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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2930/2022

ATAS/268/2024 du 24.04.2024 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

 

 

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2930/2022 ATAS/268/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 avril 2024

Chambre 4

 

En la cause

A______

représenté par Me Maëlle KOLLY, avocate

 

 

recourante

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant) est né le ______ 1969, de nationalité kosovare, au bénéfice d’un permis B, marié et père d’une fille, née en 2016. Il réside en Suisse depuis 1995 et travaillé dans le bâtiment jusqu’en 2015, d’abord comme manœuvre, puis comme maçon et finalement comme contremaître et chef d’équipe pour l’entreprise B______ du 1er janvier 2003 au 22 février 2015. Depuis juin 2021, il exploite une entreprise.

B. a. Il a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 15 juillet 2015 en raison de sciatalgies droites ayant entraîné une incapacité de travail totale depuis le 20 février 2015.

b. Dans un rapport du 29 juillet 2015, la docteure C______, neurologue, a posé les diagnostics de lombosciatalgies droites et de hernie discale L4-L5 ayant une répercussion sur la capacité de travail de l’assuré.

c. Dans un rapport du 3 novembre 2015, le docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a indiqué que l’assuré présentait un trouble anxieux généralisé avec des attaques de panique.

d. Il ressort d’une note de travail de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI ou l’intimé) du 25 janvier 2016 que l’assuré avait une bonne expérience en tant que chef d’équipe dans le bâtiment et qu’il souhaitait la compléter par une formation dans la planification, la gestion et la soumission de chantier.

e. Le 19 février 2016, l’OAI a octroyé à l’assuré un reclassement avec une orientation, en prenant en compte une capacité de travail de 0% dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité adaptée.

f. L’assuré a ainsi suivi une formation de technicien en bâtiment, métreur-chiffreur auprès de l’école E______, du 22 février au 19 octobre 2016, puis fait un stage en entreprise du 20 octobre 2016 au 31 décembre 2017.

g. Il a été inscrit à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) à 100% du 1er janvier 2018 au 6 novembre 2019 et a suivi dans ce cadre un cours pour obtenir un certificat d’agent de maintenance en bâtiment du 18 au 29 juin 2018.

h. Par décision du 7 septembre 2018, l’OAI a nié à l’assuré le droit à une rente d’invalidité, lui reconnaissant une incapacité de travail de 100% dans son activité habituelle dès le 20 février 2015 et une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée dès le 26 novembre 2015.

i. Dans un rapport établi le 29 mai 2019, le Dr D______ a posé le diagnostic de dépression récurrente majeure d’intensité modérée et indiqué que l’assuré était incapable de travailler à 100% depuis 2015, précisant qu’il avait essayé de faire une formation, mais que son état psychique ne lui permettait pas de l’utiliser.

j. Sur recours de l’assuré, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice a, le 21 août 2019, annulé la décision de l’OAI du 7 septembre 2018 et renvoyé la cause à celui-ci pour instruction complémentaire, estimant que les répercussions sur la capacité de travail des troubles somatiques et psychiques de l’assuré n’avaient pas été suffisamment investiguées.

k. Le 2 octobre 2019, l’assuré a été informé par l’OCE que ses indemnités de chômage arriveraient bientôt à leur terme.

l. Le dossier de demandeur d’emploi de l’assuré à l’OCE a été annulé le 6 novembre 2019.

m. Le 18 novembre 2019, le docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur, a certifié que l’assuré était incapable de travailler du 18 au 27 novembre 2019.

n. L’OAI a confié une expertise de l’assuré au docteur G______, rhumatologue, et à la docteure H______, psychiatre, du I______ (I______), lesquels ont conclu, dans un rapport du 21 janvier 2022, que l’assuré avait une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée avec une baisse de rendement de 20% et que l’activité de maçon n’était plus exigible de lui depuis février 2015. Sur le plan psychiatrique, une capacité de travail de 100% était retenue depuis juin 2021.

o. Le 27 janvier 2022, l’OAI a déterminé le degré d’invalidité, en prenant en compte, pour le revenu avec invalidité, l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2018, tableau TA1, pour un homme exerçant dans le domaine de travail correspondant à la ligne 41-43, dans une activité de niveau 2 et la durée normale hebdomadaire de travail en 2018 (41.3 heures), soit un revenu de CHF 73'869.- après annualisation. Il a encore réduit ce montant de 20% pour la diminution de rendement, puis de 10% (abattement pour une activité légère seule possible et le taux d’occupation) pour un total de CHF 53'186.-.

Le revenu sans invalidité a été fixé sur la base du revenu annuel figurant dans le certificat de salaire de l’assuré, soit CHF 73'279.- et CHF 75'141.- après indexation à 2018.

p. Par projet de décision, l’OAI a octroyé à l’assuré un rente entière d’invalidité du 1er février 2016 au 31 mars 2018. Il a retenu que l’assuré était totalement incapable de travailler dans toute activité dès le 20 février 2015 et que dans une activité adaptée à son état de santé, comme celle pour laquelle il avait été réadapté, il avait une capacité de 100% avec une baisse de rendement de 20%. À l’échéance du délai d’attente, le 1er février 2016, il avait droit à une rente entière. Le taux d’invalidité dès 2018 était de 29%, en tenant compte d’un revenu sans invalidité de CHF 75'141.- et d’un revenu avec invalidité de CHF 53'186.-. Son droit à une rente entière était supprimé au 31 mars 2018, soit trois mois après l’amélioration constatée.

q. L’assuré a formé opposition au projet de décision de l’OAI.

r. Par décision du 14 juillet 2022, l’OAI a confirmé son projet de décision.

