Skip to main content

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/9630/2021

ACJC/446/2024 du 05.04.2024 sur JTBL/339/2023 ( OBL ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9630/2021 ACJC/446/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU VENDREDI 5 AVRIL 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 3 mai 2023 et intimé sur appel joint,

et

ANLAGESTIFTUNG B______, sise c/o C______ AG, ______ (ZH), intimée et appelante sur appel joint, représentée par Me Pascal PETROZ, avocat, rue
du Mont-Blanc 3, 1201 Genève.

 


EN FAIT

A. a.a Le 30 juin 1987, A______, en qualité de locataire, et D______, en qualité de bailleresse, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 5 pièces situé au 4ème étage de l'immeuble sis rue 1______ no. ______ à E______ [GE]. La gérance de l'immeuble était alors assurée par F______ (ci-après : la régie F______).

Le contrat a été conclu pour une durée initiale d'une année et quinze jours, du 16 juillet 1987 au 31 juillet 1988, renouvelable ensuite tacitement d'année en année, sauf congé donné trois mois à l'avance.

Le loyer annuel a été fixé en dernier lieu à 19'356 fr. dès le 1er août 2008 et la provision annuelle pour charges à 1'800 fr.

L'art. 14 des clauses complémentaires intégrées au contrat de bail est libellé comme suit : "Le locataire n'est pas autorisé à percer les faïences. Si des installations supplémentaires à celles existantes sont nécessaires, une autorisation écrite de la régie est indispensable".

a.b Le 30 juin 1987, les mêmes parties ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un box n° 2______ situé dans le même immeuble, dont le loyer annuel a été fixé à 2'100 fr., la durée de location étant identique à celle de l'appartement.

b. A une date qui ne ressort pas du dossier, la CAISSE DE PENSIONS G______ (ci-après également la bailleresse) est devenue propriétaire de l'immeuble sis rue 1______ no. ______ à E______.

c. En 2009, la bailleresse a procédé à des travaux de peinture (hall, salon et dégagement de chambre) et au rebouchage de trous dans la salle de bains de l'appartement occupé par A______ (ci-après également le locataire).

En 2011, des travaux de peinture et de réfection du parquet ont été effectués dans l'une des chambres de l'appartement.

d. Par pli du 6 octobre 2015, la régie F______ a informé A______ avoir sollicité un devis relatif à la fourniture et à la pose d'une nouvelle cuisine, le locataire étant prié de prendre contact avec l'entreprise mandatée à cet effet.

A______ n'a pas donné suite à ce courrier, étant précisé que son épouse est décédée à la même époque.

e. Au début de l'année 2020, la gérance de l'immeuble a été confiée à [la régie immobilière] H______ (ci-après : la régie).

f. Le 18 mai 2020, A______ s'est adressé à la régie au sujet de travaux à réaliser dans son appartement. Il lui a reproché de ne pas répondre à ses demandes, relevant qu'elle améliorait "les performances du pire" de la régie F______.

Le même jour, la régie, soit pour elle I______, lui a répondu que, comme indiqué précédemment, les travaux étaient soumis à l'approbation de la société propriétaire. Le dossier du locataire était à l'étude, étant précisé que le travail de la régie était rendu plus compliqué en raison de la crise sanitaire.

g. Le 12 juin 2020, I______ s'est rendue dans l'appartement du locataire. Le même jour, la régie a émis un ordre de travail n° 3______ à l'attention de J______ SA pour réparer des "portes de cuisine" qui ne fermaient plus, ainsi que deux demandes de devis portant sur la remise en état du parquet de l'appartement et de la peinture du WC, ainsi que sur le remplacement de la toile solaire du balcon.

Le 15 juillet 2020, la régie a validé les devis portant sur les travaux précités. Les travaux relatifs au ponçage des parquets et à la peinture du plafond des WC ont été facturés à la bailleresse le 31 août 2020.

h. Le 28 juillet 2020, J______ SA a informé la régie que le locataire avait "annulé" les travaux commandés selon l'ordre de travail n° 3______ car il souhaitait rénover complètement la cuisine.

i. Par courriel du lendemain, A______ a informé la régie qu'il avait l'intention de repeindre l'appartement, à ses frais, et qu'il souhaitait que le parquet soit refait de manière simultanée, aux frais de la bailleresse. L'ameublement et les faïences de la cuisine devaient être remplacés, de même que les faïences des salles de bains; il sollicitait l'octroi d'un "crédit" de la bailleresse pour faire ces travaux, étant précisé que le surplus serait à sa charge. Il avait déjà pris contact avec un tiers pour réaliser des meubles sur mesure dans la cuisine. Il proposait également à la bailleresse de procéder à deux "modifications", à savoir l'ouverture d'une paroi entre la cuisine et le salon et le remplacement de la baignoire par une douche dans l'une des salles de bains. S'agissant de la première modification, il priait la régie de bien vouloir lui "donner un préavis favorable ou défavorable le plus rapidement possible afin de soumettre un projet par un architecte". Finalement, il demandait à la bailleresse de remettre en état les portes et les joints des fenêtres, qui devaient être révisés, et de réparer les bouchons des baignoires qui ne fonctionnaient pas bien.

j. Le 25 août 2020, la régie a émis des ordres de travaux afin de contrôler/vérifier les bouchons des baignoires, les joints des fenêtres et les serrures de portes.

