Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/997/2024 du 12.12.2024 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/2023/2024 ATAS/997/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 12 décembre 2024 Chambre 5 |
En la cause
A______ représentée par l'APAS-Association pour la permanence de défense des patients et des assurés, mandataire
| recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en 1976, est au bénéfice d’un certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) d’employée de commerce et d’un certificat d’assistante en gestion du personnel. Elle a travaillé en qualité d’assistante de gestion, dès octobre 2011 à 100% pour une banque.
b. L’assurée a présenté une incapacité de travail totale dès le 22 juillet 2019.
c. Le 18 décembre 2019, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI), invoquant un burn out.
d. L’assurée a été licenciée pour le 31 mars 2020.
e. Dans le cadre de l’instruction du dossier, l’OAI s’est notamment procuré les rapports du docteur B______, spécialiste FMH en psychiatrie et médecin traitant de l’assurée, qui a diagnostiqué un trouble dépressif, épisode actuel sévère (F32.2) dans son rapport du 12 février 2020. Le Dr B______ a mentionné dans son rapport du 24 avril 2020 des troubles de la concentration, une irritabilité, une thymie triste, et des troubles du sommeil importants, avec de nombreuses ruminations. Selon le médecin, la survenue des troubles psychiatriques découlait d’un changement au sein de la structure de travail de l’employeur de l’assurée, laquelle était très angoissée dès que l’on abordait les questions de travail. Le Dr B______ a conclu à une capacité de travail nulle.
f. L’assurance d’indemnités journalières en cas de maladie de l’employeur a chargé le docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie, de procéder à l’expertise de l’assurée. Dans son rapport du 19 juin 2020, ce médecin a confirmé le diagnostic d’épisode dépressif récurrent sévère, sans symptômes psychotiques, actuellement en rémission partielle, dont il résultait une symptomatologie dépressive actuellement moyenne, avec syndrome somatique (F 33.11). Il a conclu à une capacité de travail nulle jusqu’au 31 août 2020 et de 100% sans diminution de rendement dès le 1er septembre 2020.
g. L’OAI a mandaté le docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie, pour une expertise de l’assurée. Celui-ci a rendu son rapport le 16 juillet 2021. Il a conclu à un diagnostic de trouble dépressif récurrent, de gravité légère (F 32.0), avec peut-être, sur le plan des traits de personnalité, des traits anxieux et obsessionnels (Z 73.1) marqués surtout par une certaine rigidité. Selon l’expert, les diagnostics n’avaient pas de répercussion sur la capacité de travail. Celle-ci était entière et sans baisse de rendement au plus tard le 1er septembre 2020, et l’activité habituelle était adaptée.
h. Par décision du 4 janvier 2022, rendue après des déterminations de l’assurée comportant plusieurs critiques sur l’expertise du Dr D______, l’OAI a octroyé à celle-ci une rente entière d’invalidité du 1er juillet 2020 au 31 août 2020.
i. Dans un rapport du 7 mars 2022, le Dr B______ a considéré la capacité de travail de l’assurée nulle dans l’activité d’assistante en gestion bancaire. La capacité de travail était de 50% depuis octobre 2021, l’assurée avait pu travailler à mi-temps dans un autre poste. Le milieu devait être protecteur, soutenant et valorisant. Il n’y avait pas de baisse de rendement.
j. Saisie d’un recours contre la décision de l’OAI du 4 janvier 2022, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) a, par ordonnance du 10 mars 2023 (ATAS/155/2023), confié une expertise au professeur E______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, après avoir invité les parties à faire valoir d’éventuels motifs de récusation à son encontre et à se déterminer sur la mission d’expertise. Elle a, en substance, retenu que les nombreuses critiques de l’assurée sur l’expertise du Dr D______ et l’avis divergent du Dr B______ sur l’exagération des symptômes retenue par cet expert ainsi que sur le caractère adapté de l’ancienne activité suscitaient des doutes quant à la valeur probante de cette expertise.
k. Dans un rapport établi en juillet 2022, la docteure F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a confirmé une capacité de travail de l’assurée de 50%, depuis le 1er octobre 2021, dans une activité professionnelle adaptée, à savoir hors du milieu bancaire. L’activité devait se faire dans le respect de la personne et dans un climat de confiance, avec des horaires flexibles à 50%.
l. Le Dr E______ a rendu son rapport en date du 10 juillet 2023. Il a posé les diagnostics ayant une répercussion sur la capacité de travail de trouble de la personnalité anankastique (F 60.5) dès 2019 et de neurasthénie (F 48.0) dès 2022.
L’examen neuropsychologique a mis en évidence un fonctionnement intellectuel dans la zone moyenne à supérieure. Le profil cognitif mettait au premier plan des difficultés attentionnelles, et la tâche informatisée identifiait des difficultés d’inattention, d’attention soutenue et de maintien de la vigilance. Cela correspondait aux plaintes de l’assurée quant à sa fatigabilité. Les limitations fonctionnelles en lien avec le trouble de la personnalité étaient : une tendance à la procrastination, une lenteur d’exécution avec volonté de contrôle et une rigidité défensive dans les rapports humains. Les limitations fonctionnelles découlant de la neurasthénie étaient une fatigue accrue, un sentiment subjectif d’inefficience cognitive, des vertiges et des douleurs diffuses, une hypersensibilité au bruit et une vulnérabilité significative au stress. Contrairement au sentiment subjectif de l’assurée, ses fonctions cognitives étaient bien préservées, à l’exception des différentes dimensions attentionnelles affectées à un degré léger à moyen.
