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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/629/2023

ATAS/701/2023 du 20.09.2023 ( LCA ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/629/2023 ATAS/701/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 septembre 2023

Chambre 8

 

En la cause

A______

 

 

demandeur

 

contre

GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA

 

défendeur

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : le demandeur ou l'assuré), né le ______ 1988, travaillait comme agent de sûreté aéroportuaire auprès de B______ (ci-après : l'employeur), depuis le 1er février 2017. Son lieu de travail était l'Aéroport international de Genève. En 2022, son salaire annuel assuré AVS était de CHF 58'500.-, soit CHF 4'875.- par mois.

b. Le GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA (ci-après : la défenderesse ou l'assureur) est une société anonyme de droit suisse, ayant son siège à Martigny (VS), dont le but est l'exploitation des branches d'assurances non vie.

c. Le 6 juillet 2022, l'assuré a été annoncé par son employeur à l'assureur en incapacité de travail à 100% dès le 3 juillet 2022. La durée prévisible de l'incapacité était jusqu'au 3 août 2022.

d. Après son arrêt maladie, le demandeur n'était plus en incapacité de travail dès le 1er septembre 2022 et a repris son activité le 3 septembre 2022.

e. Le litige porte sur l'interruption des prestations du 18 août 2022 au 31 août 2022.

B. a. B______ fait partie du Groupe C______. Elle est assurée auprès de la défenderesse pour une assurance collective indemnité journalière maladie, police no 1______ du 26 novembre 2021 (ci-après : le contrat).

b. Le contrat prévoit un début au 1er janvier 2020 et une fin du contrat au 31 décembre 2022. Le preneur formel d'assurance est C______ SA, ayant son siège à Zollikofen (ZH) ; parmi les entreprises concernées figure notamment B______.

c. Il prévoit deux catégories de personnes assurées ; la catégorie 1 vise le personnel avec salaire mensuel. Il prévoit une couverture maladie à 80% du salaire pour une durée de 730 jours, après un délai d'attente de 30 jours.

d. Le contrat se réfère aux conditions générales (ci-après : CGA), édition du 1er septembre 2016 (référence PCAM03).

e. Selon l'art. 1 CGA, l'assureur porteur de risques est mentionné dans la police. Il accorde sa garantie pour les conséquences économiques d'une incapacité résultant d'une maladie ou d'un accident, ou du congé à la suite d'un accouchement, selon les définitions des conditions d'assurances, pour autant que ces risques soient inclus dans la police.

Selon l'art. 5, ch. 1 CGA, le cercle des personnes assurées est mentionné dans la police.

Selon l'art. 6, ch. 1 CGA, tous les cas de sinistre survenus durant la couverture d'assurance collective sont à charge du contrat collectif.

Selon l'art. 13, ch. 1, lettre a, 1ère phrase CGA, l'indemnité journalière est allouée proportionnellement au degré d'incapacité qui doit être d'au moins 25%. Selon l'art. 13, ch. 3, lettre b CGA, l'assureur paie l'incapacité médicalement attestée et prouvée. Une attestation du médecin, basée sur des consultations régulières au cabinet, doit être remise à l'assureur au moins une fois par mois.

Selon l'art. 13, ch. 8, lettre a CGA, l'indemnité journalière assurée est calculée sur la base de la déclaration de l'employeur faite par le biais des formulaires mis à sa disposition par l'assureur. Selon l'art. 13, ch. 8, lettre b CGA, si l'indemnité est exprimée en pourcentage de salaire, elle est calculée pour les salaires horaires et les salaires mensuels, mais au maximum selon les règles prévues par la convention collective, comme suit : […] salaire mensuel multiplié par douze mois divisé par 365 jours multiplié par pourcentage de couverture fixé.

Selon l'art. 13, ch. 11, lettre a CGA, l'indemnité journalière due est versée après l'expiration du délai d'attente choisi, pour chaque jour d'incapacité.

Selon l'art. 18, ch. 2, lettres b, c et d CGA, les prestations peuvent être réduites ou refusées temporairement ou définitivement : b) si le preneur d'assureur ou l'assuré ne respectent pas les obligations citées aux articles 25 et 26 CGA ; c) si l'assuré refuse de collaborer aux mesures d'instruction (p. ex. se faire examiner par un médecin mandaté par l'assureur) ou ne se présente pas à une convocation ordonnée par l'assureur sans motif valable. Dans ce cas, l'assureur se réserve en outre le droit de demander le remboursement de prestations déjà avancées et de facturer à l'assuré les frais relatifs à la convocation manquée ; d) si l'assuré refuse de fournir tous les renseignements sur les faits à sa connaissance qui peuvent servir à déterminer le droit aux prestations.

Selon l'art. 26, ch. 1 CGA, durant son incapacité, l'assuré doit rester à portée de contrôle administratif et médical de l'assureur.

Selon l'art. 26, ch. 4 CGA, l'assuré doit collaborer avec l'assureur et les tiers qu'il mandate (inspecteur de sinistres, gestionnaire, médecins, etc.). Il doit notamment suivre leurs prescriptions, fournir les documents demandés et répondre de manière complète et selon la vérité aux questions posées par l'assureur.

C. a. Le 21 juin 2022, le demandeur avait rendez-vous à l'institut D______; cela concernait son enfant à naître.

b. Le 24 juin 2022, l'épouse du demandeur a été reçue en consultation par le centre d'échographie gynécologique et obstétricale E______ de la Clinique F______.

c. Début juillet 2022, le docteur G______, médecin à H______(F), a établi un certificat médical manuscrit avec un arrêt de travail du demandeur jusqu'au 3 août 2022.

d. Le 5 juillet 2022, un prélèvement ADN relatif au fœtus dont le demandeur est le père a été effectué par l'institut D______.

e. Le 6 juillet 2022, l'employeur a attiré l'attention de l'assureur sur le dossier du demandeur, pour deux raisons : d'une part, le médecin ayant établi l'arrêt de travail délivrait beaucoup d'arrêts de longue durée ; d'autre part, le demandeur avait des vacances prévues du 11 au 24 juillet 2022.

f. Le 21 juillet 2022, Monsieur I______, collaborateur de la défenderesse, s'est rendu au domicile du demandeur pour comprendre les circonstances de son incapacité de travail. Selon son rapport, la femme de l'assurée était enceinte d'environ six mois ; lors d'une échographie faite un mois auparavant, un problème au niveau du fœtus serait apparu. Cela aurait – ce qui est contesté par le demandeur – crée des tensions au sein du couple. En parallèle, l'assuré se serait rendu au Tribunal pour une procédure de droit matrimonial liée à une union antérieure. L'assuré serait également soumis à la pression au niveau du travail. S'étant rendu chez le médecin, ce dernier a mis l'assuré en arrêt pour burn-out.

