Skip to main content

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2404/2022

ATAS/600/2023 du 14.08.2023 ( LCA ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2404/2022 ATAS/600/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 14 août 2023

Chambre 6

 

En la cause

A______

Représenté par Me Pascal PETROZ, avocat

 

demandeur principal et défendeur reconventionnel

 

contre

 

ZURICH COMPAGNIE D'ASSURANCES SA

Représentée par Me Pierre GABUS, avocat

 

 

défenderesse principale et demanderesse reconventionnelle

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le demandeur), né en 1968, travaillait depuis le 1er juillet 2001 comme maçon pour la société B______ (ci-après : l'employeuse), sise à Genève.

b. L'employeuse était assurée auprès de Zurich Compagnie d’assurance SA (ci-après : l’assurance ou la défenderesse) contre les conséquences économiques d'une incapacité de travailler du personnel due à la maladie.

c. La police d'assurance n°14.______ prévoit qu'en cas de maladie d'un assuré et après un délai d'attente de trente jours, l'assurance verse des indemnités journalières correspondant à 90% de son salaire. Les conditions générales d'assurance édition 1/2015 (ci-après : CGA) font partie intégrante du contrat d'assurance.

d. Par courrier du 29 mai 2020, l'employeuse a licencié l'assuré pour le 31 août 2020.

B. a. Par formulaire de déclaration d'assurance collective perte de salaire en cas de maladie du 12 août 2020, l'employeuse a informé l'assurance que l'assuré se trouvait en incapacité de travail depuis le 7 juillet 2020.

b. L'assurance a pris en charge le cas et versé des indemnités journalières dès le 7 août 2020.

c. Sur la base d'informations reçues de l'employeuse, Monsieur C______, inspecteur de sinistre auprès de l'assurance, a mené une enquête pour vérifier si l'assuré avait repris une activité professionnelle.

d. Le 1er juillet 2021, Monsieur C______ a établi un rapport d'enquête, dont il ressort ce qui suit :

Dans le courant du mois de juin 2021, il avait appris par l'employeuse que l'assuré, en incapacité totale de travail depuis le 8 juillet 2020, avait été vu faisant des achats de matériaux auprès d'un fournisseur, pour le compte de la société D______. L'inspecteur avait alors contacté le fournisseur qui avait reconnu l'assuré. Celui-ci lui avait rapporté que l'assuré, qui était connu pour effectuer des achats au nom de l'employeuse, avait, cette fois-ci, acheté du matériel au nom d'une autre société. Le fournisseur ne souhaitait pas témoigner par peur de représailles. L'inspecteur avait appris que l'assuré travaillait à J______, au domicile de Monsieur E______, sis chemin G______. II y effectuerait des travaux de terrassement extérieur en tous cas depuis le 3 juin 2021. Il aurait ensuite travaillé, toujours pour la société D______, au numéro 29 de la même adresse, chez Madame F______. Sur place, l'inspecteur avait constaté la présence d'un véhicule utilitaire Citroën H______ immatriculé GE 1______ stationné entre les numéros I7 et le 29 de la rue précitée, ainsi qu'un véhicule Mercedes I______ de type camionnette à benne avec des outils de chantier et des tréteaux à l'arrière, immatriculé GE 2______. Ces deux véhicules appartenaient à l'assuré. L'inspecteur avait constaté de nombreux va et vient d'ouvriers, soit deux personnes d'allure athlétique, âgées d'environ 50 ans et deux plus jeunes, visiblement peintres en bâtiment. Les domiciles étant privés, il n'avait pas pris de photographies ni de vidéos des personnes vues à l'intérieur. Le 1er juillet 2021, l'inspecteur s'était mis en place à 9h00 du matin sur le chemin G______ à J______ et avait remarqué deux personnes effectuant des travaux de peinture au numéro 27 et au moins deux personnes effectuant des travaux de rénovation au numéro 29. Afin d'identifier l'assuré, l'inspecteur l'avait appelé sur son natel, à la 5e sonnerie, il avait vu un homme de corpulence athlétique et d'environ 50 ans sortir du domicile situé au numéro 29 de cette rue. Il était visiblement habillé avec une tenue de travail de chantier. Il avait un téléphone à la main. L'inspecteur lui avait demandé son état de santé et l'avait convoqué le lundi suivant, soit le 5 juillet 2021. Lorsqu'il avait raccroché, l'inspecteur constatait que ce même individu enlevait son téléphone portable de son oreille. La physionomie de la personne décrite par l'employeuse permettait de conclure qu'il s'agissait effectivement de l'assuré. L'ayant identifié, l'inspecteur était ensuite resté sur place et avait remarqué que l'intéressé portait des outils jusqu'à son H______. Il était manifeste qu'il avait une activité professionnelle à cette adresse. Par ailleurs, le jour du contrôle, l'inspecteur n'avait remarqué aucun autre véhicule devant le numéro 29 de cette rue. L'intéressé ayant croisé son regard à deux reprises, l'inspecteur avait décidé de quitter les lieux.

En annexe de ce rapport, figuraient quatre photographies prises par l'inspecteur et un extrait du registre du commerce de la société D______.

e. À la suite de cette enquête, Monsieur C______ a convoqué l'assuré pour un entretien le 5 juillet 2021. Il a établi un procès-verbal d'entretien dont il ressort que l'inspecteur a interrogé l'assuré à propos de son arrêt de travail et l'a confronté aux résultats de son enquête, lui indiquant qu'il avait pu constater qu'il travaillait sur un chantier à J______. L'assuré avait confirmé qu'il se rendait sur place, car il connaissait bien Madame F______ et le patron de la société D______, avec qui il discutait, mais contestait le fait qu'il aurait travaillé. D'ailleurs il avait donné sa camionnette à la société D______.

f. Par courrier du même jour, signé par l'assuré, l'assurance se référait à leur entretien et lui rappelait qu'elle avait appris qu'il avait recommencé à travailler, notamment pour la société D______, à J______. Elle estimait que ses explications lors de l'entretien étaient invraisemblables, qu'il lui avait manifestement dissimulé sa reprise d'activité et qu'il avait ainsi fait valoir des prétentions frauduleuses. En conséquence, elle mettait fin à ses prestations dès le 1er juin 2021 et clôturait le dossier.

g. Par pli du 22 juillet 2021 adressé à l'assurance, l'assuré, sous la plume de son conseil, a catégoriquement contesté le fait qu'il aurait travaillé durant son incapacité de travail. Il demandait la transmission du rapport d'enquête et réservait ses droits.

h. Par courrier du 4 août 2021, l'assurance a transmis à l'assuré une copie de son rapport d'enquête du 1er juillet 2021. Elle a rappelé qu'elle était en droit de réclamer le remboursement de l'intégralité des sommes versées à l'assuré mais qu'en l'état, elle s'était contentée de clore le dossier au 1er juin 2021 tout en réservant ses droits, précisant qu'en cas de procédure judiciaire, elle réclamerait l'entier des prestations, sous suite de frais et dépens.

i. Le 1er décembre 2021, l'assuré a intégralement contesté les informations contenues dans le rapport d'enquête du 1er juillet 2021. Il ne se trouvait pas à J______ le 1er juillet 2021. En revanche, ses enfants se trouvaient sur place ce jour-là car ils apportaient des retouches effectuées par son épouse, laquelle exploitait un magasin de vêtement. Par ailleurs, le véhicule Mercedes vu sur place appartenait à Monsieur D______ et non à lui. Il réitérait que son état de santé ne lui permettait pas de travailler, ce qui était confirmé par l'IRM de son genou droit réalisée le 18 juin 2021, dont il transmettait le rapport médical consécutif. Il joignait également à son courrier un contrat de vente automobile daté du 6 novembre 2020 au nom de Monsieur D______, une attestation du 3 novembre 2021 de l'épouse de l'assuré, Madame K______, certifiant que ses enfants apportaient régulièrement des retouches à sa cliente et amie, Madame F______, ainsi qu'un extrait du registre du commerce de la société L______, dont l'associée gérante était l'épouse de l'assuré. Enfin, il réclamait la reprise du paiement des indemnités journalières.