L’expert a conclu à une incapacité de travail dans tous les milieux en lien avec l’évolution du trouble dépressif récurrent d’août 2019 à fin 2021. Celui-ci était en rémission totale à compter du début de l’année 2022. Cependant, dès cette date, la capacité de travail restait nulle en milieu usuel compétitif, en lien avec le trouble de la personnalité et la neurasthénie. La neurasthénie n’affectait pas le temps de travail mais diminuait le rendement de 20% en milieu usuel compétitif, mais aussi en milieu adapté en économie libre. En revanche, le trouble de la personnalité était totalement invalidant pour ce milieu. Selon le psychiatre, dans un milieu adapté bienveillant, avec une activité ritualisée, peu exposée aux changements et avec de faibles demandes attentionnelles, l’assurée pouvait assumer un horaire équivalant à 70% avec une baisse de rendement de 20% (soit une capacité de travail globale de 56%) dès le début de l’année 2022. Le pronostic était bon pour une activité adaptée, car l’assurée avait de bonnes capacités cognitives, restait motivée à l’idée de construire un projet d’avenir et bénéficiait d’un soutien relationnel considérable.
m. Par courrier du 10 septembre 2023, l’OAI a demandé que trois questions supplémentaires soient posées à l’expert afin de préciser les notions de milieu usuel, de milieu bienveillant et de milieu protégé.
n. Par courrier du 11 septembre 2023, l’assurée a pris acte des conclusions de l’expert et s’y est ralliée. Elle a toutefois soutenu que l’expertise exprimait clairement que son trouble de la personnalité était totalement invalidant, y compris dans un milieu adapté en économie libre. Les limitations correspondaient à la description d'un poste offert dans des structures d'intégration, de type atelier protégé. Partant, l’expertise devait être comprise comme retenant une incapacité de travail totale dans toute activité sur le marché primaire du travail. Il y aurait lieu d’interpeller l’expert sur ce point si la chambre de céans ne partageait pas cet avis.
Elle a joint un courriel du 29 août 2023 de la Dre F______ qui se disait d’accord avec les conclusions de l’expertise, selon lesquelles l’état de l’assurée n’était pas compatible avec les conditions de travail exigibles dans la société actuelle.
o. Par courrier du 25 septembre 2023, la chambre de céans a informé l’OAI qu’elle ne jugeait pas nécessaire de soumettre ses questions complémentaires à l’expert, dans la mesure où celui-ci avait clairement indiqué que la capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle, le milieu usuel compétitif n’étant pas adapté. L’expert avait précisé que le milieu bienveillant était une condition à l’exercice d’une activité, si bien qu’un tel milieu était nécessairement adapté. Savoir si un tel milieu était accessible sur le marché primaire du travail sortait du champ de compétence de l’expert. Il n’était, en outre, pas fait mention de milieu protégé dans l’expertise.
p. Par arrêt du 26 octobre 2023 (ATAS/818/2023), la chambre de céans a relevé que les reproches de l’OAI à l’encontre du rapport du Prof. E______ étaient quelque peu ambigus, dès lors que cet office semblait considérer que les limitations fonctionnelles de l’assurée empêcheraient toute activité en dehors d’un milieu protégé. La chambre de céans ne saurait suivre ces considérations. Rien ne démontrait qu’il n’existait pas d’activité adaptée aux limitations fonctionnelles de l’assurée en dehors d’un milieu protégé, et qu’elle ne pourrait pas travailler en milieu adapté. L’expertise du Prof. E______ devait se voir reconnaître une entière valeur probante. La chambre de céans a retenu une incapacité de travail de 100% dans toute activité du 1er août 2019 au 31 décembre 2021. Dès le 1er janvier 2022, la capacité de travail restait nulle dans l’activité habituelle mais était de 56% dans un milieu adapté (consid. 16 de son arrêt).
La chambre de céans a renvoyé la cause à l’OAI afin que celui-ci procède au calcul du degré d’invalidité dès le 1er janvier 2022, en tenant compte de la capacité de travail globale de 56%, soulignant que le revenu de l’activité habituelle dans le secteur bancaire était vraisemblablement plus élevé que le revenu avec invalidité dans un secteur adapté et bienveillant. Dans ce cadre, l’expert pourrait s’adresser au Prof. E______ s’il souhaitait obtenir des informations complémentaires afin de déterminer les activités adaptées que l’assurée pourrait exercer.