g. Le 26 juillet 2022, l'assuré a été examiné par le docteur J______, médecin-conseil de l'employeur, ayant son cabinet à K______.

h. Le 29 juillet 2022, le docteur L______, médecin traitant du demandeur, a établi un certificat médical d'arrêt de travail pour la période du 29 juillet 2022 au 31 août 2022.

i. Le 4 août 2022, l'assureur a convoqué l'assuré à une « expertise médicale » fixée jeudi 18 août 2022 auprès de la docteure M______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie à Genève. La convocation mentionnait explicitement, sur la base des CGA, que « […] si vous ne collaborez pas lors de l'examen, vous vous exposez à un refus, voire à une demande de remboursement des prestations de la caisse, ainsi qu'à la prise en charge des frais d'expertise ».

j. Le 12 août 2022, le demandeur avait rendez-vous à l'institut D______.

k. Le 18 août 2022, le demandeur s'est rendu chez la Dre M______. Il sera revenu ci-dessous sur le déroulement de cet entretien.

l. Par courriel du 18 août 2022, l'assuré a écrit à l'assureur pour faire valoir une indemnisation pour son déplacement. Cela représentait EUR 10.79 d'essence et CHF 4.20 de frais de stationnement.

m. Le 19 août 2022, la Dre M______ a établi un rapport destiné à l'assureur (qui figure en deux versions légèrement différentes dans le dossier). L'assuré s'était présenté à son rendez-vous le « 18.07.2022 » (sic ; recte : 18.08.2022). Cela étant, l'assuré avait exprimé son opposition à l'évaluation. Il était resté 30 minutes et répondait aux questions par « je ne vous dirai rien », « je ne vous réponds pas », de sorte que l'expertise psychiatrique n'avait pas pu se faire.

n. Le même jour, la Dre M______ a facturé CHF 300.- à l'assureur.

o. Le 22 août 2022, l'assureur a annoncé à l'assuré que le droit aux indemnités journalières était suspendu dès le 18 août 2022. De plus, la note d'honoraires de la Dre M______ lui serait transmise. Le droit aux prestations pourrait être réévalué dès que le médecin conseil de l'assureur aura reçu le rapport d'une « expertise ».

p. Le 24 août 2022, l'assuré a pris contact par téléphone avec l'assureur. Il s'est entretenu avec Monsieur N______. Selon la note téléphonique de ce dernier, l'assuré a fait valoir qu'il payait ses primes et qu'il s'agissait de sa première absence d'aussi longue durée ; il ne paierait pas les honoraires de la Dre M______ et ne craignait pas les poursuites. Il irait en justice contre l'assureur, car le dossier avait été traité de manière inhumaine.

q. Le 1er septembre 2022, l'assuré a écrit un courriel à la Dre M______ afin d'obtenir une copie de ses réponses. Ce courriel n'a pas reçu de réponse.

r. Le 1er septembre 2022, l'assuré a aussi écrit à l'assureur pour obtenir le paiement des indemnités au-delà du 18 août 2022. Il avait collaboré avec l'inspecteur de l'assureur en juillet 2022, puis s'était rendue chez la Dre M______ le 18 août 2022, où il avait répondu à toutes les questions ; il lui importait peu de savoir si ses réponses satisfaisaient l'assureur. Les questions posées étaient déplacées et ne devaient pas figurer dans le questionnaire. Il avait demandé, sans succès, d'obtenir copie du rapport de la Dre M______. Précédemment, il avait consulté deux médecins différents qui avaient tous deux considéré que l'arrêt de travail était légitime. Il avait repris son travail le 1er septembre 2022.

s. Le 8 septembre 2022, l'assureur a pris acte de la reprise du travail au 1er septembre 2022 et a confirmé le refus de payer les prestations pour la période du 18 au 31 août 2022.

t. Le 14 septembre 2022, l'assureur a transmis une copie de son dossier à l'assuré. Il comprenait l'avis (français) d'arrêt de travail du 29 juillet 2022 au 31 août 2022 établi par le Dr L______, la convocation du 4 août 2022, la déclaration de sinistre du 6 juillet 2022, un document manuscrit peu lisible, mais avec le timbre du Dr G______, la facture du 19 août 2022 de la Dre M______, ses rapports du même jour, le courrier de l'assureur du 22 août 2022, enfin le mandat et le rapport de visite de l'inspecteur de l'assureur.

u. Le 14 septembre 2022, l'assureur a établi le décompte rectifié des indemnités journalières et l'a transmis à l'employeur. Les prestations versées portaient sur 46 jours (3 juillet au 17 août 2022), sous déduction de 30 jours, soit 16 jours à CHF 128.22 d'indemnité journalière, ce qui représentait un montant de CHF 2'051.52. Les prestations étaient payées à l'employeur, qui les reversait au demandeur ; il n'y a pas de versement direct de l'assureur à l'assuré.

En raison d'un versement trop important le 4 août 2022 (CHF 3'846.60), l'employeur devait rembourser CHF 1'795.10.

v. Le 21 septembre 2022, l'assuré a écrit deux courriels, sur deux adresses électroniques distinctes, à la Dre M______ afin d'obtenir une copie de son dossier médical. Ces courriels n'ont pas reçu de réponse.

w. Le 26 septembre 2022, l'assureur a confirmé son refus d'accorder les prestations demandées par l'assuré le 1er septembre 2022. Ce refus de prestations était justifié par le refus de collaborer de l'assuré.

x. Le 23 octobre 2022, l'assuré a écrit un nouveau courrier à l'assureur. Il contestait ne pas avoir collaboré avec la Dre M______. Les propos de la Dre M______ sortiraient de l'imagination de cette dernière, à moins qu'elle ne se soit trompée de dossier. Il s'interrogeait sur la neutralité de la Dre M______ et n'avait pas pu obtenir le questionnaire qu'elle remplissait. Il avait précédemment reçu M. I______ chez lui le 21 juillet 2022 et répondu à ses questions ; ce rendez-vous s'était bien passé et M. I______ avait fait preuve d'empathie. M. I______ n'avait pas pu voir l'épouse du demandeur, car il y avait une suspicion de COVID-19 et elle était restée à l'intérieur ; M. I______ faisait référence à une entorse à la cheville en 2020, ainsi qu'à un accident de moto en 2017, éléments qui n'avaient pas de lien avec le dossier. Il était employé chez B______ et non pas chez C______. Le dossier reçu de l'assureur n'était pas complet, car il manquait le questionnaire de la Dre M______ et un certificat de la docteure O______ transmis le 18 août 2022. La pression subie de la part de l'assureur était inadmissible ; il s'était trouvé en arrêt maladie et il avait ensuite été harcelé par l'assureur par téléphone, par courriel et courrier postal.

y. Le 3 novembre 2022, le fils du demandeur est né.

z. L'emploi de l'assuré chez B______ a pris fin le 15 mai 2023. L'assuré a un nouvel emploi depuis le 28 août 2023.

