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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/902/2023

ATAS/648/2023 du 30.08.2023 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/902/2023 ATAS/648/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 août 2023

Chambre 4

 

En la cause

A______

représentée par le syndicat SIT, soit pour lui B______, mandataire

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1992, s’est inscrite auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) le 15 juin 2022 pour un placement au 1er juillet 2022 à 100%.

b. Par courriel du 13 octobre 2022, l’OCE a convoqué l’assurée à un entretien de conseil fixé au mercredi 23 novembre 2022 à 10h45, rappelant à l’assurée son obligation d’avertir en cas d’empêchement au moins 24 heures à l’avance.

c. Par courriel du 23 novembre 2022, le service juridique de l’OCE a imparti à l’assurée un délai au 7 décembre 2022 pour expliquer pourquoi elle ne s’était pas rendue à l’entretien de conseil du jour même, sans s’en excuser.

d. Le 24 novembre 2022, l’assurée a répondu que son absence à l’entretien de conseil était due au fait qu’elle avait été malade et pas en état d’en informer sa conseillère en placement (ci-après : la conseillère) avant l’entretien. Elle s’excusait du dérangement occasionné et joignait un certificat médical attestant d’une incapacité pour cause de maladie du 22 au 26 novembre 2022.

e. Par décision du 25 novembre 2022, le service juridique de l’OCE a prononcé une suspension d’une durée de trois jours dans l’exercice du droit à l’indemnité de l’assurée en raison de son absence non excusée à l’entretien de conseil prévu le 23 novembre 2022.

f. Par courrier du 22 décembre 2022, l’assurée s’est opposée à la décision précitée, précisant qu’elle n’avait pu informer sa conseillère de son état maladif qu’après un long repos et une bonne dose de médicaments prescrits par son médecin. Il était normal qu’une personne en incapacité de travail pour maladie soit empêchée de prévenir l’OCE à des moments précis dans ce genre de situation. Elle n’avait d’ailleurs pas à faire des postulations pendant les périodes d’incapacité. L’assurée faisait encore valoir qu’elle avait toujours respecté ses obligations dans les délais impartis par l’office régional de placement (ci-après : l’ORP), sans commettre de faute ou de négligence. La sanction prononcée constituait un excès de formalisme à caractère chicanier et ne se fondait sur aucune base légale adéquate.

g. Par décision sur opposition du 15 février 2023, l’OCE a rejeté l’opposition formée par l’assurée, considérant que celle-ci avait certes démontré qu’elle avait été empêchée de se rendre au rendez-vous en raison de son état de santé, mais qu’elle aurait dû aviser l’ORP de son empêchement au moins 24 heures à l’avance, ou à tout le moins dès la survenance de son incapacité totale de travail. Par ailleurs, le fait d’être dispensée de recherches d’emploi durant une période d’incapacité ne signifiait pas que l’assurée était également dispensée de son obligation d’annoncer à temps à sa conseillère son empêchement par un simple appel téléphonique ou un bref courriel, ce qui ne requérait pas autant d’attention que l’envoi d’une postulation.

B. a. Par courrier du 13 mars 2023, l’assurée, représentée par le syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT), a interjeté recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, en concluant à son annulation, en reprenant les arguments déjà développés. Elle ajoutait n’avoir commis aucun manquement depuis sa période d’inscription auprès du chômage et prendre ses obligations envers l’OCE très au sérieux, référence faite à la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle un premier oubli à un entretien de conseil n’était pas sanctionné à certaines conditions.

b. Dans sa réponse du 31 mars 2023, le service juridique de l’OCE, considérant que l’assurée n’apportait aucun élément nouveau, a persisté dans les termes de sa décision sur opposition. La jurisprudence citée par l’assurée ne s’appliquait pas, dès lors que la sanction litigieuse concernait une inobservation des instructions de l’ORP.

c. Dans sa réplique du 4 mai 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions.

