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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1169/2022

ATAS/594/2023 du 11.08.2023 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1169/2022 ATAS/594/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 11 août 2023

Chambre 9

 

En la cause

A______
représentée par Me Maxime CLIVAZ, avocat

 

 

recourante

 

contre

CAISSE DE CHÔMAGE SIT

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée) est au bénéfice d’un délai cadre de chômage depuis le 6 mai 2021.

b. Par décision du 29 juillet 2021, la caisse de chômage du SIT (ci-après : la caisse) a prononcé une suspension du droit à l’indemnité de l’assurée de 40 jours dès le 6 mai 2021 en raison de son licenciement avec effet immédiat pour faute grave.

Cette décision n’a pas été contestée.

B. a. Le 9 août 2021, l’assurée a conclu un contrat de travail avec l’entreprise B______ pour une activité de femme de chambre à compter du 10 août 2021 et pour une durée indéterminée. Le contrat prévoyait un temps d’essai de trois mois et un temps de travail de 25 heures par semaine au minimum.

b. Par courrier du 10 septembre 2021, l’assurée a démissionné de ses fonctions de femme de chambre.

c. L’assurée a été en arrêt de travail total du 13 au 18 septembre 2021 (cf. certificats médicaux des 13 et 15 septembre 2021).

d. Par courriel du 16 septembre 2021, l’assurée a informé sa conseillère en placement de ce qu’elle avait cessé son emploi chez B______ le 16 septembre 2021 alors qu’elle était en période d’essai pour « mobbing suivi de raison médicale ». Elle a également indiqué qu’elle était en arrêt de travail jusqu’au 17 septembre 2021.

e. Par courriel du 20 septembre 2021, la conseillère en placement a répondu que, n’ayant reçu aucune information de la part de l’assurée depuis sa prise d’emploi, son dossier était resté ouvert et les conditions de suivi étaient inchangées. Elle n’avait reçu le contrat de travail de l’assurée que le 14 septembre 2021. Elle a invité l’assurée à lui transmettre les certificats médicaux d’arrêt maladie et de contacter l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière (ci-après : OSEO) afin de « reprendre le programme interrompu au mois d’août ». Un point de situation serait effectué le 29 septembre prochain.

f. Par courriel du 29 octobre 2021, la caisse a invité l’assurée à lui transmettre les attestations de gain intermédiaire pour les mois d’août et septembre, voire octobre, 2021.

g. Par courriel du 17 décembre 2021, la caisse informé l’assurée de ce qu’elle devait fournir une attestation médicale expliquant les raisons de sa démission auprès de B______.

h. Par courriel du 23 décembre 2021, l’assurée a répondu que son médecin avait pris sa retraite le 8 décembre 2021.

C. a. Par décision du 23 décembre 2021, la caisse a prononcé une suspension du droit à l’indemnité de chômage de l’assurée de 40 jours dès le 15 octobre 2021 pour chômage fautif.

b. Le 24 janvier 2021, l’assurée a formé opposition à cette décision. La décision du 23 décembre 2021 était antidatée, comme en témoignait le courriel de Monsieur C______ du 6 janvier 2022 précisant que la décision suivrait « dès que sa rédaction serait achevée ». Le début de la sanction ne correspondait pas à la date de la fin du contrat chez B______. Le montant de la sanction était abusif et largement supérieur au gain intermédiaire touché. Son emploi chez B______ ne lui avait pas été assigné. Il avait été proposé lors de ses recherches d’emploi. Elle était masseuse de profession et n’avait jamais exercé comme femme de chambre. Elle n’arrivait pas à tenir la cadence de nettoyer et préparer 20 chambres par jour, comme cela lui avait été demandé. Elle avait été menacée d’être renvoyée si elle ne tenait pas le rythme. Elle était couverte de bleus et très mal à l’aise sur son lieu de travail. Le 16 septembre 2021, elle avait envoyé un courriel à sa conseillère en placement précisant avoir cessé son travail en période d’essai et lui demandant comment procéder pour la suite. Dans sa réponse, sa conseillère lui avait demandé de reprendre contact avec l’OSEO pour reprendre un programme de formation. Si la caisse avait consulté l’attestation de gain intermédiaire de septembre 2021, elle aurait vu que les rapports de travail étaient terminés à mi-septembre 2021. Toute sanction financière mettrait en difficulté sa famille et ses deux enfants à charge.