D. a. Par courrier daté du 13 février 2023, mais posté le 22 février 2023 et reçu au greffe de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) le 24 février 2023, le demandeur a fait valoir une « opposition décision de non payement ». Sans chiffrer ses prétentions, il a indiqué qu'il contestait l'absence de paiement d'indemnités par l'assureur pour la période du 18 au 31 août 2022.

Il a transmis divers documents médicaux liés à la grossesse de son épouse, respectivement aux examens, avant et après la naissance de son enfant, en particulier un rapport d'analyse effectué par D______.

b. Le 24 avril 2023, l'assureur s'est opposé à la demande et a fait valoir CHF 300.- avec intérêts (non chiffrés) dès cette date, à titre de demande reconventionnelle.

c. Par courrier non daté et non signé, reçu à la chambre de céans le 22 mai 2023, le demandeur a répliqué et persisté dans ses conclusions.

d. Le 23 juin 2023, l'assureur a dupliqué et persisté dans ses conclusions.

e. Lors de l'audience du 11 juillet 2023, les parties ont été entendues.

e/1) Le demandeur a considéré ne pas avoir été pris au sérieux par l'assureur. Il a confirmé avoir été en incapacité de travail du 3 juillet 2022 au 31 août 2022, avoir reçu son salaire pendant le délai d'attente, puis des indemnités journalières, avant une interruption de ces dernières. Il n'avait pas procédé au calcul des indemnités journalières réclamées, mais les estimait entre CHF 1'300.- et CHF 1'500.-. Il refusait de payer la facture de CHF 300.- de la Dre M______. En revanche, il renonçait à faire valoir ses prétentions de frais d'essence et de parking pour se rendre à l'examen chez la Dre M______.

Son médecin traitant était le Dr L______, mais en raison de son indisponibilité, c'est le Dr G______ (chez qui le demandeur s'était déjà rendu précédemment) qui avait établi le premier certificat médical. Le renouvellement du certificat médical avait été effectué par le médecin traitant L______. Le demandeur se trouvait dans une période de grande anxiété liée à des raisons privées, à son futur enfant, mais aussi à son travail. Il avait aussi été convoqué au Tribunal pour une procédure liée à la garde de son premier enfant. Avant sa reprise du travail, il n'était pas retourné chez le médecin, considérant de lui-même qu'il pouvait recommencer.

En juillet 2022, il avait reçu un appel téléphonique de M. I______, inspecteur de la défenderesse, qui lui avait annoncé sa visite à domicile le lendemain. En raison du COVID-19 de son épouse, la discussion avait eu lieu dans le jardin. Le demandeur avait tout expliqué à M. I______, qu'il s'agisse de la grossesse, de la pression au travail, de la convocation au Tribunal liée à la garde du premier enfant ou de l'absence de confiance envers son employeur d'alors. Il l'avait prié de garder confidentielles toutes les informations. Malgré cela, il constatait par exemple, dans le rapport de l'inspecteur, la mention d'un accident de moto en 2017, qui était sans relation avec l'arrêt de 2022.

Le 26 juillet 2022, il s'était rendu chez le Dr J______, médecin conseil de son employeur, et lui avait parlé de tous les éléments pertinents du dossier.

Le 18 août 2022, il s'était rendu chez la Dre M______ ; c'était la quatrième médecin en deux mois. A son arrivée, il avait refusé de signer un document de levée du secret médical, car il était trop large et visait des tiers (par exemple son employeur). Il avait tout expliqué à la Dre M______ s'agissant des motifs de son arrêt maladie et des malformations supposées du fœtus ; la Dre avait pris des notes au crayon gris sur un questionnaire de trois pages. Lorsqu'il estimait que les réponses ne la concernaient pas (par exemple s'agissant de ses frères/sœurs ou du ménage), il avait répondu « je ne sais pas ». Il ne souhaitait pas dévoiler sa vie privée et ne pas répondre aux questions hors sujet. Cela étant, il considérait avoir collaboré et répondu aux questions pertinentes. Il était donc surpris que l'assureur considère qu'il n'avait pas collaboré.

Le 24 août 2022, il avait téléphoné à la défenderesse et demandé un interlocuteur francophone, sans désigner un interlocuteur particulier. Il admettait que l'entretien téléphonique s'était mal passé. Il avait reçu une grande quantité de courriers et de courriels de la part de l'assureur et de son employeur ; L'assureur l'avait poussé à bout. Sa vie privée ne devait pas être dévoilée à tout le monde ; un collègue de travail lui avait téléphoné, à une date indéterminée, en l'interrogeant sur des informations factuellement fausses.

Il regrettait les erreurs commises par le GROUPE MUTUEL dans la gestion de son dossier, qu'il s'agisse de sa date de naissance, de la date du début du travail ou de la présence de son épouse lors de l'entretien avec l'inspecteur.

e/2) Le demandeur a remis à la chambre de céans une copie de la facture que le Dr J______ lui avait adressée par erreur (car à la charge de son employeur) pour la consultation du 26 juillet 2022.

e/3) L'assureur a confirmé que les CGA produites comme pièces étaient applicables à la présente procédure, malgré les erreurs de plume figurant dans son écriture en ce qui concerne les références à plusieurs articles.

Le délai d'attente de 30 jours pour les prestations était du 3 juillet au 1er août 2022 ; les indemnités journalières ont été versées pour la période du 2 au 17 août 2022. Le montant contesté, relatif à la période du 18 au 31 août 2022, représentait CHF 1'795.10. Il n'y avait pas de versement direct de l'assureur à l'assuré, mais un paiement à l'employeur qui le répercutait à son travailleur. L'assuré avait donc reçu un salaire, respectivement des indemnités du 1er juillet au 17 août 2022.