Il ressortait du rapport du 21 juin 2021 du docteur M______, radiologue, que l'IRM du 18 juin 2021 mettait en évidence : une chondropathie condylienne médiale, siège d'un large « défect » cartilagineux (grade IV) associé à un œdème osseux sous-chondral condylien médial étendu en regard ; un petit œdème osseux sous-chondral périphérique du plateau tibial médial ; une petite méniscopathie dégénérative de la corne postérieure et du segment moyen subluxé du ménisque médial, associé à une fine fissuration intra-méniscale horizontale (grade II) au sein de sa corne postérieure ; une chondropathie fémoro-patellaire profonde (grade IV) modérément étendue, plus marquée sur le versant patellaire et associée à un discret œdème osseux sous chondral patellaire ; un épanchement intra-articulaire abondant.

j. Par pli du 20 décembre 2021, l'assurance a confirmé son précédent courrier et contesté la position de l'assuré. Dans la mesure des nouvelles contradictions de l'assuré, elle lui réclamait, cette fois-ci, le remboursement de l'ensemble des prestations versées, soit CHF 61'678.-, sous un délai d'un mois, à défaut de quoi, elle serait en droit de le poursuivre en justice.

k. Par courrier du 8 février 2022, l'assuré a maintenu sa position et contesté le remboursement des prestations réclamées par l'assurance. Il la mettait une ultime fois en demeure de prester, à défaut de quoi il introduirait une demande en justice. Il joignait une attestation du 21 janvier 2022 établie par Monsieur D______, certifiant que l'assuré ne travaillait pas pour son entreprise et indiquant qu'il l'avait présenté à ses amis Madame F______ et Monsieur E______ pour effectuer différents travaux de rénovation chez eux, ainsi que des lettres de ces derniers, confirmant cela et attestant qu'ils n'avaient pas mandaté l'assuré pour accomplir ces travaux. L'assuré transmettait également un certificat médical du 12 janvier 2022 du docteur N______, généraliste, attestant qu'il se trouvait en arrêt de travail en raison d'une chondropathie du genou droit avec une importante arthrose et des lésions du ménisque et du cartilage avec ulcérations.

l. Le 28 février 2022, l'assurance a informé l'assuré qu'elle maintenait sa position, mettant en évidence les contradictions constatées dans les explications de l'assuré.

C. a. Par acte du 22 juillet 2022, l'assuré, représenté par son conseil, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d'une demande en paiement à l'encontre de l'assurance, concluant à sa condamnation, sous suite de frais et dépens, au paiement de CHF 41'118.64, avec intérêt à 5% l'an dès le 1er novembre 2021 (date moyenne), à titre d'arriérés d'indemnités journalières pour perte de gain non versés, réservant son droit d'amplifier ses conclusions.

Le demandeur a produit en particulier : divers certificats d'incapacité de travail pour la période totale du 8 juillet 2020 au 28 février 2022 ; ses fiches de salaire de juillet 2020 à juillet 2021 ; ses échanges de courriers avec la défenderesse et leurs annexes.

À l'appui de sa demande, il demandait l'audition de Madame F______ et de Monsieur D______. Il sollicitait également la production par la défenderesse du contrat d'assurance police n°14.______ et des CGA, ainsi que des « décisions de prestations perte de gain ».

b. Sur interpellation de la chambre de céans, le demandeur a, le 22 août 2022, requis la tenue d'une audience de débat.

c. Invitée à se déterminer sur la demande, la défenderesse a, par acte du 21 octobre 2022, conclu au déboutement du demandeur et saisi la chambre de céans d'une demande reconventionnelle, par laquelle elle concluait à la condamnation du demandeur principal, sous suite de frais et dépens, au paiement en sa faveur de la somme de CHF 61'678.-, avec intérêts à 5% l'an à compter du 20 décembre 2021, pour prétention frauduleuse.

La défenderesse a en particulier produit : la lettre de licenciement du 29 mai 2020 à l'égard du demandeur ; les décomptes de prestations de perte de gain en faveur du demandeur ; un échange de courriel du 30 juin 2021 avec l'employeuse ; un extrait de l'office fédéral des routes relatif au véhicule Mercedes immatriculé GE -

2______.

À l'appui de sa position, elle demandait l'audition des parties, ainsi que des témoins suivants : Monsieur Alexandre P______, ancien patron du demandeur auprès de l'employeuse, ainsi que Madame F______ et Messieurs C______, D______ et E______.

Elle sollicitait également la production par le demandeur de documents renseignant sur ses démarches auprès des assurances invalidité et chômage.

d. Par réplique du 12 décembre 2022, le demandeur a amplifié ses conclusions principales, concluant à la condamnation de la défenderesse au paiement de CHF 56'497.35, avec intérêt à 5% l'an dès le 15 septembre 2021 (date moyenne), à titre d'arriérés d'indemnités journalières pour perte de gain non versés, réservant son droit d'amplifier ses conclusions.

Il a produit un nouveau certificat du 14 novembre 2022 établi par le Dr N______, attestant une incapacité de travail à 100% depuis le 15 mars 2021 jusqu'au 28 février 2022 en raison des atteintes (blocages et douleurs importantes) du genou droit.

e. Par duplique du 17 janvier 2023, la défenderesse a maintenu sa position, ses conclusions et les termes de sa demande reconventionnelle et contesté les nouveaux allégués du demandeur.

Elle a produit un bordereau de preuves, réitérant ses réquisitions de preuves déjà formulée et sollicitant la production des dossiers du demandeur auprès des assurances chômage et invalidité, ses déclarations fiscales 2020, 2021 et 2022, ainsi que l'extrait de son compte individuel AVS/AI pour les mêmes années.

f. Une audience de débat d'instruction, de débat principaux et de premières plaidoiries, avec comparution personnelle des parties a eu lieu le 27 mars 2023.

La chambre de céans a entendu, avec l'aide d'un interprète français-albanais, le demandeur principal, lequel a déclaré qu'il était maçon pour l'employeuse, d'abord comme temporaire, puis en fixe depuis 2001. Il avait travaillé comme manœuvre, aide-maçon et maçon durant 24 ans et parfois faisait également des livraisons avec une camionnette. Il avait été licencié en mai 2021 pour août 2021. Il avait des problèmes aux mains qui se bloquaient et sentait des fourmillements depuis longtemps, son patron savait qu'il devait se faire opérer, il avait un problème de tunnel carpien, était suivi auprès de la clinique de la main et avait été opéré après son licenciement. Il avait toujours des problèmes à deux doigts de la main gauche qui parfois se bloquaient. Il avait également des problèmes de genoux depuis longtemps, d'abord au genou droit, puis au gauche, probablement du fait qu'en raison de son intervention des mains, il avait dû rester à la maison et avait pris du poids. Son médecin généraliste était le Dr N______, lequel l'avait envoyé faire des examens du genou droit, lui avait prescrit des médicaments et des crèmes et lui avait dit qu'il faudrait mettre une prothèse. Il n'avait pas vu de médecin spécialiste mais avait tellement mal qu'il serait obligé d'aller consulter. Il prenait un jour sur deux du Voltarène, médicament très fort. Ses opérations aux mains avaient justifié le début de son incapacité de travail, qui s'était ensuite prolongée à cause des genoux. Il ne pouvait pas travailler car dans le bâtiment les genoux étaient sollicités et il ne pouvait plus soulever de poids. Il n'était plus suivi pour ses mains, qui allaient mieux, en revanche le problème était surtout ses genoux. Ses arrêts de travail avaient d'abord été prescrits par la clinique de la main et ensuite par le Dr N______.

Il s'était inscrit au chômage en mars 2022 et en était sorti en avril 2022 car il ne souhaitait pas y rester ; il n'avait pas déposé de demande de prestations d'assurance-invalidité. Actuellement il travaillait pour sa propre société, O______, créée en juin 2022, active dans le domaine de la construction et dont il était le seul gérant. Il travaillait comme maçon, n'avait pas d'employés mais sous-traitait beaucoup et ne travaillait plus vraiment comme avant à cause de ses problèmes de santé. Sa femme et ses fils travaillaient et c'est eux qui l'avaient aidé.

Il connaissait Madame F______ depuis longtemps car elle était cliente de sa femme. Il lui arrivait de passer chez elle pour discuter et boire le café, au moins une fois par semaine, mais il n'était pas capable de dire s'il était chez elle le 1er juillet 2021. Il connaissait Monsieur E______ depuis quatre/cinq ans, c'était le voisin de Madame F______. Il n'y avait pas de mur entre leurs propriétés. Lorsqu'il travaillait pour son employeuse, il n'avait pas travaillé pour Madame F______, ni pour Monsieur E______. Monsieur D______ était son ami, il l'avait présenté à Madame F______ et Monsieur E______. En 2021, l'entreprise D______ avait fait des travaux sur leurs terrasses respectives. Il n'avait pas participé du tout à ces travaux, ni aucun de ses fils.

Lorsque l'inspecteur de la Zurich lui avait téléphoné pour le convoquer, il se trouvait dans le bâtiment où il habite et n'avait pas pu répondre tout de suite, car il n'y avait pas de réseau. Il l'avait ensuite rappelé. Il s'était rendu à un entretien avec Monsieur C______, qui lui avait posé des questions sur son état de santé et lui avait demandé s'il se trouvait sur le chantier de Madame F______ et de Monsieur E______, ce à quoi il avait répondu qu'il y passait pour boire le café mais pas pour travailler. Monsieur C______ lui avait dit qu'ils pouvaient s'arranger entre eux, qu'il fallait qu'il admette qu'il avait donné une machine à l'entreprise D______ pour effectuer les travaux au chemin G______ et que l'affaire s'arrêterait là, ce qu'il avait refusé de faire, car ce n'était pas le cas. Monsieur C______ lui avait alors répondu qu'ils se verraient au Tribunal. Il a précisé qu'il lui avait dit qu'il passait régulièrement boire le café chez Madame F______ mais ne lui avait pas confirmé qu'il s'y trouvait le 1er juillet, car il ne savait pas à quelle date il était passé chez elle.