Le remplacement des bouchons des baignoires et le débouchage d'une des deux baignoires ont été effectués le 28 août 2020. Les travaux relatifs aux joints des fenêtres et au nettoyage/graissage/réglage des serrures ont été facturés à la bailleresse le 23 septembre 2020.

k. Par courrier du 2 septembre 2020, la régie a informé le locataire, s'agissant de ses demandes de travaux, que la bailleresse n'entrait pas en matière concernant le remplacement de la cuisine, sous réserve de la réparation des portes qui fermaient mal (selon l'ordre de travail n° 3______), que le carrelage ne serait pas remplacé (locataire étant invité à déclarer à son assurance ménage les impacts au sol que la régie avait constatés lors de sa visite sur place) et qu'aucun mur ne devait être détruit que ce soit entre la cuisine et le salon ou entre les deux salles de bains.

"En conclusion", les demandes de travaux du locataire étaient refusées et aucune indemnité ne lui serait versée s'il venait à engager des travaux sans l'accord préalable de la bailleresse. L'attention du locataire était également attirée "sur le fait que des diagnostics amiante d[evaient] être effectués ainsi que des demandes d'autorisation pour certains travaux".

l. Par courriel du 28 septembre 2020, le locataire a confirmé à la régie que les travaux commandés (peinture du plafond de la salle de bains, changement de la toile du balcon, ponçage du parquet, réparation des joints des fenêtres) avaient été réalisés. Il avait procédé à ses frais au changement du carrelage de la cuisine, relevant que les impacts mentionnés par la régie étaient anecdotiques au vu de l'usure du sol qui était devenu glissant. Il avait également repeint l'appartement à ses frais. Il entendait prendre en charge les dépenses liées au changement des meubles de la cuisine, une simple réparation des portes n'étant pas suffisante, étant relevé qu'il avait obtenu un préavis favorable de la bailleresse en 2015 et que d'autres locataires avaient bénéficié d'une nouvelle cuisine. Après plus de trente ans, il souhaitait "aller au bout de cette rénovation" et demandait à la régie "de bien vouloir remplacer les lavabos […], les sanitaires [et] les murs des salles de bains".

m. Par pli du 30 novembre 2020, la régie a pris note de ce que le locataire avait réalisé des travaux dans l'appartement, malgré le refus de la bailleresse notifié par courrier du 2 septembre 2020. L'attention du locataire était attirée sur le fait que ces travaux avaient été réalisés à ses frais, à ses risques et périls et à l'entière décharge de la bailleresse. Pour le bon ordre de ses dossiers, la régie souhaitait effectuer une visite de l'appartement le 14 décembre 2020.

n. Le 5 décembre 2020, A______ a adressé un courriel de trois pages à I______ ainsi qu'à un autre employé de la régie, précisant accepter le rendez-vous du 14 décembre 2020. Il a notamment indiqué ce qui suit :

"Dans votre exercice de séduction vous secrétez des règles, des normes, des interdits qui visent à une autre approbation que la mienne puisque, comme vous avez pu constater j'ai fait ce que j'ai promis […]. Votre insistance dans le fait de vouloir interdire, prohiber n'est qu'un moyen de masquer, camoufler vos insuffisances et c'est confirmé par votre manière de procéder […] J'ai attribué votre attitude à un manque de lucidité et/ou des vertiges mentaux passagers […]. De toutes façons, je suis prêt à en parler si vous avez les moyens de m'indemniser pour assouvir vos désirs et vos envies […]. Alors, Madame I______, votre avis n'est pas transcendant parce que nous ne vivrons pas ensemble et, dans le cas hypothétique et virtuel où cette possibilité existerait, votre conception sur le bon état d'une digne présentation d'un appartement avorterait complètement cette illusion mentale. En conclusion, votre rendez-vous du 14 décembre 2020 à 14 heures […] me convient afin qu'éventuellement vous déployer vos énergies pour trouver une illégalité dans mes agissements au lieu de vous concentrer dans tout ce qui améliore".

o. Le 7 décembre 2020, I______ a accusé réception de ce courriel et précisé qu'il serait discuté de son contenu lors du rendez-vous fixé.

p. Le 14 décembre 2020, la précitée s'est rendue chez A______, accompagnée de sa collègue K______. Le rendez-vous s'est mal passé et, au cours de la visite, le locataire a mis fin aux discussions et demandé aux collaboratrices de la régie de quitter les lieux.

Interrogé par le Tribunal des baux et loyers, A______ a déclaré qu'il n'avait pas pu s'exprimer lors de ce rendez-vous, les représentantes de la régie lui ayant adressé de nombreux reproches. Il avait alors mis fin à la visite et leur avait demandé de partir.

Entendue comme témoin, I______ a déclaré qu'elle s'était rendue une première fois chez le locataire en juin 2020. A cette période, celui-ci n'avait pas encore effectué de travaux dans son logement. La cuisine était ancienne mais en bon état de fonctionnement. Lors de cette visite, elle avait informé le locataire que tous les travaux à effectuer dans l'appartement devaient faire l'objet d'une demande écrite qui était soumise à l'approbation de la bailleresse. Lors de la visite du 14 décembre 2020, elle avait constaté que le sol de la cuisine avait été remplacé par du carrelage gris. Des meubles de couleur bleu ciel avaient été installés à la place des anciens. La faïence des murs de la cuisine avait été retirée au niveau de la crédence et il ne restait que la colle. Ces travaux avaient été effectués sans autorisation, ce qu'elle avait dit au locataire. Elle lui avait demandé s'il avait fait un diagnostic amiante. Irrité, celui-ci lui avait répondu que ce n'était pas nécessaire car il avait juste retiré les carrelages. Elle lui avait indiqué qu'un test d'amiante était obligatoire et qu'il en allait de sa santé. Le locataire s'était alors emporté et avait refusé de lui laisser visiter le reste du logement. Il lui avait dit qu'elle était incompétente et qu'elle "ne servait à rien". A la même époque (cf. ég. let. r infra), il lui avait adressé des courriels "intolérables" qui l'avaient blessée. De son côté, elle était toujours restée calme et polie dans ses interactions avec le locataire.

