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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3550/2021

ATAS/662/2023 du 04.09.2023 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 10.10.2023, 8C_639/2023
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3550/2021 ATAS/662/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 septembre 2023

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

Représentée par Maitre Alexia RAETZO, avocate

 

 

recourante

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS

 

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1970, assistante gestionnaire contentieux auprès de la centrale de compensation de la Confédération, a été victime d’un accident de la circulation routière le 22 janvier 2018 alors qu’elle circulait à scooter. Elle a subi une fracture du plateau tibial gauche justifiant une invention chirurgicale le 30 janvier 2018 et le 21 juin 2018, puis une ablation du matériel d’ostéosynthèse (AMO) le 9 avril 2019. L’assurée a présenté des douleurs persistantes au genou et à la cheville gauche, avec des sensations de blocage, nécessitant l’utilisation de béquilles.

b. L’assurée a repris son activité professionnelle dès août 2019, de façon progressive jusqu’à un taux de 70%. Dès le 19 juin 2020, elle a présenté une incapacité de travail de 50% pour des motifs psychiques.

B. a. Le 23 septembre 2020, le docteur B______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, médecin d’arrondissement de la caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : SUVA), a examiné l’assurée ; celle-ci se plaignait de pessimisme, de moral fluctuant avec des moments d’abattement, de découragement, de sommeil perturbé, de fatigue, de fatigabilité, de ruminations. Il a posé le diagnostic de trouble dépressif récurrent, épisode actuel léger à moyen, réactionnel à la problématique somatique et fixé une capacité de travail limitée à 50%.

b. Le 16 février 2021, le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, médecin d’arrondissement de la SUVA, a effectué un examen final. L’assurée présentait des douleurs au niveau du genou, une instabilité, la nécessité d’utiliser des béquilles et une sensibilité aux frottements sur le genou. Il a retenu, le 19 février 2021, des diagnostics de fracture du plateau tibial gauche, de syndrome douloureux régional complexe (SDRC), de douleurs neuropathiques du membre inférieur gauche et de raideur de la cheville gauche. La capacité de travail était diminuée de 20% jusqu’à l’échéance des deux ans post-opératoires puis, dans le futur de 10% pour une activité sédentaire stricte. L’état était stabilisé à deux ans de la dernière intervention du 9 avril 2019. Le 29 avril 2021, le Dr C______ a fixé le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) à 25% et, le 30 avril 2021, il a estimé que la baisse de rendement était de 5% correspondant à une augmentation du temps de déplacement d’au-minimum ½ heure par jour ; les limitations fonctionnelles autorisaient une activité sédentaire stricte.

c. Le 19 mai 2021, la SUVA a écrit à l’assurée qu’elle cesserait le versement des indemnités journalières et la prise en charge des soins médicaux (sous réserve de certains traitements) au 31 août 2021.

d. Par décision du 7 juin 2021, la SUVA a refusé à l’assurée le droit à une rente d’invalidité et fixé une IPAI de 25%. La diminution de rendement était de 5% du point de vue somatique et des éléments d’appréciation excluaient une relation de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l’accident.

e. Le 18 juin 2021, la recourante a fait opposition à cette décision. La SUVA devait investiguer les perspectives d’évolution de son état de santé physique, au besoin par une expertise indépendante, avant toute suppression des indemnités journalières et motiver de manière détaillée les éléments d’appréciation dont elle se prévalait pour exclure la prise en charge des troubles psychiques. Le paiement des indemnités journalières devait être maintenu au-delà du 31 août 2021 et une rente d’invalidité et une IPAI examinées après instruction médicale complémentaire.

f. Le 3 septembre 2021, le Dr C______ a rendu une appréciation médicale et confirmé ses précédentes appréciations, dont une capacité de 100%, avec une baisse de rendement de 5%.

g. Par décision du 16 septembre 2021, la SUVA a rejeté l’opposition de l’assurée, en se fondant sur l’avis du Dr C______. S’agissant des troubles psychiques, l’accident devait être qualifié de moyen, à la limite de la catégorie inférieure, de sorte que quatre critères jurisprudentiels étaient nécessaires pour admettre la causalité adéquate, alors qu’aucun n’était rempli ; l’IPAI de 25% était confirmée. Il était mentionné qu’un recours contre la présente décision n’aurait aucun effet suspensif.

C. a. Le 18 octobre 2021, l’assurée, représentée par une avocate, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision sur opposition précitée, en concluant, sur mesures provisionnelles, à la restitution de l’effet suspensif au recours et au maintien de l’indemnité journalière au-delà du 31 août 2021, principalement, à l’annulation de la décision, au versement de l’indemnité journalière sur la base d’une incapacité de travail de 50%, à la prise en charge par la SUVA des soins médicaux, à l’octroi d’une IPAI supérieure à 25%, à l’ordonnance d’une expertise pluridisciplinaire, voire à l’octroi d’une rente d’invalidité dès le 1er septembre 2021 tenant compte d’une incapacité de travail de 50%. Contrairement aux constats retenus par la SUVA, des traitements complémentaires devaient encore être explorés avant de pouvoir conclure à une stabilisation de l’état de santé, de sorte que le versement de l’indemnité journalière et le paiement des soins médicaux devaient être poursuivis au-delà du 31 août 2021.

L’assurée a notamment communiqué :

-     un rapport de la docteure D______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, du 11 mars 2021, selon lequel l’assurée présentait un tableau clinique stabilisé, les douleurs du membre inférieur et les aspects psychologiques ne permettaient pas une reprise d’activité à 80%, une augmentation progressive était plus adaptée avec un taux maximum de 70% ; elle présentait une hypersensibilité au toucher et une allodynie au niveau du genou et de la jambe gauche ; elle ressentait un lâchage du genou et la marche sans béquilles n’était pas fluide.

-     un rapport des docteurs E______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, et F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, du 2 juin 2021, constatant une allodynie du genou gauche jusqu’à mi-mollet ; la situation était stabilisée selon les différents thérapeutes qui l’avaient suivie ;

-     un rapport de la docteure G______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, du 18 juin 2021, selon lequel l’assurée gardait des séquelles très importantes d’une algodystrophie sévère, avec des douleurs permanentes et persistantes, malgré une médication antalgique forte, un lâchage de son genou et une amyotrophie de la cuisse ; elle était limitée dans son quotidien personnel et professionnel et sa capacité de travail était au maximum de 50%, compte tenu des douleurs et des effets de son traitement antalgique lourd ;

-     un rapport du docteur H______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, du 21 juillet 2021, selon lequel l’assurée souffrait toujours de façon importante des séquelles d’une algodystrophie sévère de son genou gauche, dans les suites traumatiques d’une fracture complexe ostéosynthésée ; elle était très limitée dans ses activités de la vie quotidienne et professionnelle et prenait une médication lourde sur le plan antalgique ; sa capacité de travail était de 50% au maximum ;

-     un rapport du docteur I______, spécialiste FMH en médecine générale, du 14 septembre 2021, selon lequel l’assurée présentait des douleurs en lien avec l’accident au membre inférieur gauche, au bassin, à la colonne lombaire et aux épaules (peut-être en raison de l’utilisation de cannes anglaises) ; l’IRM du genou gauche du 24 août 2021 montrait une énorme chondropathie fémoro-tibiale latérale de grade III et fémoro-patellaire de grade II, affectant la mobilité ; il convenait d’étudier quel traitement apporter pour rendre un minimum de mobilité ; la capacité de travail était au maximum de 50%.

b. Le 19 novembre 2021, la SUVA a conclu au rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif au recours, la situation étant stabilisée.

c. Le 25 novembre 2021, la recourante a observé qu’il était prématuré de considérer que son état de santé était stabilisé et le 20 décembre 2021, elle a estimé, après que la SUVA ait réclamé un délai supplémentaire pour répondre et pour apprécier les pièces médicales récentes, que la SUVA avait traité avec légèreté son dossier, sans examiner les éléments médicaux qu’elle avait apportés.

d. Le 21 décembre 2021, le Dr C______ a effectué une appréciation médicale, en relevant que le rapport du Dr I______, du 14 septembre 2021, ne modifiait pas son appréciation. Les limitations fonctionnelles autorisaient une activité sédentaire stricte à taux plein. Il était concédé une limitation de rendement de 5% et le 14 janvier 2022, la SUVA a conclu au rejet du recours, en se fondant sur l’appréciation du Dr C______.

e. Le 3 février 2022, l’assurée a répliqué et le 7 février 2022, elle a communiqué deux certificats attestant d’une incapacité de travail de 50% en février 2022 établis par le docteur J______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et la docteure K______, spécialiste FHM en médecine interne générale.