Il avait autorisé Monsieur D______, au début de son activité, à mettre à son nom sa camionnette Mercedes, car cela lui permettait de payer des primes meilleur marché, ce d'autant qu'il était pauvre vu qu'il débutait son activité. En revanche, le fourgon H______ était sa propriété et il l'utilisait. Ce fourgon avait été vu par Monsieur C______, car son fils était venu livrer des retouches faites par sa femme pour Madame F______. Il utilisait parfois la camionnette Mercedes de Monsieur D______, qui la lui prêtait, mais cette camionnette était la propriété de ce dernier bien qu'elle soit toujours enregistrée à son nom. Le contrat de vente qui avait été fourni était celui de Monsieur D______ et correspondait à la date à laquelle il avait acheté la camionnette. Celle-ci avait été immédiatement enregistrée à son nom. Il précisait qu'à la fin de son incapacité de travail, il avait encore travaillé environ deux mois pour son employeuse, car il avait un délai de résiliation de 3 mois, vu qu'il avait travaillé plus de 20 ans pour elle, et sa date de licenciement avait été prolongée en raison de son incapacité de travail. Il lui devait donc encore deux mois de travail et, en outre, il devait obtenir des papiers pour son inscription au chômage. Il avait travaillé comme maçon mais faisait principalement des livraisons avec la camionnette. Ensuite, il s'était inscrit au chômage. Depuis qu'il ne travaillait plus pour l'employeuse, il n'avait pas acheté lui-même du matériel, en revanche il avait conseillé Monsieur D______, car il connaissait tous les fournisseurs à Genève et pouvait lui dire où se fournir moins cher, mais il ne l'avait jamais accompagné pour faire des achats, ni avait fait des achats pour lui, en particulier en juin 2021.

Il a donné l'autorisation à la chambre de céans de demander l'apport de son dossier AI, son dossier chômage, ainsi que l'extrait de son compte individuel auprès de la caisse.

Également entendue, la défenderesse a déclaré que le contrat en cause était une assurance de dommage.

g. Par ordonnance de preuve du 28 mars 2023, la chambre de céans a ordonné l'audition, à titre de témoin, de Messieurs C______, D______ et E______, ainsi que de Madame F______. Elle a ordonné l'apport des dossiers AI et chômage, ainsi que la production de l'extrait de compte individuel du demandeur. Elle a invité le demandeur à produire ses certificats de salaire pour son activité auprès de l'employeuse, ainsi que tous rapports médicaux susceptibles d'éclaircir sa situation médicale durant son arrêt de travail. Elle a également invité la défenderesse à produire les pièces médicales en sa possession concernant le demandeur. Enfin, elle a réservé l'audition de Monsieur P______ et la suite de la procédure.

h. Le 14 avril 2023, le demandeur a produit ses fiches de salaire des mois de mars et avril 2022, son certificat de salaire concernant la période du 1er janvier au 30 avril 2022, ainsi qu'un rapport médical du 9 juillet 2020 des docteurs Q______ et R______, spécialiste FMH en chirurgie de la main, relatif à l'intervention chirurgicale sur sa main gauche.

i. Le 19 avril 2023, la chambre de céans a reçu le dossier du demandeur auprès de la caisse de chômage SIT, comprenant : son formulaire d'inscription auprès de la caisse de chômage le 10 mai 2022 ; sa confirmation d'inscription le 3 mai 2022 à l'ORP ; l'attestation de chômage remplie le 6 mai 2022 par l'employeuse ; la lettre de licenciement du 29 mai 2020 ; les fiches de salaire pour la période de janvier 2021 à avril 2022.

j. Le même jour, la chambre de céans a également reçu l'extrait de compte individuel du demandeur, dont il ne ressortait aucun revenu en 2021.

k. Le 8 mai 2023, Madame F______, ainsi que Messieurs E______ et D______, ont été interrogés par la chambre de céans.

Madame F______ a déclaré qu'elle connaissait le demandeur, qu'elle avait rencontré une dizaine d'années auparavant par l'intermédiaire de sa femme, qui était couturière. Ils étaient devenus camarades, car elle s'entendait très bien avec sa femme, qu'elle voyait régulièrement, de même que le demandeur et leur fils, qui lui amenaient souvent les habits qu'elle donnait à Madame K______ pour faire des travaux de couture. Il y avait environ deux/trois ans, Monsieur D______ lui avait été présenté par le demandeur. Elle voulait refaire sa terrasse et le demandeur lui avait dit qu'il connaissait quelqu'un qui travaillait bien. L'été 2021, elle avait mandaté Monsieur D______ lequel avait effectué des travaux de terrassement à son domicile. Le demandeur n'avait pas travaillé sur ce chantier, d'ailleurs, elle ne croyait pas qu'il travaillait avec Monsieur D______, car elle savait qu'il avait un emploi. Le demandeur passait régulièrement prendre le café chez elle, ce d'autant qu'à cette époque elle était en home office. Elle se rappelait que le demandeur était passé la voir alors que Monsieur D______ travaillait pour elle et que, d'ailleurs, parfois cela l'énervait car il venait boire un café ce qui interrompait tant son travail que celui de Monsieur D______. Le demandeur n'avait jamais effectué de travaux sur sa terrasse, que ce soit avec Monsieur D______ ou seul. Elle ne se souvenait plus si le demandeur était passé chez elle le 1er juillet 2021, ni quelle marque de véhicule il possédait. Probablement qu'il avait une petite camionnette blanche, car à l'époque où elle était seule, il y a quatre/cinq ans, il l'avait aidée à débarrasser des affaires à la déchetterie avec ce véhicule. Par ailleurs, il lui semblait l'avoir vu dans une voiture de sport noire mais elle ne pouvait pas confirmer avec quelle voiture il circulait actuellement. Lorsqu'il venait chez elle, il se parquait à côté de la maison, de sorte qu'elle ne voyait pas et ne faisait pas attention. Elle se souvenait que le demandeur avait été un moment en incapacité de travail durant plusieurs mois et c'était d'ailleurs pour cette raison qu'il venait boire le café chez elle. Le chantier de sa terrasse avait duré environ deux/trois semaines. Selon elle, pendant la période où le demandeur se trouvait en incapacité de travail, il n'avait pas travaillé, elle l'avait vu boiter et l'on voyait qu'il avait mal. Avec son voisin, Monsieur E______, ils avaient des maisons mitoyennes et leurs jardins n'étaient pas fermés. Monsieur E______ avait également engagé Monsieur D______ pour refaire sa terrasse. Les travaux sur les deux terrasses ont duré environ un mois à un mois et demi. Le demandeur n'avait pas travaillé non plus sur la terrasse de Monsieur E______, d'ailleurs il n'aurait pas pu car il boitait et il n'avait jamais été convenu qu'il serait engagé sur ce chantier. Sur l'annexe à la pièce 8 du chargé demandeur qui lui était présentée, elle confirmait que la photo sur la droite correspondait à sa maison et celle de gauche à celle de Monsieur E______. Elle confirmait également avoir rédigé la lettre pour valoir du 24 janvier 2022 – en annexe à la pièce 11 du chargé demandeur –, à la demande du demandeur, lequel lui avait dit qu'il était en litige avec son employeur qui prétendait qu'il avait un autre emploi. Elle avait rédigé bien volontiers cette attestation pour dire qu'il n'avait en tous les cas pas travaillé chez elle. Elle précisait que les travaux avaient peut-être duré quatre semaines, que deux personnes avaient travaillé, soit Monsieur D______ et un ouvrier, et qu'il en avait été de même sur le chantier de son voisin. C'était essentiellement Monsieur D______ qui avait travaillé car il s'agissait seulement de poser des dalles. Dans son souvenir, ce dernier venait travailler avec une camionnette blanche. Elle n'avait jamais discuté de cette audience avec le demandeur, qui lui avait demandé s'il pouvait la citer comme témoin et l'avait ensuite informée qu'elle allait être convoquée. Elle n'avait jamais discuté du fond du problème.