B. a. Dans une note du 15 janvier 2024, l’OAI a retenu que la capacité de travail de l’assurée restait exploitable dans son domaine de compétence, soit le secteur administratif, de sorte que des mesures d’ordre professionnel ne se justifiaient pas. Ce secteur offrait une variété d’activités présentant une compétitivité et un dynamisme moins marqués que dans le milieu bancaire, et l’assurée pouvait y utiliser ses compétences professionnelles.
b. Le 16 janvier 2024, l’OAI a procédé au calcul du degré d’invalidité. Il a retenu un gain sans invalidité de CHF 100'436.- en 2022, se fondant sur le salaire de CHF 100'000.- communiqué par l’employeur. Le revenu d’invalide était fondé sur le revenu de niveau 2, dans le secteur des services de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) de 2020 (TA1_tirage_skill_level, lignes 45-96), soit CHF 63'456.-, après adaptation à la durée normale de travail et indexation en 2022. Compte tenu d’une capacité de travail de 70% et d’une baisse de rendement de 20%, soit d’une capacité de travail globale de 56%, le revenu après invalidité s’élevait à CHF 35'536.-, ce qui aboutissait à un degré d’invalidité de 64.62%. Dès 2024, le degré d’invalidité était de 68.16%, compte tenu d’une réduction supplémentaire de 10% sur le revenu d’invalide.
c. Le 25 janvier 2024, l’OAI a adressé un projet de décision à l’assurée, lui allouant une rente entière d’invalidité correspondant à un degré d’invalidité complet du 1er août 2020 au 31 mars 2022, à une rente de 65% d’une rente entière du 1er avril 2022 au 31 décembre 2023, et à une rente de 68% d’une rente entière dès le 1er janvier 2024. Des mesures professionnelles n’étaient pas indiquées.
d. Par courrier du même jour, l’assurée a fait part à l’OAI de son désaccord avec l’arrêt de la chambre de céans du 26 octobre 2023, en tant que cet arrêt retenait que ses limitations fonctionnelles ne la limiteraient pas à l'exercice d'une activité en milieu protégé. À la lecture des conclusions de l'expert, la chambre de céans aurait dû conclure à l’inexploitabilité de son éventuelle capacité résiduelle de travail dans une activité adaptée à compter du 1er janvier 2022 et lui octroyer une rente entière dès le 1er août 2019 pour une durée indéterminée. Elle a invité l’OAI à décrire spécifiquement les activités de l’économie libre correspondant à ses limitations, en interpellant son service de réadaptation ou l’expert judiciaire.
e. La caisse de pension de l’ancien employeur, par courrier du 12 février 2024 à l’OAI, a déclaré « objecter » au projet de décision du 25 janvier précédent, affirmant que le contrat de travail avait été résilié pour des raisons opérationnelles, de sorte que le revenu sans invalidité devait se fonder sur un salaire statistique s’élevant à CHF 83'036.-. De plus, selon l'arrêt de la chambre de céans du 26 octobre 2023, le début du délai d'attente, et par conséquent le début d'un droit à une rente, avaient été fixés, respectivement, à août 2019 et août 2020, alors que la décision attaquée fixait le début du délai d’attente à juillet 2019 et le début du droit à la rente en juillet 2020. Il y avait lieu de solliciter une rectification de l’arrêt sur ce point. La caisse de pension a, en outre, requis de nouveaux calculs du degré d'invalidité réactualisé en fonction de l’indexation en 2022 et en 2024.
f. Le 1er mars 2024, l’assurée a maintenu ses observations quant au projet de décision, relevant qu’aucun exemple d’activité n’avait été donné et que le niveau 2 dans une activité administrative n’était pas compatible avec une activité dans un milieu bienveillant, ritualisée, peu exposée aux changements et avec de faibles demandes attentionnelles. Le niveau 1 des revenus dans le secteur administratif devait être retenu si l’OAI s’en tenait à ce domaine d’activités. Quant au revenu avant invalidité, il devait être fixé à CHF 106'051.-, ce qui correspondait au salaire perçu en 2017, année précédant la dégradation de son état de santé. Sa perte de gain excédait ainsi 70% et lui ouvrait le droit à une rente entière.
g. Le 20 mars 2024, l’OAI a requis de la chambre de céans la rectification matérielle de son arrêt du 26 octobre 2023 en tant qu’il fixait la date de la survenance de l’incapacité de travail à août 2019 plutôt qu’à juillet 2019.
h. Par décision sur rectification du 10 avril 2024, la chambre de céans a rectifié le considérant 16 de son arrêt du 26 octobre 2023 en ce sens qu’il existait une incapacité de travail de 100% dans toute activité du 22 juillet 2019 au 31 décembre 2021. Dès le 1er janvier 2022, la capacité de travail restait nulle dans l’activité habituelle, en lien avec le trouble de la personnalité et la neurasthénie, et de 56% dans un milieu adapté.
i. Par décision du 13 mai 2024, l’OAI a octroyé à l’assurée une rente entière du 1er juillet 2020 au 31 mars 2022, une rente de 65% d’une rente entière du 1er avril 2022 au 31 décembre 2023, et une rente de 68% d'une rente entière d'invalidité dès le 1er janvier 2024. Il a confirmé le niveau 2 de compétence retenu pour fixer le revenu d’invalide. Il a cité, à titre d’exemples d’activités adaptées, des postes d’assistante administrative dans le secteur privé, dans une administration publique, parapublique ou communale, d’assistante administrative dans le domaine du bâtiment, d'assistante administrative dans les ressources humaines, d'assistante de vente et logistique, de collaboratrice en facturation, ou d'employée de bureau. Le revenu sans invalidité ne serait pas revu dès lors que le contrat avait perduré jusqu’à mars 2020. Compte tenu de la décision sur rectification du 10 avril 2024, le droit à une rente était reconnu dès le 1er juillet 2020. L’indexation requise par la caisse de pension ne pouvait être opérée, dès lors que les indices applicables n’étaient pas encore connus.