C. a. Le 14 septembre 2022, l’assuré a recouru contre la décision précitée auprès de la chambre de céans concluant, préalablement, à l’audition des Drs D______ et F______ ainsi qu’à sa comparution personnelle et, principalement, à l’annulation de la décision et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit à une rente entière jusqu’au mois de juin 2021, puis à une demi-rente d’invalidité dès le 1er octobre 2021, avec suite de frais et dépens. Subsidiairement, il concluait au renvoi de la cause à l’intimé pour complément d’expertise.

b. L’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Le recourant a répliqué persistant dans ses conclusions et en produisant un rapport médical.

d. L’intimé a persisté dans ses conclusions.

e. Les parties ont été convoquées par la chambre de céans à une audience le 30 août 2023, à laquelle le recourant ne s’est pas présenté.

f. Le 30 août 2023, la chambre de céans a demandé l’apport du dossier du recourant à l’OCE.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d’invalidité dès le 1er avril 2018.

4.              

4.1 Dans le cadre du développement continu de l’AI, la LAI, le règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance-invalidité (RAI - RS 831.201) et l'art. 17 LPGA notamment ont été modifiés avec effet au 1er janvier 2022 (modifications des 19 juin 2020 et 3 novembre 2021 ; RO 2021 705 et RO 2021 706).

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence).

Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2).

Dans les cas de révision selon l'art. 17 LPGA, conformément aux principes généraux du droit intertemporel (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), il convient d’évaluer, selon la situation juridique en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, si une modification déterminante pour le droit à la rente est intervenue jusqu’à cette date. Si tel est le cas, les dispositions de la LAI et celles du RAI dans leur version valable jusqu'au 31 décembre 2021 sont applicables. Si la modification déterminante est intervenue après cette date, les dispositions de la LAI et du RAI dans leur version en vigueur à partir du 1er janvier 2022 sont applicables. La date de la modification se détermine selon l'art. 88a RAI (arrêts du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2 et 8C_644/2022 du 8 février 2023 consid. 2.2.3).

Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5; ATF 113 V 273 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

4.2 En l’occurrence, la décision querellée est postérieure au 1er janvier 2022, mais elle concerne le droit à une rente d’invalidité né le 1er février 2016, avec des changements de circonstance pouvant être survenus en 2018 et en juin 2021, de sorte que c’est le droit en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 qui est applicable.

5.              

5.1  

5.1.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

L’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40 % au moins (art. 28 al.  2 LAI).

5.2  

5.2.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 102 V 165 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

5.2.2 Il y a lieu d'examiner la capacité de travail et la capacité fonctionnelle de la personne concernée dans le cadre d'une procédure structurée d'administration des preuves à l'aide d'indicateurs (ATF 141 V 28), car celles-ci ne peuvent en principe être déterminées ou prouvées sur la base de critères objectifs que de manière limitée. La question des effets fonctionnels d'un trouble doit dès lors être au centre. La preuve d'une invalidité ouvrant le droit à une rente ne peut en principe être considérée comme rapportée que lorsqu'il existe une cohérence au niveau des limitations dans tous les domaines de la vie. Si ce n'est pas le cas, la preuve d'une limitation de la capacité de travail invalidante n'est pas rapportée et l'absence de preuve doit être supportée par la personne concernée (ATF 143 V 409 consid. 4.5 et ATF 143 V 418 consid. 6 et 7).

Même si un trouble psychique, pris séparément, n'est pas invalidant en application de la nouvelle jurisprudence, il doit être pris en considération dans l'appréciation globale de la capacité de travail, qui tient compte des effets réciproques des différentes atteintes. Ainsi, une dysthymie, prise séparément, n'est pas invalidante, mais peut l'être lorsqu'elle est accompagnée d’un trouble de la personnalité notable. Par conséquent, indépendamment de leurs diagnostics, les troubles psychiques entrent déjà en considération en tant que comorbidité importante du point de vue juridique si, dans le cas concret, on doit leur attribuer un effet limitatif sur les ressources (ATF 143 V 418 consid. 8.1).

Il convient dorénavant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs limitant les capacités fonctionnelles et, d'autre part, les potentiels de compensation (ressources), à l’aide des indicateurs développés par le Tribunal fédéral suivants :

Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l’étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour le diagnostic. Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l’atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés.

Il convient encore d'examiner le succès du traitement et de la réadaptation ou la résistance à ces derniers. Ce critère est un indicateur important pour apprécier le degré de gravité. L’échec définitif d’un traitement indiqué, réalisé lege artis sur un assuré qui coopère de manière optimale, permet de conclure à un pronostic négatif. Si le traitement ne correspond pas ou plus aux connaissances médicales actuelles ou paraît inapproprié dans le cas d’espèce, on ne peut rien en déduire s’agissant du degré de gravité de la pathologie. Les troubles psychiques sont invalidants lorsqu'ils sont graves et ne peuvent pas ou plus être traités médicalement. Des déductions sur le degré de gravité d’une atteinte à la santé peuvent être tirées non seulement du traitement médical mais aussi de la réadaptation.

La comorbidité psychique ne doit être prise en considération qu’en fonction de son importance concrète dans le cas d’espèce, par exemple pour juger si elle prive l’assuré de ressources. Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l’influence du trouble psychique avec l’ensemble des pathologies concomitantes. Un trouble qui, selon la jurisprudence, ne peut pas être invalidant en tant que tel n’est pas une comorbidité, mais doit à la rigueur être pris en considération dans le cadre du diagnostic de la personnalité.