f. Par arrêt incident du 9 février 2021, la chambre de céans a rejeté la requête en restitution de l’effet suspensif au recours, en relevant que les rapports du Dr C______ étaient très succincts et peu motivés sur l’analyse du cas de la recourante, dont celle de la stabilisation de l’état de santé mais que les rapports médicaux des médecins traitants ne permettaient pas d’admettre, sans aucun doute, que la stabilisation de l’état de santé n’était pas atteinte.

g. Le 29 avril 2022, l’assurée a communiqué les nouvelles pièces médicales suivantes et souligné que celles-ci confirmaient ses nombreuses atteintes à la santé, de sorte que des investigations médicales complémentaires étaient nécessaires et qu’elle ne pouvait travailler à un taux supérieur à 50% :

-     des certificats d’arrêt de travail à 50% pour mars, avril et mai 2022 du Dr J______ ;

-     des certificats d’arrêt de travail à 50% pour avril et mai 2022 de la Dre K______ ;

-     un rapport du 22 février 2022 du docteur L______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, selon lequel l’assurée présentait cliniquement une paresthésie, dysesthésie du genou gauche et une grosse irritation de la bandelette « ilii-tibiale » justifiant une infiltration et à l’IRM une prolifération fibre-cicatricielle de l’angle supéro-externe de la cheville, justifiant une investigation par un spécialiste de la douleur ;

-     un rapport du docteur M______, spécialiste FMH en anesthésiologie, du 28 mars 2022, selon lequel un test de perfusion confirmait l’étiologie neuropathique du syndrome douloureux ; une sonde test de neuromodulation était proposée à l’assurée qui avait accepté cette proposition ;

-     un rapport de la docteure N______, spécialiste FMH en endocrinologie et diabétologie, du 6 avril 2022, concluant à une ostéoporose axiale et périphérique multifactorielle nécessitant un traitement.

h. Le 10 juin 2022, le Dr C______ a rendu une appréciation médicale, en relevant que les nouvelles pièces médicales ne modifiaient pas son appréciation ; l’assurée présentait des douleurs neuropathiques de la jambe et du genou gauche mal systématisées. Il serait intéressant de connaitre l’effet de l’implantation de la sonde test de neuromodulation ; la situation était stabilisée à deux ans de la dernière intervention. Les nouveaux examens envisagés depuis janvier 2022 ouvraient la question d’une rechute.

i. Le 13 juin 2022, la SUVA a conclu au rejet du recours.

j. Le 20 juin 2022, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution. La recourante a déclaré, notamment, que le traitement par sonde de neuromodulation était programmé pour septembre 2022.

k. Le 13 septembre 2022, la chambre de céans a informé les parties qu’elle entendait ordonner une expertise judiciaire qui serait confiée au Professeur O______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur.

l. Le 20 septembre 2022, la recourante a accepté la mission d’expertise.

m. Le 23 septembre 2022, la SUVA a demandé la récusation du Prof. O______, d’une part, car il avait travaillé avec le Dr L______, d’autre part, car il n’était pas spécialiste de la jambe. Elle a proposé deux noms d’experts.

n. Le 3 octobre 2022, l’assurée a observé que le Prof. O______ disposait de toutes les compétences nécessaires pour effectuer l’expertise et que le fait qu’il ait travaillé et/ou opéré avec le Dr L______ n’était pas un motif suffisant de récusation.

o. Par ordonnance du 6 octobre 2022, la chambre de céans a confié l’expertise judiciaire au Prof. O______, en relevant que celui-ci disposait de larges compétences et d’une grande pratique dans le domaine de l’orthopédie et que le simple fait d’avoir exercé avec le Dr L______ ne fondait pas une apparence de prévention. Elle a relevé que compte tenu des rapports peu étayés du Dr C______ et de ceux des médecins traitants, lesquels contestaient l’exigibilité retenue, il existait un doute sur la fiabilité et la validité des constatations du Dr C______, de sorte qu’il convenait d’ordonner une expertise judiciaire orthopédique.

p. Le 10 octobre 2022, le Dr M______ a adressé l’assurée au docteur P______, chef du service de chirurgie plastique et de la main du CHUV, pour une évaluation chirurgicale, en relevant qu’elle souffrait de douleurs neuropathiques.

q. Le 20 décembre 2022, le Dr P______ a requis de l’assurance-maladie de l’assurée la prise en charge d’une opération de révision de cicatrice, de décompression et neurolyse du nerf péronier commun et saphène et lipofilling pour correction de la cicatrice atrophique au niveau du genou gauche.

r. Le 10 mars 2023, le Prof. O______ a rendu son rapport d’expertise.

L’état de santé était stabilisé mais il existait encore une amyotrophie, une arthrose, des raideurs et des douleurs qui nécessitaient une thérapie de maintien. Les atteintes et les plaintes étaient objectivables. La fracture des plateaux tibiaux, le SDRC, l’arthrose du genou gauche, la raideur articulaire du genou et de la cheville, les métatarsalgies étaient en lien de causalité certain avec l’accident. L’ostéoporose pour immobilisation séquellaire et la bursite de l’épaule suite à l’utilisation des cannes anglaises étaient en lien probable avec l’accident. Le dommage articulaire persistant et le SDRC, tout comme l’ostéoporose, étaient en évolution.

Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : port de charge limité à 3 kg, station assise avec chaise ergonomique et repose jambe réglable avec alternance debout-assis, station debout limitée à 20 mn, périmètre de marche limité à 200 m, pas d’escaliers, ni d’échelle ou d’escabeau, pas de travail avec les mains au‑dessus des épaules. L’assurée présentait des difficultés de mobilité et des douleurs persistantes qui perturbaient l’attention et la concentration.

En raison des seules atteintes en lien avec l’accident, l’assurée était capable de travailler à 50% dans son activité habituelle.

Il était étonné de constater que le Dr C______ admettait une capacité de travail de 80% avec une baisse de rendement de 10% (le 16 février 2021) puis une capacité de travail de 100% avec une baisse de rendement de 5% (le 21 décembre 2021), alors que la situation médicale n’avait pas changé.

La fixation, le 30 avril 2021, d’une baisse de rendement de 5% ne tenait pas compte de l’évolution du SDRC ni de l’installation progressive de l’arthrose du genou gauche ; l’assurée était dans l’impossibilité d’assurer un taux de 100% qui nécessitait une grande faculté de concentration ; les traitements de physiothérapie et d’acupuncture évitaient une aggravation de l’amyotrophie et de la raideur articulaire du membre inférieur gauche.

L’atteinte à l’intégrité était de 40%, correspondant à une panarthrose sévère du genou gauche. En effet, l’IRM du 10 février 2022 montrait une évolution vers une arthrose grave inévitable.

s. Le 5 avril 2023, la recourante a estimé que l’expertise judiciaire était probante. Elle a conclu à l’octroi d’une rente d’invalidité de 50% dès le 1er septembre 2021 ; le lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l’accident était réalisé ; les séances de physiothérapie, d’acupuncture, de psychothérapie et un traitement médicamenteux étaient à la charge de l’intimée au-delà du 31 août 2021 ; enfin, l’IPAI devait être fixée à 40%.

t. Le 24 mai 2023, la docteure Q______, spécialiste FMH en chirurgie générale et traumatologie, médecin-conseil de la SUVA, a rendu une appréciation, en estimant que l’expertise judiciaire n’était pas convaincante. La littérature citée par l’expert se limitait aux faits servant la cause de la recourante ; l’expert traitait des effets psychologiques des fractures qui ne relevaient pas de sa compétence ; l’expert n’indiquait pas quel diagnostic était en lien de causalité avec l’accident ; certains diagnostics étaient antérieurs à l’accident ; la date de la stabilisation de l’état de santé n’était pas arrêtée ; aucune littérature n’étayait le lien de causalité entre la bursite et l’utilisation de cannes ; l’expert ne se prononçait pas sur la capacité de travail dans une activité adaptée ; on ne pouvait savoir si la recourante allait présenter une arthrose grave.

u. Le 30 mai 2023, la SUVA a estimé que l’expertise judiciaire n’était pas probante.

v. Le 6 juin 2023, la recourante a relevé que les critiques émises par la Dre Q______ n’étaient pas fondées.

w. Les 30 juin et 10 juillet 2023, la recourante a communiqué :

-     un rapport du 20 juin 2023 du docteur R______, médecin adjoint agrégé au département de chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur des HUG, attestant d’une lésion transfixiante de la coiffe postérieure supérieure de l’épaule gauche ; une chirurgie était proposée en septembre ;

-     un rapport du 26 mai 2023 du docteur S______, médecin assistant au service de chirurgie plastique et de la main au CHUV, attestant d’une neurolyse effectuée le 9 mai 2023 avec bon effet ; la capacité de travail devait être évaluée à trois mois post-opératoire ;

-     un protocole opératoire du 3 juillet 2023 concernant l’intervention du 9 mai 2023 par le Dr P______.

x. Le 14 juillet 2023, la SUVA a indiqué qu’elle examinerait l’existence d’un éventuel lien de causalité entre l’accident et les problématiques de l’épaule de la recourante et se prononcerait ensuite sur cette question, dès lors que celles-ci sortaient du cadre de la présente procédure.

y. Les 20 et 24 juillet 2023, la recourante a observé que l’atteinte à son épaule était un fait nouveau en lien avec l’accident et devait, pour un motif d’économie de procédure, être tranchée dans le cadre du présent litige et a conclu à ce que la SUVA soit tenue de verser les prestations dues en lien avec l’atteinte à l’épaule.