Monsieur E______ a déclaré qu'il connaissait le demandeur, qu'il avait rencontré environ quatre ans auparavant, dans son jardin, qui communiquait avec celui de Madame F______. Le demandeur venait souvent voir Madame F______ et comme les jardins étaient communicants, il l'avait rencontré, avait bu plusieurs fois le café avec lui et il lui était arrivé même de boire une bière à une occasion. Il voulait refaire sa terrasse car elle était composée de pierres inégales et peu pratiques et le demandeur lui avait dit qu'il connaissait une personne capable de faire ces travaux, sauf erreur Monsieur D______, qu'il a engagé. Ce dernier a débuté les travaux sur sa terrasse et, ensuite, Madame F______ l'avait engagé pour faire ses travaux. Monsieur E______ n'avait jamais mandaté le demandeur pour faire des travaux chez lui. Le demandeur n'avait jamais travaillé sur ce chantier, il passait de temps en temps pour boire des cafés et fumer des cigarettes en regardant les autres travailler. C'était quelqu'un de sympa et chaleureux et il était content de voir que tout se passait bien avec la personne qu'il lui avait recommandé. Il n'était pas capable de dire si le demandeur était présent sur le chantier le 1er juillet 2021, il savait qu'il était propriétaire d'une BMW foncée et d'une camionnette blanche dont il ne connaissait pas la marque, mais il n'était pas certain. Il n'était plus très sûr mais croyait qu'il avait une Golf grise. Monsieur D______ avait eu à un moment un petit camion pour transporter les dalles et du ciment. Il ne pouvait pas dire quel véhicule il avait, même s'il avait stationné devant sa maison pendant des heures. Il ne savait pas à l'époque que le demandeur se trouvait en incapacité de travail, celui-ci lui en avait parlé ensuite, à son souvenir, à l'été 2022. Il précisait que les travaux sur sa terrasse avaient dû avoir lieu à la fin du printemps/été 2021 et durer environ deux semaines. Il se souvenait qu'il avait fallu aménager les sauts-de-loup, ce qui avait pris un peu plus de temps. Compte tenu des travaux chez Madame F______, les travaux avaient duré trois semaines à un mois. Sur l'annexe à la pièce 8 du chargé demandeur qui lui était présentée, il confirmait que, la photo en haut à droite avait été prise devant chez lui, il ne se rappelait pas du véhicule Opel qui figurait sur la photo en haut à gauche, en revanche la Citroën qui figurait sur la même photo pouvait correspondre à la camionnette évoquée appartenant au demandeur. La photo en bas à gauche pouvait correspondre au camion appartenant à Monsieur D______ avec lequel il avait transporté le matériel. Par ailleurs, il confirmait avoir rédigé et signé la lettre pour valoir du 21 janvier 2022– en annexe à la pièce 11 du chargé demandeur –, à la demande du demandeur et en concertation avec Madame F______. Il avait un peu copié le texte de cette dernière, car elle était avocate et lui chirurgien, loin du langage juridique. À ce moment-là, il savait que le demandeur avait été en arrêt de travail et qu'il y avait un litige autour de celui-ci. Il précisait encore que sur le chantier de sa terrasse, il y avait en tous les cas deux personnes, parfois trois, mais il n'avait pas suivi quotidiennement les travaux. Monsieur D______ était toujours là et c'était lui qui semblait avoir la connaissance du travail.

Monsieur D______ a déclaré qu'il était propriétaire d'une entreprise, créée en mai 2021 et active dans la maçonnerie. Il avait actuellement deux employés mais au début, il travaillait seul et, en cas de besoin, appelait des amis qui avaient également eux-mêmes des entreprises et venaient l'aider. Il connaissait le demandeur, déjà avant son arrivée en Suisse, il y a treize ans, lorsqu'il se trouvait au Kosovo. Son père et son oncle avaient travaillé au Kosovo avec le demandeur, lequel était leur ami très proche. Depuis qu'il était en Suisse, Monsieur D______ s'était également rapproché du demandeur, qui était devenu un ami. C'est lui qui lui avait présenté Madame F______ et Monsieur E______. Monsieur D______ avait travaillé pour ces derniers au chemin G______ pour agrandir leur terrasse. Les travaux n'avaient pas duré beaucoup mais il ne savait plus exactement combien de temps, ni quand ils avaient eu lieu. Le demandeur n'avait pas travaillé avec lui sur ce chantier. Il l'avait vu quelques fois venir discuter avec Madame F______ mais il ne l'avait jamais aidé à travailler sur le chantier. Il se rappelait avoir signé une attestation le 21 janvier 2021 et confirmait que c'était bien lui qui avait signé ce document. Il ne savait plus qui avait tapé cette attestation mais il était possible que ce soit son comptable. Le demandeur lui avait demandé de faire ce document en disant la vérité, soit qu'il n'avait pas travaillé pour lui, mais il ne savait pas pourquoi. Monsieur D______ avait relu l'attestation et compris son contenu. Il n'avait jamais engagé le demandeur pour travailler dans son entreprise et celui-ci ne l'accompagnait pas sur les chantiers ni n'avait jamais acheté du matériel pour lui, ni n'était venu avec lui acheter du matériel. En revanche, il lui était arrivé de demander conseil au demandeur pour savoir où trouver du matériel moins cher, car celui-ci avait l'expérience qu'il n'avait pas. Monsieur D______ était propriétaire d'une Renault S______, ainsi que d'une Mercedes, qui était au nom du demandeur. Il avait mis cette voiture à son nom car cela lui revenait moins cher pour le paiement de prime vu qu'il était en Suisse depuis plus longtemps que lui, en plus il bénéficiait d'un macaron bleu pour la zone près de son domicile car chez Monsieur D______, il y avait peu de places de parking. Il ne pouvait pas citer de tête le numéro de plaques de la Mercedes. Il avait également une BMW noire et une Golf grise, ainsi qu'une camionnette Iveco qu'il avait achetée récemment. Sur le chantier au chemin G______, il allait plutôt travailler avec la Mercedes et la Renault S______. Au début de son activité, il n'était plus très sûr mais pensait avoir alors la Mercedes, soit une camionnette ouverte, et la Renault S______, soit un fourgon. Il ne savait plus exactement depuis quand il était propriétaire de la Mercedes. Il savait que le demandeur avait eu plusieurs voitures, notamment une Citroën blanche. Sur l'annexe à la pièce 8 du chargé demandeur qui lui était présentée, il confirmait que le véhicule sur la photo en bas à gauche était sa Mercedes. Le véhicule qui se trouvait sur la photo en haut à gauche n'était pas le sien, il était peut-être au demandeur mais il ne savait pas.

Le même jour, les parties ont chacune produit un nouveau bordereau de pièces médicales.

l. Le 5 juin 2023, Monsieur C______ a été interrogé par la chambre de céans.

