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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/8357/2021

CAPH/185/2022 du 29.11.2022 sur JTPH/114/2022 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8357/2021-1 CAPH/185/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 17 novembre 2022

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 13 avril 2022 (JTPH/114/2022), comparant par Me Dalmat PIRA, avocat, PBM Avocats SA, avenue de Champel 29, case postale, 1211 Genève 12, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, représenté par [le syndicat] C______, ______, en les bureaux duquel il fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/114/2022 du 13 avril 2022, le Tribunal des prud'hommes groupe 1, statuant par voie de procédure simplifiée, a déclaré recevable la demande formée le 26 août 2021 par B______ contre A______ SA (ch. 1 du dispositif), condamné A______ SA à verser à B______ la somme brute de 15'304 fr. 95, sous déduction de la somme nette de 805 fr. 75, avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er avril 2021 (ch. 2), condamné A______ SA à verser à B______ la somme brute de 6'926 fr. 75, avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er mai 2021 (ch. 3), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 4), condamné A______ SA à délivrer à B______ une attestation employeur, respectivement un certificat de travail conformes aux considérants de ce jugement (ch. 5 et 6), dit que la procédure était gratuite et qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 7) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 8).

B.            a. Par acte expédié au Tribunal des prud'hommes le 19 mai 2022 et réceptionné au greffe de la Cour civile le 23 mai 2022, A______ SA forme appel contre ce jugement, qu'elle a reçu le 19 avril 2022, concluant à son annulation, et, cela fait, à ce qu'il soit constaté que le contrat de travail liant les parties était de durée déterminée et a pris fin le 30 novembre 2020, et à ce qu'il soit statué à nouveau en ce sens que B______ soit débouté de toute autre conclusion ou, plus subsidiairement, que la cause soit renvoyée au Tribunal pour nouvelle décision selon les considérants, sous suite de frais.

b. Par réponse du 20 juin 2022, B______ conclut au rejet de l'appel, au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions et à la confirmation du jugement entrepris.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 3 août 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ SA, administrée par D______ et E______, a notamment pour but l'exploitation d'une entreprise de nettoyage.

De par son activité, A______ SA et ses employés sont soumis à la Convention collective de travail du secteur du nettoyage pour la Suisse romande du 30 novembre 2017 (ci-après : la CCT).

b. B______ a été engagé par A______ SA le 18 août 2020, en qualité de nettoyeur sans qualification, pour un salaire horaire brut de 21 fr. 70 et 43 heures de travail hebdomadaire.

c. Par courriel du 20 août 2020, B______ a écrit à F______, conseiller en personnel à l'Office Cantonal de l'Emploi (OCE) : "Comme [ ] je vous [l'avais] dit, [j'ai] trouvé un poste du travail chez A______ avec un contrat à 100% et de durée indéterminé[e]".

d. B______ a travaillé auprès de A______ SA jusqu'au 30 novembre 2020.

A______ SA n'a pas sollicité de mesure de RHT (réduction de l'horaire de travail) pour B______.

e. Par courrier recommandé du 25 janvier 2021, [le syndicat] C______ a avisé A______ SA qu'elle n'avait pas valablement mis un terme au contrat de travail la liant à B______ et l'a mise en demeure de payer à l'employé le salaire de décembre 2020, le 13ème salaire au 31°décembre 2020, ainsi qu'un solde dû au titre d'heures supplémentaires effectuées de septembre à novembre 2020.

[Le syndicat] C______ a ajouté que l'employé était disponible pour reprendre le travail à première demande de A______ SA pour autant que les rémunérations résiduelles dues lui soient intégralement payées.