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connait, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA ; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI ; RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 LPGA)

2.             En l’occurrence, en rendant le 7 juin 2021 une décision formelle de refus de rente d’invalidité et d’octroi d’une IPAI de 25%, l’intimée a, par voie de conséquence, également refusé formellement le versement de l’indemnité journalière et le paiement des soins médicaux dès le 1er septembre 2021 (cf. ATF 144 V 354 consid. 4. 2 p. 358 et arrêt du Tribunal fédéral 8C_619/2018 du 7 mars 2019).

Le litige porte en conséquence tant sur la cessation au 31 août 2021 des prestations précitées que sur le refus d’une rente d’invalidité et le taux de l’IPAI.

Cependant, vu la dernière conclusion de la recourante, la cessation de l’indemnité journalière au 31 août 2021 n’est plus litigieuse.

3.              

3.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraine la mort (art. 4 LPGA ; ATF 129 V 402 consid. 2.1 ; ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

3.2 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage parait possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; ATF 119 V 335 consid. 1 ; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

3.3 Les notions de syndrome douloureux régional complexe, algodystrophie ou maladie de Suedeck appartiennent aux maladies neurologiques, orthopédiques et traumatologiques et constituent ainsi une atteinte à la santé physique, respectivement corporelle (arrêt du Tribunal fédéral 8C_955/2008 du 29 avril 2009 consid. 6). Ils désignent, en médecine, un état maladif post-traumatique, qui est causé par un traumatisme bénin, qui se transforme rapidement en des douleurs importantes et individualisées avec des sensations de cuisson, qui s’accompagnent de limitations fonctionnelles de type moteur, trophique ou sensori-moteur. Toute une extrémité ou une grande partie d’une zone du corps est touchée. Les causes peuvent non seulement être une distorsion d’une articulation mais aussi, par exemple, un infarctus. La discordance entre le traumatisme à l’origine, qui peut en réalité être qualifié de bagatelle, et les conséquences est importante. L’étiologie et la pathogenèse de ce syndrome ne sont pas claires. C’est pourquoi, selon la jurisprudence, pour qu’un tel syndrome puisse constituer la conséquence d’un accident, les trois critères suivants doivent être réalisés : a) la preuve d'une lésion physique (comme par exemple un hématome ou une contusion) après un accident ou l'apparition d'une algodystrophie à la suite d'une opération nécessitée par l'accident; b) l'absence d'un autre facteur causal de nature non traumatique (comme par exemple : état après infarctus du myocarde, après apoplexie, après ou lors de l’ingestion de barbituriques, lors de tumeurs, de grossesses; etc.) et une courte période de latence entre l'accident et l'apparition de l'algodystrophie, soit au maximum six à huit semaines (arrêts du Tribunal fédéral 8C_871/2010 du 4 octobre 2011 consid. 3.2 et 8C_384/2009 du 5 janvier 2010 consid. 4.2.1 in SVR 2010 UV n° 18 p. 69). Pour admettre un lien de causalité naturelle, il n'est pas déterminant que le diagnostic ait été posé dans les six à huit semaines après l’accident, mais que sur la base de constatations médicales fournies en temps réel, on puisse conclure que durant cette période de latence l'assuré a souffert au moins en partie des symptômes typiques de ce diagnostic. La causalité naturelle peut également être admise si le syndrome fait suite à une opération en lien avec l'accident (arrêt du Tribunal fédéral 8C_27/2019 du 20 août 2019 consid. 6.4.2 et les références citées).

3.4 Une fois que le lien de causalité naturelle a été établi au degré de la vraisemblance prépondérante, l’obligation de prester de l’assureur cesse lorsque l'accident ne constitue pas (plus) la cause naturelle et adéquate du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui serait survenu tôt ou tard même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (arrêt du Tribunal fédéral 8C_481/2019 du 7 mai 2020 consid. 3.1 et les références). En principe, on examinera si l’atteinte à la santé est encore imputable à l’accident ou ne l’est plus (statu quo ante ou statu quo sine) selon le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références), étant précisé que le fardeau de la preuve de la disparition du lien de causalité appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (arrêt du Tribunal fédéral 8C_650/2019 du 7 septembre 2020 consid. 3 et les références). La simple possibilité que l'accident n'ait plus d'effet causal ne suffit pas (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2).

4.              

4.1 Aux termes de l'art. 10 al. 1 LAA, l'assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident. S'il est totalement ou partiellement incapable de travailler (art. 6 LPGA) à la suite de l'accident, il a droit à une indemnité journalière. Le droit à l'indemnité prend naissance le troisième jour qui suit celui de l'accident et s'éteint dès que l'assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu'une rente est versée ou dès que l'assuré décède (art. 16 al. 2 LAA). Enfin, si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite de l'accident, il a droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA). Le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme (art. 19 al. 1, 1ère phrase, LAA).

Cependant, le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente au sens de l'art. 19 al. 1 LAA (art. 19 al. 1, 2ème phrase, LAA). Il cesse également s'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé de l'assuré et qu'aucune mesure de réadaptation de l'assurance-invalidité n'entre en considération, mais qu'aucune rente n'est allouée parce que l'assuré présente un taux d'invalidité inférieur au seuil de 10% prévu par l'art. 18 al. 1 LAA (cf. ATF 134 V 109 consid. 4.1 ; ATF 133 V 57 consid. 6.6.2). Autrement dit, l'assureur-accidents est tenu d'octroyer une indemnité journalière et de prendre en charge le traitement médical aussi longtemps qu'il y a lieu d'attendre une amélioration notable de l'état de santé. Si une telle amélioration ne peut plus être envisagée, il doit clore le cas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_589/2018 du 4 juillet 2019 consid. 4.2).

4.2 Selon l'art. 21 al. 1 LAA, lorsque la rente a été fixée, les prestations pour soins et remboursement de frais (art. 10 à 13 LAA) sont accordées à son bénéficiaire notamment lorsqu'il a besoin de manière durable d'un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain (let. c) ou lorsqu'il présente une incapacité de gain et que des mesures médicales amélioreraient notablement son état de santé ou empêcheraient que celui-ci ne subisse une notable détérioration (let. d).

Ainsi, les conditions du droit à la prise en charge des frais de traitement médical diffèrent selon que l'assuré est ou n'est pas au bénéfice d'une rente (ATF 116 V 41 consid. 3b). Dans l'éventualité visée à l'art. 10 al. 1 LAA, un traitement doit être pris en charge lorsqu'il est propre à entrainer une amélioration de l'état de santé ou à éviter une péjoration de cet état. Il n'est pas nécessaire qu'il soit de nature à rétablir ou à augmenter la capacité de gain. En revanche, dans l'éventualité visée à l'art. 21 al. 1 LAA, un traitement ne peut être pris en charge qu'aux conditions énumérées à cette disposition (arrêt du Tribunal fédéral 8C_332/2012 du 18 avril 2013 consid. 1).