Il a déclaré être employé de la défenderesse en tant qu'inspecteur sinistre depuis 2012. Il avait déjà vu le demandeur qui était en maladie perte de gain pour la défenderesse en tant qu'employé de la société T______. Monsieur P______, qui était patron de cette société avait téléphoné au gestionnaire du dossier en lui disant qu'un fournisseur avait vu le demandeur faire des achats pour la société D______. Le demandeur travaillait depuis plus de 20 ans pour l'employeuse et faisait des achats depuis longtemps chez ce fournisseur, lequel avait remarqué que le demandeur portait un tee-shirt de la société T______ mais faisait des achats pour la société D______. Monsieur C______ avait ensuite lui-même contacté par téléphone le fournisseur qui lui avait répété la même chose et qui ne voulait pas que son nom soit cité par peur de représailles. Le demandeur se trouvait en incapacité de travail totale de sorte que Monsieur P______ n'avait pas trouvé normal qu'il fasse des achats et pensait qu'il travaillait à côté. Le fournisseur n'avait pas indiqué à Monsieur C______ ce que le demandeur avait acheté et ce dernier ne lui avait pas demandé précisément. Le fournisseur lui avait dit que les achats avaient été faits pour la société D______. Monsieur C______ supposait qu'il avait dû établir une facture au nom de la société D______. Le fournisseur lui avait dit qu'il était seul au moment de ces achats et que le fait qu'il achète du matériel pour une autre société l'avait étonné, raison pour laquelle il avait interpellé Monsieur P______. Monsieur C______ avait lui-même appelé Monsieur P______, lequel lui avait donné l'information que le demandeur travaillait depuis juin 2021 à J______, ainsi que deux adresses. Monsieur C______ est allé vérifier sur place fin juin 2021, selon son souvenir, il s'agissait du 27 et 29 dans une allée qui faisait une impasse. Il avait remarqué des véhicules de chantiers, soit deux fourgons et une camionnette Mercedes avec une benne de chantier derrière. Il avait vu quatre personnes, deux d'une cinquantaine d'années et deux plus jeunes. Il était rentré au bureau pour vérifier l'identité des véhicules et avait vu que deux de ceux-ci, le Citroën H______ et le camion Mercedes appartenaient au demandeur. A partir de là, Monsieur C______ estimait que toutes les informations données par Monsieur P______ étaient vérifiées. Il s'est rendu deux jours de suite sur place pour vérifier si les véhicules étaient présents. Le 1er juillet 2021, il y est retourné, étant précisé qu'avant cela, il était allé sur place deux fois : la première fois, il avait vu les véhicules de chantier qu'il était allé identifier et la deuxième fois, il y était retourné pour vérifier si les véhicules étaient encore là, ce qui était le cas. Le 1er juillet 2021, il avait constaté que les trois véhicules étaient également sur place, soit la Citroën, la Merdeces et une Renault, et avait pris des photographies. Il a précisé que la signature sur le rapport correspondait à la date à laquelle il s'était rendu sur place. Ce jour-là, il avait également constaté la présence des mêmes quatre personnes qu'il avait observé la première fois. Lors de sa deuxième visite, il n'avait vu que les véhicules. L'allée faisant un grand arc de cercle, la première fois qu'il était venu, il était passé à pied devant les numéros 27 et 29, avait noté les immatriculations des véhicules et était reparti. La deuxième fois, il était passé en voiture, avait juste constaté que les véhicules étaient là, sans voir personne, et était reparti. La troisième fois, soit le 1er juillet 2021, il s'était mis à l'arrière de son véhicule pour être discret, lequel était garé un peu en amont des numéros 27 et 29 et était resté toute la matinée. En fin de matinée, il avait appelé le demandeur et avait vu une personne d'une cinquantaine d'années sortir du numéro 27 ou 29. Il avait convoqué le demandeur à un entretien et celui-ci lui avait dit qu'il viendrait. Lorsqu'il avait raccroché, il avait vu que cette personne avait également raccroché. Ce jour, Monsieur C______ a confirmé qu'il s'agissait du demandeur. Lorsqu'il avait fait l'entretien avec lui, soit quatre jours plus tard, il avait également constaté que c'était bien lui. Dans la matinée du 1er juillet 2021, il avait vu le demandeur mettre quelque chose dans le véhicule Citroën H______ mais n'avait pas vu ce que c'était. Il supposait qu'il s'agissait d'outils. Il n'avait rien vu d'autre concernant le demandeur. Quand il était rentré au bureau, il avait adressé un SMS au demandeur pour lui indiquer où se trouvait l'agence. Le 5 juillet 2021, il avait eu l'entretien avec le demandeur. Il a confirmé qu'il était l'auteur du rapport d'enquête du 1er juillet 2021, auquel il avait joint les photos en annexe, ainsi que du procès-verbal d'entretien du 5 juillet 2021. La photo en bas à droite en annexe correspondait à l'arrière du véhicule Mercedes, soit un camion benne. Il a également confirmé qu'il n'y avait pas d'interprète lors de l'entretien du 5 juillet 2021, précisant que le demandeur était à même de comprendre l'entretien et ne lui avait jamais fait part d'une difficulté à comprendre les questions. Le 1er juillet 2021, il se souvenait s'être rendu sur place à 9h00 et être reparti vers 12h00-12h30. L'information sur les heures de surveillance précise n'était généralement pas indiquée dans les rapports d'enquête. Pour Monsieur C______, lorsque le demandeur avait répondu au téléphone, il était habillé en tenue de chantier, soit avec un jean qui de loin lui avait semblé tâché de résidus de chantier et, en haut, un tee-shirt dont il ne se rappelait plus la couleur. Il a présenté à la chambre de céans le SMS qu'il avait envoyé au demandeur pour le convoquer à l'entretien du 5 juillet 2021. Lors de cet entretien, il avait rencontré le demandeur et reconnu la personne qu'il avait vue le 1er juillet 2021 et qui était au téléphone et avait raccroché en même temps que lui. Il lui avait demandé dans un premier temps comment il allait, ce à quoi il avait répondu qu'il avait des problèmes aux genoux et qu'au niveau des mains il avait retrouvé 80% de ses capacités, précisant que s'il utilisait un marteau toute la journée, cela le chauffait mais qu'il devait retrouver une capacité de travail. Il lui avait également demandé comment se passaient ses journées, ce à quoi il avait répondu qu'il se levait tôt, ne faisait rien de ses journées et s'ennuyait et que parfois il accompagnait sa femme en course. Monsieur C______ lui avait alors exposé ce qu'il avait vu, soit ses deux véhicules garé devant les numéros 27 et 29 du chemin G______, et qu'il estimait qu'il travaillait. Le demandeur avait reconnu qu'il allait à cet endroit, précisant que s'il avait envie d'y aller c'était son problème, qu'il connaissait Madame F______ et ceux qui travaillaient sur le chantier, notamment Monsieur D______. Il lui avait expliqué qu'il prêtait habituellement son véhicule à son fils pour son travail mais que ce jour-là, le 1er juillet, c'était lui qui conduisait le H______. Le demandeur avait été d'accord de signer le procès-verbal. Monsieur C______ a confirmé avoir par la suite adressé plusieurs courriers au demandeur et à son conseil, avec lequel il y avait eu deux ou trois échanges. Dès l'ouverture de l'action, le dossier était parti au service juridique. Dès le moment où il avait vérifié ce que Monsieur P______ lui avait exposé, il avait repris le dossier à son compte dans son entier, y compris l'aspect médical. Dans le dossier médical du demandeur figurait un rapport de mars 2021 de son chirurgien de la main, selon lequel le demandeur avait retrouvé une pleine capacité de travail suite aux interventions du canal carpien des deux mains. C'était ce chirurgien qui établissait les incapacités de travail jusqu'au mois de mars, lesquelles étaient liées à la problématique des deux mains. À compter du mois de mars, un autre médecin avait établi des arrêts de travail. La défenderesse avait demandé un rapport médical à ce médecin, le Dr N______, qui avait tardé à le rendre, ce qu'il avait fait fin juin. Il faisait état de problèmes aux mains et aux genoux, avait joint une IRM du genou et indiquait que le demandeur avait retrouvé une pleine capacité de travail le 1er juillet 2021. Ainsi, même si Monsieur C______ n'avait pas fait son constat, la défenderesse aurait mis un terme aux prestations dès le 1er juillet 2021. Monsieur C______ n'avait personnellement pas vu le demandeur acheter du matériel et lors de ses passages à J______, il l'avait vu uniquement à une occasion transporter une fois des objets jusqu'à son véhicule utilitaire. Techniquement, il n'avait pas vu travailler le demandeur, précisant que le chantier se trouvait dans la maison. Lorsqu'il avait fait la recherche d'identité des véhicules, il avait constaté que deux véhicules étaient immatriculés au nom du demandeur, ce qui pour Monsieur C______, correspondait à la propriété du véhicule. Dans les courriers adressés au demandeur et à son conseil, il n'avait jamais évoqué le recouvrement d'une capacité de travail du demandeur car il instruisait le dossier sous l'angle de la prétention frauduleuse, soit que le demandeur retravaillait tout en percevant des indemnités indues. Selon lui, les faits étaient suffisamment clairs du point de vue de la prétention frauduleuse, de sorte que Monsieur C______ n'avait pas jugé utile de dire que le demandeur avait recouvré une capacité de travail. Il a constaté qu'à la pièce 1 du chargé demandeur qui lui était présentée, figuraient notamment des arrêts de travail prescrits par le Dr N______ pour la période du 1er juillet 2021 au 28 février 2022, ce qui allait en contradiction avec le rapport précité établi par ce médecin fin juin 2021. La défenderesse avait certainement reçu ces arrêts de travail mais il ne pouvait pas l'assurer. Les certificats médicaux arrivaient directement dans leur système sinistre. Comme Monsieur C______ avait ensuite transmis le dossier au service juridique, il n'avait pas fait le suivi du point de vue médical. Pour lui, il n'était pas utile de demander un nouveau rapport médical au Dr N______ car le dossier était instruit sous l'angle de la prétention frauduleuse. S'ils avaient instruit médicalement, ils auraient demandé des explications au Dr N______ par le biais de leur médecin interne. Ce dernier n'avait pas été sollicité. Monsieur C______ était très étonné des nouveaux certificats médicaux du Dr N______ après son rapport médical très détaillé. Une fois que le dossier avait été confié au service juridique, Monsieur C______ n'y avait plus accès. Il ne savait pas quand la défenderesse avait reçu ces certificats médicaux et il ne pouvait assurer les avoir vu, étant précisé qu'après les échanges avec le conseil du demandeur il avait transmis le dossier au service juridique et ne s'était plus intéressé à l'aspect médical car il était clair pour lui que le demandeur avait repris un travail. Il n'avait pas contesté formellement la force probante des certificats médicaux du Dr N______, rappelant qu'il ne pouvait pas certifier les avoir vu. Il a confirmé que la pièce 12 du chargé demandeur qui lui était présentée, soit un courrier du 28 février 2022 de la défenderesse, avait été rédigée par lui et qu'à cette date il était toujours en charge du dossier qu'il n'avait pas encore transmis au service juridique.

À la suite de l'audition de Monsieur C______, la défenderesse a réitéré sa demande d'audition de Monsieur P______, dont les déclarations, même s'il s'agissait d'un témoin indirect, étaient un indice de preuve. Par ailleurs, elle a requis la tenue de plaidoiries finales orales.

m. Par ordonnance du 6 juin 2023, la chambre de céans a renoncé à l'audition de Monsieur P______ et déclaré l'instruction close.

n. Le 19 juin 2023, les parties ont plaidé oralement et persisté dans leurs conclusions respectives. La cause a ensuite été gardée à juger.

