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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2921/2023

ATAS/1064/2024 du 23.12.2024 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2921/2023 ATAS/1064/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 décembre 2024

Chambre 3

 

En la cause

A______

représenté par Me Toni KERELEZOV, avocat

recourant

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 19 octobre 1991, Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en ______ 1972, originaire de Turquie, a été victime d'une fusillade lors d’une manifestation pro kurde en Turquie. Ses blessures ont entraîné diverses opérations, puis l’amputation du tiers proximal du fémur droit, le 28 octobre 1991.

b. L’assuré a ensuite été emprisonné et torturé. À sa libération, il n’a pas repris ses études universitaires en sciences économiques. En Turquie, il a travaillé de 1992 à 1994 en qualité d’opérateur informatique. En 1995, il a émigré en Allemagne.

c. Le 26 mars 1997, l’assuré a épousé Madame B______. De leur union sont nés deux garçons en 2004 et 2007.

d. Arrivé en Suisse en septembre 1997, l’assuré n’y a jamais travaillé.

B. a. Le 18 décembre 1997, l’assuré a déposé une première demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI), visant à l’octroi de mesures professionnelles, de moyens auxiliaires et d’une rente.

b. Le 16 octobre 1998, l’OAI lui a nié le droit à toute prestation, au motif que la survenance de l’invalidité (en 1991 ou 1992) était antérieure à l’arrivée en Suisse de l’assuré, qui n’avait dès lors pas la qualité d’assuré.

C. a. En date du 25 juillet 2001, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations, sous la forme de mesures professionnelles et de moyens auxiliaires.

b. Par décisions des 14 novembre 2002 et 18 décembre 2003, l’OAI a refusé l’octroi de mesures d’ordre professionnel et de moyens auxiliaires, aux motifs que l’assuré était déjà invalide, respectivement que la prothèse de jambe dont il demandait la prise en charge était déjà objectivement nécessaire avant son entrée en Suisse.

D. a. Le 7 novembre 2005, l'OAI a une nouvelle fois nié à l’assuré le droit à une prothèse, au motif qu’il ne remplissait pas les conditions d'assurance au moment où il en avait eu besoin objectivement, en octobre 1991.

b. Par courrier du 20 janvier 2006, il a informé l'OAI qu'il avait obtenu, le 28 décembre 2005, la naturalisation suisse.

c. Dès lors, par décision du 4 mai 2006, l'OAI a partiellement admis l'opposition formée par l’assuré contre sa décision du 7 novembre 2005, en ce sens qu’il a reconnu à l’assuré le droit à une prothèse. En effet, à compter du 28 décembre 2005, date de l'acquisition de la nationalité suisse, il pouvait prétendre des moyens auxiliaires.

d. Depuis lors, l’OAI, après préavis de la Fédération suisse de consultation en moyens auxiliaires (FSCMA), a accepté de prendre en charge, concernant l’assuré :

- en avril 2007, une prothèse fémorale (avec genou modulaire polycentrique avec hydraulique ; CHF 10'468.40) ;

- en août 2009, une emboîture fémorale (CHF 3'592.75) ;

- en février 2011, une réadaptation de la prothèse (CHF 1'641.60) ;

- en octobre 2011, un renouvellement de la prothèse (avec genou modulaire polycentrique, avec pneumatique ; CHF 11'790.40) ;

- en février 2014, le renouvellement de l’emboîture fémorale (CHF 6'566.40) ;

- en novembre 2014, le renouvellement de la prothèse de cuisse (CHF 17'124.96) ;

- en juillet 2016, une emboîture de prothèse (CHF 7'182.00) ;

- en janvier 2018, une prothèse d’extrémité inférieure (CHF 2'115.80 + CHF 813.30 + CHF 2'470.45) ;

- en avril 2020, une prothèse fémorale mécanique (CHF 19'983.15) ;

- en octobre 2021, le renouvellement de l’emboîture de la prothèse (CHF 8'005.55) ;

- en août 2022, le changement de l’emboîture de la prothèse (CHF 10'665.80).

En revanche, par deux fois, en 2014 et 2020, l’OAI a refusé de prendre en charge une prothèse de genou C-Leg.

E. a. Le 19 septembre 2022, l’assuré a demandé à l’OAI le renouvellement de sa prothèse en produisant une ordonnance établie le 29 août 2022 par son médecin, le docteur C______, généraliste, pour une « prothèse de cuisse électronique pour amputation droite sous le genou ».

b. La FSCMA a établi un rapport de consultation en date du 6 décembre 2022.

Il en ressortait que, rencontré le 10 novembre 2022, l’assuré était revenu sur le refus de prise en charge d’un genou électronique en 2018 (recte 2020), source, selon lui, des difficultés morales et physiques dont il souffrait. Suite à une chute survenue le 23 septembre 2022, qui avait entraîné une brisure du mur postérieur au niveau C5 (cf. rapport du docteur D______ du 23 septembre 2022), l’assuré avait pris la décision de commander et faire installer, sur sa prothèse, un genou électronique de type C-Leg 4. Depuis le 10 octobre 2022, il marchait avec.

Le représentant de la FSCMA avait pu constater une très nette amélioration de la marche, sans canne et harmonieuse. La claudication était peu perceptible, avec un sentiment de sécurité retrouvé. L’assuré portait sa prothèse plus de dix heures par jour, sortait de chez lui quotidiennement pour des promenades, participait aux courses et faisait à nouveau des visites muséales. Les douleurs décrites par l’assuré, y compris les douleurs fantômes, sans disparaître, étaient moins invalidantes et devenaient gérables. Il en allait de même des lombalgies, devenues acceptables.

