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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/1527/2021

CAPH/90/2023 du 10.07.2023 sur JTPH/218/2022 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1527/2021-4 CAPH/90/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU LUNDI 10 JUILLET 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [France], appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 5 juillet 2022 (JTPH/218/2022), comparant par Me Gabriel RAGGENBASS, avocat, OA Legal SA, place Longemalle 1, 1204 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

B______ SARL, sise ______ (VS), intimée, comparant par Me Adrienne FAVRE, avocate, place Pépinet 4, case postale 6919, 1002 Lausanne, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/2018/2022 du 5 juillet 2022, notifié à B______ SARL le 7 juillet 2022 et à A______ le lendemain, le Tribunal des prud'hommes (ci-après: le Tribunal) a déclaré recevable la demande formée le 21 avril 2021 par A______ contre B______ SARL (ch. 1 du dispositif), déclaré irrecevables les allégués et moyens de preuves nouveaux (pièces 27 à 34) déposés les 17 février et 7 mars 2022 par A______ (ch. 2), condamné B______ SARL à verser à A______ la somme nette de 1'196 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 30 septembre 2017 (ch. 3), débouté A______ du solde de ses prétentions (ch. 4), mis les frais judiciaires – arrêtés à 1'120 fr. – à la charge de A______ à hauteur de 1'000 fr. et à la charge de B______ SARL à hauteur de 120 fr. (ch. 5 et 6), compensé ces frais avec l'avance de frais de 1'120 fr. fournie par A______ (ch. 7), condamné B______ SARL à rembourser la somme de 120 fr. à A______ (ch. 8), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 9), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 10).

B.            a. Par acte expédié au greffe de la Cour civile le 9 septembre 2022, A______ appelle de ce jugement, dont il sollicite l'annulation des chiffres 2, 4 et 6 à 10 du dispositif.

Principalement, il conclut à ce que B______ SARL soit condamnée à lui payer les sommes de 93'810 fr. et de 16'900 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15 août 2016, ainsi qu'à lui délivrer un certificat de travail, avec suite de frais judiciaires et dépens de première et de seconde instance.

b. Dans sa réponse, B______ SARL conclut au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. Les parties ont respectivement répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger par plis du greffe du 20 février 2023.

C.           Les faits pertinents suivants résultent de la procédure:

a. B______ SARL (ci-après: B______) est une société sise à C______ (VS), dont le but est le conseil en immobilier, l'achat et la vente, le conseil en financement hypothécaire, les assurances, les placements financiers, le crédit et le leasing privé.

D______ en est l'unique associé gérant, avec signature individuelle.

B______ dispose notamment de bureaux à E______ (GE).

b. A______ est un ressortissant français, né le ______ 1988.

c. Le 6 juillet 2015, B______ et A______ ont signé un contrat intitulé "Convention de collaboration", aux termes duquel celui-ci s'engageait à négocier des contrats avec des tiers, pour le compte de B______ (art. 1 du contrat).

c.a Le contrat, dans lequel B______ était désignée comme "Employeur" et A______ comme "Employé", a été conclu pour une durée indéterminée (art. 3). Un temps d'essai de trois mois était prévu (art. 4).

c.b Il était convenu que "l'Employé recherche des clients et visite la clientèle en respectant les instructions qui lui sont données par l'Employeur" (art. 5 ch. 1). A______ devait exécuter lui-même sa prestation et n'était pas autorisé à la déléguer à des tiers (art. 5 ch. 2).

c.c Le contrat prévoyait que A______ serait rémunéré par le biais de commissions uniquement, pour chaque contrat négocié avec un tiers, pour autant qu'un contrat soit effectivement conclu avec ledit tiers (art. 6). Il était précisé que "les parties s'entendent pour dire que ce mode de rémunération suffit à assurer un revenu adéquat à l'Employé" (art. 6 ch. 1).

Il était par ailleurs prévu que "si l'Employé constate qu'il ne parvient pas à mener à bien sa tâche malgré les efforts raisonnables que l'on peut attendre de lui et qu'il ne parvient pas à obtenir un revenu décent, il est tenu d'en aviser l'Employeur par écrit sans délai" (art. 5 ch. 3).

c.d En sus de la rémunération à la commission, les parties ont convenu du versement d'un forfait pour le remboursement des frais professionnels de A______, selon un barème prédéfini (art. 9).

c.e Il était notamment prévu que B______ mette à disposition de A______ du matériel de bureau dans ses locaux et lui donne accès à des ordinateurs, à des tablettes, ainsi qu'à des téléphones (art. 8 ch. 1).

B______ ne fournissait pas de véhicule, de sorte que A______ devait utiliser son propre véhicule pour exercer son activité.

c.f B______ s'est engagée à organiser et offrir une formation gratuite, d'une durée de trois semaines, à A______ s'il ne disposait pas des connaissances requises dans le domaine des assurances, avec la précision que celui-ci ne serait pas rémunéré pour y participer (art. 8 ch. 3).

c.g Il était également prévu que "l'Employé est libre dans l'organisation de son travail. Il s'organise lui-même pour exécuter ses tâches, dans son intérêt et celui de l'Employeur" (art. 11 ch. 1).

