissant du nombre d'heures supplémentaires accomplies par l'intimée, l'appelante se limite à reprendre, dans son mémoire, les témoignages P______, Q______, V______ et X______, selon lesquels l'intimée n'était présente que de manière irrégulière dans les locaux de l'entreprise. Elle ne le fait cependant que dans le but de démontrer que l'intimée était libre de s'organiser comme elle l'entendait et ne dépendait pas de son employeur sur le plan organisationnel. Ce faisant, elle ne tente à aucun moment de démontrer que le Tribunal aurait mal apprécié l'ensemble des témoignages récoltés et violé l'art. 42 al. 2 CO en retenant en équité que l'intimée avait travaillé à 100% et donc accompli environ 21 heures supplémentaires par semaine. En l'absence de grief motivé à l'encontre de ce point du jugement entrepris, il n'y a pas lieu d'examiner cette question plus avant.

Au vu de ce qui précède, le jugement querellé sera confirmé en tant qu'il condamne l'appelante à verser 28'075 fr. 26 à l'intimée à titre de rétribution des heures supplémentaires effectuées entre juillet et décembre 2020.

5. L'appelante conclut à la condamnation de l'intimée à lui payer 9'991 fr. 65 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 23 septembre 2021, ainsi que 4'886 fr. 89 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 3 novembre 2021, à titre de dommages-intérêts.

5.1 Aux termes de l'art. 321e al. 1 CO, le travailleur répond du dommage qu'il cause à l'employeur intentionnellement ou par négligence. Conformément aux règles générales en matière de responsabilité contractuelle, la responsabilité du travailleur au sens de cette disposition présuppose une faute, un dommage, une violation du contrat et un lien de causalité adéquate entre celle-ci et le dommage survenu. L'employeur doit prouver la violation contractuelle, le dommage et le lien de causalité, tandis que le travailleur peut prouver qu'il n'a pas agi fautivement (ATF 144 III 327 consid. 4.2.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 4A_402/2021 du 14 mars 2022 consid. 5.1).

5.2 Aux termes du jugement entrepris, le Tribunal a considéré, en substance, que l'intimée fondait sa demande de remboursement de ses frais de conseils juridiques en 4'886 fr. 89 sur une note d'honoraires de l'étude d'avocats C______, ne mentionnant que la description du litige, le nombre d'heures travaillées et le coût total. Cette facture ne permettait toutefois de déterminer ni la nature des activités effectuées, ni l'existence d'un lien de causalité entre celles-ci et le comportement de l'intimée. L'appelante avait en outre refusé de produire le relevé d'activité y afférent. Elle avait ainsi "rendu impossible toute analyse d'un éventuel dommage sous l'angle des dispositions précitées".

A cela s'ajoutait que la facture susmentionnée n'indiquait pas qui de Me B______, alors administrateur unique de A______ SA, ou de son associé, voire de l'avocate stagiaire intervenue lors des audiences du Tribunal, avait effectué les activités juridiques dont l'appelante sollicitait le remboursement. Me B______ était en outre intervenu successivement en qualité d'administrateur unique de l'appelante, puis de représentant, avant de se faire excuser en sa qualité d'avocat par une avocate stagiaire, de sorte qu'il "planait une incertitude son intervention dans la procédure". Les prétentions de l'appelante devaient également être écartées pour cette raison.

Concernant les frais de la sécurisation de l'usine que l'appelante entendait imputer à l'intimée, les coûts de changement de serrures en 1'031 fr. 55 résultaient d'une offre et non d'une facture, au demeurant établie six mois après la fin des rapports de travail avec l'intimée. Rien n'indiquait en outre que l'appelante se soit effectivement acquittée du montant en question. Non prouvé, ce poste du dommage ne pouvait donc être retenu.

Les frais de protection du site et des employés ainsi que les frais de sécurisation du monte-charge étaient quant à eux justifiés, prétendument, par le refus de l'intimée de restituer les clés de l'usine et par ses "visites intempestives et […] illicites". Or, il ressortait de la procédure que l'appelante était coactionnaire de A______ SA avec I______, lequel n'avait pas non plus rendu ses clés. Les témoins R______, U______, E______, W______ et Q______ avaient en outre déclaré que l'intimée s'était rendue sur place après la fin de ses rapports de travail en sa qualité d'actionnaire, afin de présenter les lieux à d'éventuels repreneurs. Elle n'avait dès lors pas agi en qualité d'employée lors de ces visites et n'avait ainsi pas violé ses devoirs contractuels envers l'appelante. En tout état de cause, les mesures de sécurisation prises par l'appelante étaient manifestement disproportionnées, de sorte qu'elles ne pouvaient être imputées à l'intimée. Les postes du dommage susmentionnés devaient par conséquent également être écartés.