[Le syndicat] C______ a imparti à A______ SA un délai de réponse de sept jours, sollicitant la remise d'un décompte relatif aux vacances et au treizième salaire, ainsi que la fiche de salaire d'août 2020.

f. Par courrier du 8 février 2021, [le syndicat] C______ a relancé A______ SA. Elle l'a avisée de ce que l'employé était sans ressources financières depuis novembre 2020 et lui a imparti un délai de trois jours pour régulariser la situation du travailleur, sous peine de saisir la justice.

g. Le 12 février 2021, B______ a été convoqué dans les bureaux de A______ SA pour signer son contrat de travail, ce qu'il a refusé de faire. B______ a pris une photo de ce contrat, lequel prévoyait une durée d'engagement du 1er août au 30 novembre 2020.

h. Par réponse recommandée du 12 février 2021, A______ SA a décliné les prétentions de B______ au motif qu'il avait été engagé pour une durée déterminée jusqu'au 30 novembre 2020 et a produit, en annexe, un contrat de travail détaillé, dressé au nom de l'employé, faisant notamment mention d'une durée déterminée du 18 août 2020 au 30 novembre 2020, et signé uniquement par l'employeuse.

i. Par courrier du 22 février 2021, [le syndicat] C______ a déclaré s'étonner de la production par A______ SA d'un contrat de travail antidaté du 18 août 2020, prévoyant une durée d'engagement déterminée au 30 novembre 2020. Qualifiant ce contrat de faux dans les titres, [le syndicat] C______ a réclamé à A______ SA le paiement des salaires de novembre 2020 à janvier 2021 et des heures supplémentaires effectuées de septembre à octobre 2020.

j. Par courrier [du syndicat] C______ du 8 mars 2021, B______ a résilié le contrat de travail avec effet immédiat pour non-paiement du salaire depuis décembre 2020, rappelant à A______ SA que le contrat qu'elle avait produit était un faux dans les titres.

k. Le 24 mars 2021, à la requête de B______, l'Office des poursuites a notifié à A______ SA un commandement de payer d'un montant de 11'197 fr. 20 plus intérêts à 5% dès le 15 janvier 2021, à titre de "salaires contractuels de décembre 2020 et février 2020 [recte : 2021]" et de 599 fr. 10 plus intérêts à 5% dès le 31°décembre 2020, au titre d'heures supplémentaires de septembre à novembre 2020. A______ SA a formé opposition à cette poursuite.

l. Par courrier du 19 avril 2021, la Caisse de chômage [du syndicat] C______ a réclamé à A______ SA l'attestation de l'employeur et ses annexes. A______ SA n'a pas donné suite à cette demande.

m. Le 18 juin 2021, A______ SA a fait notifier à B______ un commandement de payer d'un montant de 17'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 1er mars 2021 au titre de "Dommage d'intérêt sur le marché public". B______ a formé opposition à cette poursuite.

n. Par requête de conciliation parvenue le 22 avril 2021 au greffe du Tribunal, B______ a assigné A______ SA en paiement d'une somme totale de 20'630 fr. 13.

Une audience de conciliation s'est tenue le 25 mai 2021, sans succès, de sorte qu'à l'issue de celle-ci, une autorisation de procéder a été délivrée à B______.

o. Par courrier déposé au greffe du Tribunal le 20 août 2021, la Caisse de chômage [du syndicat] C______ a transmis une déclaration de subrogation dans les droits de B______ à hauteur de 805 fr. 75 nets pour le mois de mars 2021, avec intérêts moratoires à 5% dès le 18 août 2021.

p. Par demande simplifiée et motivée, déposée au greffe universel le 26 août 2021, B______ a assigné A______ SA en paiement de la somme totale brute de 22'231 fr. 70. Cette somme se décomposait comme suit :

- 13'041 fr. 70 à titre de salaires dus pour la période du 1er décembre 2020 au 7 mars 2021, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er avril 2021;

- 1'086 fr. 40 à titre d’indemnité pour vacances non prises en nature pour la période du 1er novembre 2020 au 7 mars 2021, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er avril 2021;

- 1'176 fr. 85 à titre de treizième salaire pour la période du 1er novembre 2020 au 7 mars 2021, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er avril 2021;

- 5'902 fr. 40 à titre de salaire afférent au délai de congé du 8 mars au 21 avril 2021, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er mai 2021;

- 491 fr. 70 à titre d’indemnité pour vacances non prises en nature pour la période du 8 mars au 21 avril 2021, finalement requise pour la période du 1er décembre 2020 au 7 mars 2021, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er mai 2021 et

- 532 fr. 65 à titre de treizième salaire pour la période du 8 mars au 21 avril 2021, finalement requis pour la période du 1er décembre 2020 au 7 mars 2021, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er mai 2021.