K______, entendue comme témoin, a déclaré avoir été accueillie froidement par le locataire. Elle avait constaté que du carrelage avait été posé sur le sol de la cuisine sans qu'elle puisse dire s'il avait été posé sur l'ancien revêtement. Des meubles de cuisine avaient déjà été posés et les faïences sur le mur - au niveau de la crédence - étaient partiellement enlevées. A la question de savoir s'il avait fait un diagnostic amiante, le locataire avait répondu qu'il n'était pas obligé d'y procéder, tout en reprochant à I______ et à elle-même de ne pas connaître leur métier. Elles lui avaient expliqué qu'il s'agissait d'une obligation légale et qu'il devait leur transmettre ce document. Le locataire alors avait refusé de leur faire visiter les autres pièces du logement et leur avait demandé de partir.

q. Par courrier recommandé du 18 décembre 2020, la régie a fait suite au rendez-vous du 14 décembre 2020 et relevé que le comportement du locataire à cette occasion ainsi que les divers courriels qu'il avait adressés à I______ étaient inacceptables. Lors de ce rendez-vous, la régie avait pu constater que le locataire avait effectué d'importants travaux, malgré les refus de la bailleresse annoncés lors de la visite du 12 juin 2020 et par plis des 2 septembre et 30 novembre 2020. La cuisine avait été entièrement rénovée (mobilier, carrelage, faïences, etc.) sans qu'un diagnostic amiante n'ait été effectué. Le locataire s'exposait à voir son bail résilié pour justes motifs et serait tenu informé de la décision de la bailleresse à ce sujet. Au surplus, la régie notait que le locataire avait refusé de lui laisser visiter les autres pièces de l'appartement, alors qu'il y était tenu selon l'art. 257h al. CO.

r. Par courrier du 28 janvier 2021 adressé à la régie, A______ a répondu en ces termes :

"Madame, […] Pour le besoin de votre cause, les doses de mauvaise foi que vous injectez à vos affirmations sont tellement conséquentes que cela me fait douter, en l'absence de conflit, d'une quelconque présence de tact. A partir de notre entretien téléphonique du mois d'août 2020, comme je vous l'avais précisé, vous avez muté l'incompétence pour la mauvaise foi au service d'une colère inappropriée qui ne fait qu'aggraver votre cas. Pour masquer vos manquements vous puisez dans les tentatives de représailles, menaces, intimidations, ou des propos désobligeants […]. Pour illustrer votre confusion lorsque je vous ai mis à la porte le 14 décembre vous êtes sortie en promettant « des lettres vont partir » et vous prouvez ainsi que votre volonté de nuire occupe une place prioritaire dans votre attitude au détriment de la communication et de rendre service […]. Si cela peut servir pour motiver votre colère et votre courage pour aller jusqu'au bout de ce à quoi je m'expose je ne peux que constater que vous êtes à l'incompétence ce que la Tour Eiffel est à Paris; un monument. […] Dans le but de vous aider à éclore vos intentions et à votre épanouissement personnel et mener à terme toutes vos initiatives personnelles vindicatives je vous confirme […] que vous ne mettrez plus un pied chez moi, même si vous faites appel à la Police Montée du Canada, la Garde Nationale des Etats-Unis ou les parachutistes de la RFA, tant je réprouve et m'indigne sur des méthodes dignes d'une inquisition moyenâgeuse et votre comportement lors de la dernière visite […]".

s. Par quatre avis officiels du 16 avril 2021, la bailleresse a résilié les baux de l'appartement et du box de manière extraordinaire pour le 31 mai 2021 et de manière ordinaire pour le 31 juillet 2021. Sous la rubrique "remarques éventuelles", chacun de ces avis mentionnait ce qui suit : "Motif : cf. lettre d'accompagnement du 16 avril 2021 et courriers des 18 décembre, 30 novembre et 2 septembre 2020".

Par courrier d'accompagnement du même jour, la bailleresse a motivé les congés par le fait que le locataire avait effectué des travaux sans son autorisation, adopté un comportement "intolérable et outrancier" envers sa représentante et refusé de permettre l'accès à son logement, en violation de l'art. 257h CO. Elle a précisé que les congés extraordinaires étaient fondés sur l'art. 257f CO.

Entendue comme témoin, I______ a confirmé que le bail avait été résilié pour un triple motif, à savoir l'attitude déplacée du locataire envers la régie, le refus de celui-ci d'autoriser la visite de la chose louée et les travaux réalisés sans l'accord de la bailleresse.

t. Par demande du 17 mai 2021, déclarée non conciliée le 13 juillet 2021 et introduite devant le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) le 13 septembre 2021, A______ a contesté les congés du 16 avril 2021 concernant l'appartement et le box. Il a conclu, principalement, à la nullité des congés, subsidiairement à leur inefficacité, plus subsidiairement à l'inefficacité des congés extraordinaires et à l'annulation des congés ordinaires, et, encore plus subsidiairement, à l'inefficacité des congés extraordinaires et à l'octroi d'une prolongation de bail d'une durée de quatre ans échéant le 31 juillet 2025 avec possibilité de résilier le bail en tout temps moyennant un préavis de quinze jours pour le 15 ou la fin d'un mois.