Il convient ensuite d'accorder une importance accrue au complexe de personnalité de l’assuré (développement et structure de la personnalité, fonctions psychiques fondamentales). Le concept de ce qu’on appelle les « fonctions complexes du Moi » (conscience de soi et de l’autre, appréhension de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation) entre aussi en considération. Comme les diagnostics relevant des troubles de la personnalité sont, plus que d’autres indicateurs, dépendants du médecin examinateur, les exigences de motivation sont particulièrement élevées.

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles ne doivent pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l’assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social. Il faut s’assurer qu’une incapacité de travail pour des raisons de santé ne se confond pas avec le chômage non assuré ou avec d’autres difficultés de vie.

Il s’agit, encore, de se demander si l’atteinte à la santé limite l’assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l’exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l’assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d’activité sociale de l’assuré avant et après la survenance de l’atteinte à la santé.

Il faut examiner ensuite la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, pour évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons que l'atteinte à la santé assurée.

5.2.3 Le juge vérifie librement si l’expert médical a exclusivement tenu compte des déficits fonctionnels résultant de l’atteinte à la santé et si son évaluation de l’exigibilité repose sur une base objective.

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 et 141 V 281 consid. 2.2 et 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_841/2016 du 30 novembre 2017 consid. 4.5.2).

Ce diagnostic doit être justifié médicalement de telle manière que les personnes chargées d’appliquer le droit puissent vérifier que les critères de classification ont été effectivement respectés. Il suppose l’existence de limitations fonctionnelles dans tous les domaines de la vie (tant professionnelle que privée). Les médecins doivent en outre prendre en considération les critères d’exclusion de ce diagnostic retenus par la jurisprudence (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1. et 2.2). Ainsi, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les difficultés décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses difficultés dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (cf. ATF 131 V 49 consid. 1.2).

5.3 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 125 V 261 consid. 4). La tâche du médecin dans le cadre d'une révision de la rente selon l'art. 17 LPGA consiste avant tout à établir l'existence ou non d'une amélioration de l'état de santé de l'assuré en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision initiale avec la situation au moment de son examen (ATF 125 V 369 consid. 2).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3).

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

En cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).

5.4 L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Il convient ici de relever que l’entrée en vigueur de l’art. 17 LPGA, le 1er janvier 2003, n’a pas apporté de modification aux principes jurisprudentiels développés sous le régime de l’ancien art. 41 LAI, de sorte que ceux-ci demeurent applicables par analogie (ATF 130 V 343 consid. 3.5).

Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3; ATF 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; ATF 112 V 371 consid. 2b; ATF 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références). Un changement de jurisprudence n'est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).

Le point de savoir si un changement notable des circonstances s’est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l’époque de la décision litigieuse. En effet, la base de comparaison déterminante dans le temps pour l'examen d'une modification du degré d'invalidité lors d'une révision de la rente est constituée par la dernière décision entrée en force qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et la référence).

Lorsque les faits déterminants pour le droit à la rente se sont modifiés au point de faire apparaître un changement important de l'état de santé motivant une révision, le degré d'invalidité doit être fixé à nouveau sur la base d'un état de fait établi de manière correcte et complète, sans référence à des évaluations antérieures de l'invalidité (ATF 141 V 9).

5.5 Si les conditions de la révision sont données, les prestations sont, conformément à l’art. 17 al. 1 LPGA, modifiées pour l’avenir dans le sens exigé par le nouveau degré d’invalidité. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s’écartant de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 806/04 du 15 mars 2005 consid. 2.2.).

Dans le domaine de l’assurance-invalidité, le point de départ d’une modification du droit aux prestations est fixé avec précision. En cas de modification de la capacité de gain, la rente doit être supprimée ou réduite avec effet immédiat si la modification paraît durable et par conséquent stable (art. 88a al. 1 phr. 1 RAI); on attendra en revanche trois mois au cas où le caractère évolutif de l'atteinte à la santé, notamment la possibilité d'une aggravation, ne permettrait pas un jugement immédiat (art. 88a al. 1 phr. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 666/81 du 30 mars 1983 consid. 3, in RCC 1984 p. 137 s.). En règle générale, pour examiner s'il y a lieu de réduire ou de supprimer la rente immédiatement ou après trois mois, il faut examiner pour le futur si l'amélioration de la capacité de gain peut être considérée comme durable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1).

6.             En l’espèce, le recourant conteste les résultats de l’expertise bidisciplinaire du I______, dont il convient d’examiner la valeur probante.

6.1 La chambre de céans constate que le rapport d’expertise répond de prime abord aux réquisits permettant de lui reconnaître une pleine valeur probante et examinera ci-après les critiques formulées à son encontre par le recourant.

6.2  

6.2.1 Celui-ci a fait valoir que l’évaluation de la baisse de rendement faite par le Dr G______, qui l’évaluait à 20%, ne tenait pas compte de l’ensemble de ses limitations fonctionnelles. L’expert n'avait motivé ce pourcentage qu’en raison de la fatigue et des crises récidivantes symptomatiques, sans tenir compte d’une diminution de rendement due à la nécessité d’alterner ses positions, alors qu’il avait retenu cette limitation fonctionnelle.

