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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/9807/2022

ACJC/704/2024 du 31.05.2024 sur JTBL/682/2023 ( OBL ) , JUGE

Normes : CPC.59
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9807/2022 ACJC/704/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU VENDREDI 31 MAI 2024

Entre

La "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______", soit pour elle toutes les personnes physiques et morales mentionnées sur l'extrait du Registre foncier concernant l'immeuble sis no. ______, route 2______, [code postal] Genève, sise c/o B______ SA, ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 22 août 2023, représentée par Me Olivier ADLER, avocat, BM Avocats, quai Gustave-Ador 26, case postale 6253, 1211 Genève 6,

 

et

"C______ D______/3______ SA", sise ______ (ZH), intimée, représentée par
Me Gérard BRUTSCH, avocat, rue Prévost-Martin 5, case postale 60, 1211 Genève 4.

 


EN FAIT

A. a. Par jugement JTBL/682/2023 du 22 août 2023, reçu le 1er septembre 2023 par la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______", le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a constaté la nullité de l'autorisation de procéder délivrée le 5 septembre 2022 (ch. 1 du dispositif), déclaré par conséquent irrecevable la demande en annulation du congé formée le 4 octobre 2022 par "C______ D______/3______ SA" à l'encontre de la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______" (ch. 2), renvoyé la cause à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers (ch. 3) et dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

B. a. Le 2 octobre 2023, la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______", soit toutes les personnes physiques et morales mentionnées sur l'extrait du Registre foncier (cf. pièce 1)" à teneur de l'acte d'appel (ci-après la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______"), a formé appel contre le chiffre 3 du dispositif du jugement précité, concluant principalement à ce que la Cour de justice l'annule, mette un terme à la procédure C/9807/2022 et déboute "C______ D______/3______ SA, respectivement D______ SA", de toutes ses conclusions.

b. Le 2 novembre 2023, "C______ D______/3______ SA" a conclu à la confirmation du jugement querellé.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées le 8 avril 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a.a D______ SA, inscrite au Registre du commerce de Zurich, sise no. ______ rue 5______ à E______, a notamment pour but social différentes activités dans le domaine du commerce et de la location de véhicules et l'exploitation de parkings et de stations-service. Selon l'extrait du Registre du commerce, F______ et G______ sont habilités à représenter cette société, avec signature collective à deux.

a.b D______/6______ SA, inscrite au Registre du commerce de Zoug, sise rue 7______ no. ______ à H______ (ZG), a notamment pour but social la fourniture de services, notamment dans le domaine de la gestion immobilière.

a.c Le "A______" se compose de deux immeubles offrant notamment des bureaux à la location.

L'un de ces immeubles est situé au no. ______, route 2______, [code postal] I______ [GE], et désigné comme "A______/1______" (immeuble n° 8______ de la Commune de J______ [GE]). L'autre se trouve au no. ______ route 9______, [code postal] I______, et est désigné comme "A______/4______" (immeuble n° 10______ de la Commune de J______).

La parcelle sur laquelle est bâti le "A______/1______" est la propriété de ______ personnes physiques et morales dont les noms ou raisons sociales figurent sur l'extrait du Registre foncier de l'immeuble n° 8______ susvisé et qui composent la COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______.

La parcelle sur laquelle est bâti le "A______/4______" est la propriété de ______ autres personnes physiques et morales dont les noms ou raisons sociales figurent sur l'extrait du Registre foncier de l'immeuble n° 10______ susvisé et qui composent la COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______.

b. En date du 18 mai 2000, la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______", en tant que bailleresse, et "C______/11______ AG", sise no. ______, rue 12______ à Genève, en tant que locataire, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location de 20 emplacements de parking situés au 3ème sous-sol de l'immeuble sis route 9______ no. ______ à Genève.

Il ne résulte pas du dossier que cette dernière société aurait été inscrite au Registre du commerce.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale de 3 ans et 9 mois, du 1er avril 2000 au 31 décembre 2003, renouvelable tacitement de 5 ans en 5 ans. Le préavis de résiliation était de 12 mois.