B______ a également conclu à la délivrance de l’attestation employeur et d’un certificat de travail.

q. Par réponse du 24 novembre 2021, A______ SA a conclu au rejet de la demande de B______, ainsi qu'à son déboutement de toute autre conclusion.

r. Le 24 février 2022, le Tribunal a procédé à l'interrogatoire des parties, au cours duquel B______ a déclaré que son entretien d'embauche s'était déroulé en français. Il avait bien compris les termes du contrat qui lui avait été présenté le 12 février 2021 et celui-ci "n'avait rien [eu] à voir avec la conversation" qu'il aurait eue avec D______ (lors de son engagement), qui lui avait parlé d'un contrat de durée indéterminée.

B______ a ajouté que le 30 novembre 2020, G______ – son responsable hiérarchique avec Madame H______ - lui aurait dit "que pour l'instant, il n'y avait pas de travail, sans aucune autre précision, et qu'on [l']'appellerait". L'employé aurait téléphoné à mi-décembre à Madame H______ pour savoir s'il y avait du travail pour lui et elle lui aurait répondu que ce n'était pas le cas. Aux alentours du 10 janvier 2021, l'employé se serait rendu au bureau et aurait parlé avec D______ pour lui demander s'il y avait du travail. Ce dernier lui aurait répondu qu'il irait se renseigner auprès de G______ et de Madame H______. L'employé aurait expliqué à D______ qu'il avait trois enfants et n'avait plus perçu de salaire depuis décembre 2020.

A______ SA, soit pour elle E______, a déclaré que G______ aurait rappelé à B______ que le 30 novembre 2020 était son dernier jour de travail, "selon son contrat qui n'était pas signé, mais dont il était au courant". E______ a ajouté que l'employé aurait restitué ses vêtements de travail le lendemain.

B______ a contesté cette dernière affirmation et a déclaré avoir rapporté lesdits vêtements à fin janvier 2021.

L'employé a exposé n'avoir pas donné sa démission [avant la date du 8 mars 2021] car il ne voulait pas être pénalisé par le chômage. Il ne connaissait pas la date de la fin de son contrat, raison pour laquelle il ne pouvait pas "aller au chômage". S'il y avait réellement eu un contrat à durée déterminée, avec échéance le 30 novembre 2020, il serait "allé au chômage" le 1er décembre 2020 au lieu d'attendre pendant trois mois sans percevoir d'indemnités.

E______ a précisé que les 130 à 140 employés de la société auraient tous été engagés sur la base de contrats de travail signés, sauf B______ car "nous étions dans une période COVID". Elle a déclaré avoir présenté plusieurs fois le contrat de travail à l'employé, mais que ce dernier avait refusé de le signer. A sa connaissance, B______ n'avait pas tenté de joindre l'employeur entre le 1er décembre 2020 et le 25 janvier 2021 et n'avait pas contesté la fin de son contrat.

s. F______, entendu comme témoin, a produit, à l'audience du Tribunal du 24°février 2022, le courriel du 20 août 2020 d'B______ et a confirmé sa teneur, à savoir que ce dernier lui avait indiqué avoir conclu un contrat à durée indéterminée à 100%.

I______, épouse de l'employé, entendue comme témoin par le Tribunal, le 24°février 2022, a déclaré que son mari avait commencé à travailler pour A______ SA en août 2020 et qu'il lui avait indiqué "qu'il n'y avait pas eu de contrat". Il avait "demandé plusieurs fois à son employeur, sans succès, et cela l'inquiétait".

Elle a déclaré que le 30 novembre 2020, à son retour à la maison, son époux lui avait indiqué que son employeur lui avait dit qu'à cause du COVID, "il devait arrêter car il y avait peu de travail, mais qu'après ils allaient le rappeler. Ils ne l'[avaient] pas rappelé". Elle a confirmé que son mari avait appelé son chef, G______. Son mari ne s'était pas inscrit au chômage car son employeur ne lui avait pas délivré son attestation. Son mari attendait que son employeur l'appelle pour lui donner du travail.

t. A l'issue de l'audience du 24 février 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions et le Tribunal a gardé la cause à juger.

D. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré, s'agissant de la durée des rapports de travail, seul point encore litigieux en appel, que le contrat de travail entre les parties aurait dû être dressé en la forme écrite et signé par celles-ci, conformément à la CCT applicable. A______ SA aurait donc dû le faire signer par l'employé et elle avait d'ailleurs admis que seul le contrat la liant à B______ n'avait pas été signé, alors qu'elle comptait entre 130 à 140 collaborateurs, lesquels disposaient tous de contrats signés.

En outre, A______ SA n'avait produit le contrat signé par elle-même qu'en date du 12 février 2022 et ne s'en était pas prévalue dès le premier courrier [du syndicat] C______ du 15 janvier 2021. Elle n'avait pas non plus mis fin au contrat de travail, pour sauvegarder ses droits, après avoir reçu le courrier [du syndicat] C______ du 25 janvier 2021. Elle n'avait pas davantage contesté les allégués de l'employé selon lesquels ses supérieurs hiérarchiques lui auraient dit, en date du 30 novembre 2020, qu'il n'y avait plus de travail en raison du COVID-19 et qu'ils le rappelleraient. Selon les premiers juges, l'employé avait, de bonne foi, pu comprendre que son contrat de travail perdurait et qu'il serait rappelé par l'employeur dès qu'il y aurait du travail.

Le Tribunal a également retenu qu'il ressortait de l'audition du témoin F______ que l'employé l'avait informé, dès le 20 août 2020, qu'il avait trouvé un poste à 100% pour une durée indéterminée.

Les premiers juges ont exposé avoir acquis la conviction que les parties étaient liées par un contrat de travail de durée indéterminée, lequel ne prenait pas fin automatiquement, mais devait être résilié par la partie souhaitant y mettre un terme. Il appartenait à l'employeur de signifier de manière claire et précise à l'employé son intention de mettre fin au contrat de travail qui les liait. Toutefois, l'employeur n'avait jamais fait parvenir de lettre de licenciement à l'employé, y compris après réception de la lettre [du syndicat] C______ du 25 janvier 2021 dans laquelle ce dernier indiquait qu'il se tenait disponible pour reprendre son travail. Au vu de ce courrier, l'employeur ne pouvait pas considérer que l'employé avait compris qu'ils étaient liés par un contrat de travail de durée déterminée et que le contrat avait pris fin le 30 novembre 2020. Le Tribunal a, dès lors, retenu que les parties avaient convenu d'un contrat de travail à durée indéterminée et qu'il convenait de faire droit aux prétentions de l'employé jusqu'à la résiliation des rapports de travail par celui-ci le 8 mars 2021, pour justes motifs.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable notamment contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC) dans les causes patrimoniales dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Dès lors qu'en l'espèce les montants litigieux sont supérieurs à 10'000 fr. et que l'appel a été interjeté dans le délai et selon la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 3 et 311 al. 1 CPC), il est recevable.

1.2 La Chambre de céans revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

2. Les parties ne remettent pas en cause la conclusion d'un contrat de travail et l'appelante ne conteste pas être soumise à la CCT. La question litigieuse est de savoir si le contrat de travail a été conclu pour une durée déterminée ou pour une durée indéterminée.

L'appelante reproche au Tribunal une constatation inexacte des faits, interprétés selon la thèse de l'intimé, à l'issue de laquelle il aurait considéré à tort la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée. L'appelante reproche également au Tribunal la violation des art. 334 al. 1 CO et de l'art. 4 al. 3 CCT.

Elle soutient que l'intimé était "au clair" avec la fin des rapports de travail le 30°novembre 2020 car il n'avait plus offert ses services après cette date. De plus, le témoignage de son épouse devait être à son sens "vivement relativisé".

2.1.1 Sauf disposition contraire de la loi, le contrat individuel de travail n'est soumis à aucune forme spéciale (art. 320 al. 1 CO).

Selon l'art. 1 al. 1 CCT, la convention collective a pour but de régler les conditions de travail dans les domaines du nettoyage, de la propreté et de l’hygiène dans les entreprises de services et de propreté établies ou actives dans ces domaines dans les cantons romands.

Cette convention est entrée en vigueur le 1er janvier 2018 pour une durée de quatre ans, soit jusqu'au 31 décembre 2021 (art. 31 al. 1 CCT).