Se basant sur deux attestations médicales (vraisemblablement celles des Drs C______ et D______), la FSCMA a considéré que les possibilités suivantes s’offraient à l’OAI :

-  accepter, pour limiter les chutes et une nouvelle fracture, l’installation d’un genou électronique avec un liner supplémentaire et une esthétique de type Cover pour un montant total de CHF 24'205.05 ;

-  confirmer la décision de refus du 1er avril 2020 concernant le genou électronique.

c. Faisant suite à une demande de précisions de l’OAI, le Dr C______ a notamment expliqué, par courrier du 22 mars 2023, qu’avec la prothèse mécanique, l’assuré avait chuté à plusieurs reprises, ce qui avait entraîné des fractures et des hospitalisations. Avec sa prothèse de genou mécanique, l’assuré ne se sentait pas à l’aise et était affecté psychologiquement. Cette prothèse demandait également plus d’efforts pour marcher ; cela épuisait l’assuré, qui ressentait plus fréquemment des douleurs fantômes, et entraînait des lombalgies. Le médecin préconisait dès lors une prothèse avec genou électronique.

d. Par décision du 16 mai 2023, l’OAI a refusé la prise en charge d’une nouvelle prothèse avec genou électronique C-Leg 4.

L’OAI a considéré qu’une telle prothèse ne remplissait pas les conditions d’économicité, de simplicité et d’adéquation au regard des activités de l’assuré. Il a rappelé que, selon la jurisprudence, un genou électronique devait être nécessaire pour que l’assuré puisse exercer son activité professionnelle dans des conditions satisfaisantes. Or, l’assuré n’exerçait pas d’activité professionnelle.

Par ailleurs, l’OAI avait déjà pris en charge une prothèse fémorale mécanique avec un genou prothétique en date du 1er avril 2020, puis le renouvellement de l’emboîture de la prothèse en date du 19 août 2022.

F. a. Le 14 septembre 2023, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant, sous suite de frais et dépens, préalablement, à son audition, à celle de ses médecins et à la mise en œuvre d’une expertise judiciaire sur la nécessité d’une prothèse de genou électronique C-Leg 4, principalement, à la prise en charge d’une prothèse avec genou électronique C-Leg 4 pour un montant de CHF 22'795.-, subsidiairement, à la prise en charge d’une prothèse avec genou électronique C-Leg 4, à concurrence du montant de CHF 19'983.15 correspondant au coût d’une nouvelle prothèse de genou mécanique.

Le recourant soutient qu’une prothèse électronique C-Leg 4 constitue un moyen auxiliaire adéquat et nécessaire dans son cas, la prothèse mécanique ayant entraîné de nombreuses chutes lui ayant occasionné des lésions importantes.

Il ajoute que ce type de prothèse, qui existe depuis 1997, s’est démocratisé et correspond à un standard commun de nos jours.

Il argue que la différence de prix entre la prothèse électronique – CHF 22'795.00 – et la prothèse mécanique – CHF 19'983.15 – ne paraît pas excessive.

Selon lui, le refus de l’OAI viole son droit à la vie privée et va à l’encontre de son autonomie personnelle et de son droit de nouer des contacts sociaux.

Enfin, il fait valoir qu’il est injustifié de considérer la condition de l’adéquation comme non remplie, au seul motif qu’il n’exerce pas d’activité lucrative. D’ailleurs, il enseigne la musique, à raison de 15 heures par semaine. Si cette activité n’est pas rémunérée, il ne s’agit pas pour autant d’un simple hobby.

À titre subsidiaire, si le refus de prise en charge de la prothèse de genou devait être confirmé, le recourant demande que lui soit accordé le montant correspondant à un genou prothétique mécanique (soit CHF 19'983.15).

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 10 octobre 2023, a conclu au rejet du recours.

L’OAI soutient que, contrairement à ce qu’il allègue, le recourant n’a jamais été entravé dans ses activités en raison de sa prothèse mécanique. En effet, il a pu suivre, depuis 2018, des cours de saz au sein des ateliers d’ethnomusicologie et y enseigne bénévolement depuis 2022. Il ne saurait donc soutenir que ce n’est que grâce à sa prothèse électronique qu’il a pu renouer des contacts sociaux impossibles auparavant. Il en va de même des activités ménagères, lesquelles étaient déjà effectuées par le recourant, en 2016, selon ses possibilités.

Par ailleurs, l’intimé se réfère à l’avis du docteur E______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie, qui suit le recourant, selon lequel la prothèse hydraulique ou pneumatique est suffisante, le genou électronique apportant uniquement un confort supplémentaire, sans être nécessaire.

Enfin, dans la mesure où le recourant a bénéficié de la prise en charge des coûts d’une prothèse de genou mécanique en date du 1er avril 2020, il ne saurait prétendre, à titre subsidiaire, à une nouvelle prise en charge de ces frais.

c. Le 13 novembre 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

d. Le 23 mai 2024, la Cour de céans a procédé à l’audition du recourant, du Dr E______ et de Monsieur F______, conseiller en réadaptation auprès de la FSCMA.

e. Pour le surplus, invité par la Cour de céans à lui faire parvenir les questions qu’il entendait poser, par écrit, au Dr C______, le recourant y a renoncé par courrier du 29 mai 2024, préférant maintenir sa demande d’audition. Il a également requis l’audition, d’une part, des orthopédistes l’ayant suivi auprès d’G______ et de H______, d’autre part, de son épouse, afin que celle-ci s’exprime sur les changements constatés à la suite de la pose du genou électronique. Enfin, le recourant a maintenu sa demande d’expertise sur la nécessité d’une prothèse de genou électronique.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le droit du recourant à une prothèse C-Leg.