Le locataire a fait valoir qu'il n'avait reçu aucun avertissement écrit le menaçant d'une résiliation de bail s'il effectuait des travaux sans l'accord de la bailleresse. Le courrier de la régie du 2 septembre 2020 ne lui faisait pas interdiction de rénover la cuisine à ses frais; en effet, dans ce courrier, la bailleresse avait uniquement refusé de participer financièrement à ces travaux dont il avait assumé le coût pour environ 40'000 fr. Un test d'amiante n'était pas nécessaire pour les travaux réalisés sur le sol de la cuisine, la céramique ayant été posée sur le revêtement existant. Lors de la visite du 14 décembre 2020, il avait déjà mandaté L______ SA pour faire un diagnostic amiante sur les murs de la cuisine, à l'endroit où il souhaitait enlever des faïences. Ce diagnostic, effectué le 8 janvier 2021, n'avait pas détecté d'amiante, ce qui ressortait du rapport établi par cette entreprise. Il contestait avoir adopté un comportement inacceptable vis-à-vis de la régie. Le 14 décembre 2020, c'était au contraire lui-même qui n'avait pas pu s'exprimer; il s'était senti agressé, raison pour laquelle il avait dû mettre fin à cette rencontre. Enfin, la visite de l'appartement que la régie voulait effectuer n'impliquait aucune des hypothèses visées par l'art. 257h CO, de sorte qu'il était légitimé à la refuser.

u. Dans sa réponse du 12 novembre 2021, la bailleresse a conclu au déboutement du locataire et à la constatation de la validité des congés notifiés. Elle a formé une demande reconventionnelle, concluant au prononcé de l'expulsion du locataire des locaux loués avec mesures d'exécution directe.

Elle a fait valoir que le locataire admettait avoir fait des travaux sans y être autorisé, alors qu'il savait pertinemment que l'accord de la bailleresse était un prérequis indispensable. Le rapport d'amiante du 8 janvier 2021 était postérieur aux travaux de rénovation de la cuisine. Le locataire s'était comporté comme s'il était le propriétaire de la chose louée, ce qui avait rompu de manière irrémédiable le lien de confiance avec la bailleresse. S'agissant de travaux non-autorisés, une protestation écrite au sens de l'art. 257f CO apparaissait d'emblée inutile vu les circonstances. S'agissant de l'attitude "exécrable" du locataire et de son refus de laisser l'accès aux locaux, une protestation écrite lui avait été adressée par courrier du 18 décembre 2020. Or le locataire avait persisté dans son comportement le
28 janvier 2021, de telle sorte que la poursuite des relations contractuelles était devenue insupportable pour la bailleresse.

v. Dans ses écritures du 1er décembre 2021, le locataire a conclu à l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle.

w. Le Tribunal a procédé à l'interrogatoire des parties le 8 février 2022.

A______ a déclaré avoir interpellé la régie en mars 2020 au sujet des travaux qu'il souhaitait effectuer dans son logement, sans obtenir de réponse. En août 2020, lors d'un entretien téléphonique houleux, la régie lui avait dit que la bailleresse refusait de participer au coût des travaux. Avant de débuter les travaux, il s'était renseigné auprès du Département des travaux publics; celui-ci lui avait indiqué que seuls certains travaux étaient soumis à autorisation, à savoir la suppression d'un mur entre la cuisine et le salon et l'installation d'une douche dans l'une des salles de bains. A la lecture du courrier de la régie du 2 septembre 2020, il avait compris que la bailleresse refusait de financer les travaux dans la cuisine, mais qu'il pouvait les faire à ses frais. Selon lui, la bailleresse avait uniquement refusé sa demande portant sur les travaux sujets à autorisation (suppression d'un mur, pose d'une douche).

Lors de la visite du 14 décembre 2020, la cuisine n'avait pas encore été entièrement rénovée. Seuls les travaux sur le sol avaient été réalisés, étant précisé qu'un test d'amiante n'était pas nécessaire puisque le nouveau carrelage avait été posé sur l'ancien. La dépose des faïences sur les parois de la cuisine, de même que la pose des panneaux en bois et du plan de travail avaient été effectuées à fin janvier 2021, après le test d'amiante. Cela ressortait notamment de la facture - datée du 26 janvier 2021 - du marbrier qui lui avait fourni le plan de travail. La situation décrite dans le courrier de la régie du 18 décembre 2020 ne correspondait donc pas à la réalité. Les collaboratrices de la régie avaient "fait une fausse déclaration" à ce sujet. Conformément aux indications de la régie, il avait fait un diagnostic amiante le 7 janvier 2021 pour les travaux effectués au-dessus du plan de travail, à l'endroit où il avait enlevé des faïences.

x. Lors des audiences de débats des 7 juin et 6 septembre 2022, le Tribunal a entendu plusieurs témoins dont les déclarations ont été reprises ci-avant dans la mesure utile. Avant la tenue de ces audiences, par courrier du 2 mars 2022, A______ a informé le Tribunal qu'il renonçait à solliciter l'audition du témoin M______, qui était domicilié en Espagne (cf. infra let. C.a).