C. a. L’assurée a interjeté recours contre cette décision par écriture du 17 juin 2024. Elle a conclu, sous suite de dépens, préalablement, à l’audition de la Dre F______, et sur le fond, à l’annulation de la décision du 13 mai 2024 en tant qu’elle limitait le degré d’invalidité à 65%, respectivement à 68%, et à l’octroi d’une rente entière dès le 1er juillet 2020. Elle a contesté disposer d’une capacité de travail exploitable dans l’économie libre, soulignant que l’expert n’avait pas décrit les domaines d’activité ou les professions adaptées. Les postes suggérés par l’intimé ne respectaient pas les limitations fonctionnelles retenues. Par définition, toute activité impliquant des contacts avec la clientèle excluait des actes ritualisés et exposait aux changements. Faute pour l’intimé d’avoir décrit précisément les activités adaptées, la recourante estimait avoir droit à une rente entière d’invalidité. Elle a repris ses arguments précédemment développés pour le surplus.
b. Dans sa réponse du 11 juillet 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours. Il a soutenu que les professions citées correspondaient aux limitations fonctionnelles de la recourante. Celle-ci disposait de nombreuses compétences transférables dans le secteur administratif, si bien que c’était à juste titre que le niveau 2 de compétence avait été retenu.
c. Dans sa réplique du 13 août 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions. S’agissant du revenu sans invalidité, l’extrait du compte individuel AVS révélait des revenus supérieurs à CHF 100'000.-. Son état de santé s’était dégradé dès 2018, de sorte que le revenu afférent à 2017 devait être pris en compte, ou la moyenne des revenus de 2013 à 2018, ce qui correspondait à un revenu de CHF 104'113.-.
d. Par duplique du 11 septembre 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.
e. La chambre de céans a transmis copie de cette écriture à la recourante le 12 septembre 2024.
f. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
2. L’objet du litige, tel que circonscrit par les conclusions du recours, porte sur le droit à la rente dès le 1er avril 2022, étant souligné que la capacité médico-théorique de travail de 56% de la recourante dans une activité adaptée dès cette date n’est plus litigieuse à ce stade.
3. Il convient en préambule de rappeler ce qui suit au sujet du droit applicable.
3.1 En vertu de l’art. 28 LAI dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, l’assuré a droit à une rente d’invalidité aux conditions suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a) ; il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b) ; au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c) (al. 1). L’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à trois quarts de rente s’il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins (al. 2).
L’art. 29 LAI dispose que le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré (al. 1). Le droit ne prend pas naissance tant que l’assuré peut faire valoir son droit à une indemnité journalière au sens de l’art. 22 (al. 2).
3.2 La LAI a connu une novelle le 19 juin 2020, entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Dans ce cadre, le système des quarts de rente jusque-là applicable a été remplacé par un système linéaire de rentes (Message concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité [Développement continu de l'assurance-invalidité], FF 2017 2442).
L’art. 28b LAI en vigueur depuis le 1er janvier 2022 dispose que la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière (al. 1). Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d’invalidité (al. 2). Pour un taux d’invalidité supérieur ou égal à 70%, l’assuré a droit à une rente entière (al. 3). L’al. 4 détaille les taux de rente correspondant aux degrés d’invalidité entre 40% et 50%.
La let. b des dispositions transitoires relatives à cette modification prévoit notamment que pour les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente est né avant l’entrée en vigueur de ladite modification et qui n’avaient pas encore 55 ans à cette date, la quotité de la rente ne change pas tant que leur taux d’invalidité ne subit pas de modification au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (al. 1). La quotité de la rente reste également inchangée après une modification du taux d’invalidité au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA, si l’application de l’art. 28b de la loi se traduit par une baisse de la rente en cas d’augmentation du taux d’invalidité ou par une augmentation de la rente en cas de réduction (al. 2). Le Message précise que la quotité de la rente est calculée conformément au nouveau système si son taux d’invalidité a subi une modification d’au moins 5 points de pourcentage (FF 2017 2504).
3.3 Selon l’art. 17 LPGA dans sa teneur depuis le 1er janvier 2022, la rente d’invalidité est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée, lorsque le taux d’invalidité de l’assuré subit une modification d’au moins 5 points de pourcentage (let. a), ou atteint 100% (let. b) (al. 1). De même, toute prestation durable accordée en vertu d’une décision entrée en force est, d’office ou sur demande, augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée si les circonstances dont dépendait son octroi changent notablement (al. 2).