4.              

4.1 L’art. 8 LAI prévoit que les assurés invalides ou menacés d'une invalidité ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d'accomplir leurs travaux habituels (al. 1 let. a) et que les conditions d'octroi des différentes mesures soient remplies (al. 1 let. b). Le droit aux mesures de réadaptation n'est pas lié à l'exercice d'une activité lucrative préalable. Lors de la fixation de ces mesures, il est tenu compte de la durée probable de la vie professionnelle restante (al. 1bis). Les assurés ont droit aux prestations prévues aux art. 13 et 21, quelles que soient les possibilités de réadaptation à la vie professionnelle ou à l'accomplissement de leurs travaux habituels (al. 2). Les mesures de réadaptation comprennent notamment l’octroi de moyens auxiliaires (al. 3 let. d).

4.2 En vertu de l’art. 21 al. 1 première phrase LAI, l’assuré a droit aux moyens auxiliaires dont il a besoin pour exercer une activité lucrative ou accomplir ses travaux habituels, pour maintenir ou améliorer sa capacité de gain, pour étudier, apprendre un métier ou se perfectionner, ou à des fins d’accoutumance fonctionnelle. L’art. 21 al. 2 LAI prévoit que l’assuré qui, par suite de son invalidité, a besoin d’appareils coûteux pour se déplacer, établir des contacts avec son entourage ou développer son autonomie personnelle, a droit, sans égard à sa capacité de gain, à de tels moyens auxiliaires. Selon l’art. 21 al. 3 LAI, l’assurance prend à sa charge les moyens auxiliaires d’un modèle simple et adéquat et les remet en toute propriété ou en prêt ou les rembourse à forfait. L’assuré supporte les frais supplémentaires d’un autre modèle. L’assuré à qui un moyen auxiliaire a été alloué en remplacement d’objets qu’il aurait dû acquérir même s’il n’était pas invalide peut être tenu de participer aux frais.

Selon l’art. 21bis LAI, lorsqu'un assuré a droit à la remise d'un moyen auxiliaire figurant dans la liste dressée par le Conseil fédéral, il peut choisir un autre moyen remplissant les mêmes fonctions (al. 1). L'assurance prend à sa charge les coûts du moyen auxiliaire choisi jusqu'à concurrence du montant qu'elle aurait versé pour le moyen figurant dans la liste (al. 2). En cas d'acquisition de moyens auxiliaires par une procédure d'adjudication, le Conseil fédéral peut limiter le droit à la substitution de la prestation aux moyens fournis par les soumissionnaires (al. 3).

4.3 Par moyen auxiliaire il faut entendre un objet ayant pour but de pallier la perte d'un membre ou d'une fonction du corps humain (ATF 131 V 9 consid. 3.3). Ledit objet doit être utilisable sans modification structurelle. Il doit également être réutilisable. Ainsi, un objet qui ne peut exécuter sa fonction de substitution et être remplacé que s'il est introduit dans le corps au moyen d'une intervention chirurgicale ne constitue pas un moyen auxiliaire (ATF 115 V 191112 V 11101 V 267).

4.4 Dans le domaine des moyens auxiliaires visant la réadaptation (art. 21 ss LAI), le Tribunal fédéral a jugé que la personne assurée exerce une activité lucrative lorsque, sans tenir compte des éventuelles rentes, elle réalise un revenu annuel équivalent ou supérieur au montant correspondant à la cotisation minimale pour les personnes sans activité lucrative au sens de l'art. 10 al. 1 LAVS (ATF 130 V 360 consid. 3.2.1 ; arrêts 9C_573/2016 du 20 février 2017 consid. 4.1; 9C_767/2009 du 10 février 2010 consid. 4 et les références, in SVR 2010 IV n° 60 p. 182 ; cf. ch. marg. 1019 de CMAI [Circulaire de l'Office fédéral des assurances sociales concernant la remise des moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité]), soit un revenu annuel minimum de CHF 4'747.- en 2022 (ch. 6.1 de l'annexe 1 CMAI, dans sa version en vigueur au 1er janvier 2022).

5.             À l'art. 14 du règlement du 17 janvier 1961 sur l'assurance-invalidité (RAI - RS 831.201), le Conseil fédéral a délégué au Département fédéral de l’intérieur la compétence de dresser la liste des moyens auxiliaires et d’édicter des prescriptions complémentaires au sens de l’art. 21 al. 4 LAI. Ce département a édicté l’ordonnance du 29 novembre 1976 concernant la remise des moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité (OMAI - RS 831.232.51) avec en annexe la liste des moyens auxiliaires.