Aucun contrôle des jours de vacances pris par A______ ne serait effectué "puisque ce dernier est complètement libre dans l'organisation de son temps de travail et du volume d'activité qu'il souhaite déployer" (art. 11 ch. 2).

c.h Une part de 8,33% de toutes les commissions versées était destinée à indemniser quatre semaines de vacances par année, avec la précision qu'une telle méthode était justifiée "puisque l'Employé est libre de choisir seul son taux d'activité, indépendamment de la volonté de l'employeur, d'une part, et d'autre part sa rémunération ne dépend pas du nombre d'heures de travail effectuées dans un mois, par exemple, mais du moment où l'Employeur reçoit le paiement du tiers" (art. 11 ch. 3).

A______ était au surplus libre de s'octroyer plus de quatre semaines de vacances par année, étant convenu qu'aucune indemnisation supplémentaire ne lui serait versée pour couvrir de tels jours de congé (art. 11 ch. 4).

d. A______ a déployé une activité pour B______ jusqu'à la fin du mois de septembre 2017, date pour laquelle celle-ci a déclaré mettre fin à son contrat, par courrier du 28 août 2017, en précisant que le motif du licenciement était la restructuration du personnel.

e. Au cours de ses vingt-six mois d'activité pour le compte de B______, A______ a réalisé 49 propositions d'assurance, soit en moyenne 1,88 contrats par mois.

Il a reçu mensuellement des décomptes de commissions correspondants.

f. A teneur des certificats de salaire établis par B______, A______ a perçu une rémunération nette totale de 1'046 fr. en 2015, de 19'942 fr. en 2016 et de 19'927 fr. en 2017.

Ces montants s'entendaient après déduction des charges sociales opérée par B______.

g. B______ a également remis à A______ des "Attestations Quittances" d'imposition à la source pour les années 2016 et 2017.

h. Par courrier du 16 avril 2019, A______ a mis en demeure B______ de lui verser une somme de 93'810 fr. à titre de salaire.

Le 24 mai 2019, il a fait notifier à celle-ci un commandement de payer pour une créance salariale de 130'000 fr., auquel la poursuivie a formé opposition.

i. Par courrier du 11 juillet 2019, A______ a relancé B______, annonçant vouloir trouver une solution amiable.

Par courriers des 16 et 19 juillet 2019, B______ a contesté devoir un quelconque montant à A______, précisant que la poursuite à son endroit était abusive et qu'elle se réservait le droit de réclamer des dommages-intérêts si celle-ci devait lui causer du tort.

j. Par demande du 11 janvier 2021, déclarée non conciliée le 9 mars 2021 et introduite devant le Tribunal le 21 avril 2021, A______ a assigné B______ en paiement d'une somme totale de 111'906 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 15 août 2016, se décomposant comme suit:

- 93'810 fr. brut, à titre de salaires impayés,
- 16'900 fr. net, à titre de frais professionnels et
- 1'196 fr. net, à titre de retenue indue sur salaire.

Il a également conclu à la délivrance d'un certificat de travail et, préalablement, à ce que B______ soit condamnée à produire son agenda professionnel pour la totalité de la période contractuelle.

k. Dans sa réponse, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

Elle a notamment produit des décomptes indiquant que d'autres agents réalisaient une vingtaine de propositions d'assurance par mois, ainsi que deux jugements rendus respectivement par le Tribunal et le Tribunal des prud'hommes de Lausanne, aux termes desquels deux collègues de A______ ont été déboutés de leurs prétentions salariales contre B______, étant précisé que A______ avait comparu comme témoin dans la procédure genevoise.

l. Dans un courrier ultérieur, B______ a indiqué ne pas être en mesure de produire l'agenda professionnel de A______, tel que mis à la disposition de celui-ci pendant son engagement, dès lors que la société supprimait le compte Outlook des personnes concernées après leur départ.

m. Le Tribunal a entendu les parties à l'audience de débats principaux du 26 janvier 2022.

m.a A cette occasion, A______ a soutenu que la convention de collaboration du 6 juillet 2015, ainsi que son obligation de rendre compte à son supérieur, les formations obligatoires et les objectifs qu'il devait atteindre, étaient constitutifs d'un contrat de travail. Il n'avait pas réalisé un chiffre d'affaires important, mais il avait travaillé à plein temps pour B______. Il lui avait été donné pour objectif d'atteindre 250'000 fr. de chiffre d'affaires par mois, sans plus d'explications, ce qu'il n'avait pas toujours réalisé. Il réclamait ainsi un salaire mensuel brut de 5'389 fr., précisant qu'il avait perçu les montants indiqués sur les décomptes de commissions et sur ses certificats de salaire. Il avait dû rembourser certains montants dans la mesure où certains clients avaient résilié leur contrat. Il réclamait également le remboursement de ses frais professionnels, notamment ses frais de déplacement, en intégralité, car il estimait que le pourcentage prévu dans la convention de collaboration n'était pas applicable à sa situation. En outre, il réclamait 1'196 fr. à titre de retenues indues pour la LPP. Il était parvenu à ce montant en comparant les certificats de salaires et les décomptes de commissions. Aucun certificat de travail ne lui avait par ailleurs été délivré.