 

 

 

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la LAMal, relevant de la loi fédérale sur le contrat d'assurance, du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1).

Selon la police d’assurance, le contrat est régi par la LCA.

La compétence de la chambre de céans à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2  

1.2.1 La LCA a fait l’objet d’une révision entrée en vigueur le 1er janvier 2022 (modification du 19 juin 2020 ; RO 2020 4969 ; RO 2021 357).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle qui était en vigueur lors de réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

Selon la disposition transitoire relative à cette modification, seules les prescriptions en matière de forme (let. a) et le droit de résiliation au sens des art. 35a et 35b (let. b) s’appliquent aux contrats qui ont été conclus avant l’entrée en vigueur de cette modification. S’agissant des autres dispositions de la LCA, elles s’appliquent uniquement aux nouveaux contrats (Message concernant la révision de la loi fédérale sur le contrat d’assurance, FF 2017 4812).

1.2.2 En l'occurrence, le contrat d'assurance entre l'employeuse du demandeur et la défenderesse a été conclu avant le 1er janvier 2022 et l’objet du litige ne porte ni sur des prescriptions en matière de forme, ni sur le droit de résiliation au sens des art. 35a et 35b LCA, de sorte que les dispositions de la LCA applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

1.3 L’art. 46a LCA prescrit que le for se définit selon la loi du 24 mars 2000 sur les fors (LFors), qui a été abrogée au 1er janvier 2011 par l’entrée en vigueur du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272), auquel il convient de se référer.

Selon l’art. 17 CPC, sauf disposition contraire de la loi, les parties peuvent convenir d’un for pour le règlement d’un différend présent ou à venir résultant d’un rapport de droit déterminé. Sauf disposition conventionnelle contraire, l’action ne peut être intentée que devant le for élu (al. 1). La convention doit être passée en la forme écrite ou par tout autre moyen permettant d’en établir la preuve par un texte (al. 2).

En l’occurrence, le chiffre 27 des CGA prévoit que pour tout litige découlant du contrat en cause, le preneur d'assurance, l'assuré ou l'ayant droit aux prestations peut, notamment, choisir comme for son domicile ou son siège social, en Suisse ou au Liechtenstein, à l'exclusion de tout pays étranger.

Le demandeur, qui est l'ayant droit aux prestations, a son domicile à Genève, de sorte que la chambre de céans est compétente à raison du lieu pour connaître de la présente demande.

1.4 La loi fédérale sur la surveillance des entreprises d’assurance du 17 décembre 2004 (LSA - RS 961.01) ne contient pas de règles spécifiques concernant les délais relatifs aux contestations de droit privé qui s’élèvent entre les entreprises d’assurance et les assurés.

1.5 Les litiges relatifs aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l'art. 197 CPC lorsque les cantons ont prévu une instance cantonale unique selon l'art. 7 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6; ATAS/577/2011 du 31 mai 2011), étant précisé que le législateur genevois a fait usage de cette possibilité (art. 134 al. 1 let. c LOJ).

1.6    La procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la loi fédérale sur l’assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10 ; art. 243 al. 2 let. f CPC) et la chambre de céans établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC).

1.7 Pour le surplus, la demande en paiement du 22 juillet 2022 respecte les conditions de forme légales (art. 130 et 244 CPC) et est donc recevable.

2.              

2.1 Le litige portait initialement sur le paiement de CHF 41'118.64 avec intérêt à 5% l'an dès le 1er novembre 2021, correspondant aux indemnités journalières encore dues selon le demandeur. Dans son écriture du 12 décembre 2022, celui-ci a amplifié ses conclusions et requis à ce titre le versement de CHF 56'497.35 avec intérêt à 5% l'an dès le 15 septembre 2021, correspondant toujours aux indemnités journalières encore dues selon le demandeur mais dont il a adapté le montant suite à la production des décomptes d'indemnité journalière par la défenderesse.

2.2 S’agissant de la recevabilité de ces conclusions amplifiées, il convient de relever que si, conformément à l’art. 243 al. 2 let. f CPC, les litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la LAMal sont soumis à la procédure simplifiée, selon la doctrine, les art. 227 et 230 CPC – relatifs à la procédure ordinaire – s’appliquent par analogie à la modification des conclusions en procédure simplifiée (Denis TAPPY, in Bohnet et al. [éd.], Code de procédure civile commenté, 2011, n. 20 ad art. 246 CPC; ATAS/550/2015 du 14 juillet 2015 consid. 8). Or, selon l’art. 227 al. 1 CPC, la demande peut être modifiée si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et si l’une des conditions suivantes est remplie : la prétention nouvelle ou modifiée présente un lien de connexité avec la dernière prétention (let. a), la partie adverse consent à la modification de la demande (let. b). Cette disposition, dont les conditions sont alternatives, détermine à quelles conditions un changement de conclusions est admissible (Philippe Schweizer, in Bohnet et al. [éd.], Code de procédure civile commenté, 2011, n. 14, 17 et 18 ad art. 227 CPC). Il y a connexité matérielle lorsque les deux actions ont le même fondement matériel ou juridique, notamment lorsqu’elles reposent sur un même contrat ou un même état de fait (ATF 129 III 230 consid. 3.1).

2.3 En l’espèce, le versement des indemnités journalières que réclame le demandeur dans son écriture du 12 décembre 2022 à hauteur de CHF 56'497.35, contre CHF 41'118.64 dans sa demande en paiement du 22 juillet 2022, relève de la même procédure et est en lien de connexité matérielle au sens de la définition
ci-dessus, puisqu’il résulte d’un différend reposant sur le même état de fait et sur le même rapport juridique.

2.4 Partant, les conclusions amplifiées du demandeur sont recevables.

3.              

3.1 Selon l’art. 14 al. 1 CPC, une demande reconventionnelle peut être formée au for de l’action principale lorsqu’elle est dans une relation de connexité avec la demande principale.

Les conditions de recevabilité de la demande reconventionnelle sont celles de la demande (François BOHNET, in Bohnet et al. [éd.], Code de procédure civile commenté, 2011, n. 86 ad art. 59 CPC).

3.2 En l’occurrence, la recevabilité de la demande reconventionnelle tendant à la restitution de CHF 61'678.- avec intérêt de 5 % l'an dès le 20 décembre 2021, doit être admise, puisqu'elle porte, comme la demande principale, sur les indemnités journalières versées pour l'incapacité de travail totale ayant débuté le 8 juillet 2020 en raisons des troubles aux mains du demandeur (voir en ce sens ATAS/800/2017 du 19 septembre 2017 consid. 7).

Par conséquent, la demande reconventionnelle sera déclarée recevable.

4.              

4.1 À teneur de l'art. 243 al. 2 let. f CPC, la procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), indépendamment de la valeur litigieuse.

Il en résulte que le tribunal établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC). Il s'agit donc d'un cas où une disposition spéciale instaure la maxime inquisitoire, en lieu et place de la maxime des débats (ATF 138 III 625 consid.2.1). Ce principe n'est pas une maxime officielle absolue, mais une maxime inquisitoire sociale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_541/2010 du 16 juillet 2010 consid. 1). Le juge ne doit pas instruire d'office le litige lorsqu'une partie renonce à expliquer sa position. En revanche, il doit interroger les parties et les informer de leur devoir de collaboration et de production des pièces; il est tenu de s'assurer que les allégations et offres de preuves sont complètes uniquement lorsqu'il a des motifs objectifs d'éprouver des doutes sur ce point. L'initiative du juge ne va pas au-delà de l'invitation faite aux parties de mentionner leurs moyens de preuve et de les présenter. La maxime inquisitoire sociale ne permet pas d'étendre à bien plaire l'administration des preuves et de recueillir toutes les preuves possibles (ATF 125 III 231 consid. 4a).

4.2 La maxime inquisitoire sociale ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4C.185/2003 du 14 octobre 2003 consid. 2.1).

Pour toutes les prétentions fondées sur le droit civil fédéral, l'art. 8 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 (CC ; RS 210), en l'absence de règles contraires, répartit le fardeau de la preuve et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 133 III 323 consid. 4.1 non publié ; ATF 130 III 321 consid. 3.1 ; ATF 129 III 18 consid. 2.6 ; ATF 127 III 519 consid. 2a). Cette disposition ne prescrit cependant pas quelles sont les mesures probatoires qui doivent être ordonnées (cf. ATF 122 III 219 consid. 3c ; ATF 119 III 60 consid. 2c). Elle n'empêche pas le juge de refuser une mesure probatoire par une appréciation anticipée des preuves (ATF 121 V 150 consid. 5a). L'art. 8 CC ne dicte pas comment le juge peut forger sa conviction (ATF 122 III 219 consid. 3c ; ATF 119 III 60 consid. 2c ; ATF 118 II 142 consid. 3a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, il ne s'applique que si le juge, à l'issue de l'appréciation des preuves, ne parvient pas à se forger une conviction dans un sens positif ou négatif (ATF 132 III 626 consid. 3.4 et ATF 128 III 271 consid. 2b/aa). Ainsi, lorsque l'appréciation des preuves le convainc de la réalité ou de l'inexistence d'un fait, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus (ATF 128 III 271 consid. 2b/aa).