L'assureur n'avait pas connaissance du questionnaire de trois pages rempli au crayon gris par le Dre M______. Toutes les pièces en possession de l'assureur avaient été produites en procédure. Il ignorait pourquoi la Dre M______ avait écrit la date du « 18.07.2022 » dans son rapport, alors que le rendez-vous avait eu lieu le 18 août 2022. Il ignorait également pourquoi la Dre M______ avait rédigé deux rapports différents destinés à l'assureur.

e/4) A l'issue de l'audience, les parties ont souhaité l'audition de la Dre M______ et l'ont déliée du secret médical.

f. Par ordonnance du 12 juillet 2023, la chambre de céans a ordonné à la Dre M______ de produire son dossier médical, en particulier le questionnaire rempli lors de l'examen du 18 août 2022. Ces notes personnelles ont été produites par la Dre M______ le 11 août 2023 et transmises le 22 août 2023 aux parties. Il en ressort que ces notes personnelles comprennent beaucoup de points d'interrogations (par exemple à côté des rubriques « fonctions cognitives », « humeur / moral », « excitation » / « euphorie inadéquate », « rituels, obsessions » / « évitement spécifiques », « appétit, poids, alimentation, rapport à la nourriture ». La rubrique « antécédents familiaux, hérédité » comprennent la mention « je ne vous dirai rien » ; la rubrique « antécédents personnels » comprend un point d'interrogation ; la rubrique « milieu d'origine, événements particuliers à la naissance » comprend la mention « je ne vous réponds pas ». Des points d'interrogations figurent à côté des rubriques « scolarité » et « formation professionnelle ». Dans la rubrique « activités professionnelles », il est mentionné « conducteur de car », « sécurité », « pompier 10 ans », ainsi que l'amplitude horaire du poste actuel (4h-12h et 12h30/13h00). La mention « en famille » se trouve dans la rubrique « anamnèse psycho-sociale et histoire de la vie sentimentale », la mention « oui » à côté de la rubrique concernant le permis de conduire. Il y a des mentions dans la rubrique « réveils/coucher ». Pour les rubriques « entretien du logement », « achats et courses diverses », « lessive », « documents administratifs – paiements bancaires », « soins aux enfants ou aux membres de la famille », il est mentionné « oui, oui ».

g. Lors de l'audience du 23 août 2023, la Dre M______, dûment déliée de son secret médical, a été entendue, en présence des deux parties.

g/1) La Dre M______ était mandatée comme indépendante à titre de « médecin-experte psychiatre » pour diverses assurances ; s'agissant des dossiers envoyés par la défenderesse, cela représentait environ un dossier tous les deux mois.

Elle exerçait depuis plus de 25 ans comme médecin-psychiatre et disposait de spécialisations en psychiatrie générale de l'adulte, des enfants et des personnes âgées ; elle disposait également d'un titre de spécialiste en thérapie cognitive et comportementale. Elle avait également suivi diverses formations spécifiques en expertise et suit régulièrement des cours de formation continue.

g/2) Son entretien du 18 août 2022 avec le demandeur avait duré 30 minutes, alors qu'en principe il durait entre une et deux heures, quelquefois même trois heures, si c'était le premier examen. C'était la première fois qu'elle n'avait pas eu assez d'informations pour dresser un dossier d'expertise. Il était certes déjà arrivé que certaines personnes refusent un examen ou ne viennent pas, mais c'était extrêmement rare.

Elle avait transmis à la chambre de céans une copie de ses notes personnelles, à ne pas confondre avec un rapport d'examen (qu'elle n'avait en l'occurrence pas pu établir, vu l'absence de réponses du demandeur). Les deux rapports figurant dans le dossier de la défenderesse, produits en procédure, s'expliquaient par une raison informatique : en effet, elle devait remplir son rapport sur une plateforme informatique, qui, le jour de l'examen, n'avait pas confirmé la sauvegarde dudit rapport ; elle avait ainsi rédigé à nouveau le rapport le lendemain.

Le début de l'entretien avec le demandeur était cordial ; il s'était cependant crispé lors du refus par le demandeur de signer le consentement à la levée du secret médical. Si la première partie portant sur des questions générales s'est bien passée, tel n'était pas le cas de la deuxième partie, qui représentait l'essentiel de l'évaluation et comprenait l'anamnèse de la personne examinée. A titre d'exemple, elle avait interrogé le demandeur sur sa famille ; ce dernier avait répondu qu'il avait une sœur, mais refusé de répondre sur la date de naissance et le lieu de domicile de celle-ci. Elle avait ainsi noté les mots du demandeur « je ne vous dirai rien » en lieu et place de ses réponses. Son rapport comportait de nombreuses citations de réponses de ce type. Le demandeur avait refusé de répondre sur son milieu d'origine, sa naissance ou l'ambiance à la maison, son niveau scolaire, ses études, diplômes ou formation.

Pour établir son évaluation, elle avait aussi besoin de réponses relatives à l'activité professionnelle, par exemple s'agissant du premier poste de travail, de l'intégration au travail, des horaires de travail de la durée et du lieu des activités, des conditions de changement de travail (départ volontaire ou non, chômage, etc.). Le demandeur avait seulement répondu qu'il avait exercé une activité de conducteur de car et avait été pompier pendant dix ans. Il avait ensuite donné davantage d'informations sur son poste actuel, par exemple s'agissant de l'amplitude horaire.

De manière générale, les informations personnelles et familiales récoltées au début de l'entretien permettaient d'orienter la suite de l'entretien et de poser ensuite des questions plus pertinentes pour la suite de l'évaluation. Toutes ces informations permettaient de déterminer si certains événements causaient une surcharge ou étaient plutôt une ressource. En l'occurrence, le demandeur n'avait pas fourni ces informations, à part la mention d'une « vie familiale ». Il avait fourni des réponses générales, telles que « oui, oui » à des questions portant sur l'organisation de la vie familiale, la préparation des repas ou les courses.

Le demandeur avait ensuite été interrogé sur son état de santé et avait parlé d'insomnie et de réveils. Il n'avait cependant pas répondu davantage à d'autres questions, tout en serrant les lèvres (ce qui avait été mentionné dans les notes personnelles). L'amplitude horaire du travail aurait pu être la cause de l'absence au travail, mais en l'espèce, le demandeur n'avait pas fourni suffisamment d'autres explications pour finir l'évaluation.

Vu l'absence de réponses utilisables, l'entretien avait donc pris fin.

g/3) Interrogée par le demandeur, la Dre M______ a expliqué recevoir de nombreux courriels et appels téléphoniques sur son répondeur. Elle n'avait pas souvenir des appels, ni des courriels du demandeur lui demandant copie de son rapport. Cela étant, son rapport était très bref, vu les réponses lacunaires du demandeur. Il ne fallait pas confondre les notes personnelles transmises à la demande du Tribunal et un rapport d'examen qu'elle n'avait pas pu rédiger.