L’art. 2 OMAI prévoit qu’ont droit aux moyens auxiliaires, dans les limites fixées, par la liste en annexe, les assurés qui en ont besoin pour se déplacer, établir des contacts avec leur entourage ou développer leur autonomie personnelle (al. 1). L'assuré n'a droit aux moyens auxiliaires désignés dans cette liste par un astérisque (*), que s'il en a besoin pour exercer une activité lucrative ou accomplir ses travaux habituels, pour étudier ou apprendre un métier ou à des fins d'accoutumance fonctionnelle ou encore pour exercer l'activité nommément désignée au chiffre correspondant de l'annexe (al. 2). Le droit s'étend aux accessoires et aux adaptations rendus nécessaires par l'invalidité (al. 3). L'assuré n'a droit qu'à des moyens auxiliaires d'un modèle simple, adéquat et économique. Il supporte les frais supplémentaires d'un autre modèle. Lorsque la liste en annexe ne mentionne aucun des instruments prévus à l'art. 21quater LAI pour la remise d'un moyen auxiliaire, les frais effectifs sont remboursés (al. 4). Lorsqu'un assuré a droit à la remise d'un moyen auxiliaire figurant dans la liste en annexe mais qu'il se contente d'un autre moyen moins onéreux remplissant les mêmes fonctions, ce dernier doit lui être remis même s'il ne figure pas dans la liste (al. 5). À noter que ce dernier alinéa a été abrogé avec effet au 1er janvier 2024.

Quant à l’art. 8 al. 1 OMAI, il stipule que si l’assuré fait lui-même l’acquisition d’un moyen auxiliaire prévu dans la liste annexée ou s’il réalise, à ses frais, une adaptation rendue nécessaire par l’invalidité, il a droit au remboursement des dépenses qui auraient incombé à l’assurance si elle avait pourvu à l’acquisition ou à l’adaptation en question.

La liste annexée à l’OMAI prévoit au chiffre 1.01 le remboursement selon convention tarifaire avec l'Association suisse des techniciens en orthopédie (ASTO) des prothèses fonctionnelles définitives pour les pieds et les jambes.

6.              

6.1  

6.1.1 L’octroi de moyens auxiliaires est subordonné à la réalisation des conditions du droit à de tels moyens selon l’art. 8 LAI (adéquation, nécessité, efficacité de la réadaptation ; ATF 133 V 257 consid. 3.2). Comme pour tout moyen auxiliaire, la prise en charge de frais de renouvellement d'une prothèse doit répondre aux critères de simplicité et d'adéquation (cf. notamment arrêt du Tribunal fédéral 9C_279/2015 du 10 novembre 2015 consid. 4.2).

Les critères de simplicité et d’adéquation sont cumulatifs (Der Begriff des Hilfsmittels in der Unfallversicherung, Friedrich BELLWALD, SZS 2005 p. 311ss). Ces critères sont l’expression du principe de la proportionnalité et supposent que les transformations requises soient propres à atteindre le but fixé par la loi et apparaissent nécessaires et suffisantes à cette fin (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 502/05 du 9 juin 2006 consid. 3.1.1). Ils impliquent en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre le coût et l'utilité du moyen auxiliaire, compte tenu de l'ensemble des circonstances de fait et de droit du cas particulier (proportionnalité au sens étroit) (ATF 131 V 167 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_600/2011 du 20 avril 2012 consid. 3.4). S’agissant en particulier du critère de l’adéquation, il suppose que le moyen auxiliaire soit destiné et propre à aider l’assuré à atteindre un des buts poursuivis par la loi. L’exigence de la simplicité implique que la réadaptation ne doit être assurée que dans la mesure utile et suffisante dans le cas d’espèce. La personne assurée n’a ainsi droit qu’aux mesures nécessaires et adaptées au but de réadaptation (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 195/04 du 21 septembre 2004 consid. 3). L’assuré a droit à la remise du moyen auxiliaire nécessaire et adapté, mais non au meilleur moyen existant (ATF 122 V 212 consid. 2c ; ATF 110 V 99 consid. 2). La remise de moyens auxiliaires luxueux est exclue (Alfred MAURER, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, Berne, 1985, p. 317).

Dans l’appréciation du caractère adéquat, on distingue quatre aspects : l’adéquation matérielle, temporelle, financière et personnelle. Conformément à ces critères, une certaine efficacité de la mesure sur la réadaptation doit pouvoir être pronostiquée, la réadaptation visée devant en outre être d’une certaine durée. De plus, un rapport raisonnable doit exister entre les coûts de la mesure de réadaptation et le succès escompté. Enfin, la mesure concrète doit être exigible de l’intéressé (ATF 130 V 488 consid. 4.3.2).

L'examen des conditions de simplicité et d'adéquation doit prendre en compte l'évolution technologique. Ainsi, ce qui apparaissait il y a une dizaine d'années comme un simple élément de confort peut aujourd'hui faire partie d'un standard commun, à l'instar d'une prothèse de la cuisse équipée d'un genou articulé contrôlé par microprocesseur, de type C-Leg (arrêt du Tribunal fédéral 9C_744/2010 du 6 janvier 2011 consid. 3). Il convient encore de préciser que la seule commercialisation d'un moyen auxiliaire plus performant ne peut faire apparaître l'ancien comme inadéquat aussi longtemps que celui-ci répond aux besoins de l'assuré, en particulier en l'espèce au regard de l'intégration professionnelle (arrêt du Tribunal fédéral 9C_457/2016 du 13 février 2017 consid. 4.2.2). En l’absence de données empiriques sur l’efficacité avérée d’un pied prothétique d’un montant deux fois supérieur au modèle remboursé, le Tribunal fédéral a souligné que la simple avancée technologique que représentait ce pied ne justifiait pas sa prise en charge, sous peine de permettre le remboursement indifférencié de chaque nouveauté technique, scientifique ou technologique introduite sur le marché (arrêt du Tribunal fédéral 9C_600/2011 du 20 avril 2012 consid. 4.3).