m.b Représentée par D______, B______ a expliqué ne pas être liée à A______ par un contrat de travail, dans la mesure où il n'y avait aucun lien de subordination, aucun horaire de travail, aucun objectif fixé, aucune obligation de rendre des comptes, aucune obligation d'exercice et d'exclusivité et une liberté dans la prise de vacances. A______ était payé à la commission et sa rémunération dépendait de l'activité déployée par celui-ci. Quant aux frais professionnels, la convention de collaboration s'appliquait. B______ s'est engagée à rembourser le solde des montants indûment prélevé pour la LPP, sous réserve de compensation avec les montants qui lui étaient encore dus par A______. Enfin, les formations n'étaient pas obligatoires.

m.c A l'issue l'audition des parties, le Tribunal a renvoyé l'instruction de la cause à de nouvelles audiences de débats principaux.

n. Par courrier adressé au Tribunal le 17 février 2022, A______ a allégué des faits nouveaux et déposé de nouvelles pièces (pièces 27 et 28 dem.), soit notamment un courrier de licenciement du 26 juin 2017 de B______ caviardé (pièce 27 dem.) et une copie d'un message WhatsApp daté du 10 février 2022 (pièce 28 dem.), par lequel la lettre de licenciement susvisée a été transférée à F______, ancien conseiller en litige avec B______. A______ a précisé qu'il ne pouvait ainsi pas avoir connaissance de ces documents préalablement.

o. A l'audience des débats principaux du 24 février 2022, B______ a contesté l'authenticité de la pièce 27 dem. et a conclu à l'irrecevabilité de du courrier de A______ du 17 février 2022. A l'appui de sa conclusion, elle a allégué que la signature de D______ figurant sur ladite pièce n'était pas de la main de celui-ci. En outre, D______ se trouvait à l'étranger du 21 au 27 juin 2017, conformément aux billets d'avion qu'elle produisait (pièce 122 déf.). Il lui était dès lors impossible de signer la lettre en question le 26 juin 2017.

p. Par courrier du 7 mars 2022, A______ a transmis six pièces nouvelles au Tribunal (pièces 29 à 34 dem.), indiquant qu'il en ignorait l'existence au préalable et que celles-ci lui avaient été remises le 1er mars 2022 par G______, ancienne assistante au sein de B______. Parmi ces pièces figure un courriel de la prénommée du 4 mars 2022 (pièce 34 dem.), indiquant que A______ lui avait demandé les documents en question en 2019 déjà, mais qu'elle ne les avait retrouvés que le 1er mars 2022 et qu'elle les lui avait dès lors adressés immédiatement.

q. Par écritures du 25 mars 2022, B______ a conclu à l'irrecevabilité des allégués nouveaux et des pièces nouvelles produites par A______ le 7 mars 2022. Elle a elle-même produit un courrier de rétractation de G______, dans lequel celle-ci indique avoir eu le sentiment que ses propos, de même que les courriels et documents remis à A______, avaient été modifiés ou sortis de leur contexte. En effet, la plupart de ces documents avaient été fournis en version Word et étaient ainsi modifiables. Elle avait elle-même orienté son courriel adressé à A______, afin qu'il soit accepté au vu des délais.

r. Le Tribunal a procédé à des enquêtes et entendu plusieurs témoins.

r.a H______, conseiller auprès de B______, a déclaré qu'il travaillait toujours au sein de celle-ci, dans la succursale de I______ [VD]. Il travaillait à plein temps et B______ ne lui fixait pas d'objectifs; il remettait à celle-ci un compte-rendu des contrats signés afin de pouvoir percevoir les commissions dues. En revanche, il ne lui soumettait pas de compte-rendu des rendez-vous pris. Il suivait les formations organisées par B______, lesquelles n'étaient pas obligatoires. Il pouvait proposer les produits qu'il voulait à ses clients. La précitée ne contrôlait pas non plus ses horaires ou ses activités, il avait ainsi une liberté dans la gestion de son emploi du temps. B______ fournissait un cahier afin de créer le concept client, mais il ne s'agissait pas d'une procédure fixe à suivre. Des locaux, ordinateurs et supports étaient fournis par B______, afin de permettre aux collaborateurs de préparer les analyses et conseils aux clients. Il n'y avait pas de bureaux individuels. Il estimait qu'il était au bénéfice d'un contrat de conseiller, semi-indépendant, au sein de B______.

r.b Les témoins J______, K______, L______ et F______ ont déclaré qu'ils avaient travaillé avec A______ à un taux d'activité à plein temps, à Genève. Les deux premiers ont précisé qu'ils pensaient être au bénéfice du même contrat que le précité. L______ a indiqué qu'il se considérait comme un auto-entrepreneur. Tous ont affirmé qu'ils devaient être présents au bureau les lundis, mercredis et vendredis afin d'assister aux formations, qui étaient obligatoires. Ils y avaient toujours participé.

r.c Les témoins F______, L______, J______ et K______ ont indiqué que B______ avait établi un protocole pour les entretiens clients, qu'elle recommandait fortement de suivre, mais qui n'était pas obligatoire selon les trois premiers d'entre eux. Tous ont déclaré que B______ avait fixé un objectif de 250'000 fr. par mois à tous les collaborateurs, L______ et F______ précisant que cet objectif devait leur permettre d'atteindre un revenu compris entre 4'000 fr. et 6'000 fr. brut par mois. Les témoins K______ et F______ ont affirmé que si l'objectif n'était pas atteint, c'était un motif de licenciement. J______ et L______ ont pour leur part indiqué que B______ poussait le collaborateur à quitter l'entreprise en pareil cas, le premier ajoutant qu'elle pouvait aussi l'inciter à poursuivre sa formation.