En dérogation à l'art. 320 al. 1 CO, selon lequel le contrat individuel de travail n'est soumis à aucune forme spéciale, l'art. 3 al. 1 CCT dispose que lors de l’engagement, l’employeur et le travailleur signent un contrat individuel de travail qui comporte au moins les mentions suivantes : la date d’engagement, la catégorie professionnelle, la durée hebdomadaire moyenne normale du travail (calculée sur le mois), les horaires de travail et le salaire. Une formule type est mise à la disposition des entreprises.

L'employeur est tenu d’appliquer la convention collective à tous les employés entrant dans son champ d’application. Par la signature de son contrat individuel de travail, chaque employé se soumet à la CCT au sens de l’article 356b CO. Les employeurs assujettis appliquent sans restriction la convention collective, sous peine des sanctions établies par la commission paritaire qui organise le contrôle de son application (art. 2 al. 4 CCT).

La CCT renvoie, pour le surplus, aux dispositions du CO et à la loi sur le travail (art. 32 let. A CCT).

2.1.2 Selon l'art. 334 al. 1 CO, le contrat de durée déterminée prend fin sans qu'il soit nécessaire de donner congé (cf. ég. art. 4 al. 3 CCT).

Le contrat de durée déterminée n'est pas susceptible d'une résiliation ordinaire, mais seulement d'une résiliation pour justes motifs selon l'art. 337 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_470/2018 du 18 décembre 2018 consid. 5).

Selon l'art. 335 al. 1 CO, le contrat de durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties.

La durée du contrat doit être fixée par la loi, la convention des parties ou la nature de l'affaire. Ainsi, dans tous les cas où l'on ne peut pas constater la fixation d'une échéance, le contrat est considéré comme de durée indéterminée et un congé est alors nécessaire pour y mettre fin; c'est pourquoi la doctrine et la jurisprudence admettent qu'il faut présumer l'existence d'un contrat de durée indéterminée. Le renversement de cette présomption ne doit être admis que restrictivement et il incombe à la partie qui soutient le contraire d'apporter la preuve qu'une échéance a été fixée (art. 8 CC; ATF 145 V 188 consid. 5.1.2, 143 V 385 consid. 4.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_270/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.4, 4A_531/2008 du 4 février 2009 consid. 2.1 et 4A_89/2007 du 29 juin 2007 consid. 3.2).

Les parties doivent être en mesure de connaître de façon suffisamment précise la fin des rapports de travail déjà au moment de la conclusion du contrat, ce qui suppose qu'elles puissent au moins estimer l'ordre de grandeur du délai. La durée peut être limitée par référence au but du travail convenu, par exemple le temps d'un chantier (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4ème éd. 2019, pp. 609-610) ou jusqu'à la fin des travaux de construction (Caron, Commentaire du contrat de travail, 2013, n. 9 ad art. 334 CO; CAPH/57/2022 du 19 avril 2022 consid. 3.1).

Lorsqu’il a été question d’un contrat de durée déterminée durant les pourparlers, mais sans qu’une telle clause soit acceptée par les deux parties en la forme écrite contractuellement réservée, le simple fait que l’employé a commencé le travail ne permet pas de retenir que le contrat a été conclu pour une durée déterminée (Caron, op. cit, n. 13 ad art. 334 CO).

2.1.3 Selon l'art. 169 CPC, toute personne qui n'est pas partie au procès peut déposer en qualité de témoin; le conjoint d'une partie peut donc aussi déposer.

La suspicion de partialité d'un témoin, résultant par exemple d'un lien conjugal, de parenté, d'alliance ou d'amitié avec une partie, doit être prise en considération au stade de l'appréciation du témoignage; néanmoins, la suspicion n'exclut pas d'emblée que la déposition soit tenue pour digne de foi et il incombe au juge du fait d'apprécier sa force probante (arrêt du Tribunal fédéral 4A_181/2012 du 10 septembre 2012 consid. 3 et les références citées).

2.2 En l'espèce, un contrat de travail entre l'appelante et l'intimé aurait dû être conclu par écrit selon l'art. 3 al. 1 CCT et il incombait à l'appelante de respecter cette obligation (art. 2 al. 4 CCT), ce dont elle avait parfaitement connaissance puisqu'elle a confirmé que sa centaine de collaborateurs avaient tous été engagés sur la base d'un contrat de travail écrit.