d. Une audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 5 juillet 2023, lors de laquelle la recourante a notamment déclaré que la veille de l’entretien, soit le 22 novembre 2022, elle ne se sentait pas bien et qu’elle était clouée au lit. Elle avait essayé de joindre par téléphone son médecin, sans succès. Son état s’était empiré durant la nuit, ce qui l’avait empêchée de se réveiller pour son entretien de conseil, bien que son réveil était enclenché. Le 23 novembre 2022, elle avait réussi à contacter un des remplaçants de son médecin, qui lui avait fixé un rendez-vous le 24 novembre 2022. Si elle n’avait pas contacté sa conseillère la veille ou bien le jour même de l’entretien, c’était parce qu’il était préférable de le faire après avoir vu son médecin afin de lui transmettre son certificat médical en même temps, soit dans le délai imparti par le service juridique de l’intimé dans leur courriel du 23 novembre 2022. Elle n’était en outre pas au clair avec le fait qu’elle aurait dû prévenir sa conseillère au préalable.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de trois jours du droit à l’indemnité de la recourante, pour une absence non excusée à un entretien de conseil.

4.              

4.1 Aux termes de l’art. 17 al. 1 LACI, l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit, avec l’assistance de l’office du travail compétent, entreprendre tout ce que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l’abréger ; il lui incombe en particulier de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’il exerçait précédemment ; il doit apporter la preuve des efforts qu’il a fournis.

Selon l’art. 17 al. 3 let. b LACI, l’assuré a l’obligation, lorsque l’autorité compétente le lui enjoint, de participer aux entretiens de conseil, aux réunions d’information et aux consultations spécialisées.

L’art. 22 de l’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02) prévoit que le premier entretien de conseil et de contrôle doit avoir lieu au plus tard quinze jours après que l’assuré s’est présenté à la commune ou à l’office compétent en vue du placement (al. 1) ; l’office compétent a au moins un entretien de conseil et de contrôle par mois avec chaque assuré. Lors de cet entretien, il contrôle l’aptitude au placement de l’assuré et examine si celui-ci est disposé à être placé (al. 2) ; l’office compétent convoque à un entretien de conseil et de contrôle tous les deux mois au moins les assurés qui exercent une activité à plein temps leur procurant un gain intermédiaire ou une activité bénévole relevant de l’art. 15 al. 4 LACI (al. 3) ; il convient avec l’assuré de la manière dont il pourra être atteint en règle générale dans le délai d’un jour (al. 4).

Selon l’art. 25 al. 1 let. d OACI, l’office compétent décide à la demande de l’assuré de déplacer la date de son entretien de conseil et de contrôle s’il apporte la preuve qu’il ne peut se libérer à la date convenue en raison d’un événement contraignant, notamment parce qu’il doit se déplacer pour se présenter à un employeur.

Le courrier type de convocation à un entretien de conseil précise que toute absence injustifiée entraîne une suspension de l’éventuel droit de l’assuré aux indemnités de chômage et qu’en cas d’empêchement, il faut avertir le conseiller en personnel au moins 24 heures à l’avance.

4.2 L’art. 30 al. 1 LACI dispose que le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu notamment lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (let. c) ; n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (let. d) ; a donné des indications fausses ou incomplètes ou a enfreint, de quelque autre manière, l’obligation de fournir des renseignements spontanément ou sur demande et d’aviser (let. e).

L’assuré qui a oublié de se rendre à un entretien de conseil et qui s’en excuse spontanément ne peut pas être suspendu dans l’exercice de son droit à l’indemnité si l’on peut admettre, par ailleurs, au vu des circonstances, qu’il prend ses obligations de chômeur très au sérieux. Tel est le cas, notamment, s’il a rempli de façon irréprochable ses obligations à l’égard de l’assurance-chômage durant les douze mois précédant cet oubli. Un éventuel manquement antérieur ne doit plus être pris en considération (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 123/04 du 18 juillet 2005).

Même une négligence légère dans l’accomplissement de l’obligation de renseigner peut entraîner une sanction (DTA 2007 p. 210).

La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI ; arrêt du Tribunal fédéral C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 5.3). L’OACI distingue trois catégories de faute – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d’elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI).