En vertu de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. En conséquence, la partie qui fait valoir un droit doit prouver les faits fondant ce dernier, tandis que le fardeau de la preuve relatif aux faits supprimant le droit, respectivement l’empêchant, incombe à la partie qui affirme la perte du droit ou qui conteste son existence ou son étendue. Cette règle de base peut être remplacée par des dispositions légales de fardeau de la preuve divergentes et doit être concrétisée dans des cas particuliers (ATF 128 III 271 consid. 2a/aa avec références). Ces principes sont également applicables dans le domaine du contrat d'assurance (ATF 130 III 321 consid. 3.1).

La partie qui n'a pas la charge de la preuve a le droit d'apporter une contre-preuve. Elle cherchera ainsi à démontrer des circonstances propres à faire naître chez le juge des doutes sérieux sur l'exactitude des allégations formant l'objet de la preuve principale. Pour que la contre-preuve aboutisse, il suffit que la preuve principale soit ébranlée, de sorte que les allégations principales n'apparaissent plus comme les plus vraisemblables (ATF 130 III 321 consid. 3.4). Le juge doit procéder à une appréciation d'ensemble des éléments qui lui sont apportés et dire s'il retient qu'une vraisemblance prépondérante a été établie (ATF 130 III 321 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_61/2011 du 26 avril 2011 consid. 2.1.1).

5.             Le litige porte, d’une part, sur le droit du demandeur à la poursuite du versement des indemnités journalières au-delà du 31 mai 2021 et, d’autre part, sur le droit de la défenderesse à la restitution des indemnités journalières versées du 7 août 2020 au 31 mai 2021.

6.             En l'occurrence, il convient d'examiner en premier lieu la demande reconventionnelle, puisque si celle-ci est fondée, il n'y a pas lieu de se pencher sur la demande principale.

Ainsi, il sied de déterminer d'abord si c’est à bon droit que la demanderesse reconventionnelle invoque une prétention frauduleuse et réclame la restitution des indemnités journalières versées entre le 19 janvier 2018 et le 30 juin 2019.

6.1 L’art. 40 LCA définit la prétention frauduleuse : si l’ayant droit ou son représentant, dans le but d’induire l’assureur en erreur, dissimule ou déclare inexactement des faits qui auraient exclu ou restreint l’obligation de l’assureur, ou si, dans le but d’induire l’assureur en erreur, il ne fait pas ou fait tardivement les communications que l’art. 39 LCA lui impose, l’assureur n’est pas lié par le contrat envers l’ayant droit.

D’un point de vue objectif, la dissimulation ou la déclaration inexacte doit porter sur des faits qui sont propres à remettre en cause l’obligation même de l’assureur ou à influer sur son étendue. Il faut, en d’autres termes, constater que, sur la base d’une communication correcte des faits, l’assureur aurait versé une prestation moins importante, voire aucune. Ainsi en est-il lorsque l’ayant droit déclare un dommage plus étendu qu’en réalité, par exemple lorsque l’atteinte à la santé n’est pas aussi grave qu’annoncée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_534/2018 du 17 janvier 2019 consid. 3.1).

En plus, l’ayant droit doit, sur le plan subjectif, avoir l’intention de tromper. Il faut qu’il ait agi avec la conscience et la volonté d’induire l’assureur en erreur, afin d’obtenir une indemnisation plus élevée que celle à laquelle il a droit; peu importe à cet égard qu’il soit parvenu à ses fins (arrêt du Tribunal fédéral 4A_536/2020 du 19 janvier 2021 consid. 5.1 et les références).

6.2 L'art. 40 LCA formule un moyen libératoire pour l'assureur, de sorte qu'il incombe à ce dernier de prouver les faits permettant l'application de cette disposition, au moins au degré de la vraisemblance prépondérante (arrêt du Tribunal fédéral 4A_534/2018 du 17 janvier 2019 consid. 3.1 et les références). Cette disposition est notamment conçue pour l'hypothèse où l'ayant droit fait des déclarations mensongères relevant de l'escroquerie à l'assurance, en particulier pour le cas où il déclare un dommage plus étendu que celui qui est survenu en réalité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_671/2010 du 25 mars 2011 consid. 2.6 et les références).

Le Tribunal fédéral a rappelé dans un arrêt publié récent (ATF 148 III 134 du 11 janvier 2022 consid. 3.4 et les références), à l'égard de l'art. 40 LCA, que si le degré de la preuve applicable à l'intention d'induire en erreur (condition subjective) est celui de la vraisemblance prépondérante, il appartient en principe à l'assurance d'établir que l'assuré a présenté les faits de manière contraire à la vérité (condition objective) au degré de la preuve ordinaire, soit celui de la preuve stricte. Notre Haute Cour a estimé que ce n'est qu'exceptionnellement qu'on peut admettre une diminution du degré de la preuve de la condition objective de l'art. 40 LCA, au degré de la vraisemblance prépondérante, lorsque, par exemple, l'assurance doit prouver la simulation d'un vol, qui ne peut en règle générale pas être prouvée de manière stricte.

Lorsque les conditions de l’art. 40 LCA sont réunies, l’assureur peut non seulement refuser ses prestations, mais aussi se départir du contrat et répéter en principe celles qu’il a déjà versées. La résolution du contrat, laquelle produit des effets ex tunc, n’étend ses effets que jusqu’au jour de la fraude et non au jour de la conclusion du contrat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_534/2018 du 17 janvier 2019 consid. 3.3 et les références).

7.              

7.1 En l'espèce, la défenderesse fait valoir que le demandeur a travaillé durant la période où celui-ci déclare avoir été en incapacité de travail totale, en particulier durant l'été 2021. Elle se fonde principalement sur le rapport d'enquête établi par Monsieur C______ et les déclarations de ce dernier lors de son audition.

7.2 Le demandeur conteste le fait qu'il aurait travaillé, en se fondant essentiellement sur les déclarations de Madame F______ et Messieurs E______ et D______ et fait valoir qu'il était bel et bien en incapacité de travail à 100% du 8 juillet 2020 au 28 février 2022.

8.             En l'occurrence, les éléments de la cause ne permettent pas de retenir, que ce soit au degré de la preuve stricte, comme d'ailleurs de celui de la vraisemblance prépondérante, que le demandeur aurait travaillé durant la période où il a déclaré être en incapacité de travail.

8.1 Madame F______ a confirmé les déclarations du demandeur, à savoir qu'ils se connaissent depuis longtemps, car la femme du demandeur effectue des travaux de couture pour elle et que celui-ci lui amène les habits qu'elle donne à son épouse de sorte qu'ils se voient régulièrement. Elle a également confirmé que pour refaire sa terrasse, elle a mandaté Monsieur D______, lequel lui a été présenté par le demandeur qui le connaissait. Elle a déclaré que si le demandeur est régulièrement passé chez elle durant la période de chantier de sa terrasse, il n'a pas travaillé sur ledit chantier. Elle a précisé que durant cette période, elle travaillait en home office et que le fait que le demandeur passe prendre le café l'agaçait, car cela l'interrompait elle, mais également Monsieur D______, dans leur travail respectif. Elle a confirmé que le demandeur n'a jamais effectué de travaux sur sa terrasse, que ce soit avec Monsieur D______ ou seul. Elle a indiqué se souvenir que le demandeur a été en incapacité de travail durant plusieurs mois, raison pour laquelle il venait boire le café chez elle. Madame F______ a relevé que durant cette période, le demandeur semblait souffrir, précisant d'ailleurs qu'elle l'a vu boiter. Selon elle, durant cette période, il n'a pas travaillé, ni chez elle, ni chez son voisin, Monsieur E______, lequel a également engagé Monsieur D______ pour refaire sa terrasse. Elle a précisé que Monsieur D______ a été aidé par un autre ouvrier mais que c'est lui qui a essentiellement travaillé, car il s'agissait uniquement de poser des dalles.

Monsieur E______ a également confirmé les déclarations du demandeur et celles de Madame F______, en particulier le fait que le demandeur n'a jamais travaillé sur les chantiers de leur terrasse respective. Il a précisé que durant les travaux, le demandeur passait boire des cafés et fumer des cigarettes en regardant les autres travailler.

Monsieur D______ a lui aussi confirmé les déclarations du demandeur, ainsi que celles de Madame F______ et Monsieur E______. Il a expliqué ses relations avec le demandeur et déclaré que celui-ci n'a pas travaillé avec lui sur les chantiers des deux terrasses en question, ne l'accompagnait pas sur les chantiers et n'a pas acheté de matériel pour lui, ni ne l'a accompagné pour en acheter. Il a précisé qu'il lui était arrivé en revanche de demander conseil au demandeur pour savoir où acheter du matériel moins cher. Il a confirmé n'avoir jamais engagé le demandeur pour travailler dans son entreprise et que le véhicule Mercedes est bien le sien mais qu'il est immatriculé au nom du demandeur pour une question de coût de primes d'assurance et de parking.