2.2.1 Nonobstant l'absence de forme écrite, il n'est pas contesté que les parties ont conclu oralement un contrat de travail.

L'intimé, sitôt après son engagement, a confirmé, par courriel, à son conseiller auprès de l'Office Cantonal de l'Emploi qu'il avait obtenu un poste de travail à durée indéterminée, ce qui est un indice en faveur de la conclusion d'un contrat de travail sans limitation de durée. Ce conseiller a, de plus, confirmé sous serment avoir reçu ledit message de l'intimé lui annonçant l'obtention d'un poste de travail à durée indéterminée.

De plus, il ne ressort pas du but de ce contrat de travail que celui-ci aurait nécessairement une durée déterminée.

En tout état de cause, et en application de la jurisprudence sus évoquée, les parties sont présumées avoir conclu un contrat de travail de durée indéterminée et il appartenait à l'appelante de renverser cette présomption en rapportant la preuve de la conclusion d'un contrat de travail à durée déterminée (art. 8 CC).

L'appelante a déclaré avoir adressé sans succès des sommations à l'intimé pour qu'il signe le contrat de travail contenant la clause limitative de durée, mais elle n'a pas rapporté la preuve de ses affirmations (art. 8 CC). D'ailleurs, si cela avait été le cas, l'intimé aurait certainement donner suite, au risque de ne pas obtenir le poste, alors qu'il était en situation de chômage. L'allégation de l'appelante n'emporte ainsi pas conviction.

L'appelante soutient également que l'intimé, en exécutant le travail, aurait accepté, par actes concluants, la clause de durée déterminée du contrat de travail dont il aurait eu connaissance. Cette argumentation est contredite par l'avis de Caron (cité sous consid. 2.1.2 in fine ci-dessus), selon lequel il n'y a pas d'acceptation d'un contrat de durée déterminée par le simple fait que l'employé commence son travail, quand bien même la question de la durée du contrat a été abordée lors des pourparlers.

Même à supposer, comme le soutient l'appelante, que l'employé aurait refusé de signer le contrat de travail écrit, cela ne peut que signifier qu'il refusait également la clause de limitation de durée.

Selon l'appelante, l'intimé avait restitué ses vêtements de travail le lendemain du 30 novembre 2020. Cette allégation ne peut toutefois pas être retenue car l'intimé l'a explicitement contestée à l'audience du 24 février 2022 en déclarant les avoir rendus à fin janvier 2021, et rien de vient démentir ce point.

Les griefs de l'appelante sont ainsi infondés et le Tribunal n'a violé ni l'art. 334 CO, ni l'art. 4 al. 3 CCT.

2.2.2 L'argumentation de l'appelante, selon laquelle l'intimé était au clair sur la fin des rapports de travail au 30 novembre 2020 est contredite par le témoignage de l'épouse de l'intimé. En effet, celle-ci a déclaré au Tribunal que son mari avait appelé son chef, G______, et qu'il attendait que son employeur l'appelle pour lui donner du travail. Il n'y a pas de raison de remettre en cause la sincérité de ce témoignage, ce d'autant moins que l'appelante n'a pas corroboré la fin des rapports de travail au 30 novembre 2020, comme elle le soutient, par la remise d'un certificat de travail à l'intimé.

C'est, dès lors, avec raison que le Tribunal est arrivé à la conclusion que les parties avaient conclu un contrat à durée indéterminée.

2.2.3 En l'absence d'autres griefs dirigés contre le jugement entrepris, celui-ci sera intégralement confirmé.

L'appel, infondé, sera rejeté et le jugement entièrement confirmé.

3.             La procédure est gratuite (art. 114 let. c CPC).

Il n'est pas alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 1 :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel formé par A______ SA contre le jugement JTPH/114/2022 rendu le 13 avril 2022 par le Tribunal des prud'hommes, groupe 1 dans la cause C/8357/2021 – 1.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Monsieur Christian PITTET, juge employeur; Monsieur Roger EMMENEGGER, juge salarié; Madame Véronique FERNANDES, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.