N______, ami de longue date de A______, a déclaré avoir aidé le précité à monter des meubles dans sa cuisine à fin 2020-début 2021. Ces travaux, d'une durée d'environ deux mois, avaient été effectués après le test d'amiante. Le 25 janvier 2021, il avait échangé des messages WhatsApp avec le locataire au sujet des panneaux en bois à poser sur le mur de la cuisine, en remplacement du carrelage. En décembre 2020, la cuisine n'était pas entièrement rénovée, dans la mesure où les panneaux en bois devaient d'abord être posés avant d'installer les meubles de cuisine; la partie basse était déjà posée, y compris la cuisinière, mais la partie murale en hauteur n'était pas encore faite. Il ne s'était pas occupé de la pose du carrelage.

y. Lors de l'audience de plaidoiries finales du 6 décembre 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions, après quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

B. Par jugement JTBL/339/2023 du 3 mai 2023, reçu le lendemain par A______, le Tribunal a déclaré inefficaces les congés notifiés au précité le 16 avril 2021 pour le 31 mai 2021 concernant l'appartement et le box (ch. 1 du dispositif), déclaré valables les congés notifiés à A______ le 16 avril 2021 pour le 31 juillet 2021 concernant l'appartement et le box (ch. 2), accordé au précité une prolongation de ses baux de quatre ans, échéant au 31 juillet 2025 (ch. 3), autorisé A______ à résilier les baux en tout temps avant cette date, moyennant un préavis écrit de 15 jours pour le 15 ou la fin d'un mois (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et dit que la procédure était gratuite (ch. 6).

Le Tribunal a considéré que les congés n'étaient pas nuls, ayant été notifiés dans les formes requises par la loi. La possibilité de doubler une résiliation extraordinaire d'une résiliation ordinaire de nature subsidiaire, appelée à déployer ses effets uniquement si le premier congé n'était pas valable, était reconnue par la jurisprudence. En l'occurrence, des avis de résiliation distincts avaient été envoyés, l'un pour le 31 mai 2021 fondé sur l'art. 257f CO et l'autre pour l'échéance, de sorte que le locataire avait compris qu'il pouvait attaquer tant la résiliation ordinaire que la résiliation extraordinaire, ce qu'il avait d'ailleurs fait.

Les congés signifiés pour le 31 mai 2021 étaient inefficaces, la bailleresse n'ayant pas envoyé de protestation écrite au locataire au sens de l'art. 257f al. 3 CO, alors que les circonstances ne l'autorisaient pas à se dispenser d'une telle démarche. Les congés signifiés pour le 31 juillet 2021 avaient été donnés pour les mêmes motifs que les congés extraordinaires, soit l'attitude inadéquate du locataire envers la régie, son refus d'autoriser la visite de l'objet loué et les travaux réalisés sans autorisation. Il ressortait de l'audition des témoins K______ et I______ que le locataire avait enlevé une partie (voire l'entier) des faïences du mur de la cuisine en décembre 2020, soit avant d'effectuer un test d'amiante. Or, même à retenir que le locataire pouvait inférer du courrier de la régie du 2 septembre 2020 qu'il était en droit de faire ces travaux à ses frais, ce qui était contesté, ce courrier mentionnait clairement qu'un diagnostic amiante était nécessaire. Un tel diagnostic devait en effet être réalisé avant d'entreprendre des travaux dans un immeuble construit avant 1991, la grande majorité de ces immeubles contenant des matériaux amiantés, notamment dans les colles de carrelage; le risque de libération d'éléments amiantés était particulièrement élevé en cas de travaux (cf. directive SABRA relative au diagnostic amiante avant travaux de janvier 2021). Le locataire avait donc violé son devoir de diligence et, ce faisant, rompu le lien de confiance le liant à la bailleresse. Rien n'indiquait que le motif invoqué ne serait qu'un prétexte, de sorte que les congés ordinaires étaient valables.

L'octroi au locataire d'une prolongation des baux de quatre ans, échéant au 31 juillet 2025, conciliait de manière équitable les intérêts des parties. En effet, le locataire occupait l'appartement litigieux depuis 35 ans, payait régulièrement son loyer et l'intérêt de la bailleresse à récupérer l'usage des locaux n'était pas urgent.

C. a. Par acte expédié le 5 juin 2023 à la Cour de justice, A______ a indiqué "adresser [à la Cour] le présent mémoire réponse en matière civile à l'encontre du Jugement du 3 mai 2023 portant les indications C/9630/2021-18-OSB, JTBL/339/2023". Il a conclu à l'annulation de "toutes les conclusions de la partie adverse qui repos[aient] sur des témoignages inexacts et par conséquent faux".

Se référant à l'art. 271 CO, il a indiqué que le congé "se bas[ait] sur une relation conflictuelle avec la responsable de [la régie immobilière] H______, Madame I______, dont l'origine faisait suite à des échanges téléphoniques". Se référant à l'art. 257f CO, il a fait valoir que les travaux effectués dans la cuisine n'étaient pas terminés à la mi-décembre 2020, les meubles ayant été posés "bien plus tard". Les déclarations du témoin K______ à ce sujet étaient "techniquement impossibles". Lors de la visite du 14 décembre 2020, les choses ne s'étaient pas déroulées comme la régie l'avait dit, étant précisé qu'un "avocat pénaliste" [i.e. M______] était présent dans l'appartement ce jour-là. Il avait d'excellentes relations avec les autres habitants de l'immeuble et reprochait à la régie plusieurs "dysfonctionnements".

Il a produit une pièce nouvelle.

b. Par écritures datées respectivement des 5 et 21 juin 2023, mais expédiées à la Cour respectivement les 6 et 23 juin 2023, A______ a complété son "mémoire réponse en matière civile" contre le jugement attaqué.