Ce qu’il faut comprendre par sensible amélioration de l’état de santé au sens de l’art. 19 al. 1 LAA se détermine en fonction de l’augmentation ou du rétablissement de la capacité de travail à attendre pour autant qu’elle ait été diminuée par l’accident, auquel cas l’amélioration escomptée par un autre traitement doit être importante. Des améliorations insignifiantes ne suffisent pas (ATF 134 V 109 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_402/2007 du 23 avril 2008 consid. 5.1.2.1). Ni la simple possibilité d'un résultat positif d'un autre traitement médical, ni un progrès thérapeutique seulement insignifiant escompté d'autres mesures thérapeutiques comme une cure thermale ne donnent droit à leur mise en œuvre. Il n'y a pas d'amélioration sensible de l'état de santé quand la mesure thérapeutique (p. ex. une cure annuelle) ne fait que soulager momentanément des douleurs occasionnées par un état par ailleurs stationnaire (RAMA 2005 n° U 557 p. 388, U 244/04 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_179/2014 du 16 mars 2015 consid. 4.1). Cette question doit être examinée de manière prospective. La clôture séparée d’un cas d’assurance-accidents pour les troubles psychiques d’une part et les troubles somatiques d’autre part n’entre pas en ligne de compte (arrêt du Tribunal fédéral 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 2.3 et les références).

5.              

5.1 Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA). Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; méthode ordinaire de la comparaison des revenus).

Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1) ; seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain ; de plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2).  

5.2 Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.

5.3 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 128 V 29 consid. 1 ATF 130 V 343 consid. 3.4). Dans ce contexte, on évaluera le revenu que l'assuré pourrait encore réaliser dans une activité adaptée avant tout en fonction de la situation concrète dans laquelle il se trouve. Lorsqu'il a repris l'exercice d'une activité lucrative après la survenance de l'atteinte à la santé, il faut d'abord examiner si cette activité est stable, met pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle et lui procure un gain correspondant au travail effectivement fourni, sans contenir d'élément de salaire social. Si ces conditions sont réunies, on prendra en compte le revenu effectivement réalisé pour fixer le revenu d'invalide (ATF 129 V 472 consid. 4.2.1 5 ; ATF 126 V 75 consid. 3b/aa).

6.             Dans le cas de troubles psychiques additionnels à une atteinte à la santé physique, le caractère adéquat du lien de causalité suppose que l'accident ait eu une importance déterminante dans leur déclenchement. La jurisprudence a tout d'abord classé les accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement : les accidents insignifiants ou de peu de gravité (par ex. une chute banale) ; les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Pour procéder à cette classification, il convient non pas de s'attacher à la manière dont l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder, d'un point de vue objectif, sur l'événement accidentel lui-même (ATF 140 V 356 consid. 5.3 ; ATF 115 V 133 consid. 6 ; ATF 115 V 403 consid. 5). Sont déterminantes les forces générées par l'accident et non pas les conséquences qui en résultent ou d'autres circonstances concomitantes qui n'ont pas directement trait au déroulement de l'accident, comme les lésions subies par l'assuré ou le fait que l'événement accidentel a eu lieu dans l'obscurité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_595/2015 du 23 août 2016 consid. 3 et les références). La gravité des lésions subies - qui constitue l'un des critères objectifs pour juger du caractère adéquat du lien de causalité - ne doit être prise en considération à ce stade de l'examen que dans la mesure où elle donne une indication sur les forces en jeu lors de l'accident (arrêts du Tribunal fédéral 8C_398/2012 du 6 novembre 2012 consid. 5.2 in SVR 2013 UV n° 3 p. 8 et 8C_435/2011 du 13 février 2012 consid. 4.2 in SVR 2012 UV n° 23 p. 84 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_622/2015 du 25 août 2016 consid.3.3).

6.1 Selon la jurisprudence (ATF 115 V 403 consid. 5), lorsque l'accident est insignifiant (l'assuré s'est par exemple cogné la tête ou s'est fait marcher sur le pied) ou de peu de gravité (il a été victime d'une chute banale), l'existence d'un lien de causalité adéquate entre cet événement et d'éventuels troubles psychiques peut, en règle générale, être d'emblée niée.

6.2 Lorsque l'assuré est victime d'un accident grave, il y a lieu, en règle générale, de considérer comme établie l'existence d'une relation de causalité entre cet événement et l'incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique. D'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, un accident grave est propre, en effet, à entraîner une telle incapacité. Dans ces cas, la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique se révélera la plupart du temps superflue.

6.3 Sont réputés accidents de gravité moyenne les accidents qui ne peuvent être classés dans l'une ou l'autre des catégories décrites ci-dessus. Pour juger du caractère adéquat du lien de causalité entre de tels accidents et l'incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique, il ne faut pas se référer uniquement à l'accident lui-même. Il sied bien plutôt de prendre en considération, du point de vue objectif, l'ensemble des circonstances qui sont en connexité étroite avec l'accident ou qui apparaissent comme des effets directs ou indirects de l'événement assuré. Ces circonstances constituent des critères déterminants dans la mesure où, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, elles sont de nature, en liaison avec l'accident, à entraîner ou aggraver une incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique.

Pour admettre l’existence du lien de causalité en présence d’un accident de gravité moyenne, il faut donc prendre en considération un certain nombre de critères, dont les plus importants sont les suivants (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa ;
ATF 115 V 403 consid. 5c/aa) :

- les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l’accident ;

- la gravité ou la nature particulière des lésions physiques, compte tenu notamment du fait qu'elles sont propres, selon l'expérience, à entraîner des troubles psychiques ;

- la durée anormalement longue du traitement médical ;

- les douleurs physiques persistantes ;

- les erreurs dans le traitement médical entraînant une aggravation notable des séquelles de l’accident ;

- les difficultés apparues au cours de la guérison et des complications importantes ;

- le degré et la durée de l’incapacité de travail due aux lésions physiques.

Tous ces critères ne doivent pas être réunis pour que la causalité adéquate soit admise. De manière générale, lorsqu'il s'agit d'un accident de gravité moyenne, il faut un cumul de trois critères sur les sept, ou au moins que l'un des critères retenus se soit manifesté de manière particulièrement marquante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 3.3 et la référence). Un seul d’entre eux peut être suffisant, notamment si l’on se trouve à la limite de la catégorie des accidents graves. Inversement, en présence d’un accident se situant à la limite des accidents de peu de gravité, les circonstances à prendre en considération doivent se cumuler ou revêtir une intensité particulière pour que le caractère adéquat du lien de causalité soit admis (ATF 129 V 402 consid. 4.4.1 et les références ; ATF 115 V 133 consid. 6c/bb ; ATF 115 V 403 consid. 5c/bb).

6.3.1 Dans l’arrêt 8C_657/2013 du 3 juillet 2014 (consid. 5.4), le Tribunal fédéral a développé sa casuistique en cas de chute. Le Tribunal fédéral a rappelé que le caractère particulièrement impressionnant ou dramatique avait été nié dans le cas d'un travailleur victime d'un accident dans les circonstances suivantes : une lourde pierre s'était détachée d'un mur haut de 2,7 m d'un immeuble en démolition et lui a percuté le dos, puis la cheville gauche, alors qu'il s'apprêtait à franchir une fenêtre ; le choc l'a projeté en avant et il s'est trouvé face contre terre, à cheval sur la base de l'encadrement de la fenêtre. Il l'a encore nié dans le cas d'un travailleur qui était tombé d'un échafaudage d'une hauteur d'environ 3 à 4 m ou d'un travailleur qui avait chuté d'une échelle d'une hauteur d'environ 4,5 m dans une fouille. Il l'avait en revanche admis dans le cas d'un assuré qui, lors de travaux de démolition de boxes de garages, s'était trouvé pressé contre une benne de déchets par un pan de mur en plâtre s'écroulant sur lui tandis que le toit menaçait également de s'effondrer, et qui avait subi plusieurs fractures à la suite de cet événement nécessitant une hospitalisation de plusieurs jours (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 603/2006 du 7 mars 2007 et les références).

6.3.2 Quant au critère du degré et de la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques, il doit se rapporter aux seules lésions physiques et ne se mesure pas uniquement au regard de la profession antérieurement exercée par l'assuré. Ainsi, il n'est pas rempli lorsque l'assuré est apte, même après un certain laps de temps, à exercer à plein temps une activité adaptée aux séquelles accidentelles qu'il présente (p. ex. arrêt du Tribunal fédéral 8C_209/2020 du 18 janvier 2021 consid. 5.2.2). Ce critère est en principe admis en cas d’incapacité totale de travail de près de trois ans (arrêts du Tribunal fédéral 8C_547/2020 du 1er mars 2021, consid. 5.1 et 8C_600/2020 du 3 mai 2021). Ce critère n’est en revanche pas rempli dans le cas d’un assuré qui s’est trouvé en incapacité de travail totale pendant un peu plus d’une année (arrêt du Tribunal fédéral 8C_209/2020 précité), pendant un an et demi (arrêt du Tribunal fédéral 8C_627/2019 du 10 mars 2020, consid. 5.4.5), pendant vingt mois (arrêt du Tribunal fédéral 8C_93/2022, consid. 5.3), pendant 21 mois (arrêt du Tribunal fédéral 8C_600/2020 du 3 mai 2021) ou encore pendant deux ans et quatre mois (arrêt du Tribunal fédéral 8C_547/2020 du 1er mars 2021).