6.1.2 La tâche de l’office AI consiste à contrôler si les moyens auxiliaires répondent aux critères de simplicité et d’efficacité. La FSCMA est un organisme qui a pour mission d'apporter son soutien aux offices AI dans le domaine de l'appréciation technique des moyens auxiliaires et dans celui touchant au marché de ces moyens (ch. 3009 ss CMAI) et dont la neutralité des avis est reconnue par la jurisprudence (voir arrêt de l'ancien Tribunal fédéral des assurances I 105/05 du 29 juin 2005 c. 3).

6.2  

6.2.1 Le système C-Leg est une articulation hydraulique du genou contrôlée par un microprocesseur. Il permet une régulation électronique de la phase d'appui et de la phase pendulaire et s'adapte à la longueur de pas du patient. Un système de capteurs permet de récolter des données à tout moment du cycle de marche et de contrôler l'amortissement hydraulique. La personne portant la prothèse peut se mouvoir avec sécurité en variant la vitesse de marche, en terrain irrégulier et en montant ou descendant des escaliers. L'amortissement hydraulique garantit la sécurité en phase d'appui, puis est désactivé lors de la charge sur l'avant-pied, de manière à favoriser la phase pendulaire sans dépense excessive d'énergie (ATF 141 V 30 consid. 3.2.2.et ATF 132 V 215 consid. 2.1).

Le contrôle de la phase pendulaire est effectué au moyen de mesures en temps réel, également pour des vitesses de marche variables, le système électronique étant géré par un programme informatique assurant la coordination des données mesurées et des valeurs individuelles programmées. Chaque vingt millième de seconde, l'angle de flexion du genou est enregistré et l'information transmise au microprocesseur pour être traitée. L'alimentation en énergie est assurée par un accumulateur lithium-ion intégré, d'une autonomie de 25 à 30 heures (ATF 132 V 215 cons. 2.1).

L'indication médicale pour la pose d'une prothèse C-Leg se limite en principe aux personnes amputées d'une jambe au niveau de la cuisse et disposant d'une mobilité illimitée en extérieur. D'un point de vue épidémiologique, entre 30 et 50 patients par an seraient concernés en Suisse (ATF 141 V 30 consid. 3.2.2 et ATF 132 V 215 consid. 2.2).

6.2.2 En matière de prothèses transfémorales, on peut rappeler la casuistique suivante en lien avec la prothèse C-Leg.

Le Tribunal fédéral a reconnu que l’octroi par l’assurance-invalidité de la prothèse C-Leg restait proportionné, en dépit de son coût environ quatre fois plus élevé que celui d’une prothèse mécanique, car les moyens prothétiques usuels ne permettaient plus à un assuré, ingénieur appelé à visiter de nombreux sites parfois en phase de construction, d’exercer sa profession en sécurité, au vu des importants risques de chute (ATF 132 V 215 du 10 avril 2006).

En matière d’assurance-accidents, dans un cas concernant un assuré incapable de reprendre une activité professionnelle pour des raisons de santé, il a également été admis que les critères d'adéquation et de simplicité pour la remise d'une prothèse C-Leg étaient réunis, dès lors qu’une prothèse mécanique était contre-indiquée. Dans ce cas précis, la remise d'un genou C-Leg apparaissait comme le moyen le plus simple pour compenser le dommage subi par un assuré, dont l’évaluation médicale avait conclu à l’indication d’une telle prothèse, qui visait avant tout à diminuer le risque de lésions traumatiques sur chute et d'éviter une détérioration de l'état général, en raison d'une sédentarité excessive (ATF 141 V 30 du 20 janvier 2015).

Dans un arrêt relativement ancien, le Tribunal fédéral a retenu qu’un assuré, devant fréquemment rendre visite à sa clientèle essentiellement constituée d'agriculteurs avec de nombreux déplacements en partie en terrain accidenté, et dont la prothèse actuelle ne permettait pas d'éviter de nombreuses chutes, avait besoin d'une prothèse C-Leg pour exercer son activité professionnelle en sécurité. Il a souligné le fait que l'assuré ait pu pratiquer son activité professionnelle pendant quelques années ne permettait pas de nier le caractère nécessaire et approprié du moyen auxiliaire demandé pour l'exercice de sa profession dans des conditions satisfaisantes (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 502/05 du 9 juin 2006 consid. 3.2).

Notre Haute Cour a en outre admis la prise en charge d’une prothèse Genium dans le cas d’un informaticien souffrant également d’un handicap visuel. Elle a relevé que cette prothèse représentait un développement technique du modèle C-Leg. La prothèse Genium était la seule qui lui permettait de gravir des marches en portant des charges sans danger, et son métier lui imposait de transporter du matériel informatique. Les médecins avaient attesté du fait qu’il ne pourrait poursuivre son activité qu’équipé d’une prothèse Genium. Dans ces conditions, le surcoût de CHF 14'000.- lié à la prothèse Genium par rapport au modèle C-Leg restait adéquat (ATF 143 V 190 ; arrêt rendu le 20 juin 2017).

7.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

8.             En premier lieu, le recourant conclut à la prise en charge intégrale de la prothèse de genou de type C-Leg 4.

8.1 À titre liminaire, on rappellera que, depuis 2006 et l’ATF 132 V 215, la prise en charge d’une prothèse C-Leg reste limitée, en assurance-invalidité, aux cas dans lesquels il existe un besoin de réadaptation particulièrement élevé, par exemple en cas d’exigences professionnelles spéciales.