La Dre M______ a confirmé au demandeur qu'il avait quelquefois aussi répondu « je ne sais pas » à certaines questions ; cette réponse avait été résumée par un point d'interrogation dans ses notes personnelles. Elle n'avait pas rédigé un rapport détaillé, car elle n'avait pas d'anamnèse du demandeur. L'évaluation psychiatrique répondait à des critères stricts et, s'agissant du demandeur, elle ne disposait pas des informations nécessaires.

La Dre M______ n'avait pas de documents médicaux remis par le demandeur dans son dossier.

Alors qu'elle avait bloqué trois heures de son temps pour réaliser l'examen du demandeur, elle n'avait symboliquement facturé que CHF 300.- (soit son taux horaire) à la défenderesse pour le rendez-vous.

g/4) Une indemnité de CHF 375.- a été accordée à la témoin pour son audition devant la chambre de céans.

h. Après l'audition de la Dre M______, les parties ont explicitement persisté dans leurs conclusions. N'ayant pas sollicité d'autres actes d'instruction, les parties ont ensuite plaidé oralement et la cause a été gardée à juger.

 


 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la LAMal, relevant de la loi fédérale sur le contrat d'assurance, du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1).

Selon la police d’assurance, le contrat est régi par la LCA.

La compétence de la chambre de céans à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             L'art. 46a LCA prescrit que le for se définit selon la loi du 24 mars 2000 sur les fors (LFors) qui a été abrogée au 1er janvier 2011 par l’entrée en vigueur du CPC, auquel il convient désormais de se référer. Sauf disposition contraire de la loi, pour les actions dirigées contre les personnes morales, le for est celui de leur siège (art. 10 al. 1 let. b CPC), étant précisé que l’art. 17 al. 1 CPC consacre la possibilité d’une élection de for écrite.

En l’occurrence, l’art. 33 des CGA pour les assurances-maladie complémentaires prévoit que pour toutes les actions au sujet du contrat d’assurance, sont compétents au choix soit les tribunaux du domicile suisse des personnes assurées ou des ayants droit, soit ceux du siège de l’assureur ou du lieu de travail suisse pour l'assuré domicilié à l'étranger.

Le demandeur étant domicilié à l'étranger, mais travaillant au moment des faits dans le canton de Genève, la chambre de céans est compétente à raison du lieu pour connaître de la présente demande.

3.             Les litiges relatifs aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l'art. 197 CPC lorsque les cantons ont prévu une instance cantonale unique selon l'art. 7 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6 ; ATAS/577/2011 du 31 mai 2011), étant précisé que le législateur genevois a fait usage de cette possibilité (art. 134 al. 1 let. c LOJ).

4.             La procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la LAMal (art. 243 al. 2 let. f CPC) et la chambre de céans établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC).

La jurisprudence applicable avant l'introduction du CPC, prévoyant l'application de la maxime inquisitoire sociale aux litiges relevant de l'assurance-maladie complémentaire, reste pleinement valable (ATF 127 III 421 consid. 2). Selon cette maxime, le juge doit établir d'office les faits, mais les parties sont tenues de lui présenter toutes les pièces nécessaires à l'appréciation du litige. Ce principe n'est pas une maxime officielle absolue, mais une maxime inquisitoire sociale. Le juge ne doit pas instruire d'office le litige lorsqu'une partie renonce à expliquer sa position. En revanche, il doit interroger les parties et les informer de leur devoir de collaboration et de production des pièces ; il est tenu de s'assurer que les allégations et offres de preuves sont complètes uniquement lorsqu'il a des motifs objectifs d'éprouver des doutes sur ce point. L'initiative du juge ne va pas au-delà de l'invitation faite aux parties de mentionner leurs moyens de preuve et de les présenter. La maxime inquisitoire sociale ne permet pas d'étendre à bien plaire l'administration des preuves et de recueillir toutes les preuves possibles (ATF 125 III 231 consid. 4a).

Selon la volonté du législateur, le tribunal n'est soumis qu'à une obligation d'interpellation accrue. Comme sous l'empire de la maxime des débats, applicable en procédure ordinaire, les parties doivent recueillir elles-mêmes les éléments du procès. Le tribunal ne leur vient en aide que par des questions adéquates afin que les allégations nécessaires et les moyens de preuve correspondants soient précisément énumérés. Mais il ne se livre à aucune investigation de sa propre initiative. Lorsque les parties sont représentées par un avocat, le tribunal peut et doit faire preuve de retenue, comme dans un procès soumis à la procédure ordinaire (ATF 141 III 569, 575 consid. 2.3 et les références citées).

La maxime inquisitoire sociale ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4C.185/2003 du 14 octobre 2003 consid. 2.1). Pour toutes les prétentions fondées sur le droit civil fédéral, l'art. 8 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 (CC ; RS 210), en l'absence de règles contraires, répartit le fardeau de la preuve et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 133 III 323 consid. 4.1 non publié ; ATF 130 III 321 consid. 3.1 ; ATF 129 III 18 consid. 2.6 ; ATF 127 III 519 consid. 2a). Cette disposition ne prescrit cependant pas quelles sont les mesures probatoires qui doivent être ordonnées (cf. ATF 122 III 219 consid. 3c ; ATF 119 III 60 consid. 2c). Elle n'empêche pas le juge de refuser une mesure probatoire par une appréciation anticipée des preuves (ATF 121 V 150 consid. 5a). L'art. 8 CC ne dicte pas comment le juge peut forger sa conviction (ATF 122 III 219 consid. 3c ; ATF 119 III 60 consid. 2c ; ATF 118 II 142 consid. 3a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, il ne s'applique que si le juge, à l'issue de l'appréciation des preuves, ne parvient pas à se forger une conviction dans un sens positif ou négatif (ATF 132 III 626 consid. 3.4 et ATF 128 III 271 consid. 2b/aa). Ainsi, lorsque l'appréciation des preuves le convainc de la réalité ou de l'inexistence d'un fait, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus (ATF 128 III 271 consid. 2b/aa).