Selon l’intimé, l’expertise était probante et les limitations fonctionnelles retenues par l’expert rhumatologue ne justifiaient pas de diminution de rendement dans une activité strictement adaptée.

6.2.2 Dans son rapport, le Dr G______ a retenu que la capacité de travail du recourant en tant que patron d’une entreprise de construction était réduite de 20% en raison de la fatigue et des crises récidivantes symptomatiques depuis février 2015. Les limitations fonctionnelles étaient le port fréquent de charges de plus 10 kg et la station debout et assise prolongée. Dans l’exercice d’une activité respectant ces limitations, la capacité de travail était entière depuis toujours. Le temps de présence maximal possible dans l’activité envisagée était complet, moins 20% en raison de la réduction de la performance.

La chambre de céans constate que l’expert a ainsi bien pris en compte les limitations fonctionnelles du recourant. Dans la mesure où celles-ci n’empêchaient pas, selon l’expert, une activité respectant ces dernières à 100%, il est cohérent qu’il n’en ait pas tenu compte dans son évaluation de la baisse de rendement. Dès lors que l’activité du recourant en tant que patron d’une entreprise de maçonnerie était adaptée à ses limitations fonctionnelles, il n’y avait pas forcément baisse de rendement en raison du changement de positions nécessaire. Ce grief doit être écarté.

6.3  

6.3.1 Le recourant a encore allégué qu’on ne comprenait pas pour quelle raison l’experte psychiatre jugeait que sa capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle jusqu’en juin 2021 puis de 50% dès cette date, alors que l’évaluation de la capacité de travail dans une activité adaptée était largement différente, évoluant par paliers de 0 et 100%. La description des caractéristiques auxquelles une activité adaptée devait répondre ne permettait pas de comprendre pourquoi il existait une différence entre l’évaluation de la capacité dans l’activité habituelle et dans l’activité adaptée.

6.3.2 Dans son rapport, la Dre H______ a indiqué, en lien avec le rapport établi le 29 mai 2019 par le Dr D______ (qui retenait une incapacité de travail de 100% en raison d’une dépression récurrente majeure d’intensité modérée) que lors de son propre examen, elle n’avait pas retenu que le recourant présentait une incapacité de travail à 100% pour des raisons purement psychiatriques. Celui-ci se décrivait comme quelqu’un de réservé avec une tendance à être préoccupé et reconnaissait que les événements de 2015 l’avaient précipité dans un état de peur et d’incertitude qui avait joué un rôle dans sa difficulté à se rétablir psychiquement. Néanmoins, en juin 2021, ne trouvant pas de travail et ne supportant plus d’être désœuvré, il avait décidé de monter une entreprise de sous-traitance avec des collègues et de créer ainsi une activité à 50% qui lui plaisait et sur laquelle il fondait beaucoup d’espoir. Selon l’experte, le recourant avait ainsi démontré avoir beaucoup de ressources, précisant que son comportement face à la maladie était l’adaptation et la résilience, qu’il avait un sens des réalités et une capacité de jugement, une capacité relationnelle et l’aptitude à nouer des contacts, la capacité de gérer l’affect et à contrôler ses impulsions, une estime de soi, une capacité à l’autocritique, une intentionnalité, un dynamisme et un système de défense qui était la résilience et l’adaptation. Il était capable de structurer et planifier les tâches en utilisant ses compétences. Sa capacité de jugement et sa flexibilité étaient intactes. En revanche, il avait du mal à s’affirmer, à se montrer flexible et à s’adapter avec comme corollaire quelques problèmes légers à établir des relations avec les autres, donc à évoluer au sein d’un groupe. Son endurance était également un peu diminuée. En revanche, il se déplaçait sans difficulté et vivait en harmonie avec ses proches. Il avait suivi et terminé une réinsertion professionnelle avec une bonne maîtrise des outils spécifiques dans le dessin du bâtiment et les techniques de logiciel BIM ainsi qu’une connaissance de la gestion administrative de bureaux d’architectes et d’ingénieurs. N’ayant pas trouvé de travail dans cette branche, il avait créé sa propre entreprise de sous-traitance en juin 2021. Il disait ne plus pouvoir utiliser les connaissances qu’il avait apprises lors de son reclassement. Il était suivi sur le plan psychiatrique selon les règles de l’art. Un soutien psychothérapeutique pourrait cependant l’aider à mieux gérer sa personnalité anxieuse.

Selon la Dre H______, le recourant pouvait travailler 4 heures 10 par jour depuis juin 2021 dans l’activité exercée en dernier lieu. Sa capacité de travail était de 50% dans cette activité depuis juin 2021. Il avait présenté une incapacité de travail de 100% de 2015 à 2017, puis de 50% de 2017 à 2018, période pendant laquelle il avait suivi la formation de réinsertion professionnelle de l’assurance-invalidité. À partir de 2018, le recourant avait présenté une capacité de travail de 50% avec une évolution favorable, puisqu’il avait pu fonder sa propre entreprise à partir de juin 2021. Dans une activité correspondant à ses aptitudes (pas de travail de nuit ni horaires irréguliers, possibilité de faire de courtes pauses pour gérer les différents impacts émotionnels et les relations avec ses commanditaires, pouvoir compter sur une équipe soutenante et rassurante et se sentir reconnu), il pouvait travailler 8 heures 25 par jour depuis juin 2021.

