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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/19350/2021

CAPH/55/2023 du 23.05.2023 sur JTPH/307/2022 ( OS ) , PARTIELMNT CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/19350/2021-1 CAPH/55/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MARDI 23 MAI 2023

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 4 octobre 2022 (JTPH/307/2022), comparant par Me Philippe EIGENHEER, avocat, DGE AVOCATS, rue Bartholoni 6, case postale, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant en personne.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/307/2022 du 4 octobre 2022, reçu par A______ SA le 5 octobre 2022, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure simplifiée, a déclaré recevables la demande formée le 26 janvier 2022 par B______ contre la précitée (chiffre 1 du dispositif), la demande reconventionnelle formée le 21 mars 2022 par A______ SA contre le précité (ch. 2), ainsi que l'amplification des conclusions formulées par B______ lors de l'audience du 11 juillet 2022 (ch. 3), condamné A______ SA à verser à ce dernier les sommes de 22'486 fr. 90 bruts (ch. 4) et 1 fr. net (ch. 5), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 6), donné acte à A______ SA de son engagement à remettre à B______ les certificats de travail dans le sens du considérant 10 du jugement, en l'y condamnant en tant que de besoin (ch. 7), dit qu'il n'était pas alloué de dépens et que la procédure était gratuite (ch. 8) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 9).

B.            a. Par acte déposé le 3 novembre 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a formé appel de ce jugement, sollicitant l'annulation des chiffres 3 à 7 et 9 de son dispositif. Cela fait, elle a conclu, sur demande principale, au déboutement de B______ de toutes ses conclusions et, sur demande reconventionnelle, à la constatation que le précité n'avait pas valablement contesté ses allégués contenus dans ladite demande et à la condamnation de celui-ci à lui verser 30'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 2021, ses droits à l'encontre de B______ devant être réservés pour la réclamation de tout solde et/ou dommage complémentaire. Subsidiairement, elle a conclu au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

b. B______ n'a pas répondu à l'appel dans le délai qui lui a été imparti.

c. Par avis du 7 février 2023 du greffe de la Cour, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ SA (ci-après également l'employeuse) est une société anonyme inscrite au Registre du commerce de Genève, dont le but est l'exploitation d'une carrosserie.

C______ en est l'administrateur président, avec signature individuelle.

b. Par contrat de travail conclu à une date indéterminée, B______ (ci-après également l'employé) a été engagé par A______ SA en qualité de carrossier-peintre, à compter du 1er mai 2019, pour une durée indéterminée et pour un salaire mensuel brut de 4'500 fr., versé treize fois l'an.

Ce contrat prévoyait un délai de résiliation de trois mois pour la fin d'un mois après une année, ainsi que quatre semaines de vacances par année.

Par avenant à ce contrat du 16 décembre 2020, le salaire mensuel brut de l'employé a été augmenté à 4'700 fr. dès le 1er janvier 2021.

c. Entre le 1er janvier et le 30 juin 2021, B______ a pris trois jours et demi de congé.

d. A______ SA a allégué n'avoir rencontré aucun problème avec l'employé et avoir été satisfaite de son travail jusqu'au 30 juin 2021.

Entendus en qualité de témoins par le Tribunal, D______, directeur de la carrosserie et fils de C______, ainsi que E______, employé au sein de celle-ci, ont déclaré que B______ occupait un poste important dans l'entreprise, puisqu'il s'occupait de la finition des véhicules avant la livraison et qu'il exécutait très bien son travail.

e. Le 1er juillet 2021, B______ ne s'est pas présenté à son travail.

A______ SA a allégué avoir tenté, à plusieurs reprises, de joindre l'employé, en vain. A cet égard, elle a produit un courriel du 9 mars 2022 expédié à sa propre adresse de messagerie (______@______.ch), contenant le message suivant: "Bonjour B______. Peux-tu me donner des nouvelles de ton absence?". Devant le Tribunal, C______ a déclaré avoir envoyé ce message à B______ le matin du 1er juillet 2021; le 9 mars 2022 correspondait à la date à laquelle il avait transféré ce message sur la boîte mail de la carrosserie.

B______ a produit un extrait de sa messagerie WhatsApp, lequel faisait apparaître un appel manqué de C______ le 1er juillet 2021 ainsi que, le même jour, un message de ce dernier finissant par "des nouvelles de ton absence?". B______ a confirmé avoir reçu ce message le 1er juillet 2021, auquel il n'a pas répondu.

f. Par courrier ("Lettre par e-mail") du 2 juillet 2021, intitulé "Avertissement", A______ SA a reproché à B______ de n'avoir donné aucune nouvelle depuis le mercredi 30 juin 2021 à 17h30 et l'a sommé de se présenter, sans faute, le lundi 5 juillet 2021 à 7h45 à son poste de travail, précisant qu'à défaut il serait licencié avec effet immédiat.

Devant le Tribunal, C______ a déclaré avoir envoyé cet avertissement par courriel, ainsi que par plis simple et recommandé. B______ a déclaré ne pas l'avoir reçu.

g. Par courrier du 5 juillet 2021, A______ SA a licencié B______ avec effet immédiat, ce dernier ne s'étant pas présenté à son travail le matin même, malgré l'avertissement du 2 juillet 2021, confirmant ainsi l'abandon de son poste et la rupture du lien de confiance.

Il était indiqué dans le courrier que celui-ci était expédié à l'employé par plis simple et recommandé et par courriel.

h. Entendus en qualité de témoins, E______, F______, G______, H______ et I______, tous employés de A______ SA, ont confirmé que B______ n'était plus venu travailler du jour au lendemain, sans donner la moindre nouvelle.

i. Selon un certificat médical daté du 5 juillet 2021, établi par le Dr J______, médecin au sein de K______ SA (permanence médicale), B______ était en incapacité totale de travailler depuis le 1er juillet 2021, en raison d'un "syndrome dépressif sévère".

j. Par message WhatsApp du 28 juillet 2021, C______ a fait part à B______ de sa déception face à son comportement. Celui-ci n'a pas répondu à ce message.

k. Par courrier du 29 juillet 2021, B______ a indiqué à A______ SA que la résiliation de son contrat de travail était nulle, dès lors qu'il était en arrêt maladie pour une durée indéterminée, selon le justificatif transmis ("Je vous fais parvenir mon justificatif").