6.3.3 S’agissant du critère de la durée anormalement longue du traitement médical, il faut uniquement prendre en compte le traitement thérapeutique nécessaire (arrêt U 369/05 du 23 novembre 2006 consid. 8.3.1). N'en font pas partie les mesures d'instruction médicale et les simples contrôles chez le médecin (arrêt U 393/05 du 27 avril 2006 consid. 8.2.4). En outre, l'aspect temporel n'est pas seul décisif ; sont également à prendre en considération la nature et l'intensité du traitement, et si l'on peut en attendre une amélioration de l'état de santé de l'assuré. La prise de médicaments antalgiques et la prescription de traitements par manipulations même pendant une certaine durée ne suffisent pas à fonder ce critère (arrêts 8C_1007/2012 consid. 5.4.3 et les arrêts cités et 8C_804/2014 consid. 5.2.2).

7.             Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2). D'après l'art. 25 LAA, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est allouée sous forme de prestation en capital (al. 1, 1ère phrase) ; elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l'époque de l'accident et elle est échelonnée selon la gravité de l'atteinte à l'intégrité (al. 1, 2ème phrase). Elle est également versée en cas de maladie professionnelle (cf. art. 9 al. 3 LAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l'indemnité (al. 2).

La division médicale de la SUVA a établi plusieurs tables d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA (disponibles sur www.suva.ch). Ces tables n'ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s'agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l'égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l'annexe 3 à l'OLAA (ATF 132 II 117 consid. 2.2.3 ; ATF 124 V 209 consid. 4.cc ; ATF 116 V 156 consid. 3).

Lors de la fixation de l'indemnité, il sera équitablement tenu compte des aggravations prévisibles de l’atteinte à l’intégrité (art. 36 al. 4 1ère phrase OLAA). De jurisprudence constante, cette règle ne vise toutefois que les aggravations dont la survenance est vraisemblable et l'importance quantifiable (arrêt du Tribunal fédéral 8C_494/2014 du 11 décembre 2014 consid. 6.2 ; RAMA 1998 n° U 320 p. 602 consid. 3b).

À titre d'exemples, le Tribunal fédéral a nié le caractère prévisible d'une aggravation en fonction de l'indication du médecin selon laquelle « il n'était pas impossible » que l'affection (périarthrite scapulo-humérale) entraînât « d'ici quelques années » une arthrose moyenne (RAMA 1998 p. 602 consid. 3b) ; à l'inverse, il a admis l'aggravation prévisible d'une arthrose du genou dans le cas où le médecin a fait état d'une telle aggravation « en raison de l'évolution toujours défavorable de l'arthrose » (arrêt du Tribunal fédéral 8C_459/2008 du 4 février 2009 consid. 2.3, in SVR 2009 UV n° 27 p. 98).

8.              

8.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

8.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

8.3 Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 143 V 269 consid. 6.2.3.2 et les références ; ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

9.              

9.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.2 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, les autorités administratives et les juges des assurances sociales doivent procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raison pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Ils ne peuvent ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, ils doivent mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparait nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 283 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3).

10.         En l’occurrence, la chambre de céans a estimé qu’une expertise judiciaire orthopédique était nécessaire pour se prononcer sur le droit de la recourante à des prestations de la part de l’intimée.

10.1 Fondé sur toutes les pièces du dossier, comprenant une anamnèse, un examen clinique, une description des plaintes, des diagnostics clairs avec des références à de la littérature médicale, l’analyse du lien de causalité des diagnostics avec l’accident, la mention des limitations fonctionnelles et leur incidence sur la capacité de travail de la recourante, ainsi qu’une évaluation de l’IPAI, et une prise de position sur les rapports du Dr C______ et des médecins traitants de la recourante, le rapport d’expertise du Prof. O______ répond aux critères jurisprudentiels précités pour qu’il lui soit reconnu une pleine valeur probante.

Le Prof. O______ conclut à un état de santé stabilisé, à une capacité de travail de la recourante de 50% dans toute activité et à un taux de l’IPAI de 40%.

10.2 La recourante se rallie aux conclusions de l’expertise judiciaire. En revanche, l’intimée estime qu’elle n’est pas probante en se référant à l’avis de la Dre Q______ du 24 mai 2023. Celle-ci émet plusieurs critiques à l’encontre du rapport d’expertise judiciaire, lesquelles ne sont toutefois pas à même de mettre en doute les conclusions de ce dernier.

10.2.1 Tout d’abord, la Dre Q______ s’étonne de l’abondante littérature médicale citée par l’expert. Elle relève que la littérature se limiterait aux faits servant la cause de la recourante.

À cet égard, le rapport d’expertise comprend en effet des chapitres conséquents de littérature médicale. Cependant, celle-ci, contrairement à l’avis de l’intimée, se rapporte précisément aux atteintes dont souffre la recourante, ce qui n’est pas contesté par l’intimée, soit les fractures des plateaux tibiaux, le SDRC et l’ostéoporose post-traumatique et douleurs diverses. Par ailleurs, même si la référence à la littérature médicale était supprimée, le rapport d’expertise comprendrait tous les éléments exigés par la jurisprudence pour qu’il lui soit reconnu une pleine valeur probante, soit une anamnèse, une description des plaintes, un examen clinique, des diagnostics et limitations fonctionnelles clairs et une analyse cohérente et complète des conséquences des atteintes sur la capacité de travail de la recourante ainsi que son atteinte à l’intégrité. On constate en particulier que l’anamnèse est très précise et que l’examen clinique est complet et détaillé, ce qui permet d’écarter la critique de l’intimée concernant un rapport d’expertise basé sur des citations de littérature médicale se limitant aux faits qui serviraient la cause de la recourante, la Dre Q______ n’explicitant par ailleurs pas en quoi la littérature se rapportant aux atteintes de la recourante servirait la cause de celle-ci.

Cette critique doit être écartée.

10.2.2 L’intimée souligne que l’expert n’a pas indiqué quels diagnostics étaient en lien de causalité avec l’accident, de sorte que l’expertise relèverait plus du domaine de l’assurance-invalidité que de celui de l’assurance-accident. Or, contrairement à l’avis de l’intimée, l’expert expose précisément (en réponse à la question 5.1.1) quels diagnostics sont en lien avec l’accident, en précisant ceux qui le sont de façon certaine et ceux qui le sont de façon probable.

10.2.3 L’intimée relève que l’expert fait état de diagnostics antérieurs à l’accident ; à cet égard, l’expert liste sous le titre « sans répercussion sur la capacité de travail » des diagnostics sans lien, selon lui, avec l’accident. Sa réponse est conforme à la mission d’expertise qui n’a d’ailleurs fait l’objet d’aucun commentaire de la part de l’intimée, alors même qu’elle en avait la possibilité (cf. courrier de l’intimée du 23 septembre 2022). Par ailleurs, l’expert répond à la question de la causalité des diagnostics avec l’accident dans un second temps, ce qui est cohérent avec la mission d’expertise (cf. questions 4 et 5 de la mission d’expertise).

10.2.4 L’intimée reproche au Prof. O______ d’avoir résumé de la littérature médicale concernant les effets psychologiques des fractures. Or, le Prof. O______ résume ces effets dès lors qu’ils relèvent, selon sa propre citation, de la littérature orthopédique (expertise p. 39). Cela dit, le Prof. O______ n’a pas outrepassé ses compétences de spécialiste en orthopédie et traumatologie de l’appareil locomoteur puisqu’il précise, d’une part, qu’il ne se prononce pas sur les diagnostics de dépression et de syndrome de stress post-traumatique attestés par les psychiatres (Drs B______ et J______) et, d’autre part, que les difficultés de concentration et d’attention qu’il retient au titre de limitations fonctionnelles sont liées aux séquelles de la fracture des plateaux tibiaux et du SDRC, soit des troubles somatiques objectivés (expertise pp. 43 et 44) et non pas à d’éventuels troubles psychiques. Enfin, il ne pose aucun diagnostic psychiatrique et ne tire aucune conclusion de la littérature relative aux effets psychologiques des fractures dans le cas de la recourante. Par ailleurs, cette littérature médicale est pertinente dans le cadre de la question 11.2 qui a été posée à l’expert (soit : ces lésions sont-elles propres, selon l’expérience, à entrainer des troubles psychiques ?). À cet égard, et à nouveau, l’intimée ne saurait reprocher à l’expert de répondre à une question de la mission d’expertise.