c. Par décision sur opposition du 14 mars 2022, la caisse a maintenu les termes de sa décision du 23 décembre 2021. L’assurée avait démissionné de son emploi chez B______ sans raison valable. La caisse avait tenu compte, dans sa décision du fait que l’assurée avait perdu son emploi en gain intermédiaire. Elle avait agi aussi vite que possible après avoir obtenu tous les éléments en sa possession qui étaient nécessaires à l’appréciation de sa situation. La caisse a précisé avoir déjà dû prononcer une décision de suspension pour perte de travail par sa propre faute au début du chômage, mais que la suspension prononcée dans la présente situation n’était pas plus sévère.

D. a. Par acte du 12 avril 2022, l’assurée a recouru devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision, concluant à son annulation ; subsidiairement, à la réduction de la suspension de l’indemnité.

b. Par réponse du 26 avril 2022, la caisse a conclu au rejet du recours. Elle a précisé qu’elle n’avait pu renseigner l’assurée sur sa situation qu’après la réception, fin novembre 2021, des attestations de gain intermédiaire concernant l’emploi qu’elle occupait chez B______.

c. Le 11 mai 2022, l’assurée a relevé que la caisse savait dès réception du formulaire « indications de la personne assurée » (ci-après : IPA), reçu à la fin septembre 2021, qu’elle avait interrompu son emploi le 16 septembre 2021. La caisse aurait pu la questionner à ce sujet, mais avait décidé de ne pas le faire.

d. Le 26 octobre 2022, la caisse a produit des pièces complémentaires.

e. Lors de l’audience de comparution personnelle du 18 novembre 2022, l’assurée a confirmée avoir été sanctionnée le 29 juillet 2021 à 40 jours de suspension pour faute grave. Elle avait contesté la résiliation devant le Tribunal des prud’hommes. La décision de la caisse du 29 juillet 2021 n’avait toutefois pas été contestée, mais elle se réservait le droit de demander une révision. Elle avait été en arrêt de travail du 13 au 18 septembre 2021 car le travail avait été très pénible pour sa santé. Ses soucis de santé avaient commencé lorsqu’elle avait subi du mobbing sur son lieu de travail. Elle n’avait pas parlé de cette situation à ses supérieurs car elle avait peur des répercussions. Elle n’en avait pas non plus parlé à sa conseillère en placement avant de démissionner. Elle avait un risque de cancer de l’utérus, raison pour laquelle elle avait des douleurs en bas du dos lorsqu’elle portait des choses lourdes. Elle avait également les pieds qui gonflaient. Elle n’avait pas de certificat médical attestant de ce diagnostic. Elle avait également développé des allergies aux produits de nettoyage.

À l’issue de l’audience, le représentant de l’assurée a déclaré être disposé à obtenir un certificat médical pour les affections gynécologiques et leur influence sur sa capacité de travail.

f. Le 21 novembre 2022, la caisse a produit les attestations de gain intermédiaire dactylographiés datées du 15 novembre 2021 et afférentes aux mois d’août et septembre 2021.

g. Le 16 décembre 2022, l’assurée a relevé qu’elle n’avait pas été en mesure d’obtenir le certificat médical souhaité.

h. Par arrêt incident du 11 janvier 2023, la chambre de céans a suspendu l’instance en application de l’art. 14 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), jusqu’à droit jugé par le Tribunal des prud’hommes dans la procédure opposant la recourante à son ancien employeur.