Devant le Tribunal, C______ a déclaré que l'employeuse n'avait pas reçu ce courrier; elle n'avait pas non plus reçu de certificat médical.

D.           a. Par acte déposé le 26 janvier 2022 au greffe du Tribunal, après l'échec de la tentative de conciliation, B______, agissant en personne, a assigné A______ SA en paiement de la somme totale de 26'002 fr., à titre de salaire de juillet à septembre 2021 (14'400 fr.), d'indemnité pour résiliation immédiate injustifiée (4'800 fr.), d'indemnité pour jours de vacances non pris en nature (4'800 fr.) et d'indemnité pour tort moral (2'000 fr.). Il a également sollicité la remise d'un certificat de travail (1 fr.) et de ses fiches de salaire (1 fr.), "avec l'avis de l'avocat".

Il a rempli le formulaire type de demande en procédure simplifiée, mis à disposition par le Tribunal, sans alléguer de faits ni produire de pièces.

b. Dans sa réponse du 21 mars 2022, A______ SA a conclu au déboutement de B______ de toutes ses conclusions et, sur demande reconventionnelle, à la condamnation de ce dernier à lui verser 30'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 2021, à titre de réparation pour le dommage subi.

Elle a allégué que l'employé avait abandonné son poste de travail. Ce dernier avait intégralement vidé son casier la veille du 1er juillet 2021, ce qui démontrait qu'il n'avait plus l'intention de revenir travailler. Il n'avait jamais réagi aux courriers qu'elle lui avait adressés, ni donné de nouvelles de manière générale, pas plus qu'il n'était venu rapporter ses vêtements de travail. Elle n'avait, au demeurant, jamais été informée de son prétendu arrêt maladie, dont elle n'avait eu connaissance que dans le cadre de la procédure de conciliation. Elle émettait de sérieux doutes quant à la véracité du certificat médical produit, établi en réaction à son propre courrier de licenciement du 5 juillet 2021, ce d'autant plus que ce certificat avait un effet rétroactif au 1er juillet 2021 et se basait sur les seules déclarations de B______. De plus, certains employés de la carrosserie avaient constaté, sur les réseaux sociaux, que le précité s'adonnait à des activités festives à l'étranger, notamment entre le 1er et le 5 juillet 2021.

A______ SA a indiqué compenser l'indemnité due à B______ à titre de vacances non prises en nature (1'222 fr. 85, correspondant à six jours et demi de congé non pris) avec l'indemnité à laquelle elle avait droit selon l'art. 337d al. 1 CO (1'218 fr. 75, soit un quart du salaire mensuel). Elle restait ainsi redevable d'un montant de 4 fr. 10, pour lequel elle excipait de compensation avec le dommage qu'elle avait subi.

S'agissant de son dommage, l'employeuse a allégué que l'abandon de poste de B______ lui avait causé d'importants problèmes d'organisation. Celui-ci faisait partie d'une équipe de quatre salariés en peinture sur un effectif total de dix salariés, incluant six carrossiers. L'employeuse avait dû affecter l'un des trois peintres restants à la fonction de polisseur, ce qui avait entraîné du retard dans les travaux de peinture. Plusieurs salariés avaient dû effectuer des heures supplémentaires pour compenser le départ impromptu de B______. Il avait fallu trois mois avant une reprise normale de la charge de travail, pendant lesquels 110.2 heures supplémentaires avaient été rémunérées à hauteur de 3'306 fr. bruts (110.2 heures x 30 fr.). Il avait également fallu engager deux employés pour les former à l'activité très spécifique qu'effectuait B______, ce qui avait pris trois mois et représentait une charge salariale de 25'394 fr. 40. De ce montant devaient être déduits les trois mois de salaire qui n'avaient pas été versés à l'employé, à hauteur de 15'274 fr. 95, ce qui portait le total des frais engendrés par son départ injustifié à 13'425 fr. 45 bruts. En outre, l'équipe de peinture ayant été "amputée de l'un de ses membres", il y avait eu du retard dans la réparation/livraison de cinq voitures. Cela avait engendré une perte de rendement en 29'520 fr. par mois, correspondant aux heures de main d'œuvre que B______ aurait dû effectuer et que l'employeuse n'avait pas pu facturer. Cela étant, A______ SA limitait "en l'état" ses prétentions reconventionnelles à 30'000 fr. Elle a produit des pièces à cet égard.

c. Par ordonnance du 25 mars 2022, le Tribunal a transmis à B______ la réponse susvisée et lui a imparti un délai de trente de jours pour répondre à la demande reconventionnelle, sans attirer son attention sur les conséquences d'un éventuel défaut (cf. 147 al. 3 CPC).

L'employé n'a pas déposé de réponse dans le délai fixé.

d. Lors de l'audience du Tribunal du 11 juillet 2022, B______, comparant en personne, a amplifié ses conclusions en réclamant la somme totale de 60'624 fr. 85, à titre de salaire de juillet 2021 à mars 2022 (45'824 fr. 85), d'indemnité pour jours de vacances non pris en nature (4'800 fr.), d'indemnité pour résiliation immédiate injustifiée (5'000 fr.) et d'indemnité pour tort moral (5'000 fr.). Il sollicitait encore la remise d'un certificat de travail, mais plus ses fiches de salaire. Après explications du Tribunal, il a finalement limité ses conclusions à la somme totale de 30'000 fr.

A______ SA s'est opposée à cette amplification de la demande.