Cette critique doit être écartée.

10.2.5 S’agissant de la stabilisation de l’état de santé, l’intimée l’a fixée au 31 août 2021. Le Prof. O______ confirme que l’état de santé est bien stabilisé nonobstant une péjoration lente de l’arthrose du genou et une possibilité d’amélioration lente du SDRC. Comme relevé par l’intimée, le Prof. O______ ne fixe pas de date précise. Cependant, il ne conteste pas non plus celle retenue par l’intimée ; cette question n’est, quoi qu’il en soit, plus pertinente dès lors que la recourante s’est ralliée, dans son écriture du 5 avril 2023, à la date du 31 août 2021.

10.2.6 S’agissant de l’atteinte à l’épaule, elle a été mentionnée déjà par le Dr B______ dans son appréciation du 7 octobre 2020 (le déplacement avec des béquilles avait impacté les épaules de la recourante, avec développement d’une tendinite), puis par le Dr I______ dans son rapport du 14 septembre 2021, soit antérieurement à la décision litigieuse du 16 septembre 2021. Certes cette dernière pièce a été communiquée à l’intimée seulement dans le cadre du présent recours. Cela étant, l’intimée a pu se prononcer sur cette atteinte puisqu’elle a soumis au Dr C______ l’avis du Dr I______, lequel a confirmé, le 21 décembre 2021, l’exigibilité d’une activité à un taux de 100% avec une diminution de rendement de 5%, à la suite de quoi l’intimée a confirmé, le 14 janvier 2022, les termes de sa décision sur opposition. Les diagnostics posés par le Prof. O______ de syndrome d’empiètement et de bursite de l’épaule gauche peuvent ainsi être pris en compte. En revanche, tel n’est pas le cas du diagnostic de lésion transfixiante de la coiffe postéro-supérieure attestée par le Dr R______ le 20 juin 2023 seulement, atteinte survenue postérieurement à la décision litigieuse. Cette atteinte fait l’objet, comme précisé par l’intimée, d’une instruction médicale nouvelle.

Le 30 mai 2023, après avoir requis l’avis de la Dre Q______, l’intimée s’est prononcée sur les conclusions de l’expertise judiciaire ; s’agissant des atteintes à l’épaule gauche, la Dre Q______ s’est limitée à constater que le Prof. O______ renvoyait à de la littérature qu’il ne citait pas et l’intimée n’a pas fait d’observation particulière.

Certes, la littérature médicale à laquelle fait référence le Prof. O______ n’apparait pas dans son rapport. Cela dit, l’intimée n’a pas valablement mis en cause, en l’espèce, le lien établi par l’expert (qu’il juge probable), entre l’utilisation prolongée de cannes anglaises due à l’accident et les diagnostics de syndrome d’empiètement et de bursite de l’épaule gauche, étant relevé que l’utilisation de cannes est de longue durée, puisqu’elle est de cinq ans au jour de son examen clinique et qu’il a précisé qu’une utilisation prolongée de cannes anglaises pouvait aussi amener à une rupture de la coiffe des rotateurs. La Dre Q______ se limite en effet à souligner le défaut de littérature médicale citée. Par ailleurs, elle indique que, selon la littérature, l’utilisation de cannes anglaises et la boiterie n’ont pas d’influence sur le rachis, ce qui n’apparait pas pertinent en l’espèce, dès lors que le Prof. O______ n’a pas retenu de diagnostic en lien avec le rachis.

Aucun élément médical ne permet ainsi de douter du lien de causalité estimé comme probable par le Prof. O______, entre les atteintes qu’il a constatées à l’épaule gauche de la recourante et l’accident.

10.2.7 L’intimée reproche à l’expert une confusion sur la notion de statu quo sine. Or, les réponses de l’expert sont claires dans la mesure où on comprend que, vu les séquelles de la recourante liées à l’accident, l’état de santé de celle-ci n’a pas retrouvé le stade avant l’accident, ni celui qui aurait évolué jusqu’à ce jour, vu l’exclusion par l’expert d’un état maladif préexistant.

10.2.8 L’intimée estime que l’expert ne se prononce pas sur la capacité de travail de la recourante dans une activité adaptée. À cet égard, contrairement à l’avis de l’intimée, il ressort des développements de l’expertise que la recourante ne peut travailler que dans un travail sédentaire strict et à un taux de 50% maximum (expertise p. 44).

L’intimée estime par ailleurs incompréhensible que l’expert rejoigne l’avis des médecins traitants de la recourante quant à une capacité de travail de 50% maximum, alors qu’une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles est possible.

À cet égard, les médecins traitants ont relevé la présence de douleurs neurogènes et osseuses (avis de la Dre G______ du 18 juin 2021, du Dr H______ du 21 juillet 2021, du Dr E______ du 2 juin 2021 et du Dr D______ du 11 mars 2021), de douleurs handicapantes (avis du Dr I______ du 14 septembre 2021) plutôt neurologiques (avis du Dr L______ du 22 février 2022), de douleur constante incapacitant tous les aspects de la vie quotidienne, d’étiologie neuropathique (avis des Drs M______ du 28 mars 2022 et P______ du 20 décembre 2022) et de douleurs neuropathiques post-traumatiques du genou gauche (avis du Dr S______ du 26 mai 2023). Quant au Dr B______, il a rapporté des douleurs très handicapantes dans la vie quotidienne de la recourante (avis du 7 octobre 2020).

Ceux qui se sont prononcés sur la capacité de travail de la recourante l’ont évaluée finalement à un taux maximum de 50%.

L’expert souligne qu’il rejoint l’appréciation des médecins traitants car, même dans une activité adaptée, soit administrative stricte, la capacité de travail, au vu des difficultés de mobilité et des douleurs persistantes, lesquelles engendraient des difficultés d’attention et de concentration, était limitée. La limitation du taux de capacité de travail de la recourante dans une activité adaptée est ainsi motivée.

L’expert a relevé la présence de douleurs, qu’il faut considérer comme étant objectivées par les atteintes somatiques de la recourante (cause organique), ce qui n’est pas contesté par l’intimée (laquelle a précisé lors de l’audience de comparution personnelle des parties que, contrairement aux termes de sa décision litigieuse, elle reconnaissait la présence d’un SDRC chez la recourante). Il convient en outre de constater que le lien de causalité naturelle entre le SDRC et l’accident n’est ni contesté ni contestable (à cet égard arrêt du Tribunal fédéral 8C_416/2019 du 15 juillet 2020.

Par ailleurs, les difficultés de concentration et d’attention qui motivent, en sus des limitations de mobilité, la capacité de travail de la recourante à un taux de 50%, découlent de la présence des douleurs, dont tous les médecins intervenants admettent l’intensité et la cause organique. Cette limitation n’a pas été spécifiquement contestée par l’intimée.

Au demeurant, la limitation de la capacité de travail de la recourante à un taux de 50% est convaincante et doit être confirmée.

Au surplus, il sera constaté, comme relevé par l’expert, que la fixation par l’intimée de la capacité de travail de la recourante n’est pas cohérente car elle se rallie aux avis du Dr C______, lequel a commencé par reconnaitre une diminution de rendement de 10% dans une activité sédentaire stricte en raison de la mobilité limitée sans béquilles (avis du 19 février 2021) pour la réduire à un taux de 5%, en considérant que le poste de travail était aménagé (avis du 30 avril 2021), sans expliquer en quoi l’activité aménagée était différente d’une activité sédentaire stricte.

10.3 Au demeurant, les conclusions du Prof. O______, probantes, doivent être suivies.

11.          

11.1 Du point de vue psychique, la recourante a été soumise à un examen psychiatrique le 23 septembre 2020 auprès du Dr B______, médecin-conseil de l’intimée. Celui-ci a considéré, le 7 octobre 2020, que la recourante présentait un tableau psychique comparable à celui constaté par le psychiatre traitant, le Dr J______ (soit un tableau dépressif moyen à sévère), sous réserve d’une gravité qu’il situait entre léger et moyen. Il a posé le diagnostic de trouble dépressif récurrent, épisode léger à moyen.

La recourante présentait une atteinte de l’humeur, une aboulie, une anergie, des troubles du sommeil ; cette atteinte était réactionnelle à la problématique somatique et impactait très clairement la qualité de vie de la recourante ; la causalité naturelle avec l’accident était clairement établie et la capacité de travail était limitée à un taux de 50%.

