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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2584/2023

ATAS/961/2024 du 03.12.2024 ( LCA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2584/2023 ATAS/961/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 décembre 2024

Chambre 2

 

En la cause

A______
représenté par Me Michael RUDERMANN, avocat

 

 

demandeur

 

contre

GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA

défenderesse

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : le demandeur) a travaillé comme étancheur au service de la société anonyme B______ (ci-après : l’employeur) dès le 28 avril 2003.

b. À ce titre, il était assuré contre les risques de perte de gain en cas de maladie en vertu du contrat-cadre d’assurance d’indemnités journalières n° 1______ conclu par les Métiers genevois du second-œuvre avec la Caisse-maladie suisse pour les industries du bois et du bâtiment et branches annexes (ci-après : CMBB), fondation dont les actifs et passifs ont été repris par AVENIR ASSURANCE, ASSURANCE MALADIE ET ACCIDENTS FONDATION, selon un contrat de fusion du 18 avril 2011. Les actifs et passifs de cette dernière entité ont à leur tour été repris par la FONDATION GROUPE MUTUEL en mai 2018. Le GROUPE MUTUEL ASSURANCES SA (ci-après : la défenderesse) est désormais la partie contractante au contrat-cadre.

c. L’assuré a été en incapacité de travail totale dès le 16 février 2021, attestée par le docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie. Dans son rapport du 28 mai 2021, ce médecin a diagnostiqué un trouble dépressif récurrent, épisode actuel d'intensité sévère (F 33.2 selon la CIM-10), et des troubles mentaux et du comportement en lien avec l'utilisation d'alcool, usage nocif pour la santé (F 10.1).

La défenderesse a versé des indemnités journalières de CHF 175.66 par jour dès cette date.

d. L’employeur a mis fin au contrat de travail du demandeur pour le 31 mai 2021, terme qu’il a par la suite reporté au 30 novembre 2021.

e. Le 18 novembre 2021, la défenderesse a indiqué au demandeur que la couverture d'assurance d'indemnités journalières prenait fin à la cessation des rapports de travail. Elle lui a offert de maintenir son affiliation, conformément à son droit au libre-passage, et lui a adressé une proposition d’assurance se référant à des conditions générales d’assurance (ci-après : CGA) collectives, qu’elle a dites annexées à son envoi.

f. La défenderesse a mis un terme au versement des indemnités journalières au 30 novembre 2021.

g. Le 24 novembre 2021, la défenderesse a invité le demandeur à se soumettre à une expertise qu’elle a confiée au docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie. Dans son rapport du 22 décembre 2021, celui-ci a retenu le diagnostic avec répercussion sur la capacité de travail de trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen sans syndrome somatique (F33.10), présent depuis mars 2019, et le diagnostic sans incidence sur la capacité de travail de troubles mentaux et troubles du comportement liés à l'utilisation d'alcool, actuellement abstinent, en rémission récente. Il a qualifié le pronostic de « prudemment optimiste » à moyen ou long terme. La pathologie alcoolique était en rémission partielle avec une abstinence depuis le 17 juillet 2021, sans arguments en faveur de séquelles incapacitantes. Le trouble dépressif récurrent causait des limitations fonctionnelles entraînant une incapacité de travail dans toute activité. L’expert a émis plusieurs propositions thérapeutiques en lien avec la médication, en soulignant l’importance de l'abstinence à l'alcool. En tenant compte de ces éléments, au vu du rythme de l'amélioration, du type d'activité exercée et des facteurs de pronostic favorables et défavorables, on devait partir du principe que le demandeur recouvrerait une capacité de travail de 50% dès la mi-avril 2022, et une capacité de travail de 100% dès la mi-mai 2022. Dans une activité non qualifiée, simple, sans exigences de flexibilité, à la pression psychique réduite et sans responsabilité d'une équipe, telle que dans le nettoyage de bureaux ou en tant que surveillant d'expositions, une capacité de travail serait exigible à 50% dès début avril 2022 et à 100% à partir de la mi-avril 2022.

h. Par courrier du 22 mars 2022, le demandeur a exigé de la défenderesse la reprise sans délai du versement des indemnités journalières.

i. Dans une attestation du 5 mai 2023, la docteure E______, spécialiste FMH en psychiatrie, a attesté une incapacité de travail totale depuis le 15 juin 2021. Elle a exposé les limitations fonctionnelles du demandeur et conclu à une capacité de travail nulle, aucune reprise d'activité n’étant pour l’heure possible. Elle a expliqué que sa divergence avec le Dr D______ portait uniquement sur le pronostic de reprise de travail. Selon la Dre E______, l'échéance indiquée par le Dr D______ se basait sur des données médico-théoriques, mais les circonstances psycho-sociales du demandeur n’avaient pas été favorables. Si une nouvelle expertise avait été réalisée à la mi-avril 2022, on aurait constaté que la capacité du demandeur était nulle.

j. Par décision du 25 mars 2024, l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après l’OAI) a reconnu le droit du demandeur à une rente entière d’invalidité dès le 1er février 2022 et à une rente d’invalidité de 63% dès le 1er juillet 2022. Il a retenu une incapacité de travail totale dès le 16 février 2021, puis de 50% dès le 15 avril 2022.

B. a. Par écriture du 15 août 2023, le demandeur a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) d’une action en paiement contre la défenderesse, concluant, sous suite de dépens, après avoir mis en œuvre une expertise médicale et auditionné les Drs D______ et E______ (sic), au versement par la défenderesse de CHF 77'641.72 plus intérêts moyens à 5% l'an dès le 22 mars 2022 ; et subsidiairement au versement par la défenderesse de CHF 26'524.66 plus intérêts moyens à 5% l'an dès le 21 février 2022.

Il a allégué que contrairement au pronostic du Dr D______, son incapacité de travail s’était poursuivie après la mi-avril 2022. La défenderesse n’avait d’ailleurs pas suivi le rapport du Dr D______, et devait verser les indemnités journalières dues à tout le moins du 1er décembre 2021 au 15 mai 2022, soit 136 jours à CHF 175.66 pour l’incapacité de travail totale jusqu’au 15 avril 2022, et 30 jours à CHF 87.83 pour l’incapacité de travail à 50% du 16 avril au 15 mai 2022. Il avait en outre droit au solde des indemnités journalières dues selon la police, soit 442 indemnités complètes, conformément aux conclusions de la Dre E______. La résiliation des rapports de travail n’entraînait pas la fin du droit aux prestations.

b. Dans sa réponse du 13 novembre 2023, la défenderesse a conclu, sous suite de dépens, au rejet du recours. Elle a allégué au chiffre 5 de son écriture que le contrat-cadre d’assurance était régi par les CGA dans leur édition du 1er septembre 2016 (PCAM03) (ci-après : CGA 2016), lesquelles prévoyaient la fin du droit aux prestations à la fin des rapports de travail. Elle a contesté l’incapacité de travail attestée par la Dre E______. La défenderesse a en outre allégué qu’une première incapacité de travail complète avait été indemnisée du 23 mars 2019 au 1er mars 2020, soit durant 343 jours, une expertise ayant retenu des troubles dépressifs sévères et un usage d’alcool nocif pour la santé, puis un arrêt de travail de quatre jours du 10 au 15 novembre 2020. Elle a offert de prouver ces faits par l’interrogatoire du demandeur.

c. Dans sa réplique du 14 décembre 2023, le demandeur a persisté dans ses conclusions. Il a contesté les allégués de la défenderesse sur les indemnités versées du 23 mars 2019 au 1er mars 2020 et du 10 au 15 novembre 2020. Il a soutenu que selon les CGA 2016, le droit aux prestations cessait uniquement à la fin des rapports de travail lorsque ceux-ci avaient duré jusqu’à trois mois.

d. La chambre de céans a entendu les parties le 23 avril 2024.