B______ a déclaré avoir sollicité les conseils d'un avocat pour le dépôt de sa demande, mais ne pas avoir pu le rémunérer pour le représenter dans le cadre de la procédure. Il a confirmé avoir reçu la réponse et la demande reconventionnelle de sa partie adverse, mais ne pas avoir su "quoi répondre". Interpellé par le Tribunal, il a contesté l'intégralité des allégués contenus dans la demande reconventionnelle. Il a déclaré avoir terminé sa journée de travail le 1er juillet 2021 [recte : 30 juin 2021] et, en rentrant chez lui, s'être senti mal, pensant avoir "attrapé une grippe". Son état de santé avait empiré le lendemain, mais il avait attendu un jour avant de consulter un médecin. Son téléphone portable ne fonctionnant plus, il avait demandé à son frère de prévenir son employeuse. Son frère avait parlé avec la fille de C______, L______, qui ne semblait pas contente. Le lendemain, il avait reçu sa lettre de licenciement, par courriel sur son téléphone portable, qui fonctionnait à nouveau. Il avait alors contacté L______, qui avait confirmé son licenciement, pour l'informer qu'il était malade et au bénéfice d'un certificat médical. Il n'avait pas revu le médecin après le 5 juillet 2021, sous réserve d'une consultation le 28 février 2022. A cet égard, il a produit un document, établi par le Dr J______ le 28 février 2022 à l'attention de l'assurance-chômage, indiquant qu'il avait été en incapacité totale de travail du 1er juillet au 1er août 2021, pour cause de maladie, et qu'il était à nouveau apte à exercer son travail habituel dès le 25 novembre 2021. L'employé a toutefois admis ne pas avoir été malade jusqu'à cette date. Il a déclaré avoir eu la grippe pendant une semaine et demie, voire deux semaines, puis son incapacité de travail "[avait été] psychologique", en raison de son licenciement. Avant juillet 2021, il avait été malade à deux reprises, ce qui n'avait pas causé de problème avec l'employeuse. Il n'avait pas perçu d'indemnités chômage et vivait grâce à ses économies depuis juillet 2021. Il n'avait pas envoyé de message à A______ SA entre le 1er et le 28 juillet 2021. Enfin, il a contesté avoir vidé son casier, précisant y avoir laissé une tenue de travail, ainsi que des chaussures de sécurité.

A______ SA, soit pour elle C______, a déclaré que L______ - qui était en congé les 1er et 2 juillet 2021 - n'avait jamais parlé au frère de B______. Ce dernier avait été licencié, car il avait abandonné son poste de façon préméditée, sans donner de nouvelles. L'employeuse avait cherché à le joindre, mais il avait persisté dans son silence. Elle s'est par ailleurs engagée à lui remettre un certificat de travail.

Le témoin F______ a déclaré s'être rendu dans la boulangerie située en face de la carrosserie avec des collègues et avoir parlé du fait que B______ n'était plus revenu travailler. La boulangère s'était alors exprimée comme suit: "Ah, il est parti !". Selon le témoin, "c'était comme si elle savait qu'il allait partir". Lui-même n'avait pas entendu dire que B______ aurait été en arrêt maladie.

Le témoin G______ a déclaré que le précité disait souvent à la pause déjeuner qu'un jour "nous serions surpris", mais comme ce dernier parlait beaucoup, il n'y avait pas prêté attention. Il avait vu des photos de B______ sur Facebook, durant la période où celui-ci n'était plus venu travailler. Sur ces photos, le précité était bien habillé; il était en train de poser "comme s'il était en vacances". Le témoin avait cru reconnaître la ville de M______ [France] sur certaines des photos. Il n'avait pas eu connaissance d'une quelconque maladie concernant B______.

Le témoin H______ a déclaré que les employés de A______ SA disposaient d'un casier, qui se fermait à clé, pour déposer leurs affaires personnelles. Il n'y avait pas de matériel appartenant à l'employeuse. Il ignorait si B______ avait vidé son casier avant de partir du jour au lendemain.

Le témoin I______ a déclaré que B______ lui avait dit "qu'un jour quelqu'un allait être absent pendant plusieurs mois", sans préciser à qui il faisait référence. Il n'était donc pas étonné que le précité ne soit plus venu travailler. Il lui semblait que le casier de B______, qui se situait près du sien, était vide.

Le témoin D______ a déclaré que sa mère l'avait appelé, alors qu'il était en vacances, pour lui indiquer que B______ ne s'était pas présenté au travail et qu'ils n'avaient pas de nouvelles de lui. Il avait appris, les semaines suivantes, que le précité était en arrêt maladie. Or, lui-même et des employés de la carrosserie le voyaient "régulièrement sur les réseaux sociaux faire la fête à droite et à gauche dans différentes villes".

Les témoins E______, F______, G______, H______ et I______ ont tous déclaré avoir effectué des heures supplémentaires en raison du départ de B______, le temps que la carrosserie trouve un remplaçant, ce qui avait duré entre un et deux mois.

A l'issue de l'audience, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions, sur quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que l'amplification des conclusions de la demande était recevable, celle-ci ayant été formulée au début de l'audience du 11 juillet 2022. Les nouvelles conclusions relevaient, en outre, de la même procédure, étaient en lien de connexité avec les conclusions initiales et reposaient sur un fait nouveau, B______ ayant allégué remplir les conditions pour obtenir le paiement de son salaire jusqu'au mois de mars 2022.

A______ SA n'avait pas établi que l'employé aurait refusé, intentionnellement et définitivement, de continuer à fournir son travail. Les déclarations des témoins G______ et I______ ne suffisaient pas à démontrer une telle intention; il en allait de même de la réaction attribuée à la boulangère. Il n'était pas non plus établi que B______ aurait vidé son casier le 30 juin 2021. De plus, A______ SA n'avait pas démontré avoir sommé l'employé de reprendre le travail; en particulier, il n'était pas prouvé que celui-ci avait reçu le courrier de l'employeuse du 2 juillet 2021. Au demeurant, B______ avait une raison valable de ne pas s'être présenté à son poste, puisqu'il se trouvait en incapacité totale de travail.

Le licenciement immédiat de l'employé était, en outre, injustifié. B______ n'avait pas donné de nouvelles à l'employeuse entre le 1er et le 5 juillet 2021, faisant preuve d'un manque d'égards flagrant envers celle-ci. Toutefois, sa courte absence inexpliquée ne suffisait pas à rompre le lien de confiance entre les parties. Le manquement de l'employé n'était dès lors pas suffisamment grave pour fonder un licenciement immédiat, à tout le moins sans avertissement préalable.