A l'appui de son écriture du 23 juin 2023, il a produit des pièces nouvelles.

c. Dans sa réponse du 10 juillet 2023, la CAISSE DE PENSIONS G______ a conclu au rejet de l'appel. Sur appel joint, elle a conclu à l'annulation du jugement attaqué. Cela fait, elle a conclu, principalement, à ce que la Cour constate la validité et l'efficacité des résiliations de bail notifiées à A______ par avis du 16 avril 2021 pour l'appartement et le box, refuse d'octroyer une prolongation de bail au locataire et condamne celui-ci à évacuer immédiatement les locaux loués, avec mesures d'exécution directe. Subsidiairement, elle a conclu au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

En préambule de son mémoire de réponse, la bailleresse a indiqué avoir pris connaissance des trois écritures distinctes expédiées par le locataire à la Cour les 5, 6 et 23 juin 2023. Difficilement compréhensibles, ces écritures ne respectaient manifestement pas les conditions de recevabilité de l'appel, raison pour laquelle elles devaient être déclarées irrecevables; en effet, leur motivation était insuffisante au regard de l'art. 311 CPC et les écritures des 6 et 23 juin 2023 étaient de surcroît tardives, ayant été adressées à la Cour après l'expiration du délai d'appel. "Par précaution, la bailleresse dépos[ait] néanmoins la présente réponse et appel joint".

d. Dans sa réponse à l'appel joint du 22 août 2023, A______ a persisté dans ses précédentes explications, concluant à "l'annulation du congé prononcé en violation des règles de la bonne foi".

e. Dans l'intervalle, par pli du 11 juillet 2023, la CAISSE DE PENSIONS G______ a informé la Cour que l'immeuble sis rue 1______ no. ______ à E______ avait récemment été vendu à ANLAGESTIFTUNG B______. Celle-ci déclarait reprendre le procès en lieu et place de la CAISSE DE PENSIONS G______, en application de l'art. 83 al. 1 CPC.

f. Par arrêt ACJC/1348/2023 du 10 octobre 2023, la Cour a constaté la substitution de la CAISSE DE PENSIONS G______ par ANLAGESTIFTUNG B______ et réservé la suite de la procédure.

g. Par réplique du 13 octobre 2023, ANLAGESTIFTUNG B______ a persisté dans les conclusions de la réponse et appel joint du 10 juillet 2023.

h. La cause a été gardée à juger le 6 décembre 2023, ce dont les parties ont été avisées le jour même.

EN DROIT

1. 1.1
1.1.1
L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

La partie adverse peut former un appel joint dans la réponse (art. 313 al. 1 CPC). L'appel joint devient caduc si l'instance de recours déclare l'appel principal irrecevable (art. 313 al. 2 let. a CPC); il en va de même si l'appel principal est rejeté parce que manifestement infondé (art. 313 al. 2 let. b CPC).

1.1.2 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC).

La procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 2 let. c CPC), le litige portant sur la contestation de congés. Les faits sont établis d'office et la maxime inquisitoire sociale régit la procédure (art. 247 al. 2 let. a CPC).

1.1.3 Selon l'art. 311 al. 1 CPC, l'appel doit être introduit par un acte écrit et motivé.

La motivation est une condition légale de recevabilité qui doit être examinée d'office. Afin de respecter cette exigence, l'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_61/2016 du 10 mai 2016 consid. 4).

Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. Si la motivation de l'appel est identique aux moyens qui avaient déjà été présentés en première instance, avant la reddition de la décision attaquée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_97/2014 du 26 juin 2014 consid. 3.3), ou si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance, elle ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC et l'instance d'appel ne peut entrer en matière (arrêts du Tribunal fédéral 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2; 4A_97/2014 déjà cité consid. 3.3). Ni la maxime inquisitoire ni le devoir d'interpellation du juge n'interdisent de refuser d'entrer en matière sur un recours irrecevable faute de motivation suffisante (arrêt du Tribunal fédéral 4A_203/2013 du 6 juin 2013 consid. 3.2 et les arrêts cités).

La motivation d'un acte d'appel doit être entièrement contenue dans le mémoire d'appel lui-même. Elle ne saurait dès lors être complétée ou corrigée ultérieurement. Si elle fait défaut, la juridiction d'appel n'entre pas en matière. Le CPC ne prévoit pas qu'en présence d'un mémoire d'appel ne satisfaisant pas aux exigences légales, notamment de motivation, un délai raisonnable devrait être octroyé pour rectification. L'art. 132 al. 1 et 2 CPC (rectification des vices de forme) ne permet pas de compléter ou d'améliorer une motivation insuffisante, même si le mémoire émane d'une personne sans formation juridique, et il ne saurait être appliqué afin de détourner la portée de l'art. 144 al. 1 CPC qui interdit la prolongation des délais fixés par la loi. Il en va de même de l'art. 56 CPC (devoir d'interpellation du juge), qui concerne les allégations de fait et n'est donc pas applicable en cas d'absence de motivation d'un acte d'appel (arrêt du Tribunal fédéral 5A_488/2015 du 21 août 2015 consid. 3.2.2 et les arrêts cités; cf. JEANDIN, CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 5 ad art. 311 et les références citées).

1.2
1.2.1
Chaque partie est en principe libre de résilier un bail de durée indéterminée pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu. La résiliation ordinaire du bail ne suppose pas l'existence d'un motif de résiliation particulier (cf. art. 266a al. 1 CO; ATF 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1).

Lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, la seule limite à la liberté contractuelle des parties réside dans les règles de la bonne foi : le congé qui y contrevient est alors annulable (art. 271 al. 1 CO). De manière générale, un congé est contraire aux règles de la bonne foi lorsqu'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection et qu'il apparaît ainsi purement chicanier ou consacrant une disproportion manifeste entre l'intérêt du locataire au maintien du contrat et celui du bailleur à y mettre fin (ATF 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1).

Le but de la règlementation des art. 271 ss CO est uniquement de protéger le locataire contre des résiliations abusives. Un congé n'est pas contraire aux règles de la bonne foi du seul fait que la résiliation entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 140 III 496 consid. 4.1) ou que l'intérêt du locataire au maintien du bail paraît plus important que celui du bailleur à ce qu'il prenne fin (arrêts du Tribunal fédéral 4A_198/2016 du 7 octobre 2016 consid. 4.2; 4A_18/2016 du 26 août 2016 consid. 3.2). Il faut en effet une disproportion crasse entre l'intérêt du preneur au maintien du contrat et l'intérêt du bailleur à y mettre fin (ACJC/247/2020 du 10 février 2020 consid. 5.2; ACJC/257/2018 du 5 mars 2018 consid. 2.1).

Il appartient au destinataire du congé de démontrer que celui-ci contrevient aux règles de la bonne foi (art. 8 CC).

1.2.2 En vertu du contrat de bail, le locataire se voit confier l'usage de la chose louée, mais pas davantage. Il n'acquiert pas le droit de modifier ou de rénover les locaux. A la fin du bail, il doit les restituer dans l'état où il les a reçus, compte tenu d'un usage normal (art. 267 al. 1 CO). L'art. 260a CO déroge à cette règle, en autorisant le locataire à entreprendre des travaux de rénovation ou de modification des locaux, moyennant un accord écrit du bailleur - que celui-ci n'est pas tenu de donner sans avoir à motiver sa décision (LACHAT/RUBLI, Le bail à loyer, 2019,
p. 1060-1061 et les références citées).

Le locataire qui entreprend, à ses frais, des travaux de rénovation ou de modification de la chose louée sans l'accord (écrit) du bailleur déroge à son obligation d'user de la chose avec soin (art. 257f al. 1 CO) et s'expose à une résiliation ordinaire ou, lorsque les conditions de l'art. 257f al. 3 et 4 CO sont réunies, à une résiliation anticipée du bail (LACHAT/RUBLI, op. cit., p. 1065 et les références citées).

Dans un arrêt de 2007, le Tribunal fédéral a confirmé l'efficacité d'un congé donné en vertu de l'art. 257f al. 3 CO au motif que, malgré le refus clair de la bailleresse, exprimé à plusieurs reprises, la sous-locataire (soit l'auxiliaire du locataire) n'avait pas hésité, sans autre explication, à entreprendre sur une durée de deux mois des travaux coûteux, qui avaient fortement modifié l'état et l'apparence des locaux loués, sans pour autant en altérer la structure ou l'ordonnancement (l'intéressée ayant notamment changé les appareils sanitaires de la salle de bains et remplacé le carrelage, le mobilier et les appareils de la cuisine), retenant qu'en agissant ainsi, la sous-locataire avait délibérément violé les obligations que la loi imposait au locataire et que, par son comportement, elle avait rompu irrémédiablement le lien de confiance entre les parties au bail principal. La sous-locataire avait en effet agi comme si elle était propriétaire du logement, substituant sa propre appréciation à celle de la bailleresse et ne tenant aucun compte du fait que l'autorisation qu'elle avait sollicitée lui avait été refusée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_277/2007 du 26 septembre 2007 consid. 5).

1.2.3 Afin de préserver son droit de propriété et d'exercer son obligation d'entretien, le bailleur doit pouvoir examiner régulièrement les locaux loués. Le locataire doit donc tolérer ses visites, dans la mesure où elles sont nécessaires à l'entretien, à la vente ou à une location ultérieure des locaux (art. 257h al. 2 CO). Le bailleur peut visiter la chose louée non seulement lorsqu'il a connaissance d'un défaut, mais aussi périodiquement, sans exagération, conformément au bon sens et aux règles de la bonne foi (LACHAT/RUBLI, op. cit., p. 285 et les références citées).

1.3
1.3.1
En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

L'acte du locataire expédié à la Cour le 5 juin 2023 l'a été dans le délai d'appel de 30 jours (art. 311 al. 1 CPC) et l'on comprend à sa lecture que le locataire conclut implicitement à l'annulation des congés qui lui ont été notifiés le 16 avril 2021.

En revanche, cet acte ne répond pas aux exigences de motivation rappelées ci-avant (cf. consid. 1.1.3), même interprétées avec indulgence vis-à-vis d'un plaideur en personne. Le locataire se limite en effet à renvoyer aux arguments déjà soulevés devant le Tribunal et à formuler des critiques toutes générales de la décision attaquée. En particulier, il ne discute pas les motifs du jugement et n'expose pas en quoi celui-ci serait entaché d'erreurs dans l'établissement des faits et/ou dans l'application du droit. L'acte d'appel du 5 juin 2023 est ainsi affecté d'un vice irréparable.

Les écritures du locataire expédiées à la Cour les 6 et 23 juin 2023 sont par ailleurs tardives, le délai d'appel étant arrivé à échéance le 5 juin 2023.