Dans l’anamnèse, la Dre H______ a mentionné que du point de vue professionnel, le recourant avait indiqué avoir toujours travaillé dans le bâtiment et gravi petit à petit la hiérarchie pour devenir chef de groupe. Dans son dernier poste de travail, il était contremaître. Il dirigeait une équipe avec les plans et participait aux réunions avec les architectes. Parfois, il devait donner un coup de main en qualité de maçon. Il avait décidé de fonder une entreprise comme indépendant. Il cherchait des mandats et des sous-traitances auprès d’architectes et de membres de la branche où il plaçait des collègues. Il s’occupait de la partie administrative et travaillait tous les jours de 9h à 12h, ce qui lui convenait.

6.3.3 La chambre de céans constate que de manière générale l’experte aurait pu motiver davantage son rapport. L’on ne perçoit pas, à première lecture, pourquoi elle jugeait différemment la capacité de travail dans l’activité habituelle et dans une activité adaptée. Cela étant, il ressort de son rapport pris dans son ensemble qu’elle a manifestement retenu une capacité moindre pour l’activité habituelle, car celle-ci comprenait une activité partielle de maçon, selon ce qui ressort de l’anamnèse, ce qui n’était pas le cas dans l’activité indépendante entreprise par le recourant dès juin 2021.

L’experte aurait également pu être plus précise sur l’évolution de la capacité de travail du recourant dans le temps, en distinguant les capacités dans l’activité habituelle et dans une activité adaptée, mais elle a donné assez d’éléments dans son rapport pour que l’on puisse comprendre ses conclusions. Il en ressort en effet qu’elle considérait que l’incapacité de travail avait été de 100% de 2015 à 2017 dans l’activité habituelle, puis de 50% dès 2018 et qu’elle retenait une capacité de travail complète dans une activité adaptée dès juin 2021. Il ne se justifie ainsi pas de faire procéder à un complément d’instruction.

6.4  

6.4.1 Le recourant a encore relevé que l’experte psychiatre avait retenu comme limitations fonctionnelles qu’il devait pouvoir faire des pauses courtes pour gérer l’impact émotionnel dû aux relations avec autrui, mais qu’elle n’en avait pas tenu compte dans l’évaluation de la capacité de travail en ne retenant aucune diminution de rendement.

6.4.2 L’experte a indiqué dans son rapport que l’activité correspondant aux aptitudes du recourant devait avoir pour caractéristiques, pour correspondre de manière optimale à son handicap, de pouvoir notamment faire de courtes pauses pour gérer les différents impacts émotionnels que les relations avec les commanditaires impliquaient.

Dès lors qu’elle décrivait l’activité la plus adaptée aux limitations du recourant, il apparaît cohérent que celles-ci pouvaient être gérées dans le cadre de cette activité sans générer de baisse de rendement.

6.5  

6.5.1 Le recourant a fait valoir que l’experte psychiatre avait des conclusions contradictoires sur sa capacité de travail dans une activité adaptée, puisqu’elle retenait une capacité de travail de 100% dans son rapport depuis juin 2021, alors que dans l’évaluation consensuelle, elle retenait une telle capacité depuis 2018.

Selon l’intimé, du point de vue psychiatrique, la capacité de travail du recourant était de 100% dans une activité adaptée depuis 2018. Dans son avis du 1er novembre 2022, le SMR avait indiqué ne pas voir de contradiction entre les conclusions de l’expertise psychiatrique et les conclusions consensuelles sur le plan psychiatrique. En effet, dans son rapport, l’experte avait mentionné les capacités de travail que l’assuré avait effectuées de manière objective et, dans son appréciation consensuelle, c’était l’exigibilité médico-théorique qui était évaluée comme entière dès janvier 2018. En effet, dès cette date, l’assuré avait terminé avec succès les mesures de réadaptation et s’était inscrit au chômage.

6.5.2 La chambre de céans constate que dans l’évaluation consensuelle de l’expertise, il est indiqué que sur le plan psychique, la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était de 100% du point de vue psychiatrique depuis 2018. Les experts ont ensuite conclu, de façon consensuelle après plusieurs discussions, que du point de vue psychiatrique, la capacité de travail dans l’activité habituelle était de 50% depuis juin 2021, date à laquelle le recourant avait fondé sa propre entreprise, et totale dans une activité adaptée. Au terme de l’expertise et rétroactivement, la capacité de travail globale était entière dans une activité adaptée avec une réduction de la performance de 20%.

Les experts auraient dû être plus précis, en fixant à partir de quand la capacité de travail globale était entière dans une activité adaptée. L’intimé a retenu que c’était depuis l’année 2018, puisqu’il a octroyé une rente entière d’invalidité au recourant du 1er février 2016 au 31 mars 2018.

Contrairement à ce qu’allègue l’intimé, il ressort de son rapport que l’experte psychiatre a retenu le retour à une pleine capacité de travail dans une activité adaptée à juin 2021, soit à la date à laquelle le recourant a commencé son activité indépendante, car cela démontrait une évolution favorable depuis 2018, date à partir de laquelle, elle ne retenait qu’une capacité de travail dans une telle activité de 50%. Le recourant avait, selon l’experte, montré qu’il avait des ressources puisqu’il avait fait toutes les démarches nécessaires pour mettre sur pied son entreprise. L’experte a ainsi clairement conclu que la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était de 100% dès juin 2021.

Faute de motivation dans les conclusions consensuelles sur la prise en compte d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée dès 2018, il y a lieu de retenir les conclusions motivées de l’experte psychiatre, à savoir que cette capacité doit être datée de juin 2021 et que de 2018 à juin 2021, la capacité de travail du recourant était de 50% dans une activité adaptée.