L'incapacité de travail de l'employé avait duré du 1er au 31 juillet 2021, de sorte que les rapports de travail auraient pris fin le 31 octobre 2021 s'ils avaient été résiliés de manière ordinaire. B______ avait ainsi droit à 80% de son salaire durant son incapacité de travail, puis à son salaire entier, treizième compris, entre le 1er août et le 31 octobre 2021, soit un total de 19'347 fr. 75 bruts. L'employé ayant toutefois une part de responsabilité dans son licenciement, l'indemnité due pour résiliation immédiate injustifiée devait être fixée à 1 fr. symbolique. Il avait également droit à 3'139 fr. 15 bruts à titre d'indemnité pour jours de vacances non pris en nature (1'527 fr. 50) et pour les vacances non prises sur la période du 1er août au 31 octobre 2021 (1'611 fr. 65). En revanche, il n'avait pas démontré avoir subi une atteinte à sa personnalité en raison de son licenciement, de sorte qu'il n'avait pas droit à une indemnité pour tort moral.

Enfin, son absence étant due à une incapacité de travail pour cause de maladie, B______ ne pouvait pas être tenu pour responsable d'éventuels dommages subis par l'employeuse du fait qu'il n'était plus venu travailler.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est dirigé contre une décision finale de première instance rendue dans le cadre d'un litige portant sur une valeur litigieuse de plus de 10'000 fr. au dernier état des conclusions de première instance (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

Il a été déposé dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision et respecte, au surplus, la forme prescrite (art. 130, 131, et 311 CPC). L'appel est ainsi recevable.

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par les juges de première instance et vérifie si ceux-ci pouvaient admettre les faits qu'ils ont retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

1.3 La valeur litigieuse ne dépassant pas 30'000 fr. - tant pour la demande principale que pour la demande reconventionnelle (cf. art. 94 al. 1 CPC) -, la procédure simplifiée est applicable (art. 243 CPC).

Le procès est régi par les maximes inquisitoire sociale, ce qui implique que le juge établit les faits d'office (art. 55 al. 2 et art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC), et de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

2.             L'appelante reproche au Tribunal d'avoir déclaré recevable l'amplification des conclusions de l'intimé formulée lors de l'audience du 11 juillet 2022.

2.1 Selon l'art. 227 al. 1 CPC, la demande peut être modifiée si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et que l'une des conditions suivantes est remplie : la prétention nouvelle ou modifiée présente un lien de connexité avec la dernière prétention (let. a) ou la partie adverse consent à la modification de la demande (let. b).

En revanche, aux débats principaux, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 sont remplies (art. 230 al. 1 let. a CPC) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (art. 230 al. 1 let. b CPC).

2.2 En l'occurrence, l'intimé a modifié ses conclusions au début de la seule audience tenue par le Tribunal le 11 juillet 2022, en sollicitant le paiement de son salaire jusqu'en mars 2022 et non plus jusqu'en septembre 2021.

L'amplification de cette conclusion se fonde à l'évidence sur le document établi le 28 février 2022 par le Dr J______, produit par l'intimé à l'audience, à teneur duquel ce dernier aurait retrouvé sa pleine capacité de travail à la fin du mois de novembre 2021. La recevabilité de cette pièce nouvelle n'a pas été remise en cause par l'appelante. Sur la base de ce document, l'intimé soutient avoir droit au paiement de son salaire jusqu'en mars 2022, compte tenu du délai de résiliation ordinaire. Cette modification de la demande repose ainsi sur un fait nouveau, contrairement à ce que soutient l'appelante.

Il n'est pas contesté que les autres conditions afférentes à la modification de la demande sont, en l'espèce, remplies.

L'amplification litigieuse des conclusions de l'intimé est donc recevable. En tous les cas, celle-ci n'a pas d'incidence sur le litige, les prétentions de ce dernier devant quoi qu'il en soit être rejetées (cf. consid. 5.2. infra).

Partant, le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé.

3.             Dans un deuxième grief, l'appelante soutient que, faute pour l'intimé d'avoir valablement contesté les allégués contenus dans la demande reconventionnelle, le Tribunal aurait dû admettre cette demande.

3.1.1 En procédure simplifiée, si la demande n'est pas motivée, le tribunal la notifie au défendeur et cite les parties aux débats (art. 245 al. 1 CPC); dans le cas contraire, le tribunal fixe un délai au défendeur pour se prononcer par écrit (art. 245 al. 2 CPC).

Le tribunal décide des mesures à prendre pour que la cause puisse être liquidée autant que possible lors de la première audience; si les circonstances l'exigent, le tribunal peut ordonner un échange d'écritures et tenir des audiences d'instruction (art. 246 al. 1 et 2 CPC).

La procédure simplifiée, qui se caractérise par un formalisme réduit, a pour but de favoriser une règlement plus rapide du litige, de permettre le cas échéant à une personne non juriste de mener elle-même le procès sans recourir à un représentant professionnel et, dans certains cas, d'assurer une protection accrue d'une partie réputée socialement faible, à l'exemple du travailleur dans un litige prud'homal (TAPPY, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n° 4-5 ad art. 243 CPC).

3.1.2 En procédure ordinaire, le défendeur doit notamment exposer dans sa réponse quels faits allégués dans la demande son reconnus ou contestés (art. 222 al. 2 CPC). S'agissant de la charge de la contestation, chaque partie peut se borner à contester les faits allégués par l'autre, mais elle doit le faire de manière assez précise pour que cette dernière sache quels allégués sont contestés en particulier et qu'elle puisse en administrer la preuve. Une contestation en bloc ne suffit pas (ATF 144 III 519 consid. 5.2.2.1; 141 III 433 consid. 2.6, SJ 2016 I 16).

Si la réponse n'est pas déposée dans le délai imparti, le tribunal fixe au défendeur un bref délai supplémentaire. Si la réponse n'est pas déposée à l'échéance du délai, le tribunal rend la décision finale si la cause est en état d'être jugée; sinon, la cause est citée aux débats principaux (art. 223 al. 1 et al. 2 CPC).

3.1.3 Le Tribunal fédéral n'a pas encore tranché la question de savoir si les dispositions relatives à la procédure ordinaire, en particulier l'art. 223 CPC, trouvent application en procédure simplifiée.