D’ailleurs, la quasi-totalité des cas soumis aux tribunaux concerne des assurés actifs professionnellement.

Parmi les rares exceptions, on peut citer le cas d’une assurée, encore élève, à laquelle le Tribunal cantonal de Bâle-Campagne a accordé une prothèse de genou de type C-Leg, considérant que, dans le cas particulier, s’il n’était pas encore possible d'affirmer que le port de ce type de prothèse serait nécessaire pour des raisons professionnelles et/ou qu'il entraînerait une amélioration de la capacité de gain, il devait être retenu que, selon son choix professionnel, l'assurée pouvait être tributaire de la mobilité et donc du C-Leg. Le Tribunal cantonal a considéré que l'utilisation de la prothèse de genou C-Leg pouvait élargir non seulement la progression, mais également l'horizon professionnel futur de l'assurée (arrêt du Tribunal cantonal de Bâle-Campagne 2006/1 du 6 janvier 2006 consid. 4.4).

On peut également mentionner le cas d’une assurée née en 1965, ayant été amputée au niveau de la hanche. L’assurance-maladie avait pris en charge une prothèse C-Leg et la question qui était soumise à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois était celle de la prise en charge, par l’OAI, du renouvellement de ladite prothèse, une dizaine d’années après son octroi. Le Tribunal vaudois a d’emblée relevé que le cas qui lui était soumis différait des précédents jurisprudentiels invoqués, en ce sens que l’assurée avait été amputée au niveau de la hanche, de sorte que deux articulations étaient touchées, et qu’elle bénéficiait déjà d’une prothèse de genou de type C-Leg. Les chutes avec la prothèse mécanique étaient certes relativement fréquentes dans son cas, mais elles étaient principalement dues à la difficulté de gérer, à la fois, deux articulations occasionnant des douleurs lombaires, de la hanche et du genou gauche (arrêt du Tribunal cantonal vaudois, Cour des assurances sociales, AI 253/13 – 175/2015 du 29 juin 2015).

8.2 En l’espèce, le cas du recourant – âgé de 50 ans au jour de la décision querellée, sans activité lucrative, ayant subi une amputation fémorale – diffère sensiblement de ces deux précédents jurisprudentiels, de sorte qu’on ne peut s’y référer et qu’il convient d’examiner sa situation en détail.

À l’appui de sa demande, le recourant allègue en substance qu’une prothèse mécanique n’est pas (ou plus) adaptée, en raison des chutes qu’elle occasionne et qu’elle doit donc être remplacée par une prothèse électronique, laquelle constitue désormais le standard en la matière pour atteindre les buts de réadaptation prévus par la loi.

Cette argumentation ne peut être suivie.

En premier lieu, tant le Dr E______ que M. F______, conseiller en réadaptation auprès de la FSCMA, entendus lors de l’audience du 23 mai 2024 à la demande du recourant, ont expliqué qu'une prothèse mécanique n’induit pas en elle-même un risque plus élevé de chute. Le lien entre la prothèse mécanique et d’éventuelles chutes doit donc être examiné pour chaque situation. Or, dans le cas du recourant, M. F______ a expliqué que les chutes n’étaient pas dues à la prothèse mécanique en tant que telle, mais à la mauvaise volonté du recourant, persuadé qu'en Suisse, tout le monde a droit à une prothèse électronique. Le témoin a souligné que, dès lors, la situation n’était plus rationnelle et que « quatre ou cinq genoux auraient pu lui être fournis sans que cela ne soit suffisant », le recourant ne pouvant se satisfaire d'une prothèse mécanique. Il était tellement dans le refus qu'il ne mettait pas correctement sa prothèse mécanique et marchait de manière incohérente. Ce n’était donc en réalité pas la prothèse mécanique qui n'était pas adaptée, mais la manière dont se tenait le recourant lorsqu'il la portait qui posait problème : sa position montrait une insécurité totale et ne pouvait fonctionner (procès-verbal d’audience du 23 mai 2024, p. 2).

C’est le lieu de rappeler que M. F______ est conseiller en réadaptation auprès de la FSCMA et que c’est lui qui a établi les rapports des 12 août et 6 décembre 2022, notamment, dont la neutralité est reconnue par la jurisprudence (voir arrêt I 105/05 du 29 juin 2005 consid. 3).

La Cour de céans relève encore que les déclarations du témoin rejoignent les propos tenus par l’assuré dans un courrier adressé à l’OAI le 21 janvier 2020, dans lequel il expliquait notamment avoir discuté avec des personnes portant des prothèses électroniques, qui lui avaient dit que leur qualité de vie était bien meilleure. L’assuré exprimait alors sa frustration en ces termes : « Le gestionnaire de [son] dossier avait répondu à [sa] femme qu’une prothèse électronique n’était pas nécessaire, il a dit qu’on peut vivre sans. Avec un peu de bon sens, on sait aussi qu’on peut vivre sans prothèse, des millions de personnes vivent avec des prothèses obsolètes ou bien sans prothèses mais dans le tiers monde. Ils n’ont aucune qualité de vie et ce n’est pas humain. Cependant, [il ne vivait] pas dans un de ces pays, [il était] en Suisse, l’un des pays les plus développé[s] au monde. Quand on pense que tout est électronique dans notre monde, quoi de plus normal que les amputés puissent porter une prothèse électronique ? ».

