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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/25560/2021

CAPH/93/2023 du 09.08.2023 sur OTPH/1074/2023 ( SS )

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/25560/2021-3 CAPH/93/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MERCREDI 9 AOUT 2023

 

Entre

1) A______ LIMITED, sise ______, Grande-Bretagne,

2) B______ (SUISSE) SA, sise ______ [VD], appelantes d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 21 juin 2023, comparant toutes deux par Mes Jeremy REICHLIN et Matia TROSIC, avocats, Hardstrasse 201, 8005 Zürich, en l'Étude duquel elles font élection de domicile,

et

Monsieur C______, domicilié ______ [GE], intimé, comparant par Me Vincent GUIGNET, avocat, rue de Jargonnant 2, case postale 6045, 1211 Genève 6, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,


Vu la demande formée le 30 mai 2022 par A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA à l'encontre de C______, en paiement de la somme de USD 8'983'650, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er décembre 2010, à titre de dommages et intérêts;

Vu la réponse de C______ du 4 novembre 2022, complétée le 25 janvier 2023, concluant à l'irrecevabilité de la demande;

Attendu EN FAIT que par requête du 15 février 2023, A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA ont conclu à l'annulation de l'audience de débats d'instruction fixée au 16 février 2023, et à ce que la suspension de la procédure soit ordonnée jusqu'à droit connu dans la procédure CL-1______ les opposant, ainsi que deux autres sociétés, à D______ et E______ en particulier, laquelle est pendante devant la High Court of Justice de F______ [Grande-Bretagne];

Que le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal) a annulé l'audience de débats d'instruction précitée;

Que par mémoire du 8 mars 2023, C______ a conclu au rejet de la requête en suspension;

Que dans des déterminations du 26 avril 2023, A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA ont persisté dans leurs conclusions de suspension de la procédure;

Que C______ a dupliqué le 7 juin 2023, persistant dans ses conclusions;

Que par courrier du 16 juin 2023, A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA ont sollicité un délai de 30 jours pour se déterminer sur le mémoire de duplique précité;

Que par ordonnance OTPH/1074/2023 du 21 juin 2023 le Tribunal, statuant préparatoirement, a transmis à C______ copie du courrier du 16 juin 2023 (ch. 1 du dispositif), rejeté la demande de A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA visant à se déterminer sur le mémoire de duplique du 7 juin 2023 (ch. 2), rejeté la requête de A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA tendant à la suspension de la procédure (ch. 3) et dit qu'une nouvelle audience de débats d'instruction serait prochainement agendée (ch. 4);

Que par acte expédié à la Cour de justice le 30 juin 2023 A______ LIMITED et B______ (SUISSE) SA ont formé recours contre cette ordonnance, concluant à la constatation que leur droit d'être entendu avait été violé, à l'annulation de l'ordonnance du 21 juin 2023 et au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants;

Que, préalablement, elles sollicitent l'octroi de l'effet suspensif concernant le chiffre 4 du dispositif de l'ordonnance entreprise, subsidiairement le prononcé de mesures conservatoires nécessaires, en faisant interdiction au Tribunal de fixer une audience dans le cadre de la procédure jusqu'à droit jugé sur le recours;

Que par courrier du 7 août 2023, C______ s'est opposé à l'octroi de l'effet suspensif;

Que les parties ont été informées par courrier du 8 août 2023 de ce que la cause était gardée à juger sur effet suspensif;

Considérant EN DROIT que la décision de refus de suspension (art. 126 CPC) ne peut faire l'objet que d'un recours au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC, le recourant devant démontrer le préjudice difficilement réparable résultant du refus de suspendre, à l'inverse de la décision ordonnant la suspension de la procédure qui peut faire l'objet d'un recours inconditionnel au sens de l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (HALDY, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 9 ad art. 126 CPC; GSCHEND, Basler Kommentar, ZPO, 2017, n° 17a ad art. 126 CPC);

Que le recours ne suspend pas la force de chose jugée et le caractère exécutoire de la décision entreprise, l'autorité de recours (soit la Cour de céans) pouvant suspendre le caractère exécutoire en ordonnant au besoin des mesures conservatoires ou le dépôt de sûretés (art. 325 CPC);

Que, saisie d'une demande de suspension de l'effet exécutoire, l'autorité de recours doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; qu'elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 137 III 475 consid. 4.1);

Que, selon les principes généraux, l'autorité procède à une pesée des intérêts en présence et doit se demander, en particulier, si la décision est de nature à provoquer une situation irréversible; qu'elle prend également en considération les chances de succès du recours (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2014 du 14 juillet 2014 consid. 3.1; 4D_30/2010 du 25 mars 2010 consid. 2.3);

Que l'effet suspensif ne peut être octroyé à un recours ayant pour objet une décision rejetant une demande (parmi d'autres : GRISEL, Traité de droit administratif, vol. II, 1984, p. 923 et les arrêts cités; SJ 2015 II 29);

Qu'en effet, une décision négative ne déploie aucun effet susceptible d'être suspendu;

Qu'en l'espèce, l'ordonnance attaquée a refusé de suspendre la présente procédure; qu'ainsi, les recourantes ne peuvent obtenir la suspension du caractère exécutoire d'une décision négative; qu'elles ont cependant sollicité la suspension du chiffre 4 de l'ordonnance, prévoyant la convocation d'une nouvelle audience de débats d'instruction et, à titre subsidiaire, le prononcé de mesures conservatoires au sens de l'art. 261 CPC, afin que la procédure de première instance ne suive pas son cours tant que la Cour n'aura pas tranché le recours pendant;

Qu'il convient donc de traiter la requête dans cette mesure;

Que même si les chances de succès du recours n'apparaissent pas bonnes d'emblée et prima facie, il convient d'octroyer l'effet suspensif au chiffre 4 de l'ordonnance entreprise, respectivement d'ordonner les mesures conservatoires sollicitées jusqu'à droit jugé sur le recours, en application du principe d'économie de procédure notamment;

Qu'en effet, la valeur litigieuse importante et la complexité de la cause laissent présager une procédure longue; qu'à l'inverse, une décision devrait être rendue dans un avenir relativement proche, s'agissant d'un recours contre une décision incidente, et non sur le fond de la cause; qu'il n'y a donc pas d'urgence particulière à ce que la procédure suive son cours, avec le risque qu'elle soit finalement suspendue si les parties recourantes obtenaient gain de cause; qu'il est préférable de suspendre la procédure jusqu'à droit jugé sur le recours, pour qu'au cas où les recourantes n'obtenaient pas gain de cause, elle puisse reprendre sans nouvelle entrave possible;

Qu'il sera par conséquent ordonné, à titre provisionnel, au Tribunal, de n'entreprendre aucun nouvel acte d'instruction jusqu'à droit jugé sur le recours;

Que la question des frais en relation avec la présente décision sera traitée dans la décision au fond.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 3 :

Statuant respectivement sur effet suspensif et sur mesures provisionnelles :

Ordonne au Tribunal des prud'hommes de n'entreprendre aucun acte d'instruction dans la présente procédure jusqu'à droit jugé définitif sur le recours.

Dit que les frais de la présente décision seront traités avec l'arrêt au fond.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente ad interim; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1) est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'arrêt attaqué.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.