Selon TAPPY, lorsque la procédure simplifiée est applicable, le défendeur n'est pas tenu de formuler, dans sa réponse écrite, des allégations ou des offres de preuves détaillées, ni de se déterminer de manière conforme à l'art. 222 al. 2 CPC. En juger autrement reviendrait à rendre la procédure simplifiée impraticable pour un défendeur non assisté en cas de dépôt d'une demande rédigée conformément aux règles plus strictes applicables en procédure ordinaire, ce qui contreviendrait directement à la volonté du législateur d'une procédure "laienfreundlich". Si le défendeur omet de se déterminer par écrit dans le délai fixé selon l'art. 245 al. 2 CPC, la procédure doit simplement suivre son cours sans qu'il soit tenu compte de cette omission, conformément à la règle générale de l'art. 147 al. 2 CPC. Le juge doit alors convoquer des débats où les parties pourront procéder oralement comme elles l'auraient fait si cette convocation avait eu directement lieu après le dépôt de la demande selon l'art. 245 al. 1 CPC. Le fait de ne pas répondre ne portant pas à conséquence, la fixation d'un délai selon l'art. 245 al. 2 CPC n'a pas besoin d'être accompagnée d'un avis particulier sur les conséquences du défaut (cf. art. 147 al. 3 CPC) et il n'y a pas lieu de fixer un bref délai supplémentaire selon l'art. 223 al. 1 CPC. Ce n'est que si les circonstances exigent un échange d'écritures formel (surtout dans des cas complexes) que les écritures peuvent devoir répondre aux exigences formelles applicables aux actes correspondants en procédure ordinaire et qu'une application analogique des al. 1 et 2 de l'art. 223 CPC pourrait s'avérer justifiée, étant précisé qu'une décision par défaut, faute de dépôt d'une telle réponse dans le bref délai supplémentaire imparti d'office, ne serait quoi qu'il en soit envisageable que si, d'une part, l'intéressé a été dûment rendu attentif à la possibilité d'une telle conséquence (art. 147 al. 3 CPC) et si, d'autre part, la maxime inquisitoire n'est pas applicable selon l'art. 247 al. 2 CPC (TAPPY, op. cit., n° 8, 9 et 10 ad art. 245 CPC).

D'après BOHNET, il conviendrait, lorsque le défendeur n'a pas répondu à la demande motivée dans le délai imparti par le juge conformément à l'art. 245 al. 2 CPC, en principe, de citer les parties à une audience, plutôt que de rendre immédiatement une décision. De l'avis de cet auteur, le CPC permet cependant cette dernière possibilité, après l'octroi d'un bref délai supplémentaire (art. 223 al. 1 CPC) et à condition que le défendeur ait été averti que son silence pourrait aboutir à un prononcé sur pièces en vertu de l'art. 147 al. 3 CPC (BOHNET, Des formes écrites et orale en procédure civile suisse, in RDS/ZSR 2012 I p. 451ss, 466).

3.1.4 Si une demande reconventionnelle est introduite, le tribunal fixe un délai au demandeur pour déposer une réponse écrite (art. 224 al. 3 CPC).

La reconvention est possible en procédure simplifiée, pour autant que les prétentions reconventionnelles soient soumises à la même procédure que la demande principale (art. 224 al. 1 CPC). Par application analogique de l'art. 224 al. 1 CPC, la demande reconventionnelle doit en principe être formulée par le défendeur dans ses déterminations écrites selon l'art. 245 al. 2 CPC ou, à défaut de telles déterminations, oralement aux débats fixés selon l'art. 245 al. 1 CPC. Le demandeur principal devrait généralement avoir la possibilité de se déterminer par écrit sur la demande reconventionnelle, par application analogique des art. 224 al. 3 et 245 al. 2 CPC (TAPPY, op. cit., n° 11-13 ad art. 245 CPC).

3.1.5 La maxime inquisitoire sociale, prévue à l'art. 247 al. 2 let. a CPC, implique notamment que le tribunal n'est pas lié par les offres de preuves et les allégués de fait des parties (ATF 139 III 457 consid. 4.4.3.2) et qu'il peut fonder sa décision sur des faits qui n'ont certes pas été allégués, mais dont il a eu connaissance en cours de procédure (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2021 du 14 décembre 2021 consid. 5.1, résumé in CPC Online, ad art. 247 CPC).

Autrement dit, le juge peut se fonder sur des faits pertinents établis, même si les parties ne les ont pas invoqués. Cela ne dispense toutefois pas celles-ci de collaborer activement à la procédure, ce à quoi le tribunal doit, le cas échéant, les inciter en les interpellant. A défaut de collaboration des parties le procès peut être clos, car la maxime inquisitoire atténuée sert à favoriser une procédure accessible à des non juristes, non à suppléer les carences d'une partie négligente ou refusant de s'exprimer (Tappy, op. cit., n° 21, 23, 28, ad art. 247 CPC).

3.2 Comme déjà relevé supra (cf. consid. 1.3), le présent litige est soumis à la procédure simplifiée et à la maxime inquisitoire prévue à l'art. 247 al. 2 CPC, ce qui n'est - à juste titre - pas contesté par l'appelante.

A l'appui de sa demande reconventionnelle, cette dernière a allégué avoir subi un préjudice économique en raison de l'abandon de poste de l'employé (heures supplémentaires, formation de nouveaux salariés, perte de gain). Par ordonnance du 25 mars 2022, le Tribunal a fixé à l'intimé un délai pour se déterminer par écrit sur cette demande, sans attirer son attention sur les conséquences d'un éventuel défaut. L'intimé, qui plaide en personne, n'a pas déposé de réponse écrite dans le délai fixé, après quoi le Tribunal a cité les parties aux débats, ainsi que le prévoit l'art. 245 al. 1 CPC. Lors de l'audience du 11 juillet 2022, l'intimé a précisé ne pas avoir su "quoi répondre" dans le délai imparti. Sur interpellation du Tribunal, il a ensuite déclaré contester l'intégralité des allégués contenus dans la demande reconventionnelle.