6.6  

6.6.1 Le recourant a fait encore valoir que son psychiatre, le Dr D______, estimait qu’il était incapable de travailler à 100% dans une activité adaptée, sur la base des diagnostics d’anxiété généralisée et de dépression de type récurrent, ce qui contredisait ainsi les conclusions de l’expertise bidisciplinaire.

6.6.2 La chambre de céans relève que le rapport du 29 mai 2019 du Dr D______ ne remet pas en cause les conclusions de l’experte psychiatre, dès lors qu’il retenait une incapacité de travail à 100% dès 2015, alors qu’il est établi que le recourant a été capable de se soumettre à une mesure de reclassement à 50% de 2017 à 2018. L’experte psychiatre a en outre suffisamment motivé son rapport pour que l’on comprenne pour quels motifs, elle a retenu, contrairement au médecin traitant du recourant, une capacité de travail entière dans une activité adaptée dès juin 2021.

6.7  

6.7.1 Le recourant a fait valoir que l’experte psychiatre avait constaté un nouvel épisode dépressif en novembre 2021 sans en tirer de conclusion sur sa capacité de travail dès 2021.

6.7.2 Il ressort de la motivation de son rapport que l’experte a bien pris en compte le fait que l’état dépressif du recourant s’était aggravé suite au décès de son père (novembre 2021), puisqu’elle a relevé que cela avait conduit à l’adaptation de son traitement médicamenteux, mais que cette aggravation n’a pas été durable, au vu des constats faits par l’experte lors de son examen du recourant, relativement peu de temps après (décembre 2021). La critique du recourant est ainsi infondée.

6.8  

6.8.1 Cela étant, il convient d’examiner l’exigibilité d’une activité professionnelle du recourant, qui souffre de troubles psychiatriques, avec les indicateurs de gravité développés par le Tribunal fédéral.

L’intimé a relevé à cet égard que le SMR avait considéré le 5 janvier 2023 que le diagnostic d’épisode dépressif majeur d’intensité sévère ne correspondait pas à ce que l’experte psychiatre avait constaté et que celle-ci avait retenu que la capacité de travail du recourant était de 50% dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité adaptée dès 2018, en se fondant correctement sur les indicateurs standards de gravité.

6.8.2 En l’occurrence, la chambre de céans constate que l’experte n’a pas relevé de détresse particulière du recourant et que la gravité de ses troubles était relative, s’agissant d’un diagnostic de trouble dépressif récurrent d’intensité légère. L’experte a en outre estimé que le recourant bénéficiait de beaucoup de ressources, dans la mesure où il avait pu monter une entreprise de sous-traitance. Elle a également indiqué que son comportement face à la maladie était l’adaptation et la résilience et qu’il avait des capacités relationnelles et l’aptitude à nouer des contacts. Il se déplaçait sans difficulté et vivait en harmonie avec ses proches. Son intentionnalité et son dynamisme étaient présents. Il n’avait aucun problème avec la planification et la structure des tâches et l’aptitude à entretenir des relations proches. En revanche, il avait du mal à se montrer flexible et à s’adapter avec quelques problèmes légers à établir des relations avec les autres et à évoluer au sein d’un groupe. Son endurance était également un peu diminuée. Il avait une certaine difficulté à s’affirmer.

L’experte a encore indiqué que le recourant était suivi sur le plan psychiatrique selon les règles de l’art et que le pronostic était favorable. Il était vu par le Dr D______ une fois par mois. Contrairement à ce qu’a allégué l’intimé, il n’a pas été retenu d’incohérence par l’experte en ce qui concernait la compliance du recourant au traitement de psychotropes et d’antalgiques, au motif que les dosages étaient revenus infra-thérapeutiques ou négatifs, car l’experte a considéré qu’il s’agissait probablement d’un acétyleur rapide (métabolisme rapide) et non d’une adhésion médicamenteuse partielle.

L’experte a en outre retenu que le recourant n’avait pas présenté d’éléments d’amplification, d’exagération ou de simulation de symptômes lors de l’expertise.

Le recourant a informé l’experte qu’il n’avait pas beaucoup d’amis mais des vrais et qu’il s’entendait bien avec sa femme qui le soutenait dans ses difficultés et ses douleurs. Il aimait marcher, notamment avec sa petite-fille et il s’occupait de l’administration de son foyer. Il était parti en vacances au mois d’août 2021 au Kosovo.

Il ressort des éléments qui précèdent, en tenant compte des indicateurs de gravité développés par le Tribunal fédéral, que le recourant n’était pas incapable de travailler dans une activité adaptée, comme l’a retenu l’experte de façon convaincante.

6.9  

6.9.1 Le recourant a encore relevé plusieurs incohérences dans l’expertise psychiatrique, notamment le fait qu’il y était indiqué qu’il dormait bien la nuit alors que, dans la même phrase, des cauchemars étaient relatés, le fait que le pronostic favorable n’était pas motivé et que l’experte ne semblait pas tenir compte du fait qu’il bénéficiait déjà d’un soutien psychothérapeutique.

6.9.2 S’agissant du sommeil, l’experte a indiqué, sous le déroulement d’une journée-type, que le recourant se levait à 7h et se couchait à 22h. Il dormait bien la nuit, si ce n’était qu’il était réveillé soit par un besoin d’uriner, soit par des cauchemars. Il ne dormait pas d’un trait et avait l’impression d’être fatigué au réveil. L’experte relatait là ce que lui avait indiqué le recourant, de sorte que l’on ne saurait retenir dans ce contexte une contradiction de sa part. Il n’apparaît en outre pas forcément contradictoire d’indiquer bien dormir, puis de préciser que le sommeil était interrompu par un besoin d’uriner ou des cauchemars.