Ce taux de capacité de travail du point de vue psychique a été admis par les parties et confirmé, postérieurement à l’examen du Dr B______, par le Dr J______ (rapport du 20 octobre 2020 qui atteste d’une activité habituelle à 50% déjà difficile à maintenir et du 10 mars 2021 dans lequel le Dr J______ atteste, en outre, d’une incapacité de travail totale en raison d’une péjoration thymique du 8 au 28 février 2021). Aucune amélioration de l’état de santé psychique n’a été rapportée et l’intimée n’a jamais contesté l’incapacité de travail de 50% de la recourante pour des motifs psychiques. Il convient en conséquence d’admettre que la recourante est, du point de vue psychique, à tout le moins depuis le 1er septembre 2021, en incapacité de travail de 50%.

11.2 L’intimée a nié l’existence d’un lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques de la recourante et l’accident.

11.2.1 L’accident en cause a impliqué un scooter et un véhicule automobile. À cet égard, la riche casuistique concernant les accidents entre voitures et motos montre que les collisions sont généralement jugées comme des accidents de gravité moyenne au sens strict (arrêts 8C_473/2019 du 11 novembre 2019 consid. 5. 1, 8C_99/2019 du 8 octobre 2019 consid. 4.4.1, 8C_430/2016 du 31 octobre 2016 consid. 7.4, 8C_137/2014 du 5 juin 2014 consid. 6.1 et 8C_135/2012 du 19 septembre 2012 consid. 6.1 avec référence à une autre casuistique, 8C_621/2011 du 31 janvier 2012 consid. 3.4.2 s. avec casuistique). Dans les cas cités, des motos roulant à une vitesse comprise entre 50 et 70 km/h sont entrées en collision avec des voitures de tourisme qui, en règle générale, n'ont pas respecté la priorité. En revanche, un accident dans lequel le conducteur d'une moto est entré en collision avec une voiture de tourisme arrivant en sens inverse et où les deux véhicules roulaient à environ 50 km/h a été qualifié d'événement moyennement grave, à la limite de la gravité. Dans ce cas, l'élément aggravant était que le conducteur de la moto ainsi que son amie qui l'accompagnait ont été projetés dans les airs sur une dizaine de mètres (arrêts 8C_746/2008 du 17 août 2009 consid. 5.1.2 et 8C_134/2015 du 14 septembre 2015 consid. 5.3.1). Dans la même catégorie, on trouve des événements où le conducteur d'une camionnette s'est endormi au volant et a ensuite percuté un scooter sans freiner (arrêt 8C_917/2010 du 28 septembre 2011 consid. 5.3) ou qu'un conducteur de moto a dépassé une colonne dans un virage sans visibilité et est entré en collision avec un tracteur qui tournait (arrêt 8C_484/2007 du 3 septembre 2008 consid. 6.2). Dans le premier cas, la nature, notamment la taille et donc la force de la voiture, constitue une circonstance aggravante. Dans le dernier cas, le tribunal a considéré que la moto arrivait à une vitesse considérable, car c'est la seule façon d'expliquer que le conducteur n'ait pas pu freiner à fond ou faire une manœuvre d'évitement. 

Cette qualification de gravité moyenne au sens strict a aussi été confirmée dans le cas d’une collision entre un véhicule qui roulait à faible allure et un panneau de signalisation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_816/2021 du 2 mai 2022).

En résumé, il apparait que les collisions entre motocycles et voitures de tourisme doivent généralement être qualifiées d'accidents de gravité moyenne au sens strict, dans la mesure où il n'y a pas lieu de prendre en considération des circonstances aggravantes supplémentaires, comme par exemple la participation d'une personne transportée, la projection sur plusieurs mètres, la taille du véhicule impliqué dans la collision ou des vitesses élevées (SVR 2020 UV n° 34 p. 136, 8C_627/2019 consid. 5.3.3).

11.2.2 En l’occurrence, la recourante, alors qu’elle circulait en scooter, s’est fait couper la route par un véhicule (taxi) ; celui-ci n’a pas accordé la priorité à la recourante en quittant une route marquée d’un signal « stop » (rapport de police du 23 janvier 2018) ; suite à la chute, la recourante s’est retrouvée coincée en partie sous le taxi, avec le scooter sur sa jambe (procès-verbal de l’audience de comparution personnelle des parties du 20 juin 2022).

Au vu de la jurisprudence précitée, cet accident entre dans la catégorie des accidents de gravité moyenne au sens strict.

11.3 Pour cette catégorie d’accidents, trois critères jurisprudentiels doivent être remplis ou l’un des critères doit s’être manifesté de manière particulièrement marquante pour que le lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l’accident soit admis.

11.3.1 Il doit en l’occurrence être admis que la recourante présente des difficultés apparues au cours de la guérison, dès lors qu’elle souffre encore d’un SDRC, ce que l’intimée a fini par reconnaitre, contrairement à ce qu’elle avait indiqué dans sa décision litigieuse (cf. procès-verbal de l’audience du 20 juin 2022), étant relevé que la causalité entre le SDRC et l’accident n’est pas contestée.

11.3.2 Il convient également d’admettre que la recourante présente des douleurs physiques persistantes, attestées par l’expertise judiciaire (dues au SDRC, à l’allodynie et à l’arthrose du genou gauche). En particulier, la présence de douleurs persistantes et disproportionnées est un critère diagnostique du SDRC (arrêt du Tribunal fédéral 8C_566/2019 du 27 novembre 2020).

11.3.3 S’agissant de la durée anormalement longue du traitement médical, sa nature et son intensité, l’expert judiciaire a indiqué que la fracture des plateaux tibiaux a nécessité un traitement lourd, soit une ostéosynthèse complexe après huit jours d’immobilisation d’attente ; la recourante a présenté une thrombose veineuse profonde dans les suites de l’intervention et une lente cicatrisation de la plaie opératoire ; une longue période de rééducation s’en est suivie ; le genou gauche a évolué vers une raideur douloureuse et une arthrose ; une intervention (AMO) a été pratiquée le 21 juin 2018, avec arthrolyse arthroscopique, suivie d’une nouvelle thrombose veineuse profonde ; se développe ensuite un équin de la cheville gauche qui nécessite une troisième intervention le 9 avril 2019 ; elle a ensuite développé un SDRC (dont les premiers signes sont signalés par l’expert judiciaire en juin 2018), avec allodynie et des douleurs aux épaules nécessitant des infiltrations, toutes ces douleurs étant encore actives.

La recourante a ainsi subi trois interventions chirurgicales, dont les deux dernières ont été nécessaires en raison de complications, soit une AMO partielle le 21 juin 2018 (le matériel gênant le glissement des tissus mous périarticulaires), doublée d’une intervention pour redonner de la mobilité au genou gauche et une AMO complète le 9 avril 2019 (en raison de l’équin de la cheville gauche et pour obtenir une cheville plus mobile). Elle a présenté des complications par la survenue de deux thromboses veineuses profondes, d’une plaie chirurgicale qui a mis du temps à se fermer et d’un SDRC, d’une raideur du genou, d’arthrose et de douleurs aux épaules nécessitant des soins continus, encore à ce jour, de physiothérapie, d’acupuncture et d’infiltrations.

Dans ces conditions, le traitement subi par la recourante peut être qualifié d’invasif et plutôt pénible et d’une durée anormalement longue (à cet égard arrêt du Tribunal fédéral 8C_818/2015 du 15 novembre 2016).

11.3.4 En revanche, comme relevé par l’expert judiciaire, il n’y pas eu d’erreur dans le traitement médical.

11.3.5 S’agissant de la nature des atteintes, on ne saurait assimiler des limitations fonctionnelles au niveau de la jambe gauche à une atteinte propre à entrainer des troubles psychiques, comme la jurisprudence l’a reconnu par exemple pour la perte d’un œil ou certains cas de mutilation à la main dominante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017). Toutefois, la question se pose pour le SDRC, compte tenu de la symptomatologie douloureuse intense et persistante qui l’accompagne. Cette question peut cependant rester ouverte, trois critères étant quoi qu’il en soit déjà réalisés.