Il ressort par ailleurs des conclusions formulées dans sa demande principale, en particulier de l'indemnité réclamée pour licenciement abusif, que l'intimé conteste avoir abandonné son emploi le 1er juillet 2021 et ainsi devoir réparer un quelconque dommage à ce titre. Il a d'ailleurs déclaré en audience qu'il ne s'était pas présenté à son poste en raison d'une incapacité totale de travail pour cause de maladie.

Dans ces circonstances, eu égard à la procédure simplifiée et à la maxime inquisitoire sociale applicables, et compte tenu du fait que l'intimé - qui n'est pas juriste - a comparu en personne tout au long des débats de première instance, la Cour retiendra que celui-ci a contesté les faits allégués par l'appelante à l'appui de sa demande reconventionnelle avec suffisamment de précision. En particulier, l'appelante, qui est assistée d'un avocat, disposait des éléments utiles pour déterminer lesquels de ses allégués étaient contestés en vue d'en faire administrer la preuve - les faits devant quoi qu'il en soit être établis d'office par le Tribunal, celui-ci n'étant pas lié par les offres de preuves et les allégués des parties. Cette solution s'impose d'autant plus que la présente cause est dépourvue de complexité.

L'appel sera dès lors rejeté sur ce point.

4.             L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir retenu que l'intimé avait abandonné son poste à compter du 1er juillet 2021.

4.1 L'abandon de poste, au sens de l'art. 337d CO, entraîne l'expiration immédiate du contrat. Il est réalisé lorsque le travailleur refuse consciemment, intentionnellement et définitivement de continuer à fournir le travail convenu (ATF 121 V 277 consid. 3a). Dans ce cas, le contrat de travail prend fin immédiatement, sans que l'employeur doive adresser au salarié une résiliation immédiate de son contrat (ATF 121 V 277 consid. 3a; 112 II 41 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 4C.303/2005 du 1er décembre 2005 consid. 2.2 et 4C.370/2001 du 14 mars 2002 consid. 2a).

La décision du travailleur d'abandonner son emploi doit apparaître nettement. Lorsque celle-ci ne ressort pas d'une déclaration explicite du travailleur, le juge doit examiner si l'employeur a pu de bonne foi, en considération de l'ensemble des circonstances, comprendre son attitude comme un abandon de poste; le principe de la confiance, relatif à l'interprétation des déclarations et autres manifestations de volonté entre cocontractants (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 135 III 410 consid. 3.2) est déterminant (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2013 du 12 novembre 2013 consid. 3 et 4C.339/2006 du 21 décembre 2006 consid. 2.1). Lorsque l'attitude du travailleur est équivoque, il appartient à l'employeur de le mettre en demeure de reprendre son activité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_91/2021 du 19 juillet 2021 consid. 3.1). En particulier, lorsque l'employeur a des doutes au sujet de la capacité de travail de son employé, il doit préalablement l'inviter à reprendre son emploi, à produire un certificat médical, ou à justifier son absence, avant d'admettre qu'il y a abandon d'emploi (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 2019, p. 770).

Selon la jurisprudence, lorsque l'absence injustifiée du travailleur est de courte durée, soit quelques jours, l'employeur ne peut pas déduire des circonstances que le travailleur a abandonné son emploi; il peut seulement lui reprocher un manquement de nature à justifier une résiliation immédiate des rapports de travail, au besoin après avertissement, soit en le mettant en demeure de reprendre le travail ou, le cas échéant, de présenter un certificat médical (arrêt du Tribunal fédéral 4C.370/2001 précité consid. 2a).

Il incombe à l'employeur de prouver les faits propres à dénoter un abandon de poste (arrêt du Tribunal fédéral 4A_91/2021 précité consid. 3.1).

4.2 En l'espèce, il est établi que l'intimé ne s'est pas présenté à son travail le jeudi 1er juillet, le vendredi 2 juillet et le lundi 5 juillet 2021, date à laquelle il a été licencié par l'appelante.

Compte tenu de cette courte durée d'absence, soit trois jours ouvrables, l'appelante ne pouvait pas déduire des circonstances que l'intimé avait abandonné son emploi au sens évoqué ci-dessus. Le fait que l'intimé occupait un poste important au sein de l'appelante ou que son travail était apprécié par celle-ci ne sont pas des critères déterminants à cet égard.

L'appelante n'a d'ailleurs pas démontré une intention ferme et définitive de l'intimé de ne plus continuer à fournir sa prestation de travail, comme retenu par les premiers juges. Contrairement à ce qu'elle soutient, les déclarations des témoins G______ et I______ ne permettent pas d'établir une telle intention. En effet, ceux-ci se sont limités à rapporter certains propos tenus par l'intimé (à savoir que "quelqu'un allait être absent pendant plusieurs mois" et "qu'un jour, [ils seraient] surpris"), dont la teneur - vague et équivoque - ne suffit pas à établir une volonté ferme et définitive de sa part de ne plus reprendre son poste de travail auprès de l'appelante. Il en va de même de la réaction de la boulangère décrite par le témoin F______ à l'annonce de l'absence de l'intimé.

L'appelante n'a pas non plus établi de manière convaincante que l'intimé aurait vidé l'intégralité de son casier en date du 30 juin 2021, ce que ce dernier a contesté. Sur ce point, le témoin I______ a uniquement déclaré qu'il lui "semblait" que le casier de l'intimé avait été vidé, sans pouvoir l'affirmer et sans donner de précision quant à la date d'un tel constat.

Dans ces circonstances, le Tribunal était fondé à retenir que l'intimé n'avait pas manifesté, en date du 5 juillet 2021, soit durant son troisième jour d'absence, son intention ferme et irrévocable d'abandonner définitivement son poste de travail.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

5.             L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir retenu que la résiliation immédiate du contrat de travail de l'intimé était injustifiée.

5.1.1 L'employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs (art. 337 al. 1 CO). Sont notamment considérés comme de justes motifs, toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (art. 337 al. 2 CO).