Les questions du pronostic et des suggestions thérapeutiques ne sont pas déterminantes pour l’issue du présent litige et par conséquent sans incidence sur la valeur probante de l’expertise.

6.10 En conclusion, les critiques émises par le recourant contre l’expertise ne remettent pas en cause sa force probante. Il ne se justifie donc pas de faire procéder à un complément d’expertise ni à une nouvelle expertise. Il n’y a en outre pas lieu d’entendre les médecins traitants du recourant, dont les rapports figurent au dossier.

6.11  

6.11.1 Le recourant a fait valoir que son inscription à l’OCE était intervenue dans le cadre des mesures de reclassement professionnel mises en place par l’intimé, qui lui avait enjoint de le faire dès le 1er janvier 2018. Son taux d’inscription au chômage ne reflétait ainsi pas nécessairement ce qu’il était capable réellement d’assumer comme activité professionnelle.

6.11.2 La question de la capacité de travail étant effectivement d’ordre médical, la chambre de céans admet que le taux d’inscription à l’OCE n’est pas déterminant.

7.             Le recourant conteste le calcul du taux d’invalidité retenu par l’intimé.

7.1  

7.1.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1; ATF 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

7.2  

7.2.1 Le recourant a critiqué en particulier le revenu annuel brut sans invalidité pris en compte par l’intimé à hauteur de CHF 75'141.-, faisant valoir que le salaire qu’il percevait de son employeur était inférieur au minimal légal selon la convention collective de travail, compte tenu de ses tâches effectives de contremaître.

La convention collective de travail des cadres de la construction (contremaître et chef d’atelier) fixait le salaire minimum à CHF 6'733.- par mois dans le canton de Genève (art. 10.2.1), soit CHF 87'529.- par an, 13e salaire compris. Compte tenu de la différence de plus de 16% entre le salaire sans invalidité retenu par l’intimé et le salaire minimal prévu par la convention collective précitée, il y avait lieu de retenir un salaire sans invalidité de CHF 87'529.- par an.

7.2.2 Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l’ESS éditée par l'Office fédéral de la statistique (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

Lorsqu'il apparaît que l'assuré touchait un salaire nettement inférieur aux salaires habituels de la branche pour des raisons étrangères à l'invalidité et que les circonstances ne permettent pas de supposer qu'il s'est contenté d'un salaire plus modeste que celui qu'il aurait pu prétendre, il y a lieu d'en tenir compte dans la comparaison des revenus en opérant un parallélisme des revenus à comparer (ATF 134 V 322 consid. 4.1 et les références). Le revenu effectivement réalisé doit être considéré comme nettement inférieur aux salaires habituels de la branche lorsqu'il est inférieur d'au moins 5% au salaire statistique usuel dans la branche (ATF 135 V 297 consid. 6.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 8C_677/2021 du 31 janvier 2022 consid. 4.2.2). Lors de l'examen du caractère inférieur à la moyenne du revenu de célibataire, il convient de comparer en premier lieu le revenu statistique usuel de la branche selon l'enquête sur la structure des salaires (ESS) publiée par l'Office fédéral de la statistique(ATF 141 V 1 consid. 5.6).

Lorsque le salaire effectivement réalisé correspond au minimum prévu par une convention collective de travail (CCT), il ne peut pas être qualifié d'inférieur à la moyenne. Dans un tel cas, il n'y a pas lieu d’appliquer la règle du parallélisme des revenus (arrêt du Tribunal fédéral 8C_677/2021 du 31 janvier 2022 consid. 4.2.2 et les références).

7.2.3 En l’espèce, il faut constater que le salaire sans invalidité pris en considération par l’intimé (CHF 75'141.-) n’est pas inférieur de 5% à celui du revenu statistique usuel de la branche (ligne 41-43), en prenant en compte un niveau de compétence 2 (CHF 73'869.- selon l’ESS 2018). À teneur de la jurisprudence précitée, il convient en effet de se référer en premier lieu aux salaires statistiques pour déterminer si le revenu effectivement réalisé par le recourant avant son invalidité était nettement inférieur aux salaires habituels de la branche et non aux conventions collectives.

7.3  

7.3.1 Le recourant a fait valoir, s’agissant du revenu avec invalidité, que l’intimé s’était référé à la ligne 41-43, qui correspondait à la branche de la construction, dans une activité de niveau 2. Or, les statistiques des salaires relevant des professions de la construction n’étaient pas représentatives du salaire qu’il pouvait gagner avec son atteinte à la santé, puisque la majorité des postes qui y étaient rattachées consistait en des activités professionnelles physiques qui ne lui étaient plus accessibles. Il était donc justifié de prendre en compte la statistique générale de salaire correspondant au total des salaires de toutes les professions pour une activité de niveau 1, soit CHF 5'010.-. Il n’y avait pas lieu de retenir que la profession de technicien en bâtiment était adaptée à ses limitations fonctionnelles, dans la mesure où il ne s’agissait pas que d’une activité de bureau et que cette activité impliquait également un temps important de présence sur les chantiers et des tâches physiques (prendre des mesures, se pencher, s’élever, mesurer en hauteur, etc.). Cela confirmait le fait que la référence à la branche 41-43 n’était pas pertinente.