Par avenant n° 1 du 21 mars 2003, la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______" et "C______ D______/3______ SA", sise no. ______ rue 5______ à E______, sont convenues d'ajouter au bail 50 emplacements de parking supplémentaires.

Il ne résulte pas du dossier que cette dernière société aurait été inscrite au Registre du commerce.

Le loyer annuel, charges non comprises, a été fixé en dernier lieu à 160'212 fr. dès le 1er janvier 2020.

Par avis du 13 avril 2022 adressé à "C______ D______/3______ SA", la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______" a résilié le bail des 70 emplacements de parking pour le 31 décembre 2023.

c. En date du 23 décembre 2003, la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______", en tant que bailleresse, et "C______ D______/3______ SA", en tant que locataire, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un local technique avec office situé au rez-de-chaussée de l'immeuble "A______/1______", sis route 2______ no. ______ à Genève, destiné à l'usage d'une station de lavage et de bureaux.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale de 5 ans, du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2008, renouvelable tacitement de 5 ans en 5 ans. Le préavis de résiliation était de 12 mois.

Le loyer annuel, charges non comprises, a été fixé en dernier lieu à 59'784 fr. dès le 1er janvier 2022.

Par avis du 13 avril 2022, adressé à "C______ D______/3______ SA", la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" a résilié le bail du local précité pour le 31 décembre 2023.

d. En date du 11 juin 2019, "A______/1______", bailleresse, et "C______ D______/3______ SA", locataire, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location de deux places de parc extérieures sises route 2______ no. ______ à Genève.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale de deux mois et 15 jours, du 16 mai 2019 au 31 juillet 2019, renouvelable tacitement de mois en mois. Le préavis de résiliation était d'un mois.

Le loyer annuel a été fixé à 6'462 fr.

Par avis du 13 avril 2022, adressé à "C______ D______/3______ SA", La "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" a résilié le bail des deux places de parking extérieures pour le 31 décembre 2023.

e. En date du 21 mai 2019, "A______/1______", bailleresse, et "C______ D______/3______ SA", locataire, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un bureau d'environ 75 m2 situé au rez-de-chaussée de l'immeuble "A______/1______" sis route 2______ no. ______ à Genève.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale de 5 ans et 15 jours, du 16 mai 2019 au 31 mai 2024, renouvelable tacitement de 5 ans en 5 ans. Le préavis de résiliation était de 12 mois.

Le loyer annuel, charges non comprises, a été fixé à 23'256 fr.

Par avis du 13 avril 2022, adressé à "C______ D______/3______ SA", la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" a résilié le bail du bureau pour le 31 mai 2024.

f. Par courrier du 11 mai 2022, G______ et F______, signant en qualité de "Managing Director" et de "CFO Services, Parking & First", ont adressé à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers (ci-après: la Commission de conciliation) un courrier indiquant ce qui suit : "En référence à la résiliation ci-jointe ainsi qu'aux contrats de location (voir au titre) également joints, nous contestons la résiliation et demandons une prolongation des baux conformément à CO 272."

Ce courrier est rédigé sur un papier à en-tête portant la mention "D______". Il a été expédié de H______ (ZG) et la société requérante est désignée comme suit "D______/6______ AG, (…) rue 7______ no. ______, [code postal] H______."

Sous la rubrique "objet" figurent les mentions suivantes "Contestation de la résiliation A______/1______ & 4______, Genève", "local technique avec office – bail à loyer du 23.12.2003" et "70 places de parking – bail à loyer du 18.05.2000".