L’issue de la procédure pouvait s’avérer déterminante s’agissant de la quotité de la sanction prononcée dans la présente procédure.

i. Le 14 janvier 2023, l’assurée a produit la copie du jugement du Tribunal des prud’hommes du 30 mai 2023. Il est notamment retenu que la recourante n’avait pas commis de faute particulièrement grave justifiant son licenciement immédiat.

j. La caisse a persisté dans ses conclusions, considérant que l’assurée avait donné un motif à son employeur pour la licencier, de sorte qu’elle devait être considérée comme étant au chômage par sa propre faute.

k. Cette écriture a été transmise à la recourante.

l. Le 10 juillet 2023, l’assurée a informé la chambre de céans que son ancienne employeuse avait formé appel contre le jugement du Tribunal des prud’hommes du 30 mai 2023.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de 40 jours pour chômage imputable à une faute.

2.1 En règle générale, l’assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage (art. 16 al. 1 LACI).

2.2 Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. a LACI, le droit de l’assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci est sans travail par sa propre faute. Cet état de fait vise les comportements des assurés qui violent l'obligation d'éviter le chômage (DTA 2014 p. 145 c. 3.1). Est notamment réputé sans travail par sa propre faute l’assuré qui a résilié lui-même le contrat de travail, sans avoir été préalablement assuré d'obtenir un autre emploi, sauf s'il ne pouvait être exigé de lui qu’il conservât son ancien emploi (art. 44 al. 1 let. b de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02).

2.2.1 Dans le cadre de l'art. 44 al. 1 let. b OACI, l'emploi quitté est présumé convenable, de sorte que la continuation des rapports de travail est réputée exigible. Cette présomption est susceptible d'être renversée et il convient de ne pas se montrer trop strict quant à la preuve qui incombe alors à l'assuré (arrêts du 27 janvier 2004 [C 258/03] ; 10 février 2003 [C 135/02]). Cela étant, c'est de façon restrictive qu'il convient de trancher la question de savoir si l'on pouvait raisonnablement exiger du travailleur qu'il conserve son emploi (DTA 1989 p. 88 consid. 1a p. 89). Il s'agit toutefois de tenir compte de l'ensemble des circonstances. On ne saurait exiger d'un travailleur qu'il garde son emploi s'il peut se prévaloir d'un motif de résiliation immédiate au sens de l'art. 337 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220). Si l'absence de versement du salaire ou le versement partiel de celui-ci, malgré mise en demeure, justifie une résiliation immédiate, un simple différend salarial sans gravité ne justifie pas une telle manifestation de volonté (DTA 1982 p. 78). L'impossibilité de compenser des heures supplémentaires nombreuses et exigées régulièrement conduit à admettre que la poursuite des rapports de travail n'était pas exigible (arrêt du Tribunal fédéral du 20 août 2010 [8C_606/2010] consid. 3.2). Selon le Bulletin LACI/IC D26, une résiliation du contrat de travail par l'assuré ne peut être sanctionnée que si l'on pouvait attendre de lui qu'il conservât son emploi. Le caractère convenable de l'ancien emploi doit être apprécié sur la base de critères stricts. Les heures supplémentaires qui ne dépassent pas la durée du travail maximale légale, les différends quant au salaire, tant que les conventions collectives ou les dispositions contractuelles sont respectées, de même qu’un climat de travail tendu ne suffisent pas à faire qualifier un emploi de non convenable. Si l'assuré invoque des problèmes de santé, il doit les prouver par un certificat médical.

D'après la jurisprudence, les circonstances permettant d'admettre que l'on n'eût pu exiger de l'assuré qu'il conservât son ancien emploi doivent être appréciées de manière restrictive (DTA 1989 no 7 p. 89 consid. 1a ; voir également Gerhards, Kommentar zum Arbeitslosenversicherungsgesetz, n. 14 ad art. 30).

2.3 Selon l’art. 30 al. 1 let. d LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but. Jurisprudence et doctrine s'accordent à dire qu'une telle mesure constitue une manière appropriée et adéquate de faire participer l'assuré au dommage qu'il cause à l'assurance-chômage en raison d'une attitude contraire à ses obligations (ATF 125 V 197 consid. 6a p. 199 ; DTA 2006 no 12 p. 148 consid. 2 et les références ; Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungs-recht [SVBR], Soziale Sicherheit, 2ème édition, n. 841 ss, plus spécialement n. 846 ; Boris RUBIN, Assurance-chômage, ch. 5.8.7 p. 396 ss, plus spécialement ch. 5.8.7.4, p. 401 ss).