En tant qu’autorité de surveillance, le Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) a adopté un barème indicatif à l’intention des organes d’exécution (Bulletin LACI/D72 et ss). Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d’exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d’apprécier le comportement de l’assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas d’espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014, consid. 5.1).

Selon le barème du SECO, lorsque l’assuré n’observe pas les instructions de l’OCE, en ne se rendant notamment pas à un entretien de conseil, sans excuse valable, l’autorité doit infliger une sanction de 5 à 8 jours lors du premier manquement et de 9 à 15 jours lors du second manquement. Dès le troisième manquement, le dossier doit être renvoyé pour décision à l’autorité cantonale (Bulletin LACI IC/D79.3A). En cas d’inobservation d’autres instructions de l’ORP, la suspension est de 3 à 10 jours pour un premier manquement (Bulletin LACI IC/D79.3B).

La quotité de la suspension du droit à l’indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2). Le juge ne s’écarte de l’appréciation de l’administration que s’il existe de solides raisons. Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 123 V 150 consid. 2).

4.3  En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe‑t‑il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

5.              

5.1 En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a démontré, par certificat médical daté du 24 novembre 2022, qu’elle était malade le jour de l’entretien, le 23 novembre 2022. L’intimé reproche cependant à la recourante de n’avoir pas avisé sa conseillère de son empêchement de se présenter au rendez-vous.

Le courriel type de convocation à un entretien de conseil précise que toute absence injustifiée entraîne une suspension de l’éventuel droit de l’assuré aux indemnités de chômage et qu’en cas d’empêchement, il faut avertir le conseiller en personnel au moins 24 heures à l’avance. De ces indications, valant prescriptions de contrôle, il résulte implicitement qu’un empêchement survenant au dernier moment doit être communiqué sans délai au conseiller, dans la mesure du possible avant le rendez-vous.

En l’occurrence, il peut être reproché à la recourante de ne pas avoir averti sa conseillère du fait qu’elle ne se rendrait pas au rendez-vous de conseil.

En effet, il n’apparaît pas que son état de santé l’empêchait d’envoyer un court message à sa conseillère ou de l’appeler afin de l’aviser qu’elle ne viendrait pas le lendemain, dès lors qu’elle a été en mesure d’essayer de joindre son médecin par téléphone le 22 novembre 2022.

Même si on admet qu’elle ne l’a pas fait, car elle pensait de bonne foi pouvoir se rendre le lendemain au rendez-vous de conseil et qu’elle n’a pas entendu son réveil le matin de l’entretien, en raison d’une mauvaise nuit liée à son état de santé, il faut constater qu’elle n’a pas pris contact avec sa conseillère dès son réveil et qu’elle a indiqué qu’il était préférable d’attendre de voir son médecin pour adresser un certificat médical à sa conseillère. Elle a en outre admis devant la chambre de céans qu’elle n’était pas très au clair sur son obligation d’informer sans retard sa conseillère d’une absence à un rendez-vous de conseil, ce qui n’est pas excusable, vu la teneur de la convocation qu’elle a reçue.

Par ailleurs, même si on admettait que la jurisprudence relative à l’oubli d’un rendez-vous de conseil (arrêt C 123/04) pourrait s’appliquer au cas d’espèce, il faudrait constater que ses conditions d’application ne seraient pas remplies, puisque la recourante ne s’est pas excusée spontanément auprès de sa conseillère de son absence aussitôt que possible.

C’est en conséquence à juste titre que l’intimé a sanctionné la recourante pour ne pas avoir respecté les instructions de l’autorité.

5.2 Quant à la quotité de la suspension du droit à l’indemnité, arrêtée à trois jours par l’intimé, elle correspond au minimum de la sanction fixée par le barème du SECO, pour un premier manquement lorsque l’assuré n’observe pas les instructions de l’intimé.

Ce dernier a ainsi respecté le principe de la proportionnalité.

6.             Infondé, le recours doit être rejeté et la décision sur opposition de l’intimé du 15 février 2023 confirmée.

La recourante qui succombe n'a pas de droit à des dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le