5.             En vertu de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. En conséquence, la partie qui fait valoir un droit doit prouver les faits fondant ce dernier, tandis que le fardeau de la preuve relatif aux faits supprimant le droit, respectivement l’empêchant, incombe à la partie, qui affirme la perte du droit ou qui conteste son existence ou son étendue. Cette règle de base peut être remplacée par des dispositions légales de fardeau de la preuve divergentes et doit être concrétisée dans des cas particuliers (ATF 128 III 271 consid. 2a/aa avec références). Ces principes sont également applicables dans le domaine du contrat d'assurance (ATF 130 III 321 consid. 3.1).

En principe, un fait est tenu pour établi lorsque le juge a pu se convaincre de la vérité d'une allégation. La loi, la doctrine et la jurisprudence ont apporté des exceptions à cette règle d'appréciation des preuves. L'allégement de la preuve est alors justifié par un « état de nécessité en matière de preuve » (Beweisnot), qui se rencontre lorsque, par la nature même de l'affaire, une preuve stricte n'est pas possible ou ne peut être raisonnablement exigée, en particulier si les faits allégués par la partie qui supporte le fardeau de la preuve ne peuvent être établis qu'indirectement et par des indices (ATF 132 III 715 consid. 3.1 ; ATF 130 III 321 consid. 3.2). Tel peut être le cas de la survenance d'un sinistre en matière d'assurance-vol (ATF 130 III 321 consid. 3.2) ou de l'existence d'un lien de causalité naturelle, respectivement hypothétique (ATF 132 III 715 consid. 3.2). Le degré de preuve requis se limite alors à la vraisemblance prépondérante (die überwiegende Wahrscheinlichkeit), qui est soumise à des exigences plus élevées que la simple vraisemblance (die Glaubhaftmachung). La vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ou hypothèses envisageables ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2 ; ATF 132 III 715 consid. 3.1 ; ATF 130 III 321 consid. 3.3).

Selon la jurisprudence la plus récente, le principe général de l'art. 8 CC s'applique aussi dans le domaine du contrat d'assurance : l'ayant droit est tenu de prouver les faits relatifs à la justification de ses prétentions (cf art. 39 LCA), à savoir l'existence d'un contrat d'assurance, la survenance du cas d'assurance et l'étendue de ses prétentions. Il incombe à l'assureur de prouver les faits qui l'autorisent à réduire ou à refuser la prestation contractuelle convenue ou qui rendent le contrat d'assurance non contraignant à l'égard de l'ayant droit. Le degré de preuve ordinaire s'applique à l'incapacité de travail alléguée en lien avec la survenance du cas d'assurance (ATF 148 III 105, 107-108 consid. 3.3.1).

6.             En vertu de l'art. 8 CC, la partie qui n'a pas la charge de la preuve a le droit d'apporter une contre-preuve. Elle cherchera ainsi à démontrer des circonstances propres à faire naître chez le juge des doutes sérieux sur l'exactitude des allégations formant l'objet de la preuve principale. Pour que la contre-preuve aboutisse, il suffit que la preuve principale soit ébranlée, de sorte que les allégations principales n'apparaissent plus comme les plus vraisemblables (ATF 130 III 321 consid. 3.4). Le juge doit procéder à une appréciation d'ensemble des éléments qui lui sont apportés et dire s'il retient qu'une vraisemblance prépondérante a été établie (ATF 130 III 321 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_61/2011 du 26 avril 2011 consid. 2.1.1).

7.             Dans la situation d'espèce, le fardeau de la preuve incombe au demandeur. La présente procédure porte sur d'éventuelles indemnités journalières maladie pour la période du 18 au 31 août 2022.

7.1 Lors de l'audience du 11 juillet 2023, les prétentions du demandeur ont été chiffrées à CHF 1'795.10. Il n'y a pas de litige sur le mode de calcul des indemnités.

La défenderesse réclame pour sa part, à titre reconventionnel, un montant de CHF 300.-.

7.2 La question à résoudre ici est de savoir si l'assuré a suffisamment collaboré avec l'assureur pour avoir droit (ou non) aux indemnités journalières. L'art. 18, ch. 2 et l'art. 26 CGA, présentés ci-dessus, imposent en effet un devoir de collaboration de l'assuré. Le demandeur n'apporte pas la preuve de sa collaboration suffisante dans la procédure d'octroi de prestations. Bien au contraire, la défenderesse a apporté la contre-preuve que la collaboration du demandeur était insuffisante.

Il résulte des déclarations du demandeur lui-même – y compris lors de sa plaidoirie finale orale – que ce dernier n'a, pour l'essentiel, pas répondu aux questions de la Dre M______, respectivement seulement par des phrases telles que « je ne vous dirai rien », « je ne sais pas », « oui, oui ». Le demandeur semble considérer que sa simple présence physique à l'entretien, ainsi que la politesse élémentaire (salutations, identification), suffisent à réaliser la condition de la collaboration suffisante pour déterminer son état de santé. Le litige opposant le demandeur à son assurance porte en effet sur des indemnités journalières pour combler une absence due à des raisons médicales. La simple présence à l'entretien chez la Dre M______ ne suffit pas pour déduire une collaboration suffisante.

La témoin M______ a expliqué de manière convaincante à la chambre de céans – et le demandeur ne l'a pas contesté – que la rédaction d'un rapport d'examen nécessitait de poser des questions sur la vie personnelle, familiale et professionnelle du demandeur, mais que les réponses obtenues étaient matériellement insuffisantes, conduisant à l'impossibilité de rédiger un rapport autre qu'une mention d'absence de collaboration effective et concrète. Le demandeur, sans formation médicale, souhaitait d'ailleurs lui-même évaluer l'utilité des questions posées par la Dre M______, et choisissait soit d'y répondre par une monosyllabe (« oui »), ou par quelques mots (formation de conducteur de car, pompier) seulement. S'il est admis qu'il a expliqué des difficultés professionnelles et des insomnies, le demandeur n'a pas fourni suffisamment d'éléments à la Dre M______ pour les contextualiser et les expliquer et, a fortiori, déterminer s'ils sont constitutifs d'un motif justifié d'absence maladie.

Une attitude aussi peu collaborante d'un assuré est assez rare, comme l'a aussi admis la Dre M______. Quoi qu'il en soit, même si – dans l'hypothèse inverse, souhaitée par le demandeur – il y avait beaucoup d'assurés ne participant pas aux examens ou ne répondant pas aux questions, cela ne dispenserait pas le demandeur de collaborer activement à l'établissement de son état de santé.

S'il est certes possible de comprendre les inquiétudes du demandeur liée à la grossesse de son épouse, aux examens à effectuer auprès de D______ et aux éventuelles malformations du fœtus, cet élément n'explique pas l'absence de collaboration lors de l'entretien avec la Dre M______.