Etaient joints à cet envoi copie des baux des 18 mai 2000 et 23 décembre 2003, ainsi que divers documents y relatifs (avis de majoration de loyer et de résiliation).

g. Les causes ont été portées au rôle de la Commission de conciliation sous les n° C/13______/2022 (local technique, bureaux et station de lavage) et C/9807/2022 (places de parking).

h. Le 14 juillet 2022, la Commission de conciliation a convoqué les parties à ces deux causes, à savoir "C______ D______/3______ SA" en tant que partie demanderesse, et "COMMUNAUTE DES PROPRIETAIRES A______/1______" en tant que partie défenderesse, à une audience de conciliation fixée au 5 septembre 2022.

Une copie de la requête du 11 mai 2022 a en outre été adressée à la partie défenderesse.

i. Le 26 août 2022, K______, agissant en tant que "Regional Manager Romandie" au nom de D______/3______ SA à E______, sur papier à en-tête portant la mention "C______", a adressé à la Commission de conciliation un document intitulé "motivations de contestation". Ce document indique que la demande en conciliation oppose "D______/3______ SA-C______", sise à E______, à la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______". La première de ces sociétés concluait à "une prolongation de 10 ans des baux relatifs au tunnel de lavage et son annexe ainsi que celui des places de parc au A______/4______", à la "prolongation du bail des places de parc au A______/4______ selon usage" et à la "libération immédiate (sans remplacement) des locaux concernés par le bail Bureau A______/1______ ainsi que des deux places de stationnement y attenantes".

Elle a produit un nouveau chargé de pièces.

Figurait en pièce 2 de ce chargé un tableau récapitulatif des baux et avenants indiquant que les résiliations des baux relatifs aux deux places de parking extérieures et au bureau n'avaient pas été contestées.

j. Les causes n'ayant pas été conciliées, deux autorisations de procéder ont été délivrées à "C______ D______/3______ SA" le 5 septembre 2022, l'une pour la cause C/13______/2022, l'autre pour la cause C/9807/2022. Dans les deux cas, "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" était mentionnée comme partie défenderesse. L'objet du litige était désigné comme étant "une contestation de congé ordinaire (locataire)".

k. En date du 4 octobre 2022, D______ SA, agissant par l'entremise d'un avocat, a déposé une demande par-devant le Tribunal, prenant les conclusions suivantes à la forme : "Déclarer recevable la requête en contestation des congés et prolongation de bail relative aux résiliations de bail notifiées à la locataire par la Communauté des copropriétaires A______/1______ et 4______ et datées du 13 avril 2022, requête adressée à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers le 11 mai 2022, soit dans le délai de 30 jours prévu par la loi."

Sur le fond, elle a conclu à ce que le Tribunal annule les congés suivants :

- Celui donné par la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" pour le 31 décembre 2023 relatif à un local technique avec office à usage de station de lavage, selon avis de résiliation du bail du 13 avril 2022.

- Celui donné par la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" pour le 31 décembre 2023 concernant les places de parking extérieures, selon avis de résiliation du bail du 13 avril 2022.

- Celui donné par la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______" pour le 31 décembre 2023 concernant les places de parking souterrain (soit les 70 places de parking en sous-sol), selon avis de résiliation du bail du 13 avril 2022.

- Celui donné par la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" pour le 31 mai 2024 concernant des bureaux, selon avis de résiliation du bail du 13 avril 2022.

Elle a en outre requis pour tous les baux concernés une prolongation de bail de six ans.

Ces conclusions se référaient aux causes C/13______/2022 et C/9807/2022.

La demanderesse précisait que sa raison sociale était D______ SA et non pas "C______ D______/3______ SA". Elle s'occupait bien des intérêts de C______, notamment au chapitre des locaux litigieux, mais cette dernière mention ne figurait pas dans sa raison sociale.

Cette écriture, qui comporte 4 pages, ne comprend pas d'état de fait; elle n'expose en particulier pas précisément quels sont les contrats concernés, qui les a conclus, quel est le montant du loyer et quel est le lieu de situation exact de chaque objet litigieux.

l. Dans sa réponse du 11 janvier 2023, la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______" a conclu principalement à l'irrecevabilité des conclusions formulées tant à son encontre qu'à celle de la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______", subsidiairement au rejet de ces dernières.