r.d L______, J______ et K______ ont confirmé qu'ils utilisaient leur véhicule privé afin de se rendre aux rendez-vous avec les clients, précisant qu'ils effectuaient plusieurs dizaines de milliers de kilomètres par an.

r.e J______ et F______ ont par ailleurs confirmé qu'ils étaient ou avaient été en litige avec B______.

s. Par courrier adressé au Tribunal le 11 mai 2022, B______ a contesté la crédibilité des déclarations des témoins J______, L______ et F______. Elle a exposé qu'après leur audition en qualité de témoins, ceux-ci avaient attendu A______ à l'issue de l'audience, alors qu'ils avaient indiqué au Tribunal qu'ils n'entretenaient pas de liens particuliers avec celui-ci.

t. Lors des plaidoiries finales, tenues par le Tribunal à l'audience du 1er avril 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

D.           Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que l'existence d'un contrat de travail était un fait doublement pertinent, ce qui devait conduire à admettre la recevabilité de la demande. Les pièces produites par A______ après l'ouverture des débats principaux avaient été soumises tardivement au Tribunal, le précité connaissant l'existence de ces documents depuis 2019 au moins. Ces moyens de preuve, et les allégués les concernant, étaient ainsi irrecevables.

Sur le fond, la convention des parties ne prévoyait qu'une rémunération à la commission et aucun taux minimum de présence dans les locaux ou de travail n'était prévu, ni imposé. Il convenait néanmoins d'examiner si A______ se trouvait dans un rapport de subordination vis-à-vis de B______. En l'occurrence, le caractère obligatoire des formations avait été mentionné par plusieurs témoins, mais ceux-ci n'avaient pas rapporté avoir fait l'objet de sanctions en cas d'absence. Deux de ces témoins étaient de plus en litige avec B______. Dans ces conditions, il ne pouvait être tenu pour établi que les formations étaient obligatoires. S'agissant de l'objectif mensuel de 250'000 fr., A______ avait reconnu qu'il ne l'atteignait pas toujours et il n'avait pas été écarté pour ce motif, à l'instar des autres témoins ayant articulé ce chiffre. Il ne résultait par ailleurs pas de la procédure que A______ devait suivre les instructions de son supérieur; ce dernier était intervenu pour donner des conseils, mais le précité avait bénéficié d'une grande indépendance. Tout au plus, B______ avait-elle mis à disposition de A______ et de ses collègues des lignes directrices pour les aider à accomplir leurs tâches. Au vu de ces éléments, il n'était pas possible de retenir un quelconque lien de subordination. Il fallait par conséquent admettre que A______ avait déployé son activité pour le compte de B______ en qualité d'agent, et non de travailleur ou de voyageur de commerce.

Le Tribunal étant tenu de statuer au fond, il restait à examiner le bien-fondé des prétentions de A______ au regard du contrat d'agence. En l'occurrence, celui-ci avait perçu les commissions qui lui étaient dues conformément au contrat de collaboration signé le 6 juillet 2015, ce qu'il avait lui-même reconnu. Il n'avait pas allégué, ni démontré, avoir conclu des affaires pour lesquelles il n'aurait pas été rémunéré. Il avait dès lors reçu l'intégralité de la rémunération à laquelle il avait droit, de sorte qu'il devait être débouté de ses conclusions de ce chef. S'agissant du remboursement des frais, la convention des parties prévoyait une indemnisation forfaitaire, que l'agent ne contestait pas avoir perçue. Celui-ci n'avait jamais réclamé le remboursement de frais supplémentaires durant son activité et ne démontrait pas avoir effectivement encouru des dépenses pour un montant supérieur au forfait alloué. Il devait dès lors également être débouté de ses conclusions sur ce point. Seule une somme de 1'196 fr., correspondant à la différence entre les prélèvements de prévoyance figurant sur les certificats de salaires et ceux mentionnés sur ses décomptes de commission, lui serait allouée avec intérêts, B______ s'étant engagée à rembourser ladite différence. Au surplus, l'agent ne pouvait prétendre à la remise d'un quelconque certificat de travail.

EN DROIT

1.             1.1 Interjeté contre une décision finale (art. 308 al. 1 let. a CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 94 al. 1, art. 308 al. 2 CPC), dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 142 al. 1, art. 145 al. 1 let. b et art. 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La valeur litigieuse en première instance étant supérieure à 30'000 fr., la procédure ordinaire s'applique et le procès est régi par la maxime des débats, qui prévoit que les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC, art. 243 et art. 247 al. 2 CPC a contrario).

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; 5A_89/2014 du 15 avril 2014 consid. 5.3.2).

2.             L'appelant conclut tout d'abord à l'annulation du jugement entrepris en tant qu'il a déclaré irrecevables ses allégués et moyens de preuve produits par courriers des 17 février et 7 mars 2022 (ch. 2 du dispositif). Il sollicite que la cause soit réexaminée en tenant compte de ces éléments.