La défenderesse a déclaré prendre acte de la décision de l’OAI. Elle a contesté l’applicabilité des CGA 2016, affirmant que les CGA PC-M dans leur édition du 1er janvier 2011 (ci-après : les CGA 2011) étaient applicables, comme cela ressortait de sa proposition de libre passage. Elle a modifié l’allégué 5 de sa réponse, dont la teneur était désormais la suivante :

« Conformément à la police d'assurances, le contrat prévoit le versement d'indemnités journalières de 80% du salaire assuré. Au moment des faits, le contrat était régi par les conditions générales d'assurance (CGA) couverture collective d'une indemnité journalière maladie selon la LCA (édition 01.01.2011 ; PC-M).

Preuves : PL 1 et PL 12 » 

La défenderesse a également modifié l’allégué 6 de sa réponse citant les CGA comme suit :

« Les CGA disposent expressément à l'art. 11 que s'il cesse d'appartenir au cercle des assurés, bénéficie du droit de poursuivre sa couverture d'assurance en qualité de membre individuel : l'assuré qui en vertu de la loi sur le chômage (LACI) est réputé chômeur ; l’assuré en incapacité de travail ou qui justifie d'un revenu en Suisse à la sortie du contrat collectif sous réserve de l'al. 6. L'assuré doit faire valoir son droit de passage dans les 90 jours dès la sortie du contrat collectif, conformément à l'art. 26 al. 1, faute de quoi son droit s'éteint ».

Le demandeur a contesté les allégations de la défenderesse, soutenant que celle-ci plaidait à la limite de la bonne foi. Les CGA 2016 lui avaient été transmises par la défenderesse elle-même, et celle-ci les avait produites à l’appui de sa réponse, rédigée après deux prolongations de délai qui lui avaient laissé tout loisir pour étudier la question.

La défenderesse a souligné que le contrat-cadre et les CGA 2011 avaient également été produits à l’appui de sa réponse, ainsi qu’en annexe à sa proposition du 18 novembre 2021. Elle a ajouté que les titres des CGA étaient pratiquement identiques et qu’il y avait eu « une petite erreur de [sa part] ».

Interpellée par la chambre de céans sur les CGA qu’elle affirmait applicables, la défenderesse s’est référée au contrat-cadre produit à l’appui de sa réponse, qui se référait aux conditions générales de l'assurance collective d'une indemnité journalière (PC-M), dans leur édition du 1er septembre 2005 (ci-après : CGA 2005). Ces CGA étaient les mêmes que les CGA 2011, et elles s’appliquaient en 2021.

Le demandeur a souligné que selon l’avenant au contrat-cadre du 1er décembre 2021 produit par la défenderesse, les CGA PCGA01 dans leur édition du 1er janvier 2022 (ci-après : les CGA 2022) s'appliquaient dès cette date. Rien ne disait que les conditions générales n’avaient pas changé entre 2005 et 2022. Il a soutenu que les CGA 2016 étaient applicables. Il a précisé qu’il avait l’intention de solliciter l’audition de la Dre E______, et éventuellement la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique, mais qu’il y aurait lieu de trancher la question des CGA applicables avant de telles mesures d'instruction. Il souhaiterait faire entendre son précédent mandataire sur la version des CGA que la défenderesse lui avait transmise.

À l’issue de l’audience, la chambre de céans a clos les débats d’instruction, et a imparti un délai à la défenderesse pour démontrer, toutes pièces utiles à l'appui, que les CGA 2011 s’appliquaient et que le demandeur n'avait plus droit aux prestations au-delà du 30 novembre 2021. Elle l’a invitée à produire toutes les versions des CGA applicables depuis 2005, ainsi que toutes les modifications du contrat-cadre ou d’autres clauses contractuelles.

e. Le 3 mai 2024, la défenderesse a produit les CGA 2005, 2011 et 2022. Elle a soutenu que le contrat-cadre avait été régi par les CGA 2005 durant la période de 2005 à 2010, par les CGA 2011 durant la période de 2011 à 2022 (sic), et par les CGA 2022 dès 2022. Le contrat-cadre conclu le 17 décembre 2010 n’avait pas été modifié jusqu'en janvier 2022, date à laquelle les CGA 2022 avaient remplacé les CGA 2011. Dès lors, ces dernières s'appliquaient au moment de la survenance du cas litigieux. Elles prévoyaient la fin du droit aux prestations si l’assuré ne faisait pas valoir son droit au libre passage, comme c’était le cas en l’espèce.

De plus, le demandeur avait bénéficié d’indemnités journalières non seulement entre le 16 février et le 30 novembre 2021, mais aussi entre le 23 mars 2019 et le 1er mars 2020, pour une atteinte rattachée. L'intervalle entre ces deux périodes étant inférieur à 365 jours, la nouvelle incapacité de travail relevait d’une rechute au sens des CGA, et il y avait lieu d’imputer les indemnités versées durant la première période d'incapacité de travail sur la durée totale des prestations de 720 jours dans une période de 900 jours. Dans la mesure où la défenderesse avait versé 631 indemnités journalières au total pour les deux périodes, soit du 23 mars 2019 au 1er mars 2020 et du 16 février au 30 novembre 2021, le demandeur ne pourrait prétendre qu'à 89 indemnités avant l’épuisement du droit aux prestations.

La défenderesse a produit, outre les CGA citées, un tableau Excel intitulé « Prestations d’indemnités journalières versées [au demandeur] », selon lequel 631 indemnités journalières avaient été versées à celui-ci depuis le 23 mars 2019.

f. Par déterminations du 14 juin 2024, le demandeur a soutenu que la défenderesse avait pour toute réponse à la réquisition de la chambre de céans produit trois versions de ses CGA, en affirmant péremptoirement qu’il s’agissait des versions successives applicables au contrat-cadre d’assurance. Ledit contrat renouvelé en 2010 ne faisait pas référence aux CGA 2011. La défenderesse n’apportait aucun élément de preuve permettant de considérer que les CGA 2016 ne seraient pas applicables, contrairement à ce qu’elle avait admis dans un premier temps. L’applicabilité des CGA 2011 n’était ainsi pas prouvée à satisfaction de droit. L’expertise du Dr D______ n’avait pas valeur probante en raison des critiques de la Dre E______ et de la décision de l’OAI. En tenant compte des 288 indemnités journalières déjà versées, le demandeur pouvait encore prétendre à 432 indemnités, et il avait droit à tout le moins à un montant de CHF 26'524.66 si l’on suivait les conclusions du Dr D______, à un montant de CHF 49'887.44 si l’on suivait la position de l’OAI, et à un montant de CHF 75'885.12 si l’on suivait l’avis de la Dre E______, selon des calculs qu’il a détaillés. Quant à la rechute invoquée par la défenderesse, le demandeur a soutenu que le rapport du Dr D______ était clair. Il apparaissait que la première période d'incapacité de travail résultait de la séparation litigieuse du demandeur de son épouse, et la seconde de difficultés d’ordre professionnel ayant conduit à son licenciement. Il n’y avait ainsi pas de rechute, les deux incapacités de travail ayant des origines différentes. Le demandeur a répété que la défenderesse procédait de mauvaise foi. La chambre de céans devrait en tenir compte dans les dépens, indépendamment de l’issue de la cause.