Cette disposition s’applique également à la décision par laquelle une rente échelonnée dans le temps est accordée avec effet rétroactif (arrêt du Tribunal fédéral 9C_244/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.3.1).
3.4 Selon la jurisprudence, lorsque la décision dont est recours a été rendue après le 1er janvier 2022, il y a lieu conformément aux principes de droit intertemporel généralement applicables (cf. sur ce point ATF 144 V 210 consid. 4.3.1) de déterminer en vertu du droit applicable jusqu’au 31 décembre 2021 si un droit à la rente est né avant cette date. Lorsque le droit à la rente est né après cette date, le nouveau droit est applicable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2).
3.5 En l’espèce, le droit à la rente est né au plus tôt une année après l’arrêt de travail qui a débuté en juillet 2019, soit en juillet 2020. C’est ainsi l’ancien droit droit qui est applicable, sous réserve d’une modification du degré d’invalidité de cinq points de pourcentage au moins après le 1er janvier 2022 (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2), dont la chambre de céans examinera ci-après si elle est survenue.
4. Aux termes de l’art. 16 LPGA, pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré.
4.1 Le revenu sans invalidité se détermine en établissant au degré de la vraisemblance prépondérante ce que l’intéressé aurait effectivement pu réaliser au moment déterminant s’il était en bonne santé (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l’assuré a obtenu avant l’atteinte à sa santé, en tenant compte de l’évolution des salaires. En effet, selon l’expérience générale, la dernière activité aurait été poursuivie sans atteinte à la santé. Les exceptions à ce principe doivent être établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_934/2015 du 9 mai 2016 consid. 2.2).
4.2 Pour déterminer le revenu d'invalide de l'assuré, il faut en l'absence d'un revenu effectivement réalisé se référer aux données salariales, telles qu'elles résultent des ESS (ATF 148 V 174 consid. 6.2).
4.2.1 Le choix du tableau de l’ESS applicable et du niveau de compétence est une question de droit. L’existence de conditions concrètes justifiant le choix d’un tableau déterminé, par exemple une formation spécifique ou d’autres qualifications, relève de l’établissement des faits (ATF 143 V 295 consid. 2.4).
Depuis l'édition 2012 de l’ESS, les emplois sont classés par l'office fédéral de la statistique par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. Les critères de base utilisés pour définir le système des différents groupes de profession sont les niveaux et la spécialisation des compétences requis pour effectuer les tâches inhérentes à la profession. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf grands groupes de professions et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle. Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé. Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé. Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules (arrêt du Tribunal fédéral 8C_444/2021 du 29 avril 2022 consid. 4.2.3). L'accent est donc mis sur le type de tâches que l'assuré est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications, mais pas sur les qualifications en elles-mêmes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_66/2020 du 14 avril 2020 consid. 4.2.1). L'application du niveau 2 se justifie uniquement si la personne assurée dispose de compétences ou de connaissances particulières (arrêt du Tribunal fédéral 8C_294/2023 du 24 avril 2024 consid. 4.1.2). L’expérience professionnelle de plusieurs années dont peut se prévaloir un assuré sans formation commerciale ni autre qualification particulière ne justifie pas à elle seule un classement supérieur au niveau de compétence 2, dès lors que dans la plupart des secteurs professionnels, un diplôme ou du moins des formations et des perfectionnements sont exigés (arrêt du Tribunal fédéral 8C_657/2023 du 14 juin 2024 consid. 6.1).
L’application d’un niveau de compétence 2 a été admise pour une assurée ayant suivi avec succès plusieurs formations dans le domaine des soins, anciennement responsable durant seize ans d'un service de santé au sein d'un foyer pour jeunes, dès lors qu’elle assumait dans ce poste de multiples tâches administratives qu’elle pouvait mettre à profit dans un autre domaine tombant sous le large éventail d'activités pratiques prévues par le niveau de compétence 2, dont font notamment partie les tâches administratives (arrêt du Tribunal fédéral 8C_202/2022 du 9 novembre 2022 consid. 4.4). Pour un assuré ayant bénéficié d’un reclassement dans la profession de comptable avec une formation complète qui s’était toutefois soldée par un échec à l’examen final, il a été jugé que le niveau de compétence 2 s’appliquait pour fixer le revenu d’invalide, et que l'absence d'expérience dans le domaine de la comptabilité, la reconnaissance limitée du diplôme intermédiaire d'aide-comptable obtenu ou le premier échec à l'examen final de comptabilité ne sauraient justifier le choix du niveau 1 de compétence, qui ne visait que les tâches physiques ou manuelles simples (arrêt du Tribunal fédéral 9C_901/2017 du 28 mai 2018 consid. 3.3). Une activité d’employée de commerce au bénéfice d’un CFC et affectée à des tâches administratives et de traitement des données coïncide avec le niveau de compétence 2 du secteur des services selon la table TA1_tirage_skill_level (lignes 45-96) de l'ESS (arrêt du Tribunal fédéral 9C_44/2024 du 23 septembre 2024 consid. 4.4.2).