Elle a relevé que la Commission de conciliation avait été saisie d'une demande émanant de D______/6______ SA, laquelle était une entité distincte de D______/3______ SA et n'était donc pas légitimée à contester les congés. Les autorisations de procéder avaient toutefois été délivrées à D______ SA, alors que D______/6______ SA n'avait pas comparu à l'audience de conciliation. Par ailleurs, la demande déposée par-devant le Tribunal comportait deux conclusions nouvelles en rapport avec les deux places de parking extérieures et le bureau, lesquelles étaient irrecevables, les résiliations des baux en question n'ayant pas été contestées dans le délai de 30 jours et n'ayant pas fait l'objet de la requête en conciliation. Enfin, les conclusions prises à l'encontre de la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______" étaient irrecevables.

La réponse du 11 janvier 2023 était libellée au nom de la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______, soit toutes les personnes physiques et morales mentionnées sur l'extrait du Registre foncier (pièce 1)", "partie défenderesse". Etait annexé à la réponse un extrait du Registre foncier daté du 4 janvier 2023 listant les noms des ______ copropriétaires de la parcelle n° 8______ de la Commune de J______, d'une part, ainsi que ceux des ______ copropriétaires de la parcelle n° 10______ de la Commune de J______, d'autre part (pièce 1 déf.).

m. Par ordonnance du 7 février 2023, le Tribunal a ordonné la jonction des causes C/13______/2022 et C/9807/2022 sous le numéro de cause C/13______/2022 et a limité la procédure à la question de la recevabilité de la demande.

n. Par conclusions motivées du 3 mars 2023, D______ SA a conclu à la recevabilité de la demande.

Elle a fait valoir que son but social consistait notamment dans la location d'automobiles, en Suisse et à l'étranger, alors que la société D______/6______ SA déployait son activité dans les services de toutes sortes, notamment l'administration d'immeubles. Dans ce contexte, lorsque des baux étaient résiliés, les courriers correspondants étaient transmis à D______/6______ SA. Il s'agissait toutefois, à l'instar de D______/3______ SA, d'une société du groupe D______. Or, le courrier du 11 mai 2022 avait été adressé à la Commission de conciliation à l'entête de D______. Les baux ne liaient pas D______/6______ SA, mais D______ SA, et il n'y avait jamais eu de doute quant à la personne de la demanderesse, ni sur sa légitimité à agir.

Les signataires de la demande du 11 mai 2022, soit F______ et G______, disposaient tous deux de la signature collective à deux pour la société D______ SA, alors qu'ils ne disposaient pas d'une telle signature au sein de la société D______/6______ SA, de sorte qu'ils ne pouvaient engager que la première nommée.

o. Lors de l'audience du Tribunal du 25 avril 2023, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions.

La cause a été gardée à juger par le Tribunal sur la question de la recevabilité à l'issue de l'audience.

p. Par ordonnance du 16 août 2023, le Tribunal a ordonné la "disjonction de la cause C/13______/2022 en les causes C/13______/2022 (local technique) et C/9807/2022 (70 places de parking)".

Il a notamment relevé que "la Commission de conciliation aurait dû inscrire COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______ comme défenderesse dans la cause C/9807/2022 et délivrer l'autorisation de procéder à l'encontre de cette dernière".

La demande devait dès lors être déclarée irrecevable (art. 60 CPC) "en tant qu'elle concerne les 70 places de parkings précédemment inscrites sous le n° de cause C/9807/2022 et la cause renvoyée à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, afin qu'elle inscrive et reconvoque valablement toutes les parties et délivre en cas d'échec de la conciliation une autorisation de procéder valable."