g. La défenderesse s’est déterminée par écriture du 26 juillet 2024, affirmant avoir prouvé l’applicabilité des CGA 2011. Elle a répété que les deux incapacités de travail reposaient sur la même atteinte selon le Dr D______. Elle s’est dite prête à plaider oralement si la partie adverse en faisait la demande.

h. Par observations du 27 août 2024, le demandeur a derechef contesté que la preuve de l’applicabilité des CGA 2011 ait été amenée. La défenderesse n’avait produit aucun document contractuel, hormis les CGA. Il y avait ainsi lieu de s’en tenir aux allégués non contestés de la demande et aux aveux de la défenderesse dans sa réponse, admettant l’applicabilité des CGA 2016.

i. Par courrier du 9 septembre 2024 à la chambre de céans, le demandeur a précisé ne pas solliciter de plaidoiries orales.

j. Le 12 septembre 2024, la chambre de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), relevant de la loi fédérale sur le contrat d'assurance du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1).

Selon la police d’assurance, le contrat est régi par la LCA.

Les CGA, tant dans leurs éditions du 1er septembre 2005 et du 1er janvier 2011 que dans celle du 1er septembre 2016, consacrent à leur art. 33 un for alternatif pour l’assuré, qui peut notamment saisir les tribunaux de son domicile suisse.

Le demandeur ayant son domicile à Genève, la compétence de la chambre de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie à raison de la matière et du lieu.

2.             Les litiges relatifs aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l'art. 197 CPC lorsque les cantons ont prévu une instance cantonale unique selon l'art. 7 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6), étant précisé que le législateur genevois a fait usage de cette possibilité (art. 134 al. 1 let. c LOJ).

La loi fédérale sur la surveillance des entreprises d’assurance du 17 décembre 2004 (LSA - RS 961.01) ne contient pas de règles spécifiques concernant les délais relatifs aux contestations de droit privé qui s’élèvent entre les entreprises d’assurance et les assurés.

La demande respectant en outre les exigences de forme prévues à l’art. 244 CPC, elle est recevable.

3.             Le litige, tel que circonscrit par les conclusions réduites dans les déterminations du demandeur du 14 juin 2024, porte sur le droit de celui-ci à un montant de CHF 75'882.12 correspondant aux indemnités journalières qu’il estime dues après le 30 novembre 2021.

4.             Conformément à l’art. 243 al. 2 let. f CPC, la procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la LAMal.

4.1 Il en résulte que le tribunal établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC). Il s'agit donc d'un cas où une disposition spéciale instaure la maxime inquisitoire, en lieu et place de la maxime des débats (ATF 138 III 625 consid.2.1). Ce principe n'est pas une maxime officielle absolue, mais une maxime inquisitoire sociale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_541/2010 du 16 juillet 2010 consid. 1). Le juge ne doit pas instruire d'office le litige lorsqu'une partie renonce à expliquer sa position. En revanche, il doit interroger les parties et les informer de leur devoir de collaboration et de production des pièces ; il est tenu de s'assurer que les allégations et offres de preuves sont complètes uniquement lorsqu'il a des motifs objectifs d'éprouver des doutes sur ce point. L'initiative du juge ne va pas au-delà de l'invitation faite aux parties de mentionner leurs moyens de preuve et de les présenter. La maxime inquisitoire sociale ne permet pas d'étendre à bien plaire l'administration des preuves et de recueillir toutes les preuves possibles (ATF 125 III 231 consid. 4a). La maxime inquisitoire sociale ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4C.185/2003 du 14 octobre 2003 consid. 2.1).

4.2 La maxime inquisitoire sociale ne dispense pas les parties de collaborer à l’établissement des faits et de désigner les preuves à administrer. Le juge ne doit s’assurer du caractère complet des allégations et des moyens de preuve que s’il existe des doutes sérieux sur ce point (arrêt du Tribunal fédéral 4A_491/2014 du 30 mars 2015 consid. 2.6.1). Lorsqu’une partie admet expressément un fait allégué par l’autre, la maxime inquisitoire sociale ne permet au juge de s’en écarter ou d’interpeller la partie désavantagée par cette admission que si l’inexactitude de l’allégué ressort clairement des pièces du dossier (arrêt du Tribunal fédéral 4A_360/2015 du 12 novembre 2015 consid. 4.2). En vertu de la maxime inquisitoire sociale, il n’est pas interdit au juge de fonder sa décision sur des faits qui n’ont pas été allégués mais qui sont parvenus à sa connaissance au cours de la procédure, qui ressortent par exemple des moyens de preuve offerts (4A 388/2021 du 14 décembre 2021 consid. 5.1).

L'art. 222 al. 2 2ème phr. CPC impose au défendeur d'exposer dans la réponse quels faits allégués dans la demande sont reconnus ou contestés (cf. ATF 144 III 519 consid. 5.2.2.1). 

Si un fait allégué est admis, il y a aveu judiciaire, c'est-à-dire la reconnaissance en cours de procès d'un fait défavorable à celui qui le fait, que la partie adverse peut lui opposer. L'aveu judiciaire d'un fait supprime la nécessité de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4A_268/2021 du 18 mai 2022 consid. 4.1). Une détermination formulée « Rapport soit à la pièce » n’équivaut pas à une contestation de l’allégué correspondant (cf. arrêts du Tribunal fédéral 5A_326/2021 du 8 juin 2022 consid. 3.3 et 4A_243/2018 du 17 décembre 2018 consid. 4.3.2).

Par ailleurs, en application par analogie de l’art. 229 CPC, qui régit l’admissibilité des nova aux débats principaux dans la procédure ordinaire, les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles tant que les délibérations n’ont pas débuté (ATF 146 III 237 consid. 3.1, 144 III 117 consid. 2.2).

4.3 Aux termes de l’art. 150 CPC, la preuve a pour objet les faits pertinents et contestés (al. 1). La preuve peut également porter sur l'usage, les usages locaux et, dans les litiges patrimoniaux, le droit étranger (al. 2).

En vertu de l'art. 150 al. 1 CPC, seules doivent être prouvées les allégations qui sont expressément contestées. Une telle contestation doit être suffisamment précise pour atteindre son but, c'est-à-dire permettre à la partie adverse de comprendre quels allégués il lui incombe de prouver. Le degré de précision d'une allégation influe sur le degré de motivation que doit revêtir sa contestation. Plus les affirmations d'une partie sont détaillées, plus élevées sont les exigences quant à la précision de leur contestation. Une réfutation en bloc ne suffit pas. Le fardeau de la contestation ne saurait toutefois entraîner un renversement du fardeau de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4A_42/2017 du 29 janvier 2018 consid. 3.2.2 et les références).