La chambre de céans considère donc que la collaboration du demandeur était insuffisante au sens des conditions générales d'assurance, ce qui justifiait la position de l'assurance de considérer que le motif de maladie ouvrant le droit aux prestations n'était pas donné après l'examen par la Dre M______. Par voie de conséquence, dès lors que le motif de maladie n'est pas retenu, il n'y avait pas de droit aux prestations, ce qui implique le rejet des prétentions en paiement.

Les prétentions en paiement du demandeur seront donc rejetées.

7.3 A titre subsidiaire, en ce qui concerne le motif d'absence maladie, il ressort des déclarations du demandeur que ce dernier, en rentrant du travail début juillet 2022, s'est arrêté chez le Dr G______, qui n'était pas son médecin traitant, mais qui l'avait déjà vu précédemment, a expliqué « l'histoire qui [le] tourmentait » et a été mis en arrêt de travail pour une durée d'un mois ; le document manuscrit établi par le Dr G______ est au demeurant difficile à lire. Le renouvellement du certificat médical a été effectué par son médecin traitant, le Dr L______. Le demandeur n'est pas retourné chez son médecin avant sa reprise de travail en septembre 2022, car il considérait qu'il pouvait recommencer à travailler. Le demandeur semble donc procéder à une auto-évaluation de sa situation de santé, qu'il s'agisse de son arrêt de travail, de sa reprise de travail ou aux questions pertinentes pour une expertise.

La chambre de céans constate aussi que le demandeur, outre la production du document illisible du Dr G______ et du certificat standard du Dr L______, n'a fourni aucune preuve du fait que son état de santé l'empêche de travailler. Le demandeur a certes expliqué qu'il se trouvait dans une période de grande anxiété et de stress pour des raisons privées et professionnelles. Des inquiétudes liées à son activité professionnelle ou à l'état de santé de son futur enfant peuvent certes conduire à un état de grande anxiété, à de l'insomnie ou d'autres symptômes : elles n'impliquent cependant pas nécessairement un arrêt de travail de moyenne durée.

La chambre de céans retiendra ainsi à titre subsidiaire que le motif de maladie justifiant l'absence au travail pour la période du 18 août 2022 au 31 août 2022 n'est pas suffisamment allégué, et encore moins prouvé. La circonstance que le demandeur agisse en personne ne change rien au fait qu'il n'y a pas eu d'allégué d'explications matériellement suffisantes, y compris sous l'angle de la chronologie postérieure au 18 août 2022, pour envisager de compléter l'état de fait sur les circonstances de l'absence du demandeur au travail.

8.             A titre reconventionnel, la défenderesse fait valoir le remboursement des CHF 300.- de l'examen effectué par la Dre M______.

8.1 Selon l'art. 18, al. 2, lettre c CGA, les prestations peuvent être réduites ou refusées temporairement ou définitivement : c) si l'assuré refuse de collaborer aux mesures d'instruction (p. ex. se faire examiner par un médecin mandaté par l'assureur) ou ne se présente pas à une convocation ordonnée par l'assureur sans motif valable. Dans ce cas, l'assureur se réserve en outre le droit de demander le remboursement de prestations déjà avancées et de facturer à l'assuré les frais relatifs à la convocation manquée.

8.2 En l'espèce, il résulte du considérant précédent que la collaboration du demandeur était insuffisante, ce qui implique le rejet de ses prétentions en prestations. L'assureur a spécifiquement réclamé, déjà avant le début de la procédure, le remboursement de la consultation facturée par la Dre M______.

8.3 Il est incontesté, sur le principe, que la Dre M______, en tant que médecin indépendante a droit à une indemnité pour son examen du 18 août 2022 du demandeur ; la Dre M______ a également expliqué, sans être contredite, avoir bloqué trois heures de son temps pour préparer et effectuer l'examen du demandeur. Sa facture de CHF 300.- correspondant à une activité d'une heure est donc parfaitement justifiée ; la chambre de céans considère en effet que, même si trois heures avaient été réservées et étaient libres de rendez-vous, le reste du temps pouvait être – en application implicite du principe juridique de la réduction du dommage (art. 44 CO) – affecté à d'autres tâches par la témoin, que ce soit pour rédiger d'autres rapports ou préparer d'autres dossiers. Les honoraires de CHF 300.- sont donc admis tant sur le principe, que sur la quotité.

8.4 Il convient de déterminer qui est le débiteur final des CHF 300.- dus à la Dre M______, à savoir l'assuré ou l'assureur. C'est l'assureur qui a requis un examen de l'assuré par la témoin M______, car il avait des doutes sur les prestations à verser à son assuré. Cela étant, c'est l'assuré qui a conduit à l'échec de l'examen, vu son absence de collaboration. Il ressort en effet tant des notes personnelles de la Dre M______ que de son audition par la chambre de céans et même des déclarations du demandeur que la collaboration de ce dernier a été très partielle et sélective, causant l'impossibilité scientifique pour la Dre M______ de rédiger un rapport détaillé. La responsabilité contractuelle (art. 97 CO) de l'assuré est engagée, dès lors qu'il y a un dommage (CHF 300.-), un comportement contraire au contrat (absence de collaboration), un lien de causalité naturelle et adéquate et enfin une faute (présumée). C'est donc à bon droit que la défenderesse réclame reconventionnellement au demandeur le remboursement des CHF 300.- de la consultation facturée par la Dre M______.

8.5 Dans sa réponse et demande reconventionnelle du 24 avril 2023, la défenderesse réclame des intérêts (non chiffrés) dès cette date. Dès lors que l'écriture du 24 avril 2023 a été adressée au greffe de la chambre de céans, n'a été transmise par le greffe au demandeur que le 26 avril 2023 et que ce dernier n'a pu en avoir connaissance qu'à partir du 27 avril 2023 au plus tôt, c'est donc la date du 27 avril 2023 qui sera retenue comme point de départ des intérêts. Le taux des intérêts n'étant pas chiffré, c'est le taux légal de 5% (art. 104, al. 1 CO) qui sera retenu.

8.6 Le demandeur sera donc condamné à verser CHF 300.- + intérêts à 5% dès le 27 avril 2023 à la défenderesse.

9.             Les cantons fixent le tarif des frais (art. 96 CPC), qui comprend les frais judiciaires (art. 95 al. 1 let. a CPC) et les dépens (art. 95 al. 1 let. b CPC). Les frais judiciaires comprennent notamment les frais d'administration des preuves (art. 95 al. 2 lettre c CPC).