q. Par jugement JTBL/684/2023 du 22 août 2023, le Tribunal a déclaré recevables "les conclusions de la demande portant sur l’annulation de la résiliation de bail relatif au local technique, respectivement la prolongation du bail en question" (ch. 1 du dispositif), déclaré irrecevables "les conclusions de la demande portant sur l'annulation de la résiliation des baux relatifs aux deux places de parc extérieures et au bureau, respectivement la prolongation des baux en question" (ch. 2), ordonné la rectification de la partie demanderesse en ce sens qu'il s'agissait de D______/3______ SA (ch. 3), réservé la suite de la procédure (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite (ch. 5).

r. Le 4 septembre 2023, D______ SA a sollicité la rectification du dispositif de ce jugement en ce sens que celui-ci devait mentionner que les conclusions concernant les 70 places de parking étaient déclarées recevables.

s. Par jugement JTBL/751/2023 du 25 septembre 2023, le Tribunal a rectifié le chiffre 1 du dispositif du jugement JTBL/684/2023 du 22 août 2023 de la manière suivante : "Déclare recevables les conclusions de la demande portant sur l'annulation de la résiliation des baux relatifs au local technique et au [sic] 70 places de parking, respectivement la prolongation des baux en question".

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389136 III 196 consid. 1.1).

1.2 En l'espèce, en prenant en compte les loyers de l'objet litigieux durant trois ans, la valeur litigieuse est largement supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

L'appel a de plus été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art.  311 al. 1 CPC), de sorte qu'il est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, n. 2314 et 2416).

2. Le jugement querellé comporte uniquement une partie intitulée "en fait", qui ne contient cependant pas d'état de fait. Le Tribunal n'a pas rédigé de partie "en droit". Dans la partie "en fait", le Tribunal expose que "vu la procédure" et "l'ordonnance de disjonction du 16 août 2023", la "Commission de conciliation aurait dû inscrire COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______ comme défenderesse dans la cause C/9807/2022", la convoquer à l'audience de conciliation et délivrer l'autorisation de citer à son encontre ce qu'elle n'avait pas fait, ce qui entraînait l'irrecevabilité de la demande du 4 octobre 2022. La cause devait être renvoyée à la Commission de conciliation afin qu'elle inscrive et reconvoque valablement toutes les parties et délivre en cas d'échec de la conciliation une autorisation de procéder valable.

L'appelante fait valoir que la décision querellée ne contient aucune motivation, ce qui viole son droit d'être entendue. Le Tribunal avait retenu à juste titre que la demande du 4 octobre 2022 était irrecevable. C'était par contre à tort qu'il avait renvoyé la cause à la Commission de conciliation. Un tel renvoi n'était pas prévu par la loi. De plus le renvoi n'avait été requis par aucune des parties de sorte que le premier juge avait statué ultra petita. La phase de conciliation était terminée et le Tribunal aurait dû se limiter à statuer sur la recevabilité de l'action.

Les chiffres 1 et 2 du dispositif du jugement querellé n'ont pas été remis en cause par les parties, de sorte qu'il n'est plus contesté à ce stade que la demande déposée le 4 octobre 2022 par D______ SA est irrecevable.

2.1 En principe, la procédure au fond est précédée d'une tentative de conciliation devant une autorité de conciliation (art. 197 CPC). Tel est le cas de l'action en constatation de la nullité du congé, ainsi que des actions en annulation du congé et en prolongation du bail; pour ces deux actions-ci, l'autorité de conciliation doit être saisie dans le délai de péremption de 30 jours à partir de la réception du congé (art. 273 al. 1 et al. 2 let. a CO).

Lorsque la conciliation est un préalable nécessaire à l'introduction de la demande, la litispendance débute au moment du dépôt de la requête de conciliation et a notamment pour effet de fixer les parties au procès, des modifications n'étant ensuite possibles qu'à des conditions restrictives. C'est pourquoi la requête de conciliation doit contenir la désignation de la partie adverse, à qui la requête est notifiée sans retard avec la citation à l'audience (art. 202 al. 2 et 3 CPC). Lorsque la tentative de conciliation n'aboutit pas, l'autorité de conciliation délivre au demandeur l'autorisation de procéder, laquelle comporte notamment les noms et adresses des parties désignées dans la requête de conciliation (cf. art. 209 al. 2 CPC) (arrêt du Tribunal fédéral 4A_482/2015 du 7 janvier 2016 consid. 2.1 et les références citées).