Les propos du témoin sont également corroborés par la FSCMA, qui évoquait, dans son rapport du 12 août 2022, les rapports conflictuels entre le recourant et la maison H______, le premier adoptant un comportement parfois incohérent et des demandes souvent irréalistes, impossibles à contenter.

Eu égard à ce qui précède, la Cour constate que rien ne permet de retenir que la prothèse mécanique serait inadaptée, même s’il est établi que la prothèse C-Leg a apporté des améliorations dans le quotidien du recourant.

Par ailleurs, cette dernière ne peut pas encore être considérée comme un standard en la matière, comme cela ressort des auditions du 23 mai 2024.

Ainsi, le Dr E______ a indiqué qu’une prothèse électronique n’est pas nécessaire en termes de sécurité.

De son côté, M. F______ a expliqué que les genoux mécaniques ne sont pas désuets, qu’ils sont toujours dans le commerce et garantis, qu’ils peuvent également être utilisés sur terrains inégaux et qu’ils sont régulièrement améliorés (certains en sont à la version 6,7, voire 10). Les prothèses mécaniques sont utilisées depuis des décennies et certaines personnes font même de la course avec. Cela étant, le conseiller en réadaptation a reconnu qu’avec la prothèse électronique, « on entre dans une autre dimension », une autre technologie, qui n’est pas comparable, tout en soulignant qu’en raison de son obsolescence programmée après six ans, la prothèse électronique doit être retirée du marché et remplacée.

Si la question du standard d’une prothèse C-Leg peut se poser en lien avec certaines professions, tel n’est pas le cas lorsque l’assuré est une personne sans activité lucrative.

On ne saurait pas non plus suivre le recourant lorsque celui-ci argue que la prothèse électronique poursuit plusieurs des buts prévus par la loi et évoque une pratique discriminatoire entre les assurés qui exercent une activité lucrative et ceux qui n’en sont pas capables.

En effet, le recourant habite dans un appartement au troisième étage d’un immeuble avec ascenseur. S’il marchait peu avant d’être doté d’une prothèse C-Leg, il n’en sortait pas moins régulièrement (cf. rapport de la FSCMA du 22 décembre 2017), au moins une heure par jour (cf. rapport de la FSCMA du 12 août 2022). Il participait aux tâches ménagères dans la mesure de ses possibilités. Certes, avant la prothèse électronique, il aurait aimé être plus actif et réaliser plus d’activités avec ses fils adolescents (cf. rapport de la FSCMA du 28 février 2019). Cela ne l’a toutefois pas empêché de suivre, à compter de 2018, des cours de saz dans les ateliers d’ethnomusicologie (cf. attestation du Dr C______ du 20 juin 2023).

Force est ainsi de constater que le recourant sortait déjà de chez lui en étant appareillé d’une prothèse mécanique et qu’il pouvait déjà nouer des contacts sociaux à cette époque. En réalité, ce qui a changé avec la prothèse électronique est la pratique de loisirs, tels que la marche ou la visite de musées. Toutefois, les loisirs ne font pas partie des buts de réadaptation poursuivis par la loi (cf. ATAS/405/2016 du 23 mai 2016 consid. 9).

Enfin et en tout état de cause, la condition relative à l’adéquation financière fait également défaut. En effet, le montant de CHF 19'983.15 ressortant de la communication du 1er avril 2020, que le recourant attribue au genou mécanique, concerne en réalité la prothèse fémorale mécanique dans son ensemble, prothèse de jambe et de genou. Certes, la facture détaillée ne figure pas au dossier. Toutefois, la facture soumise à l’OAI le 28 novembre 2018, de CHF 34'228.52, incluait un genou électronique C-Leg 4, d’un montant de CHF 18'771.73. Selon la facture du 4 juin 2014, un genou mécanique Mauch Knee coûtait CHF 4'601.10. En combinant ces deux factures, c'est-à-dire en remplaçant le montant du C-Leg 4 (CHF 18'771.73) par celui d’un genou mécanique (CHF 4'601.10), on arrive à montant total de CHF 20'057.89. Il s’agit là d’un calcul approximatif. Cela étant, il montre que le prix d’un genou électronique est près de quatre fois supérieur à celui d’un genou mécanique (près de CHF 5'000.- pour le genou mécanique ; près de CHF 19'000.- pour le genou électronique).

Eu égard au fait que le genou électronique doit être renouvelé tous les six ans en raison de l’obsolescence programmée (cf. procès-verbal de l’audition de M. HOULAMNN du 23 mai 2024) et que l’amélioration en question porte sur les loisirs du recourant, il n'existe pas de rapport raisonnable entre le coût et l'utilité de ce moyen.

9.             Subsidiairement, le recourant demande que l’OAI prenne en charge l’équivalent de ce qu’aurait coûté un genou mécanique.

Cela suppose toutefois que le renouvellement de la prothèse mécanique soit nécessaire, ce qui pose la question de la justification d’un tel remplacement moins de trois ans après le précédent renouvellement.

Selon le dossier, le recourant a bénéficié du remplacement de son genou mécanique tous les trois à cinq ans :

-          Ainsi, par décision du 4 avril 2007, sur la base d’un rapport de la FSCMA du 22 mars 2007, l’office intimé a octroyé au recourant une première prothèse fémorale, avec genou modulaire polycentrique avec hydraulique.