4.4 Le principe de la libre appréciation des preuves signifie que le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de statuer sur le droit litigieux (arrêt du Tribunal fédéral 4A_253/2007 du 13 novembre 2007 consid. 4.2).

5.             L’art. 52 CPC dispose que quiconque participe à la procédure doit se conformer aux règles de la bonne foi.

Cet article contraint le plaideur à se prévaloir de ses moyens au moment prévu par la loi et sans tarder (François BOHNET, CPC annoté, 2016, n° 2 ad art. 52 CPC).

Le principe de la confiance et l’interdiction du comportement contradictoire sont des principes qui trouvent également application en procédure civile (ATF 116 II 379 consid. 2b, au sujet d’une partie invoquant au stade de l’appel l’incompétence de l’autorité inférieure).

Par comportement de bonne foi, on entend un comportement qui, objectivement, correspond à ce qui peut être légitimement attendu des parties à un procès, à savoir une attitude éthiquement correcte à l’égard de l’autre partie et du juge. Ainsi, les parties doivent collaborer à l’administration des preuves, faire en sorte que les courriers qui leur sont destinés puissent les atteindre et adopter un comportement conforme à la confiance qu’elles ont suscitée chez un autre acteur du procès. Un abus de droit doit ainsi être retenu lorsqu’une partie trompe l’attente fondée qu’elle a créée chez sa partie adverse (François BOHNET in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, nn. 7 et 8 ad art. 52 CPC). L’adoption d’un comportement contradictoire (venire contra factum proprium) relève d’un abus de droit (arrêt du Tribunal fédéral 9C_119/2023 du 12 juin 2023 portant sur l’invocation pour la première fois devant l’instance fédérale par l’assurance-invalidité du fait que sa décision retenait un début du droit à la rente contraire à celui fixé de manière contraignante par un précédent arrêt de renvoi).

6.             En matière d'assurances complémentaires, les parties sont liées par l'accord qu'elles ont conclu dans les limites de la loi, les caisses-maladie pouvant en principe édicter librement les dispositions statutaires ou réglementaires dans les branches d'assurances complémentaires qui relèvent de la liberté contractuelle des parties, hormis quelques dispositions impératives en matière d’indemnités journalières (ATF 124 V 201 consid. 3d). Le droit aux prestations d'assurance se détermine sur la base des dispositions contractuelles liant l'assuré et l'assureur, en particulier des conditions générales ou spéciales d'assurance (arrêt du Tribunal fédéral 5C.253/2000 du 6 mars 2001 consid. 4a). Ainsi, le contenu du contrat peut en principe être déterminé librement. Il est le plus souvent défini au moyen de conditions générales préformulées, qui sont des conditions contractuelles réglant les droits et obligations des contractants, lesquelles fixent notamment l’étendue de la couverture lorsque la loi leur en laisse la possibilité (Vincent BRULHART, Droit des assurances privées, 2ème éd. 2017, n. 367). Si les parties sont convenues de dispositions individuelles qui sont en contradiction avec les clauses générales, les premières priment sur les secondes (ATF 125 III 263 consid. 4b/bb ; 123 III 35 consid. 2c/bb).

7.             L’art. 3 LCA précise l’obligation d’information de l’assurance. Cette disposition énumère à son alinéa premier les éléments sur lesquels l’assurance doit renseigner le preneur d’assurance avant la conclusion du contrat. Son alinéa deuxième précise que ces renseignements sont à fournir au preneur d’assurance de sorte qu’il puisse en avoir connaissance lorsqu’il fait la proposition de contrat d’assurance ou qu’il l’accepte, et que le preneur d’assurance doit dans tous les cas, être à ce moment-là en possession des conditions générales d’assurance et de l’information au sens de l’al. 1 let. g.

Les conditions générales (d’affaires ou d’assurance) ne s'appliquent que dans la mesure où les parties les ont reprises, expressément ou par acte concluant, pour leur contrat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_47/2015 du 2 juin 2015 consid. 5.1). Les conditions générales doivent avoir été effectivement intégrées dans le contrat par les parties. Selon le régime général du droit des obligations, cela suppose que l’accord des parties les inclue, le cas échéant en y renvoyant. Elles doivent alors avoir été rendues accessibles, au moment de la conclusion au plus tard, à la partie qui ne les a pas rédigées. Pour que des conditions générales qui ne sont pas signées ou paraphées soient intégrées, il faut que l’attention de cette partie ait été raisonnablement attirée sur leur applicabilité (Nicolas ROUILLER in Commentaire romand LCA, 2022, n. 57 ad art. 100 LCA). Les conditions générales ne font partie du contrat que si la partie qui y a consenti a eu au moins la possibilité d’en prendre connaissance d’une manière acceptable lors de la conclusion du contrat (règle de l’accessibilité, Zugänglichkeitsregel) (ATF 148 III 57 consid. 2.1.2).

Les contrats d’assurance sont en principe soumis aux conditions générales qui étaient en vigueur lors de leur conclusion. Une modification ultérieure des CGA ne peut par conséquent avoir d’effet que pour de nouvelles conventions conclues après leur entrée en vigueur. En dérogation à ce principe, l’art. 35 LCA aménage un droit formateur unilatéral en faveur du preneur d’assurance, qui peut ainsi exiger l’adaptation de son contrat aux nouvelles CGA (Anne-Sylvie DUPONT in Commentaire romand LCA, 2022, n. 1 ad 35). Lorsqu’une proposition d’assurance se réfère à des CGA sans indiquer leur date d’édition, il convient d’admettre, à la lumière du principe de la confiance, que référence est faite aux conditions d'assurance en vigueur à l'époque de la conclusion du contrat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_213/2014 du 26 juin 2014 consid. 2.3.2).

Si la qualification juridique d’un contrat est une question de droit, l’existence d’un tel accord relève en revanche d’une question de fait (arrêt du Tribunal fédéral 4A_117/2024 du 21 août 2024 consid. 4.1).

8.             Le contrat-cadre d’assurance n° 1______ conclu par la CMBB avec les Métiers genevois du second-œuvre a couru dès le 1er janvier 2007. Il y est à la fois précisé au chiffre 14 que le contrat entre en vigueur le 1er janvier 2008 et expire le 31 décembre 2010, et que son renouvellement a lieu le 1er janvier 2011 avec une échéance fixée au 31 décembre 2013. Selon ledit contrat, les cas en cours sont repris par l’assureur avec imputation des prestations déjà versées. Il définit sous chiffre 1 les personnes assurées comme le personnel d’exploitation du second‑œuvre désigné habituellement comme tel dans la convention collective de travail applicable aux entreprises membres de certaines associations, dont la chambre genevoise de l’étanchéité et des toitures. Il stipule des indemnités journalières en cas de maladie de 80% du salaire après un délai d’attente de deux jours, la durée de prestations étant de 720 jours dans une période de 900 jours avec imputation du délai d’attente. Un droit de passage dans l’assurance individuelle est prévu pour les assurés quittant le cercle des assurés. Son chiffre 18 précise que les CGA 2005 font partie intégrante du contrat.