2.1 L'art. 229 CPC – qui ne s'applique qu'en première instance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_364/2020 du 14 juin 2021 consid. 8.1) – a pour objet l'admissibilité des faits et moyens de preuves nouveaux. Après la clôture de la phase d'allégation
– soit après la clôture du second échange d'écritures, ou après l'audience d'instruction, ou après l'ouverture des débats principaux avant les premières plaidoiries (ATF 144 III 67 consid. 2.1) –, la présentation de nova n'est plus possible qu'aux conditions restrictives de l'art. 229 al. 1 CPC (ATF 146 III 55 consid. 2.5.2; 140 III 312 consid. 6.3.2). Cette disposition énonce que les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont admis aux débats principaux que s'ils sont invoqués sans retard et qu'ils remplissent l'une des conditions suivantes: ils sont postérieurs à l'échange d'écriture ou à la dernière audience d'instruction ou ont été découverts postérieurement (nova proprement dits) (let. a); ils existaient avant la clôture de l'échange d'écritures ou la dernière audience d'instruction mais ne pouvaient pas être invoqués antérieurement bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (nova improprement dits) (let. b) (arrêt du Tribunal fédéral 5A_641/2019 du 30 juin 2019 consid. 5.4).

Lorsque l'invocation des faits ou la production de moyens de preuve nouveaux dépendent de la seule volonté d'une partie, ils ne peuvent être considérés comme des vrais nova (nova potestatifs) (ATF 146 III 416 consid. 5.3, arrêt du Tribunal fédéral 4A_76/2019 du 15 juillet 2020 consid. 8.1.2).

2.2 En l'espèce, il est constant que les allégués et moyens de preuves produits par l'appelant les 17 février et 7 mars 2022 l'ont été après l'ouverture des débats principaux, notamment après l'audience de débats principaux du 26 janvier 2022, lors de laquelle les parties ont été entendues et où l'appelant n'a pas invoqué les éléments en question. Il s'ensuit que ceux-ci ne sont recevables qu'aux conditions strictes posées par l'art. 229 al. 1 CPC, comme l'a correctement retenu le Tribunal.

Il est également constant que les titres en question ont été établis avant la clôture de la phase d'allégation, soit au plus tard en 2019, voire pour certains en 2017, à l'exception d'un message WhatsApp daté du 10 février 2022 et d'un courriel du 4 mars 2022, lesquels sont censés attester de ce que l'appelant ne pouvait se prévaloir plus tôt de tels nova improprement dits, même en faisant preuve de la diligence requise. En l'occurrence, ni l'appelant, ni le témoin F______ n'ont cependant expliqué pourquoi ils auraient précédemment ignoré qu'un autre conseiller avait été licencié au mois de juin 2017, alors que celui-ci était l'un de leurs collègues, ni pourquoi le second n'aurait pu obtenir la lettre de licenciement dudit conseiller – et la communiquer à l'appelant – qu'au mois de février 2022, alors que tous deux se trouvaient déjà en litige contre l'intimée. Il faut donc admettre qu'en faisant preuve de la diligence requise, l'appelant aurait pu se procurer ce moyen de preuve – et alléguer les faits correspondants – avant la clôture de la phase d'allégation. Ceci vaut a fortiori pour les documents transmis par G______, dont celle-ci a indiqué que l'appelant les lui avait demandés en 2019 déjà. Par la suite, la précitée a reconnu que ses indications, selon lesquelles elle n'aurait notamment retrouvé ces documents qu'au début du mois de mars 2022, étaient "orientées" afin de permettre à l'appelant de les verser au présent procès.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en tant qu'il a déclaré irrecevables les allégués et moyens de preuves (pièces 27 à 34) produits par l'appelant les 17 février et 7 mars 2022 (ch. 2 du dispositif).

3.             L'appelant ne conteste pas la décision du Tribunal d'admettre la recevabilité de la demande et de statuer sur le fond, au motif que l'existence d'un contrat de travail constituait un fait doublement pertinent (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4A_484/2018 du 10 décembre 2019 consid. 5.5). Il reproche au premier juge d'avoir nié l'existence d'un tel contrat et de l'avoir en conséquence débouté de l'essentiel de ses conclusions.

3.1 Lorsqu'il est amené à qualifier ou interpréter un contrat, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18
al. 1 CO).

Pour ce faire, le juge prendra en compte non seulement la teneur de leurs déclarations de volonté, mais encore le contexte général, soit aussi les circonstances et leurs déclarations antérieures, concomitantes et postérieures à la conclusion du contrat, le comportement ultérieur des parties établissant en particulier quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; 140 III 86 consid. 4.1; 131 III 606 consid. 4.1;
127 III 444 consid. 1b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_58/2018 du 28 août 2018 consid. 3.1).

La qualification juridique d'un contrat est une question de droit (ATF 131 III 217 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_602/2013 du 27 mars 2014 consid. 3.1). Le juge détermine librement la nature de la convention d'après l'aménagement objectif de la relation contractuelle, sans être lié par la qualification, même concordante, donnée par les parties (ATF 84 II 493 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_194/2011 du 5 juillet 2011 consid. 5.3). La dénomination d'un contrat n'est pas déterminante pour évaluer sa nature juridique (ATF 129 III 664 consid. 3.1)

3.1.1 Par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d'après le temps ou le travail fourni (salaire aux pièces ou à la tâche; art. 319 al. 1 CO).