9.1.1 En principe, il n'est pas perçu de frais judiciaires dans la procédure au fond pour les litiges portant sur des assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale au sens de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (art. 114 let. e CPC).

9.1.2 Cela étant, les frais judiciaires peuvent, même dans les procédures gratuites, être mis à la charge de la partie qui a procédé de façon téméraire ou de mauvaise foi (art. 115 CPC). Selon la doctrine, la jurisprudence relative l'ancien art. 343 al. 3 CO peut être transposée à l'art. 115 CPC (Denis TAPPY, Art. 115, in : Commentaire romand CPC, 2ème éd., Helbing Lichtenhahn, Bâle 2019, p. 535, §3 ad art. 115 CPC). Dans un arrêt du 23 mai 2005 (4C.91/2005, consid. 3.2, aussi cité par JENNY, Art. 115, in : Zürcher Kommentar ZPO, 3ème éd., Schulthess, Zurich 2016, p. 958, §9 ad art. 115 CPC), le Tribunal fédéral a expliqué que « dès lors que la Cour d'appel, au terme de la procédure probatoire, était arrivée à la conclusion que les allégations de la demanderesse ne reposaient sur aucun fondement objectif, elle pouvait qualifier le comportement procédural de cette partie de téméraire sans violer le droit fédéral ».

Il faut que la partie soit consciente que son action est dénuée de chances de succès suffisantes (ATF 128 V 323, 324 consid. 1b ; Patricia DIETSCHY-MARTENET, Art. 115, in : Petit commentaire CPC, Helbing Lichtenhahn, Bâle 2021, p. 595, §7 ad art. 115 CPC).

La doctrine explique encore qu'il ne faut pas confondre l'action téméraire de l'art. 115 avec l'absence de chances de succès d'une procédure. Agit de manière téméraire celui qui persiste dans la procédure, bien qu'il connaisse l'absence de chances de succès (Hans SCHMID / Ingrid JENT-SOERENSEN, Art. 115, in : Kurzkommentar ZPO, 3ème éd., Helbing Lichtenhahn, Bâle 2021, p. 710, §1 ad art. 115 CPC),

9.1.3 Les litiges d'assurances complémentaires sont en principe, selon le choix clair du législateur fédéral, gratuits, afin de faciliter l'accès à la justice et d'éviter toute barrière au début d'une procédure. Immédiatement après la disposition sur la gratuité (art. 114 CPC), le législateur fédéral a cependant précisé (art. 115 CPC) que les frais judiciaires pouvaient être mis à charge de la partie agissant de façon téméraire ou de mauvaise foi ; cela signifie que des exceptions au principe de la gratuité sont possibles et que cette dernière ne s'applique pas de manière absolue (voir aussi Thomas SUTTER-SOMM, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3ème éd., Schulthess, Zurich 2017, p. 177, §669 ; Adrian STAEHELIN / Daniel STAEHELIN / Pascal GROLIMUND, Zivilprozessrecht, 3ème éd., Zurich 2019, p. 242, §16.10). Le principe général de la mise à charge des parties des frais judiciaires vise à faire participer la partie succombante à une partie des coûts de la justice.

9.1.4 En l'espèce, la présente procédure a impliqué des frais d'administration des preuves, soit l'indemnité de CHF 375.- versée à la témoin M______.

9.1.5 Le demandeur avait parfaitement conscience de son absence de collaboration lors de l'entretien avec la Dre M______ du 18 août 2022. Il a néanmoins déposé une demande en justice le 13/22 février 2023. Au cours de la présente procédure, les notes personnelles de la Dre M______ ont été transmises au demandeur par pli du 22 août 2023. Il a ensuite assisté, le 6 septembre 2023, à l'audition de la Dre M______ qui a confirmé que ses réponses étaient insuffisantes pour établir un rapport. A la suite de cette audition, il a néanmoins persisté dans sa demande et ses conclusions. Dans sa plaidoirie orale, il a même expressément admis avoir peu collaboré.

9.1.6 La chambre de céans considère que le maintien de la demande en justice par le demandeur après l'instruction du dossier, la production des notes personnelles et l'audition de la Dre M______ était téméraire, ce qui permet d'imputer au demandeur une partie des frais judiciaires résultant de cette procédure. En application du principe de proportionnalité, et pour tenir compte du fait que la gratuité est en principe la règle, une partie réduite des frais de justice – à savoir un montant forfaitaire de CHF 200.- – sera mis à charge du demandeur. Le solde des frais judiciaires reste à charge de l'Etat de Genève.

En tant que de besoin, la chambre de céans précise encore que ce n'est pas le dépôt de la demande en justice en tant que tel qui est considéré comme téméraire, car les conditions de l'application de l'art. 115 CPC sont strictes. En revanche, c'est la persistance à la fin de la procédure, malgré le double résultat de l'administration des preuves (remise des documents, audition de la témoin), à revendiquer des prétentions infondées qui implique une participation partielle aux frais de la procédure.

9.1.7 Un montant de CHF 200.- de participation aux frais judiciaires est mis à charge du demandeur.

9.2 Aucune partie n'étant représentée par un conseil, la question des dépens ne se pose pas (art. 106 al. 1 CPC ; art. 20 à 26 de la loi d'application du code civil suisse et d’autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 [LaCC - E 1 05] ; art. 84 et 85 du RTFMC). De plus, l'art. 115 CPC ne s'applique pas aux dépens (DIETSCHY-MARTENET, Petit commentaire CPC 2021, p. 594, §3 ad art. 115 ; TAPPY, Commentaire romand 2019, p. 536, §9 ad art. 115).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

SUR DEMANDE PRINCIPALE

À la forme :

1.        Déclare recevable la demande du 22 février 2023 de Monsieur A______ contre GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA.

Au fond :

2.        Rejette la demande.

 

SUR DEMANDE RECONVENTIONNELLE

À la forme :

3.        Déclare recevable la demande reconventionnelle du 24 avril 2023 du GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA.

Au fond :

4.        Condamne Monsieur A______ à payer la somme de CHF 300.-, avec intérêts à 5% dès le 27 avril 2023, au GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA.

SUR LES FRAIS

5.        Condamne Monsieur A______ à payer la somme de CHF 200.- à l'Etat de Genève, à titre de participation aux frais judiciaires.

6.        Laisse le solde des frais judiciaires à la charge de l'Etat de Genève.

7.        Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

8.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les 30 jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

 

La greffière

 

 

 

 

Stefanie FELLER

 

Le président suppléant

 

 

 

 

David HOFMANN

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le