Mesure exceptionnelle, la résiliation immédiate pour justes motifs doit être admise de manière restrictive (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1). Les faits invoqués à l'appui d'un renvoi immédiat doivent avoir entraîné la perte du rapport de confiance qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_395/2018 du 10 décembre 2019 consid. 5.1). Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété en dépit d'un ou de plusieurs avertissements (ATF 142 III 579 consid. 4.2;
130 III 213 consid. 3.1; 130 III 28 consid. 4.1). L'employeur peut toutefois s'en abstenir lorsqu'il ressort de l'attitude de l'employé qu'une telle démarche serait inutile (ATF 127 III 153 consid. 1b).

Le juge apprécie librement s'il existe de justes motifs (art. 337 al. 3 CO); il applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC) et il dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_105/2018 du 10 octobre 2018 consid. 3.2.2). Savoir si le comportement incriminé atteint la gravité nécessaire dépend des circonstances du cas concret (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Dans son appréciation, le juge doit notamment tenir compte de la position du travailleur au sein de l'entreprise, du type et de la durée des rapports contractuels, de la nature et de l'importance des manquements (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1; 127 III 351 consid. 4a).

L'absence injustifiée d'un travailleur - moyennant avertissement selon les circonstances - peut constituer un juste motif de résiliation immédiate du contrat de travail par l'employeur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_468/2019 du 28 février 2020 consid. 4.1).

Il résulte du devoir de fidélité que le travailleur doit notamment informer immédiatement l'employeur de ses absences imprévisibles, comme par exemple une maladie (arrêt du Tribunal fédéral 4A_521/2016 du 1er décembre 2016 consid. 3.4 et 3.5).

Il appartient à la partie qui se prévaut de justes motifs de résiliation immédiate d'en établir l'existence (art. 8 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2010 du 13 avril 2010 consid. 4.1).

5.1.2 Il appartient au travailleur de prouver son incapacité de travail (art. 8 CC), preuve qui est généralement apportée par la production d'un certificat médical, lequel ne constitue cependant pas un moyen de preuve absolu (arrêts du Tribunal fédéral 4A_587/2020 du 28 mai 2021 consid. 3.1.2; 4A_289/2010 du 27 juillet 2010 consid. 3.2 et 4A_227/2009 du 28 juillet 2009 consid. 3.1.3).

L'employeur peut mettre en cause la validité d'un certificat médical en invoquant d'autres moyens de preuve; inversement, le salarié a la faculté d'apporter la démonstration de son incapacité par d'autres biais. Pourront en particulier être pris en compte pour infirmer une attestation médicale le comportement du salarié (on cite souvent l'exemple du travailleur qui répare un toit alors qu'il souffre d'une incapacité de travail totale en raison de douleurs à un genou) et les circonstances à la suite desquelles l'incapacité de travail a été alléguée (empêchement consécutif à un congédiement; production de certificats émanant de permanences ou de médecins reconnus pour leur complaisance; présentation d'attestations contradictoires; attestations faisant uniquement état des plaintes du travailleur ou établies plusieurs mois après le début des symptômes). Si la force probante d'un certificat médical n'est ainsi pas absolue, la mise en doute de sa véracité suppose néanmoins des raisons sérieuses (arrêt du Tribunal fédéral 1C_64/2008 du 14 avril 2008 consid. 3.4).

5.2 En l'espèce, il est établi que le 1er juillet 2021 l'appelante a tenté, en vain, de joindre l'intimé et requis des explications de sa part concernant son absence du jour même. En effet, il ressort de la conversation WhatsApp produite par l'intimé que l'appelante a essayé de le contacter et lui a envoyé un message, dont seule la fin apparaît, soit "des nouvelles de ton absence?". Ces termes correspondent au message contenu dans le courriel que l'appelante s'est adressée à elle-même le
9 mars 2022, de sorte que les déclarations de C______ à cet égard sont crédibles (cf. supra EN FAIT, let. C.e). L'intimé a d'ailleurs admis avoir reçu ce message le 1er juillet 2021 et ne pas y avoir répondu.

Les explications de l'intimé sur ce point, selon lesquelles il aurait demandé à son frère de prévenir l'appelante de son absence, que ce soit le 1er ou le 2 juillet 2021, ne sont pas convaincantes et ne sont, en tout état, corroborées par aucun élément probant du dossier.

Par courriel du 2 juillet 2021, l'appelante a mis l'intimé en demeure de reprendre son travail le lundi suivant, soit le 5 juillet 2021, et l'a informé qu'à défaut, il serait licencié avec effet immédiat. Contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, l'appelante a établi à satisfaction de droit que ce courriel était effectivement parvenu à l'intimé. En effet, les déclarations de ce dernier, selon lesquelles son téléphone portable aurait cessé de fonctionner, de manière subite et temporaire, ne sont pas plausibles et ne sont nullement étayées. L'intimé a d'ailleurs admis avoir reçu, sur ce même téléphone portable, le message de l'appelante du 1er juillet 2021, ainsi que sa lettre de licenciement du 5 juillet 2021 (expédiée notamment par courriel).

L'intimé n'a pas donné suite à l'avertissement de l'appelante du 2 juillet 2021 et ne s'est pas présenté au travail le 5 juillet 2021. Il admet de surcroît n'avoir plus donné la moindre nouvelle à l'appelante au cours des semaines qui ont suivi, à tout le moins jusqu'au 28 juillet 2021.

La justification de cette absence, soit l'incapacité de travail de l'intimé, n'est pas non plus convaincante. En effet, le certificat médical du 5 juillet 2021 fait état d'un syndrome dépressif sévère, avec effet rétroactif au 1er juillet 2021. Or, aucun témoin n'a attesté du fait que l'intimé se serait trouvé dans un état dépressif dans les jours ayant précédé son absence. Au contraire, les témoins G______ et D______ ont déclaré avoir régulièrement vu l'intimé sur les réseaux sociaux, notamment pendant la période de son absence, et affirmé que celui-ci se portait bien. Les déclarations de l'appelante, selon lesquelles ce certificat médical a été établi à la requête de l'intimé, en réaction à son licenciement immédiat, apparaissent ainsi dignes de foi.