L'autorisation de procéder, bien que consistant en un acte d'une autorité, n'est pas une décision sujette à recours. Elle revêt dès lors, du point de vue de son caractère définitif, le même statut qu'une décision ayant acquis force de chose jugée formelle, de sorte que le délai pour déposer la demande devant le juge compétent court dès sa notification. La validité de l'autorisation de procéder est examinée d'office par le tribunal, en tant que condition de recevabilité de la demande (art. 59 et 60 CPC) (ATF 140 III 227 consid. 3).

Dans le cadre d'une action en contestation de congé dirigée contre l'hoirie d'un bailleur, le Tribunal fédéral a retenu qu'il appartenait au locataire de désigner précisément la ou les parties défenderesses dans sa requête de conciliation. En effet, l'autorité de conciliation avait uniquement pour tâche de tenter de concilier les parties et de délivrer, si la conciliation échouait, l'autorisation de procéder contre la partie désignée par le demandeur (i.e. le locataire) dans sa requête, sans avoir à procéder à d'autres démarches ni, en particulier, à vérifier la composition de l'hoirie du bailleur. En l'occurrence, le locataire n'avait mentionné dans sa requête qu'un seul des trois héritiers du bailleur. Suite à l'échec de la tentative de conciliation, il avait introduit sa demande devant le juge compétent en la dirigeant contre les trois membres de l'hoirie. Or, l'autorisation de procéder délivrée, qui ne désignait pas deux des parties défenderesses citées dans la demande, ne permettait pas au locataire d'ouvrir action contre celles-ci, de sorte qu'une condition de recevabilité de la demande faisait défaut (arrêt du Tribunal fédéral 4A_482/2015 précité consid. 2.2).

2.2 En l'espèce, la question de savoir si le Tribunal a violé le droit d'être entendue de l'appelante en ne fournissant quasiment aucune motivation à l'appui du jugement querellé peut rester ouverte.

Le Tribunal devait se limiter à examiner la validité de l'autorisation de procéder, en tant que condition de recevabilité de la demande déposée le 4 octobre 2022.

Dans la mesure où l'autorisation de procéder délivrée le 5 septembre 2022 ne mentionnait pas la partie défenderesse citée dans la demande précitée dans le cadre de la procédure C/9807/2022, à savoir la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______", le Tribunal devait se limiter à déclarer ladite demande irrecevable.

A cela s'ajoute que la Commission de conciliation ne peut pas inscrire la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/4______" comme défenderesse dans la présente cause comme le lui a enjoint le Tribunal, puisque la demande déposée en conciliation n'indique pas quelle est la partie défenderesse.

La Commission ne peut pas non plus inscrire "C______ D______/3______ SA" comme demanderesse comme le voudrait le Tribunal, puisque la demande déposée en conciliation n'indique pas cette entité comme partie demanderesse, mais mentionne que la partie demanderesse est D______/6______ AG.

C'est dès lors à tort que le Tribunal a ordonné le renvoi de la cause à l'autorité de conciliation.

Conformément aux conclusions de l'appelante, le chiffre 3 du dispositif du jugement querellé sera par conséquent annulé.

3. Il n'est pas prélevé de frais ni alloué de dépens, s'agissant d'une cause soumise à la juridiction des baux et loyers (art. 22 al. 1 LaCC).

* * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 2 octobre 2023 par la "COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES A______/1______, soit toutes les personnes physiques et morales mentionnées sur l'extrait du Registre foncier" contre le jugement JTBL/682/2023 rendu le 22 août 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/9807/2022.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif de ce jugement.

Confirme ledit jugement pour le surplus.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Pauline ERARD et Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ et Monsieur Damien TOURNAIRE, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.