4.2.2 La notion de marché équilibré du travail est une notion théorique et abstraite qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l'assurance-chômage et ceux qui relèvent de l'assurance-invalidité. Elle implique, d'une part, un certain équilibre entre l'offre et la demande de main d'œuvre et, d'autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu'il offre un éventail d'emplois diversifiés, tant au regard des exigences professionnelles et intellectuelles qu'au niveau des sollicitations physiques. Il n'y a donc pas lieu d'examiner la question de savoir si un assuré peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail sur un marché où les places de travail disponibles correspondent à l'offre de main d'œuvre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_326/2018 du 5 octobre 2018 consid. 6.2 et les références).
Dans un arrêt portant sur la révision du droit à la rente d’un assuré bénéficiant d’une demi-rente et présentant des troubles psychiques (personnalité borderline), qui confronté à des contraintes externes ne présentait aucune capacité de travail mais était capable d’un rendement de 50% dans un environnement créé par lui-même dans le domaine artistique et sans contrainte, le Tribunal fédéral a noté que la structure actuelle du marché du travail n'offrait plus les conditions qui permettaient encore à une personne comme l’assuré, à l'aube des années 1990, de trouver un emploi et d'exercer par intermittence une activité lucrative. L'augmentation de la productivité au sein des entreprises, la pression sur la rentabilité ou encore les nécessités liées à la maîtrise des coûts salariaux pesaient sur les salariés qui devaient désormais faire preuve d'engagement et d'efficacité, s'intégrer dans une structure d'entreprise et, partant, montrer des facultés d'adaptation importantes. Si le marché du travail présentait par le passé une souplesse suffisante permettant tant bien que mal d'intégrer l’assuré, la nature et l'importance du trouble de la personnalité constituait, au regard des conditions actuelles du marché du travail, des obstacles irrémédiables à la reprise d'une activité lucrative salariée, de sorte que l’assuré n’était plus en mesure de retrouver un emploi adapté à la structure de sa personnalité sur un marché équilibré du travail (arrêt du Tribunal fédéral 9C_984/2008 du 4 mai 2009 consid. 6.2). S’agissant d’un assuré ayant présenté un retard global du développement et des troubles psychotiques dans le cadre d’une ancienne psychose infantile, qui à dire d’experts ne pouvait exercer d’activité que dans un cadre très particulier, à savoir dans un environnement soutenant et tolérant, sans remarques ni critiques, à l'abri de tout stress professionnel et sans interactions avec d'autres employés, et qui avait jusque-là travaillé bénévolement dans un cadre très familial protégé, sans contrainte, en étant suivi par un employé, il a été jugé que de telles restrictions étaient incompatibles avec les exigences actuelles du monde économique, de sorte qu’il n’existait pas de capacité de travail résiduelle (arrêt du Tribunal fédéral 9C_168/2013 du 25 juillet 2013 consid. 6.3).
Le Tribunal fédéral a considéré que le faible niveau intellectuel d’une assurée ne constitue pas un obstacle irrémédiable à la reprise d'un travail sur un marché qui offre un éventail suffisamment large d'activités simples, répétitives et sans responsabilité, dont un nombre significatif est adapté à ses limitations intellectuelles (arrêt du Tribunal fédéral 9C_804/2014 du 16 juin 2015 consid. 7.4). Pour une assurée avec un quotient intellectuel à la limite de la moyenne inférieure, dont il résultait plusieurs limitations fonctionnelles (éviter les doubles tâches, les interférences, les tâches complexes faisant appel à l'autogestion, les contraintes temporelles et les situations dans lesquelles plusieurs informations étaient données), qui présentait en outre une diminution de rendement et n’avait travaillé que dans l’hôtel de ses parents, une capacité de travail totale avec un rendement limité a été admise sur le marché équilibré de l'emploi, et pas uniquement dans un milieu protégé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.3). Une restriction de l'exigibilité ne saurait découler de la simple diminution de la capacité de travail d’un assuré présentant un état dépressif n’empêchant pas une certaine activité professionnelle à dire d'experts (arrêt du Tribunal fédéral 9C_496/2015 du 28 octobre 2015 consid. 3.2). S’agissant du droit à des mesures professionnelles d’une assurée disposant d’un certificat de capacité d’employée de commerce, ayant travaillé en tant que secrétaire, assistante de gestion et trader en bourse, qui selon son médecin ne devait plus travailler dans le secteur bancaire associé au mobbing dont elle avait été victime, mais qui pouvait être occupée dans un milieu bienveillant, soutenant et sans situations stressantes, la chambre de céans a retenu que ces limitations ne suffisaient pas à établir une incapacité de gain dans son domaine de compétence (ATAS/868/2019 du 23 septembre 2019).
4.2.3 Selon la jurisprudence, il y a lieu de procéder à une réduction des salaires statistiques lorsqu'il résulte de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité ou catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation) que le revenu que pourrait réaliser l'assuré en mettant en valeur sa capacité résiduelle de travail est inférieur à la moyenne. Un abattement global maximal de 25% permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3).