En tous les cas, les déclarations contradictoires de l'intimé sur les raisons de son absence suffisent à dénier toute force probante au certificat médical du 5 juillet 2021, qui plus est établi par un médecin exerçant dans une permanence médicale et non par un médecin de famille ou encore un psychiatre, voire un psychologue. Ainsi, l'intimé a déclaré en audience avoir été absent au travail, car il avait "attrapé la grippe" le 30 juin 2021 et que son état de santé avait empiré le lendemain, soit le 1er juillet 2021. Il a ajouté que son état grippal avait duré une semaine et demie, voire deux semaines, et que, par la suite, son incapacité "était psychologique" du fait de son licenciement. Or, le certificat médical, établi le 5 juillet 2021, ne fait aucune mention d'un état grippal. L'intimé a également admis ne plus avoir consulté de médecin ou de psychologue par la suite, sous réserve d'une consultation le 28 février 2022, soit près de huit mois plus tard.

Il s'ensuit que l'absence de l'intimé était injustifiée et qu'il n'en a pas informé son employeuse, malgré l'avertissement qu'il a reçu de celle-ci. Il a ainsi violé son devoir de fidélité à l'égard de l'appelante. De plus, l'intimé occupait un poste important au sein de celle-ci, ce qui a été confirmé par les témoins D______ et E______. Son absence abrupte et injustifiée a eu des répercussions pour l'exploitation de la carrosserie, comme en ont attesté la plupart des témoins entendus, ce qui était de nature à engendrer une rupture du lien de confiance.

Compte tenu de ce qui précède, l'attitude de l'intimé constitue un manquement grave à ses devoirs justifiant son licenciement immédiat du 5 juillet 2021.

Partant, les chiffres 4 à 6 du dispositif du jugement entrepris seront annulés et l'intimé sera débouté de ses prétentions en paiement de son salaire de juillet 2021 à mars 2022 et d'une indemnité à titre de résiliation immédiate injustifiée.

6.             L'appelante reproche au Tribunal d'avoir rejeté sa demande reconventionnelle en réparation de son dommage, au motif que le licenciement immédiat de l'intimé n'était pas justifié.

6.1.1 Aux termes de l'art. 337d al. 1 CO, lorsque le travailleur n'entre pas en service ou abandonne son emploi abruptement sans justes motifs, l'employeur a droit à une indemnité égale au quart du salaire mensuel; il a en outre droit à la réparation du dommage supplémentaire.

6.1.2 Si les justes motifs de la résiliation immédiate du contrat consistent dans son inobservation par l'une des parties, celle-ci doit réparer intégralement le dommage causé, compte tenu de toutes les prétentions découlant des rapports de travail (art. 337b al. 1 CO). Dans les autres cas, le juge apprécie librement les conséquences pécuniaires de la résiliation immédiate en tenant compte de toutes les circonstances (art. 337b al. 2 CO).

Le dommage couvert correspond à l'ensemble des préjudices qui sont dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec la fin anticipée du contrat de travail; il consiste dans l'intérêt, positif, qu'aurait eu la partie qui résilie abruptement le contrat à l'exécution de celui-ci jusqu'au plus prochain terme ordinaire des rapports de travail. L'employeur peut réclamer notamment le gain manqué et les frais supplémentaires occasionnés par la résiliation immédiate comparativement à une fin ordinaire, par exemple l'éventuel surcoût résultant de frais d'agence pour le remplacement d'urgence de l'employé renvoyé, mais non les frais d'insertion d'annonces qui auraient été exposés même en cas de fin ordinaire des rapports de travail (Donatiello, Commentaire romand CO I, 2021, n° 4 et 5 ad art. 337b CO).

6.2 En l'espèce, l'appelante reconnaît devoir à l'intimé la somme nette de 1'222 fr. 85 à titre d'indemnité pour jours de vacances non pris en nature, correspondant à six jours et demi de vacances. L'abandon de poste n'étant pas établi, elle n'est pas en droit de réclamer l'indemnité fondée sur l'art. 337d CO et ainsi compenser le montant précité avec celle-ci.

Sur demande reconventionnelle, l'appelante a sollicité la réparation du dommage engendré par l'absence abrupte et injustifiée de l'intimé. Elle a également excipé de compensation avec le montant dû à celui-ci à titre de jours de vacances non pris en nature.

Etant parti de la prémisse erronée que la résiliation immédiate des rapports de travail était injustifiée, le Tribunal n'a pas statué sur les prétentions reconventionnelles de l'appelante, en particulier sous l'angle de l'art. 337b CO, à la lumière des pièces produites par l'appelante, de l'interrogatoire des parties et des témoignages recueillis à l'audience du 11 juillet 2022.

En conséquence, il se justifie d'annuler le chiffre 9 du dispositif du jugement attaqué et de renvoyer la cause au Tribunal, dans le respect du principe du double degré de juridiction, pour nouvelle décision sur la demande reconventionnelle (art. 318 al. 1 let. c CPC).

7.             L'appelante a également conclu à l'annulation du chiffre 7 du dispositif du jugement entrepris concernant la remise de certificats de travail à l'intimé. Dans son appel, elle ne formule toutefois aucun grief motivé sur ce point, de sorte que ledit chiffre sera confirmé.

8.             La valeur litigieuse étant inférieure à 50'000 fr., la procédure d'appel est gratuite (art. 114 let. c et 116 al. 1 CPC; art. 71 RTFMC; art. 19 al. 3 let. c LaCC) et il n'est pas alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

L'avance de frais de 300 fr. versée par l'appelante lui sera restituée.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 1 :

A la forme :

Déclare recevable l'appel formé le 3 novembre 2022 par A______ SA contre les chiffres 3 à 7 et 9 du dispositif du jugement JTPH/307/2022 rendu le 4 octobre 2022 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/19350/2021.

Au fond :

Annule les chiffres 4 à 6 et 9 du dispositif de ce jugement.

Renvoie la cause au Tribunal des prud'hommes pour nouvelle décision sur demande reconventionnelle dans le sens des considérants.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens d'appel.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ SA l'avance versée en 300 fr.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; M. Pierre-Alain L'HÔTE, juge employeur; M. Yves DUPRÉ, juge salarié; Monsieur Javier BARBEITO, greffier.

 

La présidente :

Nathalie RAPP

 

Le greffier :

Javier BARBEITO

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile. Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.