-          Près de quatre ans et demi plus tard, par décision du 25 octobre 2011, l’OAI a accepté de prendre en charge les frais de remplacement de la prothèse mécanique, cette dernière ayant été adaptée plusieurs fois. S’y ajoutait le fait que le recourant avait pris du poids, ce qui avait modifié la morphologie du moignon et justifiait une nouvelle prise de moulage. Enfin, le changement de fournisseur était un motif supplémentaire. La prothèse de genou a, à cette occasion, également été remplacée par un genou polycentrique, avec pneumatique (cf. rapport de la FSCMA du 20 octobre 2011).

-          Par décision du 12 novembre 2014, soit trois ans plus tard, le recourant a bénéficié du remplacement de sa deuxième prothèse, l’emboîture n’étant plus adaptée et la prothèse étant très usée. La prothèse de genou a également été remplacée par un Mauch Knee, une prothèse hydraulique (cf. rapport de la FSCMA du 5 novembre 2014).

-          Près de cinq ans et demi plus tard, au printemps 2020, le recourant a bénéficié du remplacement de sa troisième prothèse, celle-ci ayant été abîmée lors d’une chute. La prothèse de genou a alors également été changée (cf. rapport de la FSCMA du 28 février 2019 et décision de l’OAI du 1er avril 2020).

-          Le 19 septembre 2022, le recourant a sollicité la prise en charge du genou électronique qu’il a fait installer sur sa prothèse (cf. date de la facture d’G______, pièce 27 rec.).

Par ailleurs, l’examen des dates des différentes pièces au dossier montre, s’agissant du dernier renouvellement, que :

-          Par communication du 19 août 2022 (n° de référence 2______), l’OAI a accepté de prendre en charge les coûts d’une nouvelle emboiture de la prothèse de la jambe droite pour un montant total de CHF 10'665.80.

-          Le 29 août 2022, le Dr C______ a établi un bon pour « une prothèse de cuisse électronique ».

-          Le 19 septembre 2022 :

o  le recourant a signé sa demande de renouvellement de moyens auxiliaires, reçue par l’OAI le 22 septembre 2022.

o  G______ a établi une facture à l’attention du recourant (avec le n° de référence 2______, correspondant à la communication de l’OAI du 19 août 2022), pour un montant total de CHF 22'795.- pour un genou C-Leg 4 avec composants d’adaptation sur la prothèse actuelle. Selon cette facture, la moitié de la somme due devait être payée à la commande et le solde à la livraison, étant précisé que le montant de CHF 22'795.- a été intégralement payé.

Vu les conditions de paiement indiquées au bas de la facture et le paiement intégral du prix, il peut être présumé que le genou électronique a été remis au recourant en date du 19 septembre 2022.

o  I______, succursale de J______ a établi une offre n° 1______, destinée à l’OAI (avec le n° de référence 2______ correspondant à la communication du 19 août 2022), d’un montant total de CHF 36'015.80, portant sur une nouvelle prothèse tibiale et genou prothétique électronique.

-          Le 23 septembre 2022, le recourant a chuté ce qui a entraîné une brisure du mur postérieur au niveau C5. Vu la remise présumée du genou électronique, quatre jours auparavant, on peut se demander si cette chute ne s’est pas produite avec la prothèse électronique.

Il ressort de ce qui précède qu’un genou électronique C-Leg 4 a été commandé par le recourant et installé sur sa prothèse déjà existante près de deux ans et demi après le précédent renouvellement de la prothèse mécanique, pris en charge par l’OAI. Le genou électronique a été commandé et intégralement payé avant la chute. Il en découle que le recourant n’a pas renouvelé sa prothèse du genou en raison de défauts ou d’une énième chute, comme il le soutient, mais pour des questions de choix personnel.

Ainsi, le renouvellement de la prothèse mécanique ne remplit pas la condition de la nécessité, de sorte que la décision de refus de l’OAI doit être confirmée dans son ensemble.

10.         Par courrier du 29 mai 2024, le recourant a sollicité l’audition de son médecin généraliste, le Dr C______, ainsi que celle de son épouse.

La garantie constitutionnelle du droit d'être entendu confère notamment à un justiciable le droit de faire administrer des preuves essentielles (ATF 127 V 431 consid. 3a). Ce droit n'empêche cependant pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction, et que procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier sa décision (ATF 130 II 425 consid. 2.1, ATF 124 V 90 consid. 4b, ATF 122 V 157 consid. 1d).

En l’espèce, la Cour de céans a procédé à l’audition de deux des témoins sollicités par le recourant. Le Dr C______, bien que convoqué, était absent lors de l’audience du 23 mai 2024. Aussi, la Cour de céans a-t-elle proposé au recourant de le questionner, par écrit, ce qui a été refusé. Le fait que les déclarations de deux des trois témoins dont l’audition était sollicitée par le recourant ne correspondent pas aux attentes de celui-ci ne saurait justifier d’autres auditions, comme celles des employés d’G______ et H______, ce d’autant moins que les deux témoins, entendus à la demande du recourant, vont dans le même sens.

Il n’est d’ailleurs pas contesté que le genou électronique a apporté plus de confort au recourant et que celui-ci, rassuré, a entrepris plus d’activités. Dans cette mesure, l’audition de l’épouse du recourant et la réalisation d’une expertise ne sont pas nécessaires.

Pour toutes ces raisons, la Cour de céans renoncera, par appréciation anticipée des preuves, à effectuer d’autres actes d’instruction.

11.         Eu égard à ce qui précède, le recours est rejeté.

La procédure en matière d'assurance-invalidité n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), le recourant supportera un émolument de CHF 200.-.

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le