On soulignera que l’art. a26bis al. 3 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201), dans sa version en vigueur du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023, avait la teneur suivante : si, du fait de l’invalidité, les capacités fonctionnelles de l’assuré au sens de l’art. 49 al. 1bis, ne lui permettent de travailler qu’à un taux d’occupation de 50% ou moins, une déduction de 10% pour le travail à temps partiel est opérée sur la valeur statistique. Le Tribunal fédéral a jugé que cette disposition n’interdisait pas de concéder un abattement allant au-delà de cette réduction forfaitaire réglementaire de 10% en fonction des critères dégagés par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_823/2023 du 8 juillet 2024 consid. 10.6).
Aux termes de l’art. 26bis al. 3 RAI dans sa teneur dès le 1er janvier 2024, une déduction de 10% est opérée sur la valeur statistique fixée en fonction des ESS à titre de revenu d’invalide. Si, du fait de l’invalidité, l’assuré ne peut travailler qu’avec une capacité fonctionnelle au sens de l’art. 49 al. 1bis de 50% ou moins, une déduction de 20% est opérée. Aucune déduction supplémentaire n’est possible.
Selon le rapport explicatif du 18 octobre 2023 relatif à la modification du règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance-invalidité (RAI) « Mise en œuvre de la motion 22.3377 de la CSSS-N - Utiliser des barèmes de salaires correspondant à l’invalidité dans le calcul du taux d’invalidité », la déduction forfaitaire de 10% ou 20% prévue au nouvel art. 26bis al. 3 RAI tient compte de tous les facteurs qui ont pour conséquence que les personnes en situation de handicap gagnent moins que celles qui sont en bonne santé. Il n’y a donc pas lieu d’effectuer d’autres déductions.
5. En l’espèce, au vu des limitations fonctionnelles retenues par l’expert, et comme la chambre de céans l’a déjà relevé, on ne saurait considérer que seule une activité en milieu protégé est désormais accessible à la recourante. L’expert ne l’affirme nullement. S’il apparaît, certes, que le milieu bancaire dans lequel elle a travaillé est a priori incompatible avec les exigences de bienveillance du milieu professionnel, eu égard à la nature généralement compétitive de ce secteur, les limitations de la recourante ne sont pas, à ce point, restrictives qu’il serait irréaliste de retenir que la recourante n’est pas en mesure de mettre en valeur sa capacité de travail résiduelle. Compte tenu de l’éventail important de places dans le secteur des services, on peut admettre que le marché équilibré du travail englobe des activités qui correspondent aux limitations fonctionnelles de la recourante. Si le milieu bienveillant dépend avant tout de la culture d’entreprise et ne peut être garanti dans un domaine précis ou une profession particulière, l’obtention d’un poste dans un tel milieu n’est pas impossible. En particulier, cette exigence de bienveillance ne saurait être assimilée aux situations qui ont conduit aux arrêts du Tribunal fédéral du 4 mai 2009 et du 25 juillet 2013, dans lesquelles l’engagement des assurés concernés aurait supposé des concessions de l’employeur inenvisageables sur le marché primaire du travail, notamment dès lors que ceux-ci ne pouvaient être exposés à aucune contrainte. Quant au caractère ritualisé et peu exposé aux changements d’une activité, cette condition est réalisée dans bon nombre de postes d’assistant administratif ou d’employé de bureau affecté à des tâches répétitives. À cet égard, les exemples de métiers que l’intimé a suggérés paraissent effectivement adaptés. Contrairement à ce que la recourante soutient, elle dispose de bonnes capacités cognitives et les difficultés attentionnelles constatées ne sont que légères à moyennes, si bien qu’on ne saurait considérer qu’elles rendent impossible une activité administrative de niveau 2, n’exigeant généralement pas de facultés attentionnelles particulièrement soutenues. Le grief de la recourante, qui soutient que toute activité impliquant un contact avec la clientèle ne saurait être considérée comme ritualisée et exposerait aux changements, tombe à faux. D’une part, les activités citées par l’intimé n’impliquent pour leur majorité pas de contact avec des clients. D’autre part, on ne voit pas en quoi des contacts réguliers avec des clients excluraient nécessairement le caractère ritualisé d’une profession, au sens d’activité routinière et sans imprévus.
Au vu de ces éléments, et compte tenu de la casuistique citée, on doit admettre qu’une activité lucrative est possible pour la recourante dans l’économie libre.
Les brefs commentaires du 29 août 2023 de la Dre F______ ne suffisent pas à parvenir à une autre conclusion. En premier lieu, celle-ci prête aux conclusions du Prof. E______ une portée qu’elles n’ont pas, celui-ci n’ayant pas exclu une capacité de travail dans l’économie libre, comme on l’a vu. Par ailleurs, on s’étonne de la volte-face de la Dre F______, qui n’est guère motivée et ne fait état d’aucun élément nouveau, alors même que cette psychiatre admettait une capacité de travail de 50% dès octobre 2021 – à l’instar du reste du Dr B______ – dans une activité adaptée hors du milieu bancaire, sans d’une quelconque manière restreindre son exigibilité à une activité de type « atelier protégé ». On relèvera, en outre, que la recourante elle-même a admis, face à l’expert judiciaire, une amélioration progressive dès le milieu de l’année 2021 et une capacité retrouvée à assumer des activités externes consolidées, dès le milieu de l’année 2022. Il ressort, en outre, d’un courriel de la caisse de chômage à l’intimé du 5 août 2022 que la recourante a perçu des indemnités de chômage dès le 23 mai 2022, ce qui suppose par définition une aptitude au placement dans la mesure de sa capacité résiduelle de travail, conformément à l’art. 15 de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0) et à l’art. 70 LPGA.