Il suit de là que l'appel formé par le locataire le 5 juin 2023 est irrecevable, tout comme ses compléments des 6 et 23 juin 2023.

Il en va de même des pièces nouvelles produites par le locataire devant la Cour. Il s'agit en effet de documents datés des années 2020 et 2021, dont le locataire aurait pu - et dû - se prévaloir devant le Tribunal (art. 317 al. 1 CPC).

1.3.2 Même à considérer que l'appel du 5 juin 2023 - tel que complété par la suite - serait recevable, il devrait quoi qu'il en soit être rejeté car manifestement infondé.

Il ressort en effet sans équivoque des pièces versées au dossier et de l'audition du témoin I______ que la bailleresse n'a pas donné son consentement à la réalisation des travaux de rénovation souhaités par le locataire. L'opposition de la bailleresse a été communiquée au locataire à plusieurs reprises, d'abord par plis des 2 septembre 2020 (ce courrier indiquant expressément que "toutes les demandes de travaux" du locataire étaient refusées, y compris celles portant sur la rénovation de la cuisine) et 30 novembre 2020, puis oralement par l'employée de la régie le 14 décembre 2020 et à nouveau par courrier recommandé du 18 décembre 2020.

Il est par ailleurs constant que les travaux ont néanmoins été entrepris, le locataire ayant admis avoir procédé, entre décembre 2020 et janvier 2021, nonobstant le refus clairement exprimé par la bailleresse, à la rénovation complète de la cuisine (pose d'un nouveau carrelage sur le sol, dépose des faïences et pose de panneaux en bois sur les murs, remplacement des meubles et appareils de la cuisine). Ces travaux ont duré environ deux mois et leur coût s'est élevé, selon les dires du locataire, à quelque 40'000 fr. Il s'agit ainsi de travaux d'une certaine ampleur qui ont modifié l'état et l'apparence de l'objet loué, ainsi que l'a admis le locataire et que l'ont confirmé les témoins entendus par le Tribunal. Or le locataire n'ignorait pas qu'il devait obtenir l'accord de la bailleresse pour réaliser les travaux envisagés, ce qui ressort de l'art. 14 des clauses complémentaires intégrées au contrat de bail, du courriel de la régie du 18 mai 2020, des explications données par l'employée de la régie lors de la visite du 12 juin 2020, mais également des courriels que le locataire a lui-même adressés à la régie afin d'obtenir l'autorisation de la bailleresse pour débuter les travaux.

Il résulte de surcroît des déclarations des témoins I______ et K______ que le
14 décembre 2020, le locataire avait déjà enlevé - à tout le moins une partie - des faïences sur les murs de la cuisine, au niveau de la crédence, soit avant qu'un diagnostic amiante ne soit réalisé. Un tel diagnostic était pourtant obligatoire avant d'initier des travaux de ce type, la colle des faïences pouvant contenir des éléments amiantés vu l'ancienneté de l'immeuble, ce que la régie avait spécifié par écrit à l'attention du locataire. Contrairement à ce que ce dernier semble soutenir, les déclarations du témoin N______ n'infirment pas celles des témoins I______ et K______, l'intéressé ayant déclaré qu'il ne s'était pas occupé des travaux de pose/dépose du carrelage, tout en confirmant qu'une partie du nouveau mobilier (incluant la cuisinière) avait déjà été installé en décembre 2020. Au surplus, le locataire ayant renoncé à solliciter l'audition de M______ comme témoin, il importe peu de savoir ce que le précité a pu constater (ou non) lors de la visite de la régie du 14 décembre 2020.

Eu égard aux considérations qui précèdent, il appert que le locataire s'est comporté comme s'il était propriétaire du logement loué, substituant sa propre appréciation à celle de la bailleresse et faisant fi de l'opposition manifestée par celle-ci. Ainsi, comme l'a retenu le Tribunal, le locataire a délibérément violé son obligation d'user de la chose avec soin, ce qui a entraîné une rupture du lien de confiance entre les parties. Vu l'absence de tout respect et de toute considération du locataire pour les droits de la bailleresse, sur un point aussi important que des travaux de rénovation affectant l'objet loué, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que les congés ordinaires du 16 avril 2021 reposaient sur un motif objectif, sérieux et digne de protection et, partant, n'étaient pas contraires à la bonne foi.

Cela est d'autant plus vrai qu'à la même époque, le locataire a multiplié les attaques virulentes et inutilement blessantes à l'endroit d'une employée de la régie et refusé de laisser cette dernière accéder à toutes les pièces du logement - en dépit de l'intérêt légitime de la bailleresse à examiner l'objet loué pour vérifier l'ampleur et la facture des travaux exécutés sans son accord -, manifestant de la sorte un manque d'égards manifeste vis-à-vis de la bailleresse et de sa représentante.

Il suit de là que les baux de l'appartement et du box ont valablement été résiliés avec effet au 31 juillet 2021.

1.3.3 En définitive, l'appel principal est irrecevable et, qui plus est, manifestement infondé, ce qui a pour effet de rendre caduc l'appel joint formé par la bailleresse.

2. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevable l'appel interjeté le 5 juin 2023 et complété les 6 et 23 juin 2023 par A______ contre le jugement JTBL/339/2023 rendu le 3 mai 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/9630/2021.

Dit que l'appel joint formé le 10 juillet 2023 par ANLAGESTIFTUNG B______ (anciennement CAISSE DE PENSIONS G______) contre ce même jugement est en conséquence caduc.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Pauline ERARD, Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Zoé SEILER, Monsieur
Jean-Philippe FERRERO, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.