Le renouvellement du contrat n° 1______ a été conclu par les parties en décembre 2010.

Un avenant à un contrat-cadre d’indemnités journalières selon la LCA n° 2______ a été conclu le 1er décembre 2021 par la défenderesse avec la Fédération des entreprises romandes – Métiers genevois du second-œuvre, avec effet au 1er janvier 2022, précisant que les CGA dans leur édition 01.01.2021/PCGA01 en font partie intégrante et que les autres conditions du contrat demeurent inchangées.

9.             Dans l'assurance privée selon la LCA, le droit aux prestations ne dépend pas d'une affiliation. Si le sinistre survient pendant la période de couverture, l'assureur doit verser les prestations convenues jusqu'à épuisement, aussi longtemps qu'elles sont justifiées selon les clauses conventionnelles ; la seule limite que connaisse la couverture réside non dans la fin des relations contractuelles, mais dans la durée des prestations convenues (Jean-Benoît MEUWLY, La durée de la couverture d'assurance privée, thèse Fribourg 1994, p. 185). Partant, en l'absence de clauses conventionnelles limitant ou supprimant le droit aux prestations au-delà de la période de couverture, l'assuré qui, après un événement ouvrant le droit aux prestations, sort d'une assurance collective parce qu'il cesse d'appartenir au cercle des assurés défini par le contrat, peut faire valoir son droit aux prestations également pour les suites de l'événement qui se produisent après l'extinction du rapport d'assurance (ATF 127 III 106 consid. 3).

10.         S’agissant de la couverture d’une incapacité de travail en cours lors de la résiliation des rapports de travail, les CGA de la défenderesse ont la teneur suivante.

10.1 Les CGA 2005 stipulent ce qui suit.

L’art. 5 ch. 1 précise que le cercle des personnes assurées est mentionné dans la police. Elles ont qualité de personnes assurées si elles sont employées dans l’entreprise et n’ont pas atteint l’âge AVS ou pris leur retraite anticipée.

Selon le chiffre 1 de l’art. 10 « Début et fin de la couverture d'assurance », la couverture d'assurance débute pour chaque assuré le jour de son entrée au service de l'entreprise, mais au plus tôt au moment de l'entrée en vigueur de la police. […]. Aux termes de l’art. 10 ch. 2, la couverture d'assurance ainsi que le droit aux prestations cessent pour chaque assuré : lorsque l'assuré cesse d'appartenir au cercle des assurés (let. a), à la résiliation ou à la suspension du contrat (let. b), dès l'interruption de travail volontaire ne donnant pas droit à un salaire (let. c), à l'expiration d'un contrat de travail de durée déterminée (let. d).

Aux termes de l’art. 11 réglant le passage à l’assurance individuelle, s'il cesse d'appartenir au cercle des assurés, a le droit de poursuivre sa couverture d'assurance en qualité de membre individuel : l'assuré, qui en vertu de la loi sur le chômage (LACI) est réputé chômeur, et l'assuré en incapacité de travail ou qui justifie d'un revenu en Suisse à la sortie du contrat collectif sous réserve de l'al. 6 (ch. 1). Le droit au libre passage n’existe pas pour les personnes au bénéfice d’un contrat de durée déterminée (ch. 6 let. c).

10.2 Les CGA 2011 ont la teneur suivante.

L’art. 5 ch. 1 précise que le cercle des personnes assurées est mentionné dans la police.

L’art. 10 ch. 3 let. a dispose que la couverture d'assurance ainsi que le droit aux prestations cessent notamment lorsque l'assuré cesse d'appartenir au cercle des assurés.

Aux termes de l’art. 11 réglant le passage à l’assurance individuelle, s'il cesse d'appartenir au cercle des assurés, a le droit de poursuivre sa couverture d'assurance en qualité de membre individuel : l'assuré, qui en vertu de la loi sur le chômage (LACI) est réputé chômeur, et l'assuré en incapacité de travail ou qui justifie d'un revenu en Suisse à la sortie du contrat collectif sous réserve de l'al. 6 (ch. 1). Le droit au libre passage n’existe pas pour les personnes au bénéfice d’un contrat de durée déterminée (ch. 6 let. c).

10.3 Les CGA 2016 ont la teneur suivante.

L’art. 5 précise au ch. 1 que le cercle des personnes assurées est mentionné dans la police.

L’art. 11 dispose à son chiffre 2 let. a « Fin de la couverture d'assurance » que la couverture d'assurance cesse pour chaque assuré à la fin du contrat de travail. Le chiffre 3 « Fin du droit aux prestations » précise que le droit aux prestations cesse pour chaque assuré notamment à l’épuisement du droit maximal aux prestations (let. b) ; ou à la fin des rapports de travail de trois mois ou moins (let. d).

L’art. 12 règle le droit au libre passage.

11.         En l’espèce, il convient en préambule de déterminer quelle version des CGA est applicable au présent litige. Il est souligné que le droit aux indemnités journalières se poursuit nonobstant la fin du contrat de travail en application des CGA 2016, leur art. 11 ch. 3 prévoyant la fin du droit aux prestations pour un tel motif uniquement lorsque les rapports de service ont duré trois mois ou moins. En application de cette clause a contrario, le licenciement du demandeur n’entraînerait pas la fin du versement des indemnités journalières, puisqu’il était au service de son employeur depuis 2003. En revanche, l’applicabilité des CGA 2011 conduirait à la fin du droit aux prestations au 30 novembre 2021, dès lors que la fin des rapports de travail à cette date entraîne l’extinction de la couverture d’assurance selon leur art. 10 ch. 3 let. a.

11.1 On relèvera que dans sa réponse, la défenderesse a admis l’applicabilité des CGA 2016, puisqu’elle a admis l’allégué 2 de la demande relatif au contenu du contrat, lequel offrait à titre de preuve ces CGA, et qu’elle n’a pas contesté l’allégué 4 de la demande qui en cite le contenu, mais s’est uniquement rapportée à la pièce produite, soit lesdites CGA. Par ailleurs, elle a elle-même cité les CGA 2016 à l’allégué 5 de sa propre réponse.

La défenderesse est cependant revenue sur cet allégué 5 lors de l’audience du 23 avril 2024. L’allégation d’un fait nouveau – résultant plus exactement dans le cas d’espèce de la correction d’un allégué – est intervenue dans les délais prévus par la loi, soit avant le début des délibérations. Il n’y a ainsi pas à l’écarter en raison de sa tardiveté. La chambre de céans constate cependant que la défenderesse n’est pas revenue sur son admission de l’allégué 2 de la demande, impliquant l’applicabilité de ces CGA, si bien que son aveu subsiste sur ce point. Quant à l’allégué 4 de la demande citant le contenu des CGA, il n’a pas non plus été valablement contesté par la défenderesse.