5.3 Se prévalant d'une violation du droit, l'appelante fait en substance valoir qu'en dépit des injonctions qu'elle avait formulées, l'intimée avait refusé de manière catégorique de lui restituer les clés de l'usine. Elle avait également fait irruption au sein de ses locaux, respectivement avait menacé à plusieurs reprises de se rendre sur place. Elle n'avait dès lors pas respecté les instructions et les directives de son employeuse, violant ainsi ses devoirs contractuels.

Compte tenu de ce qui précède, l'appelante n'avait eu d'autre choix que de prendre des mesures urgentes. Celles-ci avaient compris en premier lieu les conseils d'un avocat. L'étude de Me B______ avait ainsi "déployé une activité typique" en lien avec le litige, débouchant sur une note d'honoraires de 4'886 fr. 89. Lesdites mesures avaient également inclus le déploiement d'agents de sécurité ainsi que le changement des cylindres de la porte d'entrée et de ceux d'un local annexe, pour un coût de 9'991 fr. 65, ce qui constituait un dommage pour l'appelante. Ces mesures étaient légitimes compte tenu du comportement de l'intimée, de sorte que la condition du lieu de causalité était également remplie. Elles étaient de même proportionnées compte tenu notamment de la nécessité de protéger la personnalité des autres employés. La faute de l'intimée était enfin présumée. Le Tribunal avait dès lors violé l'art. 321e CO en déboutant l'appelante de ses prétentions en dommages-intérêts.

Dans un grief distinct relatif à la constatation arbitraire des faits, l'appelante fait encore valoir que l'argument du Tribunal, à teneur duquel le statut d'actionnaire de l'appelante lui aurait octroyé un quelconque droit de pénétrer dans l'usine contre la volonté du conseil d'administration, n'emportait pas conviction. Ledit conseil avait en effet la compétence de donner des instructions en lien avec la gestion de la société.

5.4 En l'espèce, l'argumentaire de l'appelante, à teneur duquel l'intimée aurait contrevenu à ses devoirs d'employée en refusant de restituer les clés des locaux et en faisant irruption au sein de ceux-ci, contraignant son employeuse à prendre des mesures urgentes, lesquelles lui auraient occasionné des frais d'avocat et de sécurité à hauteur de 4'886 fr. 89 et 9'991 fr. 65, constitue un "copier-coller" des pages 8 et 9 du mémoire de réponse et de demande reconventionnelle déposé par-devant le Tribunal. Un tel procédé n'étant pas conforme aux exigences de motivation de l'art. 311 al. 1 CPC, cette partie du mémoire d'appel ne sera pas prise en considération.

L'appelante se borne pour le surplus à faire valoir que l'attitude de l'intimée consistant à conserver les clés des locaux à l'issue des rapports de travail contrevenait aux injonctions données par le conseil d'administration conformément à l'art. 716 al. 1 CO. Ce faisant, elle ne discute en rien le raisonnement du Tribunal, selon lequel ce comportement de l'intimée ne s'inscrivait pas dans le cadre des rapports de travail qu'avaient entretenus les parties, mais dans celui de leurs relations découlant du droit des sociétés, de sorte que l'appelante n'était pas fondée à réclamer à l'intimée des dommages-intérêts sur la base de l'art. 321e al. 1 CO en rapport avec cette prétendue violation. En l'absence de grief motivé sur ce point, celui-ci ne saurait être examiné plus avant.

L'appelante ne parvenant ainsi pas à démontrer, de manière conforme à l'art. 311 al. 1 CPC, que le Tribunal aurait nié à tort la responsabilité contractuelle de l'intimée, la question de savoir si les mesures de sécurisation des locaux qu'elle a prises respectaient ou non le principe de proportionnalité, peut pour le surplus rester indécise.

Au vu de ce qui précède, le jugement entrepris sera confirmé en tant qu'il déboute l'appelante de ses conclusions reconventionnelles à l'encontre de l'intimée.

6. La procédure étant gratuite, il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 71 RTFMC) ni alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


A la forme et au fond
:

Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, l'appel interjeté le 20 octobre 2022 par A______ SA contre le jugement JTPH/291/2022 rendu le 19 septembre 2022 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/10263/2021.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Monsieur Claudio PANNO, Madame
Karine RODRIGUEZ, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.