2.4 La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute
(art. 30 al. 3 LACI). L’OACI distingue trois catégories de faute – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI). Selon l’art. 45 al. 4 OACI, il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi (let. a) ou qu’il refuse un emploi réputé convenable (let. b). Des antécédents remontant à moins de deux ans justifient une prolongation de la durée de suspension (art. 45 al. 5 OACI ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, Bâle 2014, ad art. 30 LACI n. 114 ss). Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s'agir, dans le cas concret, d'un motif lié à la situation subjective de la personne concernée (d'éventuels problèmes de santé, la situation familiale ou l'appartenance religieuse) ou à des circonstances objectives (par exemple la durée déterminée du poste). Si des circonstances particulières le justifient il est donc possible, exceptionnellement, de fixer un nombre de jours de suspension inférieur à 31 jours. Toutefois les motifs de s'écarter de la faute grave doivent être admis restrictivement (arrêt du Tribunal fédéral 8C 283/2021 du 25 août 2021 ; 8C 313/2021 du 3 août 2021).

En tant qu'autorité de surveillance, le secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas concret, en particulier de celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit aux prestations. Elles pourront le cas échéant aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (arrêt du Tribunal fédéral 8C 283/2021 précité). Le barème du SECO prévoit une suspension d'une durée de 31 à 45 jours en cas de premier refus d'un emploi convenable d'une durée indéterminée (Bulletin LACI IC D79/2.B/1).

Selon le Bulletin LACI/IC valable dès le 1er janvier 2017, D75 (Échelle de suspensions à l’intention des caisses de chômage) n° 1.D, la résiliation du contrat de travail par l’assuré ou d’un commun accord sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi, constitue une faute grave.

Sauf pour un manquement d'une aussi faible gravité qu'une absence isolée à un entretien à l’office régional de placement (ci-après : ORP), le prononcé d'une suspension ne suppose pas qu'un avertissement préalable ait été adressé à l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_834/2010 du 11 mai 2011 consid. 2.5 ; Boris RUBIN, Commentaire, ad art. 30 LACI n. 63). Il n’est en particulier pas nécessaire qu’un assuré ait été renseigné au sujet de son obligation d’accepter un emploi convenable pour qu’une sanction puisse être prononcée en cas de refus d’emploi (Boris RUBIN, Commentaire, ad art. 16 LACI n. 11, ad art. 30 LACI n. 63).

La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation. Il y a abus de celui-ci lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.2 ; 8C_601/2012 du 26 février 2013 consid. 4.2, non publié in ATF 139 V 164 et les références).

3.              

3.1 En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a résilié son contrat de travail la liant à B______ le 10 septembre 2021. Devant la chambre de céans, la recourante explique qu’elle n’avait jamais travaillé comme femme de chambre, qu’elle ignorait les conditions de travail et qu’elle ne se doutait pas qu’il lui serait demandé de nettoyer et préparer 20 chambres par jour. Elle ne savait pas non plus que le métier de femme de chambre était classé parmi les emplois avec pénibilité. Elle soutient également qu’elle ne savait pas qu’elle n’avait pas le droit de mettre fin à son contrat et que sa conseillère en placement ne l’avait pas avertie sur ce point.

Ce raisonnement ne saurait être suivi. Contrairement à ce qu’indique la recourante, le devoir de ne pas provoquer son propre chômage est notoire, de sorte qu’elle ne pouvait pas ignorer que sa démission pouvait avoir une incidence sur son droit aux prestations de chômage. S’ajoute à cela que dans la mesure où la recourante avait déjà démissionné lorsqu’elle en a informé sa conseillère en placement, on ne voit pas quelles dispositions l’intéressée aurait pu prendre sur la base d’un éventuel défaut de renseignement. Ensuite, les arguments avancés par la recourante pour justifier sa démission ne constituent pas des circonstances qui pourraient s’opposer valablement à la poursuite des rapports de travail selon la jurisprudence précitée.