Les quatre éléments constitutifs du contrat de travail sont les suivants: a) une prestation personnelle de travail, b) la mise à disposition par le travailleur de son temps pour une durée déterminée ou indéterminée, c) un rapport de subordination, et d) un salaire (cf. Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4ème éd. 2019, p. 2 ss; Meier, in Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd., 2021, n. 8 ss ad art. 319 CO).

La preuve de l'existence d'un contrat de travail incombe à la partie qui s'en prévaut pour en déduire un droit (art. 8 CC; ATF 125 III 78 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_504/2015 du 28 janvier 2016 consid. 2.1.2, in JAR 2017 p. 123).

3.1.1.1 Le lien de subordination constitue le critère distinctif essentiel du contrat de travail (ATF 125 III 78 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 4A_602/2013 du 27 mars 2014 consid. 3.2; Witzig, Droit du travail, Zurich, 2018, p. 86 ss; Witzig, La subordination dans le contrat de travail, in SJ 2015 II 39 ss, p.< 41). Il présuppose que le travailleur soit soumis à l'autorité de l'employeur pour l'exécution du contrat, cela au triple point de vue personnel, fonctionnel (organisation et contrôle), temporel (horaire de travail), et, dans une certaine mesure, économique (ATF 125 III 78 consid. 4; 121 I 259 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_553/2008 du 9 février 2009 consid. 4.1).

La dépendance personnelle réside en ceci que le travailleur s'engage à développer une activité dont la nature, l'importance, les modalités et l'exécution ne sont souvent déterminées que de manière très générale dans le contrat de travail et doivent être précisées et concrétisées par le biais d'informations et d'instructions particulières, données au fil du temps par l'employeur. Le travailleur s'engage ainsi à respecter les instructions de l'employeur et à se soumettre aux mesures de supervision que celui-ci ordonne (SJ 1990, p. 185; Meier, op. cit., n. 10 et 11 ad art. 319 CO; Wyler/Heinzer, op. cit., p. 22 ss; Witzig, La subordination dans le contrat de travail, op. cit., p. 44, n. 51-52).

La notion de rapport hiérarchique ou fonctionnel implique que le travailleur est incorporé dans l'entreprise de l'employeur et se voit attribuer une position déterminée au sein de son organisation (arrêt du Tribunal fédéral 4C_276/2006 du 25 janvier 2007 consid. 4.3.1). Du point de vue temporel, le travailleur doit en principe respecter l'horaire de travail fixé par l'employeur (Witzig, La subordination dans le contrat de travail, op. cit., p. 44, 51-52).

La dépendance économique – critère dont l'importance doit être relativisée selon le Tribunal fédéral – réside, quant à elle, en ceci que le salaire permet au travailleur d'assurer sa subsistance (arrêts du Tribunal fédéral 4C_276/2006 du 25 janvier 2007 consid. 4.3.1 et 4.6.1; 4C.462/2004 du 20 avril 2005 consid. 4.3.3; Meier, op. cit., n. 10 ad art. 319 CO; Witzig, Droit du travail, op. cit., p. 85).

En plus des quatre critères essentiels, d'autres indices peuvent aider à distinguer le contrat de travail d'autres types de contrats, sans toutefois être décisifs. Sont des indices d'existence d'un contrat de travail la stipulation d'un délai de congé, d'une clause de prohibition de concurrence, le droit de jouir de vacances, l'existence d'un temps d'essai, la présence d'un élément de durée, le fait que les conditions de temps et de lieu dans lesquelles le travail doit être exécuté sont fixées dans le contrat, la mise à disposition des instruments de travail, ainsi que le remboursement des frais. Il en va de même de la qualification du revenu en droit fiscal ou de celle retenue par les assurances sociales (Meier, op. cit., n. 15 ad art. 319 CO).

3.1.1.2 Le contrat d'engagement des voyageurs de commerce est un contrat individuel de travail à caractère spécial, par lequel une personne, appelée voyageur de commerce (travailleur), s'oblige, contre paiement d'un salaire, à négocier ou à conclure, pour le compte d'un commerçant, d'un industriel ou d'un autre chef d'entreprise exploitée en la forme commerciale (employeur), des affaires de n'importe quelle nature hors de l'établissement (art. 347 al. 1 CO).

Le contrat d'engagement des voyageurs de commerce est avant tout un contrat de travail, dont les quatre éléments caractéristiques usuels doivent être cumulativement réalisés. L'éloignement physique entre le voyageur et son employeur et l'autonomie organisationnelle dont les voyageurs bénéficient souvent, impliquent une appréciation particulière du lien de subordination. Ce qui importe alors réside dans la faculté d'instruction et de contrôle de l'employeur (lien hiérarchique) et dans l'incorporation du voyageur dans la structure organisationnelle de l'employeur (Aubert, In Commentaire romand, Code des Obligations I, 3ème éd., 2021, n. 6 s. ad art. 347 CO).