Par ailleurs, bien que la modification de l’allégué de la défenderesse ait été formulée à temps au plan procédural, on peut se demander si sa soudaine volte‑face en cours de procédure quant à l’inapplicabilité des CGA 2016, qu’elle n’avait jusqu’alors pas contestée, décevant ainsi des expectatives qu’elle a créées à ce sujet chez le demandeur, contrevient à l’interdiction de « venire contra factum proprium ». Cette dernière question n’a cependant pas à être tranchée en l’espèce, au vu de l’issue du litige.

12.         La défenderesse soutient que le contrat-cadre n’aurait pas connu de modification entre 2011 et 2022, de sorte que les CGA 2011 seraient restées applicables.

Elle en veut notamment pour preuve que c’est cette version des CGA qui aurait été fournie au demandeur en complément à la proposition de passage dans l’assurance individuelle qu’elle lui a adressée le 18 novembre 2021. Or, ladite proposition se réfère aux CGA sur l’assurance collective d’une indemnité journalière maladie selon la LCA, sans toutefois en spécifier l’édition, de sorte que cet argument ne suffit pas à se convaincre de la thèse de la défenderesse. Le fait que la proposition du 18 novembre 2021 ait été produite avec les CGA de 2011 sous un seul numéro de pièce dans le bordereau de la défenderesse ne permet en outre pas de retenir que ce sont bien ces conditions qui ont été remises au demandeur.

Quoi qu’il en soit, même s’il fallait admettre que tel est le cas, cela ne suffirait pas encore à considérer qu’elles s’appliquent au présent litige. Certes, un preneur d’assurance qui signerait une proposition dont font partie intégrante des CGA anciennes, auxquelles l’assurance se serait référée par erreur, est en principe lié par son engagement contractuel et ne saurait se prévaloir d’autres conditions générales plus récentes. Toutefois, le contenu d’une proposition de police d’assurance ne permet pas d’établir au degré de preuve requis le contenu d’un autre contrat d’assurance.

12.1 La chambre de céans a requis de la défenderesse la production de toutes les versions des CGA applicables depuis 2005 et de toutes les modifications du contrat-cadre ou d’autres clauses contractuelles. C’est le lieu de rappeler que selon l’art. 160 al. 1 let. b CPC, les parties et les tiers sont tenus de collaborer à l’administration des preuves. Ils ont en particulier l’obligation de produire les titres requis, à l’exception des documents concernant des contacts entre une partie ou un tiers et un avocat autorisé à les représenter à titre professionnel ou un conseil en brevets au sens de l’art. 2 de la loi du 20 mars 2009 sur les conseils en brevets.

Aux termes de l’art. 164 CPC, si une partie refuse de produire les titres requis sans motif valable, le tribunal en tient compte lors de son appréciation des preuves. Le refus de produire des pièces, de nature procédurale, ne touche pas au fardeau de la preuve et n’implique pas un renversement de celui-ci (ATF 142 III 568 cons. 2.1). L’art. 164 CPC n’implique pas nécessairement que le juge doive considérer les allégations de la partie adverse comme véridiques, car ce refus n’est qu’un élément parmi d’autres dans la libre appréciation des preuves prévue à l’art. 157 CPC (ATF 140 III 264 consid. 2.3). L’appréciation des preuves pourra cependant amener le juge à tenir des faits non établis pour avérés au détriment de la partie qui se refuse à collaborer, en dépit du fait qu’en vertu de l’art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), le fardeau de la preuve objectif incombait à la partie adverse (Nicolas JEANDIN in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 7 ad art. 164 CPC).

12.2 La défenderesse ne s’est pas conformée à la réquisition de la chambre de céans, puisqu’elle s’est contentée de verser à la procédure les CGA de 2005, de 2011 et de 2021, sans produire la moindre pièce afférente à une éventuelle modification du contrat-cadre entre 2011 et 2021. Certes, la preuve d’un fait négatif est souvent considérée comme pratiquement impossible par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 6B_867/2009 du 3 décembre 2009 consid. 2.5). Cela étant, ce principe ne s’applique pas en l’espèce à la démonstration que le contrat-cadre n’aurait pas subi de modifications. En effet, la défenderesse aurait pu transmettre à la chambre de céans des courriers avec l’association du second-œuvre au sujet de la poursuite sans changement du contrat – étant souligné qu’il n’est guère plausible qu’un contrat d’assurance d’une telle importance n’ait donné lieu à aucune correspondance entre les parties contractantes entre 2011 et 2022, fût-ce pour confirmer son maintien ou exiger le paiement des primes correspondantes par l’envoi de factures. Même s’il fallait admettre que la défenderesse n’a eu aucun échange de vues avec l’association du second-œuvre à ce sujet pendant plus de dix ans, celle-ci aurait à tout le moins pu donner des explications sur le renouvellement tacite aux mêmes conditions. On soulignera que la réunion de pièces et de renseignements, dont on doit admettre qu’elles sont en possession de la défenderesse en sa qualité de partie contractante, ne posait aucune difficulté particulière – ce que la défenderesse n’affirme du reste pas.

Au vu des circonstances, la récalcitrance de la défenderesse à se conformer aux réquisitions de preuve instille de très importants doutes sur l’absence de modification du contrat-cadre et l’applicabilité des CGA 2011.

Ces doutes sont de plus confortés par le fait que plusieurs parties au contrat se sont succédé en qualité d’assurance. Dans ces circonstances, il n’est guère plausible qu’aucune modification ne soit intervenue, laquelle aurait selon toute vraisemblance entraîné l’adaptation aux CGA actualisées de la défenderesse. Les déclarations de celle-ci quant au caractère très spécifique du contrat-cadre ne permettent pas de parvenir à une autre conclusion, dès lors que ce contrat applique non pas des clauses individuelles mais des CGA « standards », dont le contenu n’est pas spécifiquement adapté aux corps de métiers couverts par le second‑œuvre. On relèvera que les CGA 2016 ont le même objet que les CGA 2005 et 2011 – soit le versement d’indemnités journalières en cas de maladie – si bien qu’on ne voit pas pour quels motifs elles ne s’appliqueraient pas aux polices conclues postérieurement à leur édition.

Dans son écriture du 3 mai 2024, la défenderesse a fait valoir que la chambre de céans, dans un arrêt du 19 décembre 2016 (ATAS/1078/2016), avait admis l’applicabilité des CGA 2005. Outre le fait que cette jurisprudence est en contradiction avec la position de la défenderesse, puisque celle-ci soutient dans cette même écriture que les CGA 2011 régissaient le droit aux indemnités journalières de 2011 à 2022 (recte : 2021), cette jurisprudence ne lui est d’aucun secours, puisque l’incapacité de travail litigieuse dans cette cause était antérieure à la nouvelle édition de 2016 de ses CGA.

On ajoutera que la mise en œuvre d’une expertise psychiatrique pour déterminer la capacité de travail du demandeur après le 30 novembre 2021 – mesure inutile si les CGA 2011 s’appliquaient, eu égard à l’extinction de la couverture d’assurance lors de la résiliation des rapports de travail –, est un élément supplémentaire plaidant pour l’applicabilité des CGA 2016.