S'agissant d’abord de l'atteinte à sa santé, force est de constater que les seuls certificats médicaux versés au dossier portent sur la période du 13 au 18 septembre 2021. Or, ces documents, qui ne précisent pas le motif de l’incapacité de travail et qui ne portent que sur six jours, ne permettent pas retenir que la continuation des rapports de travail n’était plus exigible. La recourante invoque certes un épuisement professionnel, mais ne l’a aucunement étayé par des documents médicaux. Quant à son affection gynécologique qui, selon ses dires, l’empêcherait de porter des charges lourdes et provoquerait des gonflements dans les pieds, l’intéressée n’a pas été en mesure de l’attester par un document médical, et cela malgré le délai octroyé, puis prolongé, par la chambre de céans pour ce faire. Il convient donc de retenir que l’état de santé invoqué par la recourante, insuffisamment documenté, ne permet pas de justifier un abandon d'emploi au sens de l'art. 44 al. 1 let. b OACI.

Ensuite, en tant que la recourante soutient qu’elle aurait été victime de mobbing, force est de constater que cette accusation n’est étayée par aucun indice pertinent. La chambre de céans constate d’ailleurs que la recourante n’a jamais évoqué cette situation avant sa démission, que ce soit avec sa supérieure, avec laquelle elle s’entendait bien (cf. procès-verbal de comparution personnelle du 18 novembre 2022), ou avec sa conseillère en placement.

Enfin, s’agissant de ses horaires de travail, force est de rappeler que les heures supplémentaires qui ne dépassent pas la durée du travail maximale légale ne suffisent pas à faire qualifier un emploi de non convenable. Il ne ressort du reste pas du dossier que les heures de travail de la recourante auraient dépassé la durée de travail maximal légale, et celle-ci ne le prétend pas. Il sera par ailleurs rappelé que son contrat de travail ne prévoyait qu’un nombre d’heures minimal par semaine, sans préciser de taux d’activité maximal.

Tout porte donc à croire que la continuation des rapports de travail restait exigible de la part de la recourante. Dans ces conditions, il peut être reproché à la recourante d'avoir, en démissionnant, commis une faute grave.

3.2 S’agissant de la durée de la suspension, l’intimée l’a fixée à 40 jours en tenant compte du fait que la recourante avait déjà été sanctionnée à 40 jours de suspension par une décision précédente du 29 juillet 2021. Cette décision avait été prise par l’intimée en raison du licenciement avec effet immédiat de la recourante. Il appert toutefois que le Tribunal des prud’hommes a considéré, dans son jugement du 30 mai 2023, que la recourante n’avait pas commis de faute particulièrement grave justifiant son licenciement immédiat. Selon ledit tribunal, un avertissement ou un licenciement ordinaire auraient dû lui être notifiés en lieu et place d’un licenciement immédiat. Ainsi, dans ces circonstances, et quand bien même l’ancienne employeuse a formé appel contre ce jugement, cet antécédent ne saurait être pris en compte dans la détermination de la durée de la suspension. Il convient donc de réduire la sanction à 31 jours, ce qui correspond au minimum de la fourchette prévue par le barème du SECO pour une faute grave.

4.             Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision litigieuse réformée, la sanction étant réduite à 31 jours de suspension du droit à l’indemnité de la recourante.

La recourante qui obtient partiellement gain de cause et est assistée d'un mandataire a droit à des frais et dépens arrêtés à CHF 500.- à charge de l'intimée (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

Préalablement :

1.        Ordonne la reprise de la procédure.

À la forme :

2.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

3.        L’admet partiellement.

4.        Réforme la décision de l'intimée du 14 mars 2022 dans le sens que la suspension du droit à l'indemnité de la recourante est réduite à 31 jours.

5.        Alloue à la recourante, à charge de l'intimée, CHF 500.- à titre de frais et dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le