Selon l’intimé, après avoir suivi une formation de dessinateur en bâtiment et informatique, le recourant pouvait mettre en valeur sa capacité de travail dans un métier technique du bâtiment (technicien, conducteur de travaux, suivi de chantier, métreur, activité administrative dans le secteur de la construction). C’était donc à juste titre, qu’il s’était fondé sur le niveau de compétence 2.

7.3.2 Le revenu d'invalide doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne «total secteur privé» (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

Toutefois, lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières. Tel est notamment le cas lorsqu’avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte. En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s'écarter de la table TA1 (secteur privé) pour se référer à la table TA7 (secteur privé et secteur public [Confédération] ensemble), respectivement T17 (à partir de 2012) si cela permet de fixer plus précisément le revenu d'invalide et que le secteur en question est adapté et exigible (ATF 133 V 545 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_124/2021 du 2 août 2021 consid. 4.4.1 et 8C_111/2021 du 30 avril 2021 consid. 4.2.1 et les références).

Le niveau de compétence 2 se rapporte à des tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement de données et les tâches administratives, l’utilisation de machines et d’appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules. Le niveau de compétence 1, se rapporte à des tâches physiques ou manuelles simples. Le niveau de compétence 2 a été retenu par le Tribunal fédéral pour un assuré ayant bénéficié de mesures d’ordre professionnel de l’assurance-invalidité (cours de bureautique d’une durée de trois mois, reclassement professionnel d’aide-comptable, au bénéfice d’un diplôme d’aide comptable et d’un stage pratique de 6 mois). Il en a été de même d’un opérateur de station d’épuration souffrant de séquelles d’une pathologie pulmonaire ayant bénéficié d’un reclassement dans la profession de comptable, ayant suivi une formation complète, mais ayant échoué à l’examen final (David IONTA, Fixation du revenu d’invalide selon l’ESS, in : Jusletter 22 octobre 2018 p. 17).

Lorsque la personne assurée ne peut pas se réinsérer dans la profession habituelle, l'application du niveau de compétences 2 ne se justifie que si elle dispose de compétences et de connaissances particulières (arrêt 8C_5/2020 du 22 avril 2020 consid. 5.3.2).

Plaide en faveur de l'application du niveau de compétences 2, le fait que l’assuré ait une expérience de direction ou qu'il ait exercé avec succès une activité indépendante (arrêts du Tribunal fédéral 8C_737/2020 du 23 juillet 2021 consid. 5.2 et 8C_156/2022 du 29 juin 2022 consid. 7.3).

7.3.3 En l’espèce, dès lors qu’en 2018, le recourant n’avait pas repris une activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, son revenu d'invalide devait être évalué sur la base des ESS. Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne « total secteur privé ». Cela étant, dans le cas du recourant, il se justifiait de se référer à la ligne 41-43 correspondant à des activités dans le secteur de la construction pour une activité demandant des connaissances administratives et le traitement de données, car avant son atteinte à la santé, il avait travaillé de nombreuses années dans ce domaine et une activité dans un autre domaine n'entrait manifestement pas en ligne de compte, étant relevé que pendant sa période de chômage, il n’a cherché que des emplois dans la construction et qu’il a finalement fondé une entreprise dans ce domaine.

7.3.4 S’agissant du niveau de compétence, le recourant a bénéficié d’une formation de dessinateur en bâtiment et informatique ainsi que d’un stage en entreprise de plus d’un an. Il a en outre de l’expérience dans une activité de contremaître. Il se justifiait en conséquence de prendre en compte un niveau de compétence 2, comme l’a fait l’intimé.

7.4 En conclusion, le taux d’invalidité du recourant doit être recalculé pour la période de janvier 2018 à juin 2021, en tenant compte d’une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée (50% de CHF 73'869.-), soit un revenu avec invalidité de CHF 36'934.50 (revenu avec invalidité), avec un abattement de 10% (CHF 33'241.05). En comparant ce revenu au revenu sans invalidité de CHF 75'141.-, le taux d’invalidité est de 55.76%, ce qui ouvre au recourant le droit à une demi-rente d’invalidité du 1er avril 2018 au 31 août 2021, soit trois mois après la prise en compte d’une capacité totale dans une activité adaptée (art. 88a al. 1 phr. 2 RAI). Il sera encore relevé que si le niveau de compétence 1 avait été pris en compte pour déterminer le revenu avec invalidité, soit un revenu annuel de CHF 5'622.-, cela ne changerait pas le résultat, puisque le taux d’invalidité aurait été de 58%.

La procédure sera renvoyée à l’intimé pour décision sur le droit du recourant à une rente dès le 1er septembre 2021, suite au commencement de sa nouvelle activité professionnelle en tant qu’indépendant.

7.4.1 Au vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis et la décision réformée, dans le sens qui précède.

Le recourant obtenant partiellement gain de cause et étant assisté d’un conseil, il a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 2'500.- et mis à la charge de l’intimé (art. 61 let. g LPGA).

Un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de l’intimé.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision querellée dans le sens que le recourant a droit à une demi-rente d’invalidité du 1er avril 2018 au 31 août 2021.

4.        Confirme pour le surplus la décision du 14 juillet 2022.

5.        Renvoie la cause à l’intimé pour décision sur le droit du recourant à une rente dès le 1er septembre 2021.

6.        Alloue au recourant, à la charge de l'intimé, une indemnité de CHF 2'500.- pour ses dépens.

7.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le