Partant, la chambre de céans ne peut que confirmer l’exigibilité de la mise en valeur de la capacité de travail résiduelle de travail de la recourante sur le marché primaire du travail.
Par appréciation anticipée des preuves (ATF 130 II 425 consid. 2.1), elle ne donnera ainsi pas suite à la demande d’audition de la Dre F______, ni à la demande d’interpellation du Prof. E______.
6. Il reste à examiner le calcul du degré d’invalidité auquel a procédé l’intimé.
6.1 S’agissant du revenu avant invalidité, c’est à juste titre que l’intimé s’est référé au revenu concrètement réalisé dans le dernier emploi. En particulier, rien n’étaye la position de la caisse de pension, qui soutient que le poste de la recourante aurait été supprimé pour des raisons opérationnelles, ce qui justifierait le recours à un salaire statistique à titre de revenu sans invalidité. En effet, selon le questionnaire rempli par l’employeur du 20 février 2020, la cause de la résiliation des rapports de travail consistait en une performance globale insuffisante. Cela étant, le chiffre de CHF 100'000.- retenu par l’intimé à ce titre s’avère erroné, et ne correspond du reste pas au revenu annuel de CHF 93'000.- hors gratifications communiqué par l’employeur. Selon le compte individuel AVS – en principe déterminant selon l’art. 25 RAI – le revenu que la recourante a perçu en 2018, dernière année d’activité complète avant la survenance de l’incapacité de travail, s’est élevé à CHF 101'971.-. Aucun élément ne permet d’accréditer la thèse de la recourante, qui voudrait voir retenu le revenu AVS de 2017 au motif que son salaire en 2018 aurait déjà été négativement influencé par son état de santé. En effet, son incapacité de travail a débuté en 2019, et non en 2018.
On retiendra ainsi un revenu de CHF 101'971.- à titre de revenu sans invalidité en 2018, ce qui correspond à CHF 105'377.- une fois indexé à 2022.
6.2 En ce qui concerne le revenu après invalidité, le recours à l’édition 2020 de l’ESS doit être confirmé, puisque le tableau T1_skill-level de l’ESS 2022 n’a été publié qu’en mai 2024 (sur cette question, cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3). À l’aune de la casuistique citée, c’est également à juste titre que l’intimé a retenu le niveau 2 de compétence du secteur services. Le revenu mensuel statistique était de CHF 4'996.- par mois en 2020, soit CHF 63'378.- une fois annualisé, indexé et adapté à la durée normale de travail de 41.7 heures en 2022.
Compte tenu de la capacité de travail de 56%, le revenu après invalidité s’élève à CHF 35'492.-.
6.3 La comparaison des revenus aboutit ainsi à un degré d’invalidité de 66.32%, arrondi à 66%, en 2022. En effet, le degré d’invalidité doit être arrondi selon les règles mathématiques à 59% (ATF 130 V 121 consid. 3.2, règle appliquée également aux rentes calculées selon le nouveau système, cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_770/2023 du 11 juillet 2024 consid. 7.2.3.2). Compte tenu de la modification du degré d’invalidité supérieure à 5%, le nouveau droit s’applique et ce taux ouvre le droit à une rente de 66% d’une rente entière dès le 1er avril 2022 – soit trois mois après l’amélioration de la capacité de travail, conformément à l’art. 88a al. 1 RAI.
Dès le 1er janvier 2024, compte tenu de la modification de l’art. 26bis RAI et de la réduction supplémentaire de 10% qu’elle implique sur le revenu statistique, le revenu après invalidité est de CHF 31'943.-. Cela porte le degré d’invalidité à 69.69%, arrondi à 70%. Ce taux ouvre le droit à une rente entière d’invalidité dès le 1er janvier 2024.
La décision de l’intimée doit ainsi être réformée en ce sens.
7.
7.1 Le recours est partiellement admis.
7.2 La recourante, qui obtient partiellement gain de cause, a droit à des dépens, qui seront fixés à CHF 2'000.- (art. 61 let. g LPGA).
7.3 L’intimé, qui succombe, supporte l’émolument de procédure de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet partiellement.
3. Réforme la décision du 13 mai 2024 de l’intimé en ce sens que la recourante a droit à une rente entière du 1er juillet 2020 au 31 mars 2022, à une rente de 66% d’une rente entière du 1er avril 2022 au 31 décembre 2023 et à une rente entière d’invalidité dès le 1er janvier 2024.
4. Condamne l’intimé à verser à la recourante une indemnité de dépens de CHF 2'000.-.
5. Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.
6. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Véronique SERAIN |
| Le président
Philippe KNUPFER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le