Enfin, deux points permettent de considérer que le contrat-cadre a subi des modifications après 2011. En premier lieu, le contrat-cadre n°1______ prévoyait des durées de validité relativement brèves puisqu’elles sont de deux ou trois ans, et un renouvellement à son expiration. La chambre de céans retiendra ainsi qu’une nouvelle échéance – entraînant la nécessité d’un renouvellement – a été stipulée lors du renouvellement à fin 2013. En second lieu, l’avenant valable dès le 1er janvier 2022 – que la défenderesse a elle-même produit à l’appui de sa réponse – se réfère au contrat-cadre n° 2______. Le nouveau numéro de police révèle bien qu’un nouveau contrat a été conclu, contrairement à ce que la défenderesse soutient. En outre, cet avenant a été conclu en raison de la promulgation de nouvelles CGA, ce qui tend également à démontrer que la défenderesse a pour pratique d’adapter ses polices en cas de modification de ses CGA.

Conformément à ce qui précède, la chambre retiendra dans le cas d’espèce, en tenant compte du défaut de collaboration de la défenderesse, que le renouvellement du contrat-cadre s’est poursuivi après 2013 à un rythme trisannuel, voire bisannuel. Une telle fréquence implique au moins un renouvellement du contrat après septembre 2016, date d’édition des CGA 2016. On soulignera ici qu’il n’est allégué par aucune des parties que d’autres CGA auraient été établies entre cette date et le 1er janvier 2022, date de la nouvelle édition ayant fait l’objet de l’avenant au nouveau contrat-cadre.

Partant, eu égard à la règle générale dégagée par la doctrine et la jurisprudence, selon laquelle les CGA en vigueur au moment de la conclusion d’un contrat d’assurance lui sont applicables, et notamment au fait que le contrat-cadre n° 2______ a fait l’objet d’un avenant pour y intégrer dès 2022 les nouvelles CGA établies dans l’intervalle, et à l’aveu de la défenderesse quant à l’applicabilité des CGA 2016 alléguée par le demandeur, on doit considérer comme établi que les CGA 2016 sont applicables dans le présent cas, et la défenderesse échoue à démontrer que tel ne serait pas le cas.

13.         Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d’examiner le droit aux prestations à l’aune des CGA dans leur édition du 1er janvier 2016, lequel est subordonné conformément à leur art. 1 à l’existence d’une incapacité de travail.

13.1 Dans son expertise, le Dr D______ a admis l’incapacité de travail totale du demandeur. Il a cependant émis un pronostic selon lequel la capacité de travail du demandeur s’amenderait progressivement quelque quatre mois plus tard. Ce médecin a ainsi conclu à une incapacité de travail, puis de 50% dès la mi‑avril 2022, puis de 100% dès la mi-mai 2022. Force est de constater qu’un tel pronostic, même s’il est fondé sur des connaissances scientifiques, ne relève que d’une supposition sur la survenance d’un fait futur.

Cela étant, la chambre de céans peut s’épargner l’examen de la capacité de travail du recourant après la mi-avril 2022, pour les motifs suivants.

13.2 Aux termes de l’art. 3 ch. 10 des CGA 2016, une incapacité rattachée médicalement à un cas d'assurance antérieur est considérée comme une rechute. La rechute ne sera considérée comme nouveau cas d'assurance que si elle intervient après un délai de 365 jours depuis la fin du droit aux prestations du cas d'assurance antérieur.

On relèvera que l’art. 5 du contrat-cadre n° 1______ avait la même teneur.

Cette clause ne prévoit certes pas expressément les conséquences attachées à la qualification de rechute, s’agissant de l’imputation des indemnités journalières déjà versées en lien avec la même atteinte. Toutefois, le Tribunal fédéral a admis qu’une clause à la teneur très similaire, ne prévoyant pas expressément l’imputation des indemnités journalières déjà versées, devait permettre à l’assurance de ne pas fournir des prestations plus d’une fois par année en rapport avec la même maladie (arrêt du Tribunal fédéral 4A_107/2020 du 23 juin 2020 consid. 7 et 7.2). On doit ainsi admettre que dans le cas d’espèce, des indemnités journalières déjà versées pour une même atteinte doivent également être déduites du nombre total d’indemnités journalières stipulées, soit 720 selon les déclarations concordantes des parties lors de l’audience du 23 avril 2024.

S’agissant du versement des indemnités journalières du 23 mars 2019 au 1er mars 2020, soit durant 345 jours, le demandeur a contesté cette allégation dans sa réplique. Il a toutefois implicitement admis dans ses déterminations ultérieures que de telles indemnités journalières avaient été versées, mais il soutient désormais qu’il ne s’agirait pas d’une rechute, dès lors que l’élément déclencheur des troubles psychiques serait la séparation de son épouse, s’agissant de la première incapacité de travail, et de problèmes au travail pour la seconde incapacité de travail.

Le demandeur ne peut toutefois être suivi sur ce point, dès lors que l’atteinte, et non l’événement à son origine, est déterminante pour analyser si l’on est en présence d’une rechute. Or, le Dr D______ – non contredit par la Dre E______ sur ce point – a retenu un trouble dépressif récurrent, lequel est défini par la CIM-10 (classification internationale des maladies) comme un trouble caractérisé par la survenance répétée d'épisodes dépressifs. Cet expert a mentionné un épisode dépressif sévère et une pathologie alcoolique lors de la première incapacité de travail dès mars 2019, soit des troubles de même nature qu’en 2021. On peut ici souligner qu’en matière de troubles psychiques, la jurisprudence a considéré qu’un épisode dépressif moyen en 2018 relevait de la même maladie qu’un épisode dépressif en 2001 et qu’un épisode dépressif grave avec symptômes psychotiques et trouble de la personnalité (F 61.0) en 2015, de sorte que l’épisode dépressif de 2018 était une rechute (arrêt du Tribunal cantonal des assurances sociales de Zurich KK.2020.00007 du 23 novembre 2020 consid. 4.2 et 4.3, rendu dans une procédure portant sur le droit aux indemnités journalières en cas de maladie). On peut également se référer par analogie à la pratique en matière de prévoyance professionnelle. Dans ce domaine, le droit aux prestations d’invalidité est notamment subordonné à l’existence d’un lien de connexité matérielle entre l’invalidité et l’incapacité de travail survenue pendant les rapports de travail (cf. art. 23 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP ‑ RS 831.40]). La jurisprudence a retenu un tel lien de connexité entre un trouble dysthymique apparu pendant les rapports de travail et une invalidité liée à un épisode dépressif sévère sans symptôme psychotique, une personnalité dépendante et un retard mental diagnostiqués plus tard (arrêt du Tribunal fédéral 9C_930/2011 du 14 décembre 2012). Elle a également admis une connexité matérielle entre des symptômes dépressifs apparus pendant les rapports de travail et des troubles dépressifs ayant atteint un degré moyen après la résiliation du contrat de travail (arrêt du Tribunal fédéral 9C_484/2012 du 26 mars 2013 consid. 4.1).

Partant, la réapparition d’un épisode dépressif chez le demandeur le 16 février 2021 relève de la même atteinte que celle qui a justifié le premier arrêt de travail. Il s’agit dès lors d’une rechute, ce qui implique que les 345 indemnités journalières déjà versées du 23 mars 2019 au 1er mars 2020 doivent être imputées sur le droit total aux prestations. En revanche, il n’est aucunement établi que les quatre jours d’arrêt de travail en novembre 2020 mentionnés par la défenderesse relèvent de la même atteinte, si bien qu’ils ne doivent pas être déduits du droit restant aux prestations.

