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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/878/2023

ATAS/959/2023 du 07.12.2023 ( AVS ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.02.2024, rendu le 20.02.2024, IRRECEVABLE, 9C_25/2024
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/878/2023 ATAS/959/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 7 décembre 2023

Chambre 3

 

En la cause

Monsieur A______

 

recourant

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1946, a fêté ses 65 ans le ______ 2011.

b. Par décision du 8 octobre 2013 et factures émises en 2013, la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse) a fixé le montant dû par l’intéressé à titre de cotisations pour les années 2011 et 2012.

c. En date du 19 avril 2022, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) a informé la caisse qu’elle avait procédé, en date du 8 mars 2022, à une taxation rectificative des années 2011 et 2012.

En 2011, le revenu déterminant s’élevait à CHF 111'643.- (en lieu et place de CHF 30'586.-).

En 2012, le revenu déterminant avait été augmenté à CHF 45'905.- (en lieu et place de CHF 8'792.-).

d. Le 21 juillet 2022, la caisse a donc adressé à l’assuré de nouvelles décisions concernant les années 2011 et 2012, calculant les cotisations sur la base des montants indiqués par l’AFC.

Des déductions pour personnes en âge AVS de CHF 2'800.-, respectivement CHF 1'400.- ont été accordées à l’intéressé.

Des intérêts moratoires à hauteur de CHF 5'592.90 pour 2011 et CHF 1'687.75 pour 2012 ont également été réclamés.

e. Par courrier du 23 août 2022, l’assuré a manifesté son désaccord.

f. Par courrier du 25 août 2022, la caisse lui a expliqué qu’elle était liée par les communications fiscales de l’AFC et que s’il était en désaccord avec les chiffres mentionnés par cette dernière, il lui appartenait de les contester directement auprès de l’AFC.

g. Par pli du 2 septembre 2022, l’assuré s’est étonné que la franchise de CHF 16'800.- pour personnes ayant atteint l’âge de la retraite en exerçant une activité lucrative n’ait pas été prise en compte dans les calculs de la caisse. Pour le surplus, il a fait valoir que les cotisations qu’on lui réclamait étaient prescrites.

h. Par courrier du 20 septembre 2022, la caisse a accusé réception de l’opposition et rappelé que celle-ci n’interrompait pas le cours des intérêts moratoires, de sorte qu’il pouvait s’avérer judicieux de s’acquitter de ceux-ci afin d’éviter qu’ils n’augmentent encore.

i. Par décision du 8 février 2023, la caisse a maintenu ses décisions de cotisations.

S’agissant de la franchise pour personnes ayant atteint l’âge de la retraite en exerçant une activité lucrative, elle a souligné en avoir tenu compte pro rata temporis durant les mois suivant le 65ème anniversaire de l’intéressé et sur lesquels portaient les décisions litigieuses, à savoir : novembre et décembre 2011 et janvier 2012.

B. a. Par écriture du 10 mars 2023, l’assuré a interjeté recours contre cette décision.

Outre l’annulation des décisions du 21 juillet 2022, le recourant demande la restitution de l’effet suspensif.

Il invoque la « prescription du droit de le taxer » et reproche à l’intimée une violation des dispositions légales applicables en matière de droit fiscal.

b. Invitée à se déterminer, l’intimée, dans sa réponse du 15 mars 2023, a conclu au rejet du recours en rappelant, à titre liminaire, qu’un recours a effet suspensif, à moins que l’autorité n’ordonne l’exécution ce nonobstant, ce qu’elle n’a pas fait en l’occurrence.

Pour le surplus, l’intimée reprend les explications fournies dans la décision litigieuse.

c. Par écritures des 28 avril et 4 mai 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

d. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s'appliquent aux art. 1 à 97 LAVS, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours doit être déclaré recevable.

5.             Le litige porte uniquement sur la question de savoir si l’intimée peut réclamer les cotisations relatives aux années 2011 et 2012, pour lesquelles le recourant soutient que le délai de prescription (fiscal) serait échu.

6.             Conformément à l'art. 4 al. 1 LAVS, les cotisations des assurés qui exercent une activité lucrative sont calculées en pour-cent du revenu provenant de l’exercice de l’activité dépendante et indépendante.

L’art. 22 al. 2 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) précise que les cotisations des personnes indépendantes se calculent sur la base du revenu découlant du résultat de l’exercice commercial clos au cours de l’année de cotisations et du capital propre investi dans l’entreprise.

Pour établir le revenu déterminant, les autorités fiscales cantonales se fondent sur la taxation passée en force de l’impôt fédéral direct. Elles tirent le capital propre engagé dans l’entreprise de la taxation passée en force de l’impôt cantonal adaptée aux valeurs de répartition intercantonales (art. 23 al. 1 RAVS).

Les caisses de compensation sont liées par les données des autorités fiscales cantonales (art. 23 al. 4 RAVS).

