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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/6770/2023

ACJC/314/2024 du 11.03.2024 sur JTBL/1058/2023 ( SBL ) , RENVOYE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6770/2023 ACJC/314/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 11 MARS 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______, recourante contre un jugement non motivé rendu par le Tribunal des baux et loyers le 7 décembre 2023,

 

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé,
Monsieur C______, domicilié ______, autre intimé,
Monsieur D______, domicilié ______, autre intimé.

 


Attendu, EN FAIT, que les parties sont liées par un contrat de bail à loyer portant sur la location de locaux commerciaux d'une surface totale d'environ 700 m2 situés au rez-de-chaussée et au 1er étage de l'immeuble sis route 1______ no. ______ [au quartier des] E______, ainsi que de leurs dépendances (cinq places de parking en sous-sol et un local compresseur);

Que le loyer annuel a été fixé à 114'000 fr. à partir du 1er janvier 2021;

Que par requête formée devant le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) le 31 mars 2023, B______, C______ et D______ ont requis l'évacuation de A______ SA des locaux loués par la voie de la procédure en protection des cas clairs, et sollicité l'exécution immédiate du jugement d'évacuation;

Que les parties ont été entendues par le Tribunal à deux reprises, lors des audiences qui se sont tenues les 8 juin et 7 décembre 2023;

Que par jugement non motivé JTBL/1058/2023 du 7 décembre 2023, reçu par A______ SA le 12 décembre 2023, le Tribunal, statuant par voie de procédure sommaire, a condamné la précitée à évacuer immédiatement de sa personne, de ses biens et de tout tiers les locaux commerciaux d'une surface totale d'environ 700 m2 situés au rez-de-chaussée et au 1er étage de l'immeuble sis route 1______ no. ______ aux E______, ainsi que les cinq places de parking en sous-sol et le local compresseur (ch. 1 du dispositif), autorisé B______, C______ et D______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______ SA dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), condamné la précitée à payer à B______, C______ et D______, conjointement et solidairement, la somme de 52'500 fr. (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite (ch. 5);

Qu'il était indiqué au pied du jugement que sa motivation pouvait être demandée dans un délai de dix jours à compter de sa réception et que si la motivation n'était pas demandée, les parties étaient considérées avoir renoncé à l'appel ou au recours;

Que par courrier recommandé expédié au Tribunal le 19 décembre 2023, A______ SA a annoncé au Tribunal son intention de "porter recours" contre ce jugement qu'elle estimait arbitraire et dont elle sollicitait l'annulation;

Que par pli du 21 décembre 2023, le greffe du Tribunal a transmis le courrier susmentionné à la Cour de justice, exposant que, "sauf erreur", cet acte "sembl[ait] relever de [sa] compétence";

Qu'invités par la Cour à se déterminer sur le courrier de A______ SA du 19 décembre 2023, B______, C______ et D______ ont précisé ne pas être opposés à octroyer un délai de départ à la locataire, moyennant que celle-ci résorbe l'arriéré d'ici fin janvier 2024 et fournisse une garantie de loyer couvrant la durée d'occupation des locaux jusqu'à leur libération; que faute pour la locataire de se conformer à ces conditions, ils persistaient à solliciter l'évacuation des locaux "avec effet immédiat comme décidé dans le jugement du 7 décembre 2023";

Que la cause a été gardée à juger le 12 février 2024;

Considérant, EN DROIT, que selon l'art. 239 CPC, le tribunal peut communiquer aux parties une décision sans motivation écrite, en notifiant le dispositif écrit (al. 1 let. b); qu'une motivation écrite est remise aux parties, si l'une d'elles le demande, dans un délai de dix jours à compter de la communication de la décision; que si la motivation n'est pas demandée, les parties sont considérées avoir renoncé à l'appel ou au recours (al. 2);

Que l'art. 239 CPC, applicable à la procédure sommaire par renvoi de l'art. 219 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 4A_72/2014 du 2 juin 2014 consid. 5), règle la communication de la décision non motivée aux parties, et le cas échéant, les conditions d'une remise ultérieure de la motivation;

Que la demande de motivation est un préalable indispensable à la recevabilité de l'appel ou du recours (arrêt du Tribunal fédéral 5A_678/2013 du 7 novembre 2013 consid. 2.2);

Que la demande de motivation doit être adressée au tribunal qui a statué et non à la juridiction supérieure; qu'en pratique, une simple lettre manifestant clairement la volonté d'obtenir la motivation est suffisante; qu'au besoin, les déclarations d'une partie non assistée devront être interprétées objectivement : il faut comprendre comme une demande de motivation une lettre d'un plaideur embrouillée, mais révélant une volonté de recourir (TAPPY, in CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 15a ad art. 239 CPC et les références citées);

Que selon l'art. 56 CPC, le tribunal interpelle les parties lorsque leurs actes ou déclarations sont peu clairs, contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets et leur donne l'occasion de les clarifier ou de les compléter;

Qu'en l'espèce, le Tribunal a notifié aux parties le seul dispositif de son jugement et leur a rappelé la teneur de l'art. 239 al. 2 CPC;

Que par courrier du 19 décembre 2023, A______ SA a clairement manifesté au Tribunal sa volonté de recourir contre ce jugement non motivé qu'elle estimait arbitraire;

Que dans la mesure où il était adressé au Tribunal (l'autorité ayant statué) et non à la Cour (l'instance d'appel/de recours), ce courrier - qui émane d'un justiciable comparant sans l'assistance d'un avocat - devait être interprété comme une demande de motivation au sens de l'art. 239 al. 2 CPC, étant rappelé que la motivation est un préalable indispensable à la recevabilité de l'appel ou du recours;

Qu'en cas de doute, il aurait en toute hypothèse appartenu au Tribunal d'interpeller A______ SA afin de lui donner l'occasion de clarifier la portée de son courrier avant de transmettre celui-ci à la Cour;

Qu'il résulte de ce qui précède que la motivation du jugement JTBL/1058/2023 a été sollicitée en temps utile par A______ SA;

Qu'en conséquence, la cause sera renvoyée au Tribunal pour qu'il notifie la motivation de son jugement aux parties, étant précisé que celles-ci auront, cas échéant, la possibilité de faire appel et/ou recours contre la décision motivée si elles s'y estiment fondées;

Que la procédure est gratuite (art. 22 al. 1 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Renvoie la cause au Tribunal des baux loyers pour qu'il notifie aux parties la motivation du jugement JTBL/1058/2023 rendu le 7 décembre 2023 dans la cause C/6770/2023.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Pauline ERARD, Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Zoé SEILER, Monsieur
Jean-Philippe FERRERO, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et
90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.