Compte tenu des 345 indemnités journalières versées pour la première incapacité de travail dès mars 2019, et des 286 indemnités journalières versées à partir du 19 février 2021, le demandeur a droit à un solde de 89 indemnités journalières dès le 1er décembre 2021. Le droit à ces prestations est dès lors épuisé le 27 février 2022, étant rappelé que l’incapacité de travail à cette date est encore établie selon les conclusions du Dr D______.

Le demandeur a ainsi droit à un montant de CHF 15'633.75 (soit 89 indemnités à CHF 175.66).

Le droit à des indemnités journalières au-delà du 27 février 2022 étant exclu, l’audition des Drs D______ et E______ et la mise en œuvre d’une expertise s’avèrent superflues, par appréciation anticipée des preuves (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4A_271/2022 du 15 août 2023 consid. 5.2.1).

14.         Le demandeur a conclu à des intérêts moratoires de 5% dès le 22 mars 2022, date moyenne.

14.1 Les CGA ne stipulent pas de terme pour l'exigibilité des indemnités journalières.

L'art. 41 al. 1 LCA dispose que la créance qui résulte du contrat est échue quatre semaines après le moment où l'assureur a reçu les renseignements de nature à lui permettre de se convaincre du bien-fondé de la prétention.

Les renseignements au sens de cette disposition visent des questions de fait, qui doivent permettre à l'assureur de se convaincre du bien-fondé de la prétention de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral 4A_489/2017 du 26 mars 2018 consid. 4.3).

Dans des cas où les assurances s’étaient fondées sur des expertises mises en œuvre par leurs soins, dont les conclusions étaient contredites par les médecins traitants des assurés, le Tribunal fédéral a retenu que ce n’était pas à la date de réception du rapport d’expertise judiciaire seulement que ces assurances pouvaient se convaincre du droit aux prestations de leurs assurés respectifs, et en a conclu que les prestations étaient immédiatement exigibles (arrêts du Tribunal fédéral 4A_58/2019 du 13 janvier 2020 consid. 4.3 et 4A_307/2008 du 27 novembre 2008 consid. 6.3.2).

En l’espèce, selon les conclusions de l’expert désigné par la défenderesse elle‑même, qui n’en conteste du reste pas la pertinence, l’incapacité de travail restait totale après le 30 novembre 2021. Force est ainsi d’admettre que celle-ci disposait des renseignements démontrant le bien-fondé du versement des indemnités journalières dès réception du rapport du Dr D______ en décembre 2021. Les indemnités journalières étaient ainsi immédiatement exigibles.

14.2 L'intérêt moratoire de 5% l'an (art. 104 al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations - RS 220) est dû à partir du jour suivant celui où le débiteur a reçu l'interpellation, ou, en cas d'ouverture d'une action en justice, dès le lendemain du jour où la demande en justice a été notifiée au débiteur (arrêt du Tribunal fédéral 5C.177/2005 du 25 février 2006 consid 6.1). Toutefois, lorsque l'assureur refuse définitivement, à tort, d'allouer des prestations, on admet, par analogie avec l'art. 108 ch. 1 CO, qu'une interpellation n'est pas nécessaire ; l'exigibilité et la demeure sont alors immédiatement réalisées (arrêt du Tribunal fédéral 4A_16/2017 du 8 mai 2017 consid. 3.1).

En l’espèce, le demandeur a adressé une interpellation à la défenderesse le 22 mars 2022. Cela étant, eu égard au refus juridiquement infondé de celle-ci de verser les prestations dues, force est d’admettre que l’intérêt moratoire court avant même cette interpellation.

Les intérêts moratoires peuvent être fixés selon une date moyenne lorsqu’ils portent sur des prestations périodiques (cf. ATF 131 III 12 consid 9.5 en matière d’intérêt compensatoire). Compte tenu des 89 indemnités dues dès le 1er décembre 2021, la date moyenne correspond au 13 janvier 2022.

Le demandeur ayant conclu au versement d’intérêts dès le 22 mars 2022 seulement, la chambre de céans rappellera que le principe de disposition ancré à l’art. 58 al. 1 CPC interdit au juge de statuer ultra petita. Cela étant, il est admis que, pour décider si le juge a statué ultra petita, il faut comparer la somme globale accordée avec le montant des conclusions (arrêt du Tribunal fédéral 5A_277/2019 du 25 septembre 2019 consid. 3.3). Compte tenu du fait que les prétentions du demandeur ne sont pas allouées en plein et que le montant total du versement incluant les intérêts auquel est condamnée la défenderesse leur est largement inférieur, l’octroi d’intérêts à compter d’une date antérieure à celle figurant dans les conclusions de la demande ne porte pas atteinte au principe de disposition.

15.         L'art. 95 al. 3 let. b CPC prévoit que les dépens – inclus dans les frais selon l’alinéa premier de cette disposition – comprennent le défraiement d'un représentant professionnel. Le droit à une indemnité pour frais d'avocat découle ainsi du droit fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 4C_1/2011 du 3 mai 2011 consid. 6.2). Les cantons sont compétents pour fixer le tarif des frais comprenant les dépens (cf. art. 96 CPC). 

15.1 À Genève, le règlement fixant le tarif des frais en matière civile du 22 décembre 2010 (RTFMC - E 1 05.10) détermine notamment le tarif des dépens, applicable aux affaires civiles contentieuses (art. 1 RTFMC). Son art. 84 dispose que le défraiement d'un représentant professionnel est, en règle générale, proportionnel à la valeur litigieuse. Sans effet sur les rapports contractuels entre l'avocat et son client, il est fixé d'après l'importance de la cause, ses difficultés, l'ampleur du travail et le temps employé. L’art. 85 RTFMC dispose que pour les affaires pécuniaires, le défraiement prend pour base le tarif ci-dessous. Sans préjudice de l’art. 23 de la loi d’application du code civil du 11 octobre 2012 [LaCC - E 1 05], il peut s'en écarter de plus ou moins 10% pour tenir compte des éléments rappelés à l’art. 84. Pour une valeur litigieuse entre CHF 10'000.- et CHF 20'000.-, le défraiement est de CHF 2'400.- plus 15% de la valeur litigieuse dépassant CHF 10'000.-.

15.2 La valeur litigieuse étant de CHF 15'633.75, les dépens prévus selon le tarif cantonal sont de CHF 3'245.05. Cela étant, compte tenu des spécificités de la cause, et des écritures supplémentaires rendues nécessaires par le changement de position de la défenderesse en cours de procédure, il se justifie d’augmenter ces dépens de 10%, ce qui les porte à CHF 3'570.-.

15.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 114 let. e CPC).

 

 

 


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Condamne la défenderesse à verser au demandeur la somme de CHF 15'633.75 avec intérêts à 5% l'an dès le 13 janvier 2022.

4.        Condamne la défenderesse à verser au demandeur une indemnité de dépens de CHF 3'570.-.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le