D'après la jurisprudence, toute taxation fiscale est présumée conforme à la réalité ; cette présomption ne peut être infirmée que par des faits. Dès lors que les caisses de compensation sont liées par les données fiscales, et que le juge des assurances sociales examine, en principe, uniquement la décision de la caisse quant à sa légalité, le juge ne saurait s'écarter des décisions de taxation entrées en force que si celles-ci contiennent des erreurs manifestes et dûment prouvées, qu'il est possible de rectifier d'emblée, ou s'il s'impose de tenir compte d'éléments de fait sans pertinence en matière fiscale, mais déterminants sur le plan des assurances sociales. À cet égard, de simples doutes sur l'exactitude d'une taxation fiscale ne suffisent pas. La détermination du revenu est, en effet, une tâche qui incombe aux autorités fiscales, et il n'appartient pas au juge des assurances sociales de procéder lui-même à une taxation. L'assuré exerçant une activité lucrative indépendante doit donc faire valoir ses droits en matière de taxation – avec les effets que celle-ci peut avoir sur le calcul des cotisations AVS – en premier lieu dans la procédure judiciaire fiscale (ATF 110 V 86 consid. 4 et 370 s., 106 V 130 consid. 1, 102 V 30 consid. 3a ; VSI 1997 p. 26 consid. 2b et la référence).

Les communications fiscales sont également contraignantes lorsque les taxations entrées en force auraient probablement été corrigées si elles avaient été attaquées à temps par les voies de recours de droit fiscal (ATF 110 V 369).

7.             Les cotisations à l’assurance en cas de maternité (art. 3 al. 2 de la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption du 21 avril 2005 (LAMat - J 5 07) sont fixées sur la base du revenu de l’activité lucrative déterminant pour l’AVS.

Il en va de même des contributions aux allocations familiales (art. 30 al. 1 de la loi sur les allocations familiales du 1er mars 1996 [LAF - J 5 10], qui renvoie lui aussi aux dispositions de la LAVS relative à la fixation des contributions).

8.             En vertu de l’art. 16 al. 1 LAVS, les cotisations dont le montant n’a pas été fixé par voie de décision dans un délai de cinq ans à compter de la fin de l’année civile pour laquelle elles sont dues ne peuvent plus être ni exigées, ni versées, ce que confirme l’art. 24 al. 1 LPGA.

S’il s’agit de cotisations visées aux art. 6 al. 1 LAVS (salariés dont l’employeur n’est pas tenu de payer des cotisations), 8 al. 1 LAVS (cotisations perçues sur le revenu provenant d’une activité indépendante) et 10 al. 1 LAVS (assurés n’exerçant aucune activité lucrative), le délai n’échoit toutefois, en dérogation à l’art. 24 al. 1 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), qu’un an après la fin de l’année civile au cours de laquelle la taxation fiscale déterminante est entrée en force.

9.             En l’espèce, les taxations fiscales rectificatives ont eu lieu le 8 mars 2022, de sorte qu’en notifiant à l’assuré ses nouvelles décisions de cotisations le 21 juillet 2022, la caisse a agi en temps utile.

Par ailleurs, les cotisations litigieuses ont été fixées sur la base de communications de l’AFC indiquant les éléments déterminants pour la fixation des cotisations. Or, comme rappelé supra, les renseignements communiqués par l’AFC à la caisse lient cette dernière.

Le recourant, cependant, invoque la prescription en matière fiscale. À cet égard, il invoque l’art. 22 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc ‑ D 3 17), dont il tire la conclusion que le droit de le taxer s’est prescrit cinq ans après la fin de la période fiscale et que l’AFC ne pouvait donc procéder à une taxation, en 2022, des années 2011 et 2012. Il considère qu’il appartenait à l’intimée de trancher cette question préjudicielle de la prescription en matière fiscale, même si cela ne relève pas de sa compétence. Il conclut que, puisque les taxations fiscales n’étaient plus possibles, aucune cotisation AVS ne pouvait non plus être réclamée pour ces années-là.

Cependant, comme rappelé supra, selon la jurisprudence, dès lors que les caisses de compensation sont liées par les données fiscales et que le juge des assurances sociales examine, en principe, uniquement la décision de la caisse quant à sa légalité, le juge ne saurait s'écarter des décisions de taxation entrées en force. En effet, on ignore quelles circonstances exactes ont amené l’AFC à procéder à une taxation rectificative du recourant, les décisions de l’AFC n’ayant pas été produites par l’intéressé. Pour les mêmes raisons, on ignore quels motifs l’AFC a invoqués à l’appui de cette rectification et quel délai de prescription s’applique. La Cour de céans ne saurait dès lors conclure que ces décisions seraient « manifestement erronées ». 

On ajoutera que le recourant n’allègue pas avoir contesté les taxations fiscales rectificatives dont il a fait l’objet, alors même qu’il lui était loisible de faire valoir ses arguments fiscaux devant l’autorité compétente. Si les taxations fiscales sont entrées en force faute d’avoir été contestées par l’intéressé, il n’y a pas lieu de s’en écarter. Si elles ne sont pas entrées en force parce que le recourant les a contestées et qu’il obtient gain de cause par la suite, il pourra s’en prévaloir auprès de la caisse à titre de fait nouveau donnant lieu à révision.

En l’état, les décisions de cotisations rendues par l’intimée en temps utile apparaissent bien fondées, de sorte que le recours est rejeté.


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon l’art. 85 LTF, s’agissant de contestations pécuniaires, le recours est irrecevable si la valeur litigieuse est inférieure à 30’000 francs (al. 1 let. a). Même lorsque la valeur litigieuse n’atteint pas le montant déterminant, le recours est recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (al. 2). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le