11.3.6 S’agissant du caractère particulièrement impressionnant de l’accident ou des circonstances particulièrement dramatiques de celui-ci, la recourante a précisé, au cours de l’audience de comparution personnelle du 20 juin 2022, qu’à la suite de sa chute, elle s’était retrouvée coincée en partie sous le taxi, avec le scooter sur sa jambe, que le chauffeur avait bougé son véhicule et le scooter et qu’elle s’était retrouvée seule allongée sur la chaussée, avec la vision des phares des voitures qui arrivaient sur elle ; elle avait cru qu’elle allait mourir ; elle avait dû elle-même appeler la police car le chauffeur refusait de le faire. Cette description, non contestée par l’intimée, démontre que la recourante, suite à sa chute, a été laissée à la merci des autres véhicules dans la circulation, alors que la chaussée était mouillée, qu’il pleuvait et qu’il faisait nuit ; le chauffeur impliqué dans l’accident, dont elle dépendait - étant blessée mais pleinement consciente - n’a montré aucune bienveillance envers elle et, au contraire, n’a pas effectué les démarches usuelles et rassurantes dans ce type de situation. Ces circonstances semblent objectivement particulièrement dramatiques. Cette question peut cependant également rester ouverte, trois critères étant déjà réalisés.

11.4 Au demeurant, en présence de trois critères jurisprudentiels réalisés, soit les difficultés apparues au cours de la guérison, les douleurs physiques persistantes et la durée anormalement longue du traitement médical, le lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques de la recourante, entrainant une incapacité de travail de 50%, et l’accident doivent être admis.

Cela dit, l’incapacité de travail du point de vue psychique n’est pas plus importante que celle du point de vue somatique, de sorte qu’il convient de retenir que la recourante est capable, depuis le 1er septembre 2021, de travailler à un taux de 50% dans son activité habituelle.

12.         La capacité de travail de la recourante étant limitée, dès le 1er septembre 2021, à un taux de 50%, elle présente, vu l’activité exercée dans son activité habituelle, un degré d’invalidité de 50%.

En conséquence, elle a droit dès le 1er septembre 2021 à une rente d’invalidité de 50%.

13.         La recourante conclut à la condamnation de l’intimée à la prise en charge des séances de physiothérapie, d’acupuncture, de psychothérapie et du traitement médicamenteux au-delà du 31 août 2021.

13.1 Du point de vue orthopédique, l’intimée a reconnu la prise en charge, au-delà du 31 août 2021, d’un traitement antalgique pendant deux ans, ainsi qu’une consultation orthopédique annuelle (courrier de l’intimée du 19 mai 2021).

Dans son opposition (complément du 1er juillet 2021), la recourante a contesté la suppression de la prise en charge de son traitement au 31 août 2021. L’intimée n’a pas traité ce grief dans la décision litigieuse. En revanche, elle s’est référée à l’avis du Dr C______ du 3 septembre 2021, lequel estime que les traitements de fasciathérapie, acupuncture et ostéopathie ne sont pas considérés comme traitements ayant montré une efficacité et peuvent être suivis de façon ambulatoire, à la charge de la recourante. Dans sa détermination du 30 mai 2023, l’intimée ne s’est pas déterminée sur les conclusions de la recourante du 5 avril 2023 liées à la prise en charge du traitement médical au-delà du 31 août 2021.

À cet égard, l’expert judiciaire a estimé que, d’un point de vue orthopédique, des séances régulières de physiothérapie et d’acupuncture devaient être maintenues, ainsi que la prise en charge d’un traitement médicamenteux, cela afin que la recourante puisse maintenir son taux d’activité à 50%, voire de l’augmenter progressivement. Le traitement était nécessaire pour maintenir la capacité de travail.

L’intimée n’a pas contesté spécifiquement cette conclusion du rapport d’expertise.

Dans la mesure où l’expert judiciaire fait référence à la nécessité d’un traitement pour maintenir la capacité de gain de la recourante et que celle-ci a droit à l’octroi d’une rente d’invalidité, son cas relève de l’art. 21 al. 1 let. c LAA précité, soit un droit aux prestations pour soins et remboursement de frais, lorsque l’assuré a besoin de manière durable d’un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain.

Il convient en conséquence de suivre les conclusions de l’expert judiciaire et de condamner l’intimée à prendre en charge, au-delà du 31 août 2021, les traitements de physiothérapie, d’acupuncture et médicamenteux, en lien avec les séquelles de son accident, étant relevé que l’intimée a déjà accepté la prise en charge d’un traitement antalgique pendant une durée de deux ans, ainsi qu’une consultation orthopédique annuelle.

Enfin, s’agissant de l’acupuncture, contrairement à l’avis du Dr C______, ce traitement est pris en charge à certaines conditions par la LAMal (art. 4b let. a de l’ordonnance du DFI sur les prestations dans l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie du 29 septembre 1955 - RS 832.112.31), de sorte qu’il n’y a pas de motif d’en exclure la prise en charge.

13.2 Du point de vue psychiatrique, la recourante requiert la prise en charge d’un traitement psychothérapeutique. À cet égard, l’intimée ayant contesté le lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l’accident, elle ne s’est pas prononcée sur cet aspect. Par ailleurs, aucun document médical probant n’atteste de la nécessité d’une telle prise en charge pour maintenir la capacité de gain de la recourante. Il convient en conséquence de renvoyer la cause à l’intimée afin qu’elle se prononce sur la prise en charge éventuelle d’un tel traitement.

14.         L’intimée conteste le taux de l’IPAI de 40% au motif qu’en février 2022 seule une arthrose moyenne est présente et qu’il n’est pas possible de connaitre l’évolution de celle-ci.

À cet égard, l’expert s’est référé à la table 5 des indemnisations des atteintes à l’intégrité de l’intimée, tout comme le Dr C______ (avis du 29 avril 2021). A l’instar de ce médecin, il estime que l’évolution sera défavorable et atteindra une arthrose sévère. On peine ainsi à comprendre la critique de la Dre Q______ (laquelle, tout en relevant que l’arthrose est évolutive, déclare qu’elle n’est pas un « devin du village »), dès lors qu’elle va à l’encontre de l’avis du Dr C______, qui estime que l’on peut s’attendre à une évolution défavorable vers une pan-gonarthrose symptomatique pour laquelle une arthroplastie est attendue. L’arthrose grave du genou correspondant à taux d’IPAI de 30 à 40%, l’évaluation du Prof. O______ n’est pas critiquable.

S’agissant d’une éventuelle atteinte à l’intégrité psychique de la recourante, l’intimée, qui a contesté le lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l’accident, ne s’est pas prononcée sur cette question, de sorte que la cause lui sera renvoyée sur ce point, étant en outre constaté qu’aucun avis médical au dossier ne permet, à ce stade, d’établir ou de refuser une telle IPAI.

Le taux de l’IPAI étant de 40%, l’intimée sera condamnée à verser à la recourante une IPAI à ce taux, sous déduction de celle déjà versée.

15.         Selon l’art. 26 al. 2 LPGA, des intérêts moratoires sont dus pour toute créance de prestations d’assurances sociales à l’échéance d’un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, mais au plus tôt douze mois à partir du moment où l’assuré fait valoir ce droit, pour autant qu’il se soit entièrement conformé à l’obligation de collaborer qui lui incombe.

En l’occurrence, des intérêts moratoires sont dus non pas dès le 1er septembre 2021 comme requis par la recourante mais, s’agissant de la rente d’invalidité et de l’IPAI, dès le 1er septembre 2023, la recourante ayant fait valoir son droit antérieurement au 1er septembre 2021. S’agissant des frais médicaux, il incombera à l’intimée d’examiner pour chaque remboursement dû, si des intérêts moratoires se justifient.

16.         Partant, le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse annulée et il sera dit que la recourante a droit à une rente d’invalidité de 50% dès le 1er septembre 2021, à une IPAI de 40%, avec intérêt à 5% l’an dès le 1er septembre 2023, ainsi qu’à la prise en charge des traitements de physiothérapie, acupuncture et médicamenteux en lien avec l’accident, y compris les consultations orthopédiques annuelles, au-delà du 31 août 2021, sous déduction des prestations déjà versées.

La cause sera renvoyée à l’intimée, dans le sens des considérants.

La recourante obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 4'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émolument et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA – E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l'intimée du 16 septembre 2021.

4.        Condamne l’intimée à verser à la recourante une rente d’invalidité de 50% dès le 1er septembre 2021, ainsi qu’une IPAI de 40%, sous déduction des prestations déjà versées, avec intérêt à 5% l’an dès le 1er septembre 2023.

5.        Condamne l’intimée à prendre en charge les frais médicaux de la recourante, dans le sens des considérants.

6.        Renvoie la cause à l’intimée, pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

7.        Alloue à la recourante une indemnité de CHF 4'000.- à charge de l’intimée.

8.        Dit que la procédure est gratuite.

9.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le