3.1.2 Le contrat d'agence est le contrat par lequel une personne, l'agent, est chargée, à titre permanent, par un ou plusieurs mandants, de négocier la conclusion d'affaires ou d'en conclure en leur nom et pour leur compte, sans être liée à eux par un contrat de travail (art. 418a al. 1 CO).

Le critère essentiel de distinction entre le contrat d'engagement des voyageurs de commerce et le contrat d'agence réside dans le fait que l'agent exerce sa profession à titre indépendant, tandis que le voyageur de commerce se trouve dans un rapport juridique de subordination à l'égard de son employeur (ATF 137 III 32 consid. 2.4.2; 129 III 664 consid. 3.2). L'agent, contrairement au voyageur de commerce, peut organiser son travail comme il l'entend, disposer de son temps à sa guise et n'est pas lié par les instructions et directives de son cocontractant. Le fait de devoir visiter un certain nombre de clients, d'avoir à justifier un chiffre d'affaires minimum, l'obligation d'adresser des rapports périodiques à la maison représentée sont des indices permettant d'inférer l'existence d'un contrat d'engagement des voyageurs de commerce (ATF 129 III 664 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_533/2012 du 6 février 2013 consid. 2.4). Il en va de même de la fourniture par le cocontractant du matériel nécessaire à l'exécution du travail, de la prise en charge par celui-ci des cotisations sociales et des frais liés à l'exercice de l'activité, ainsi que du versement d'une rémunération fixe (ATF 104 II 108 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 4C.359/2005 du 3 février 2006 consid. 2.1; Aubert, Le contrat de travail des voyageurs de commerce, 2010, p. 52 et ss).

3.2 En l'espèce, l'activité déployée par l'appelant pour l'intimée, soit la négociation de contrats avec des tiers pour le compte de celle-ci, est susceptible de faire l'objet tant d'un contrat de travail, en particulier d'un contrat de voyageur de commerce, que d'un contrat d'agence, au sens des dispositions et principes rappelés ci-dessus.

3.2.1 Il n'est pas contesté que, pour distinguer entre ces qualifications, la dénomination de la convention conclue par les parties, soit "Convention de collaboration", n'est pas déterminante, pas plus que ne l'est le recours aux termes "Employeur" et "Employé" pour y désigner lesdites parties. Conformément aux principes rappelés-ci-dessus, c'est avant tout l'existence et l'intensité d'un lien de subordination entre les parties qui doit permettre de retenir un type de contrat plutôt que l'autre.

3.2.2 A cet égard, on relèvera tout d'abord que l'appelant jouissait d'une grande liberté dans la définition et l'organisation de son temps de travail, aucun contrôle de ses horaires n'étant effectué. La convention des parties le laissait notamment libre de choisir son taux d'activité et de s'octroyer des jours de vacances non rémunérés (en fait, consid. C let. c.g et c.h). Cette autonomie dans la gestion de son temps a notamment été confirmée par le témoin H______, qui exerçait une activité similaire à celle de l'appelant. Elle n'a pas été contredite par les autres conseillers ou ex-conseillers de l'intimée entendus comme témoins, dont l'un d'entre eux a notamment déclaré qu'il se considérait comme un auto-entrepreneur. Bien que la convention des parties ait prévu que l'appelant devait rechercher des clients et leur rendre visite en suivant les instructions de l'intimée (en fait, consid. C let. c.g), l'appelant ne paraît pas avoir été particulièrement tenu de suivre de telles instructions dans son activité. Si quatre témoins ont notamment confirmé que l'intimée avait établi un protocole pour les entretiens avec les clients, qu'elle recommandait vivement de suivre, trois d'entre eux ont cependant déclaré que celui-ci n'était pas obligatoire. Le témoin H______ a pour sa part indiqué qu'il pouvait proposer les produits qu'il voulait aux clients et qu'il n'était pas tenu rendre compte à l'intimée de ses rendez-vous, mais uniquement des affaires conclues, afin de percevoir sa rémunération. Les autres conseillers entendus n'ont pas contredit ce qui précède.

Seul le suivi des formations paraît avoir été plus contraignant, du point de vue temporel, pour l'appelant et ses collègues: celles-ci étaient organisées à jours fixes et leur suivi était "obligatoire" selon quatre témoins entendus sur cinq. Sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant cette question, on relèvera que le fait pour l'intimée d'exiger éventuellement que ses conseillers suivent de telles formations ne conduit pas nécessairement à devoir qualifier la relation des parties de contrat de travail. On ne voit notamment pas en quoi un mandant ne pourrait pas choisir de ne contracter qu'avec (ou de n'être représenté que par) des agents disposant de certaines qualifications professionnelles, ni entreprendre de leur dispenser à ses frais des formations à cette fin, comme le ferait un employeur avec ses employés. Il n'y a pas là de lien de subordination particulier, ni propre au contrat de travail, étant observé que les formations dispensées à l'appelant ne devaient s'étendre que sur une durée limitée, selon la convention des parties, et que les allégations de l'appelant selon lesquelles le refus ou l'omission des conseillers de suivre les formations proposées aurait fait l'objet de sanctions de la part de l'intimée, notamment sous la forme de licenciements, ne sont pas vérifiés par les pièces produites, ni n'ont été confirmées par les témoins entendus.

3.2.3 S'agissant des objectifs que l'appelant soutient avoir été tenu d'atteindre, quatre témoins sur cinq ont confirmé que l'intimée donnait à ses conseillers pour but d'atteindre un montant de 250'000 fr. de chiffre d'affaires mensuel. Contrairement à ce que soutient l'appelant, cet objectif n'apparait cependant pas avoir été réellement contraignant, les témoins susvisés n'étant pas unanimes sur les conséquences que l'intimée pouvait donner à un éventuel manquement à l'objectif susvisé, notamment en termes de résiliation des rapports contractuel (étant rappelé que deux d'entre eux étaient de surcroît en litige avec l'intimée au moment de leur déposition).

Devant le Tribunal, l'appelant a lui-même reconnu qu'il n'avait pas toujours atteint l'objectif en question, mais ne soutient pas avoir été remercié, ni avoir fait l'objet de pressions, pour ce motif. Comme l'ont précisé deux des témoins susvisés, il faut donc admettre que l'objectif susvisé avait pour but d'indiquer aux conseillers le montant du chiffre d'affaires qu'ils devaient réaliser pour atteindre un certain revenu, notamment s'ils entendaient s'y consacrer à plein temps, mais non de permettre à l'intimée de s'assurer qu'ils lui procurent un certain rendement, comme le ferait un élément de subordination, lesdits conseillers restant libres de déterminer le taux et le volume de leur activité. En l'occurrence, les chiffres relevés au sujet de l'activité de l'appelant (conclusion de 1,88 contrats par mois en moyenne, alors que d'autre conseillers parvenaient apparemment à en conclure une vingtaine) permettent d'ailleurs de douter que celui-ci se soit consacré à son activité à plein temps. Or, comme le relève l'intimée, l'appelant ne s'est notamment jamais ouvert à elle, durant les vingt-six mois de la période contractuelle, de ce que les revenus qu'il réalisait ne correspondaient pas à son taux d'activité, alors que la convention des parties lui en donnait la possibilité (cf. en fait, consid. C let. c.c). Il n'est pas davantage établi que l'intimée aurait reproché à l'appelant de ne pas réaliser un chiffre d'affaires donné, en dépit du nombre peu élevé de contrats conclus par son entremise. Dans ces conditions, il faut comme le Tribunal admettre que les objectifs invoqués par l'appelant ne permettent pas non plus de conclure à l'existence d'un rapport de subordination, au sens des principes rappelés ci-dessus.

3.2.4 Au vu des éléments qui précèdent, soit de la liberté d'organisation de l'appelant d'une part, et de l'absence de caractère réellement contraignant des instructions, des formations et des objectifs donnés par l'intimée, d'autre part, l'existence d'un rapport de subordination propre à un contrat de travail doit en l'espèce être niée. Tel est le cas quand bien même d'autres éléments de moindre importance, tels que la stipulation formelle d'un temps d'essai, la mise à disposition de matériel de bureau ou le remboursement de frais par l'intimée, seraient davantage le propre d'un contrat d'engagement de voyageur de commerce que d'un contrat d'agence, selon les principes rappelés ci-dessus. Il convient notamment d'observer que le remboursement de frais n'était en l'espèce que forfaitaire et ne portait pas sur le poste de frais le plus élevé, soit l'utilisation d'un véhicule privé. Pour les mêmes raisons, qualification du contrat que peuvent avoir retenues les autorités fiscales ou les assurances sociales se sauraient être déterminantes en l'espèce.

3.3 Par conséquent, c'est à bon droit que le Tribunal a retenu l'existence d'un contrat d'agence, au sens des dispositions et principes rappelés sous consid. 3.1.3 ci-dessus, et qu'il a apprécié le bien-fondé des prétentions de l'appelant à l'aune des règles régissant un tel contrat, en sus des dispositions particulières découlant de la convention des parties.

A ce propos, l'appelant ne soutient pas qu'il conviendrait de faire (davantage) droit à ses prétentions, dans l'éventualité où la relation contractuelle des parties devrait être qualifiée de contrat d'agence. L'ensemble de son argumentation est fondée sur l'existence prétendue d'un contrat de travail, laquelle doit en l'espèce être niée, pour les motifs exposés ci-dessus. Il n'y a dès lors pas lieu de revoir l'examen effectué par le Tribunal sur la base de la qualification retenue, faute de motivation de l'appel sur ce point, et le jugement entrepris sera simplement confirmé, tandis que l'appelant sera débouté de ses conclusions.

4.             En raison de la valeur litigieuse supérieure à 50'000 fr., des frais judiciaires doivent être perçus pour la procédure d'appel (art. 114 let. c cum 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC).

Ceux-ci seront arrêtés à 1'100 fr. (art. 71 RTFMC) et mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de même montant versée par l'appelant, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

La procédure d'appel ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 4 :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 9 septembre 2022 par A______ contre le jugement JTPH/2018/2022 rendu le 5 juillet 2022 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/1527/2021.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'100 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais de même montant fournie par celui-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Nadia FAVRE, juge employeur; Madame Ana ROUX, juge salarié; Monsieur Javier BARBEITO, greffier.

 

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

Le greffier :

Javier BARBEITO

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.