Monsieur C______ a, quant à lui, confirmé le contenu de son rapport d'enquête du 1er juillet 2021. Il a rapporté que le fournisseur de matériel lui a confirmé avoir reconnu le demandeur, lequel faisait des achats pour la société D______, ce qui l'avait étonné, raison pour laquelle il avait interpellé Monsieur P______. Il a précisé que c'est ce dernier qui lui a indiqué que le demandeur travaillait depuis juin 2021 sur un chantier et lui a donné les deux adresses à J______. Monsieur C______ a déclaré s'être rendu sur place à trois reprises : une première fois, il est passé à pied, a remarqué la présence de deux fourgons et d'une camionnette Mercedes avec une benne de chantier à l'arrière et a vu deux personnes d'une cinquantaine d'année et deux plus jeunes, il est ensuite parti pour vérifier l'immatriculation des véhicules et a relevé que le Citroën H______ et la camionnette Mercedes étaient immatriculés au nom du demandeur ; la deuxième fois, il a simplement constaté la présence des mêmes véhicules ; la troisième fois, en date du 1er juillet 2021, il est retourné sur place, a constaté la présence des trois mêmes véhicules, les a photographié, s'est mis à l'arrière de son propre véhicule garé en amont, est resté la matinée et, alors qu'il se trouvait sur place, a téléphoné au demandeur pour le convoquer à un entretien le 5 juillet 2021, à ce moment-là, il a vu une personne d'une cinquantaine d'année, au téléphone, sortir de l'une des maisons et lorsqu'il a raccroché, il a vu que cette personne avait également raccroché. Monsieur C______ a confirmé que cette personne était bel et bien le demandeur, qu'il avait revu et pu reconnaitre lors de l'entretien du 5 juillet 2021. Il a précisé que lors de son enquête, il n'avait rien vu d'autre, concernant le demandeur, que celui-ci mettre une seule fois quelque chose dans son véhicule Citroën H______, sans voir de quoi il s'agissait. Monsieur C______ a reconnu ne pas avoir vu le demandeur travailler, en précisant que le chantier se trouvait dans la maison, et a expliqué que, selon lui, le fait que deux véhicules soient immatriculés au nom du demandeur, signifiait que celui-ci en était le propriétaire. Il a également relevé que le demandeur était habillé avec un jean – qui, de loin, semblait tâché – et d'un t-shirt, ce qui correspondait, selon lui, à une tenue de chantier. Il a expliqué qu'après avoir vérifié les informations données par Monsieur P______, il avait repris lui-même la gestion entière du dossier du demandeur, y compris l'aspect médical, et que le dossier avait été transmis au service juridique de la défenderesse dès l'ouverture de l'action judiciaire. Il a précisé que lors des échanges de courriers avec le conseil du demandeur, il n'avait jamais évoqué le recouvrement d'une capacité de travail par le demandeur, car il estimait que la situation était suffisamment claire du point de vue de la prétention frauduleuse, de sorte qu'il instruisait le dossier sous cet angle et ne jugeait pas utile de dire que le demandeur avait recouvré une capacité de travail. Il a relevé que les arrêts de travail successifs prescrits par le Dr N______ pour la période courant du 1er juillet 2021 au 28 février 2022 – dont il ne pouvait pas certifier avoir eu connaissance auparavant –, contredisaient le rapport du même médecin, établi en juin 2021 dont il ressortait que le demandeur avait retrouvé une pleine capacité de travail dès le 1er juillet 2021.

Il ressort ainsi des déclarations des témoins qu'aucun d'eux n'a effectivement vu le demandeur travailler. Au contraire, Madame F______ et Monsieur E______, qui ont mandaté les travaux en cause et assisté aux chantiers, ainsi que Monsieur D______, qui a été mandaté par ceux-ci et a réalisé lesdits travaux, ont tous rapporté que le demandeur n'avait pas travaillé. Madame F______ a même précisé qu'elle l'avait vu boiter et que cela se voyait qu'il souffrait.

Il appert plutôt que Monsieur C______ a déduit à tort de la présence de deux véhicules, qui se trouvaient devant les maisons de Madame F______ et Monsieur E______, immatriculés au nom du demandeur, que celui-ci travaillait sur les chantiers en cause à J______. Cependant, il ne connaissait pas le contexte, à savoir que l'un des véhicules, la camionnette Mercedes, appartenait en réalité à Monsieur D______. En outre, il ne savait pas que le demandeur connaissait personnellement Madame F______, de sorte qu'il n'a pas envisagé que la présence du demandeur chez celle-ci puisse relever d'un autre motif que celui d'un contrat de travail. Or, l'ensemble des éléments recueillis dans le cadre de la procédure permettent de retenir que le demandeur n'a pas travaillé sur ces chantiers à J______.

8.2 La défenderesse a encore requis l'audition de Monsieur P______, l'ancien patron du demandeur auprès de l'employeuse, mais il ne ressort pas des déclarations des parties, ni de l'instruction de la cause, que celui-ci aurait eu une perception directe des faits pertinents, soit d'une éventuelle activité de maçon exercée par le demandeur durant la période en cause.

Par ailleurs, il s'avère que Monsieur P______ a eu connaissance du fait que le demandeur aurait acheté du matériel pour la société D______ par le même fournisseur que celui avec lequel s'est ensuite entretenu Monsieur C______, qui, lui, a largement été entendu par la chambre de céans à ce sujet. Aussi, l'audition de Monsieur P______ n'apparait pas nécessaire pour trancher la question de la prétention frauduleuse et n'aurait, quoi qu'il en soit, pas suffi à apporter les preuves requises, puisque le fait que le demandeur ait, possiblement, acheté à une occasion du matériel pour l'entreprise D______ ne signifie pas encore qu'il aurait recouvert une capacité de travail effectivement travaillée. À cet égard, il sied de rappeler que le demandeur était maçon, qu'une telle activité exige une très bonne condition physique et que des atteintes au genou, du type de celles mises en évidence par l'IRM du 18 juin 2021 et attestées ensuite par le Dr N______ dans les rapports du 28 juin 2021, 12 janvier, 14 novembre 2022 et 18 avril 2023, sont de nature à entrainer une incapacité de travail dans l'activité habituelle de maçon, sans pour autant avoir de conséquences sur une activité telle que faire des achats. En conséquence, même si par le biais de l'audition de Monsieur P______, il avait été établi que le demandeur avait acheté à une occasion du matériel pour l'entreprise D______, cela ne permettrait pas de prouver un engagement pour cette entreprise.

8.3 Enfin, les pièces versées à la procédure, notamment le dossier de chômage, permettent de retenir que le demandeur a repris le travail pour l'employeuse durant les mois de mars et avril 2022, puis s'est inscrit au chômage. En outre, le demandeur a produit divers documents médicaux, en particulier les rapports et arrêts de travail successifs prescrits par le Dr N______, pour la période courant du 15 mars 2021 au 28 février 2022, ainsi que le rapport d'IRM du genou du 18 juin 2021.

8.4 La défenderesse estime que les éléments recueillis dans le cadre de l'instruction doivent suffire à retenir la prétention frauduleuse et s'appuie sur une jurisprudence récente du Tribunal fédéral, l'arrêt 4A_273/2021 du 17 avril 2023. Dans cette affaire grisonne, il ressortait d'une enquête réalisée par l'assureur que l'assuré avait été observé accomplissant certaines activités considérées comme non étrangères à son activité professionnelle. Le Tribunal fédéral a estimé que, bien qu'il n'y avait pas eu de vérification concrète d'une reprise du travail, il n'était pas arbitraire de la part de la juridiction grisonne de déduire de ces observations, lesquelles n'avaient pas été contestées, que l'assuré disposait d'une capacité de travail résiduelle, bien que partielle, dans son activité habituelle. Or, d'une part, notre Haute Cour examine l'appréciation de la juridiction cantonale sous l'angle de l'arbitraire et, d'autre part, l'activité de l'assuré était celle d'un entrepreneur dont les tâches sont bien plus variées et comportent du travail administratif, ce qui n'est pas le cas de l'activité de maçon, qui, rappelons-le, est une activité éminemment et exclusivement physique. Dès lors, c'est à tort que la défenderesse se rapporte à cette autre affaire pour motiver sa position.

8.5 Il convient ainsi de retenir que la défenderesse n'est pas parvenue à apporter la preuve stricte, et d'ailleurs pas même au degré de la vraisemblance prépondérante, que le demandeur aurait travaillé, ni recouvert une capacité de travail résiduelle dans son activité habituelle, et ainsi dissimulé ou déclaré inexactement des faits qui auraient exclu ou restreint son obligation contractuelle. Au contraire, il apparait au degré de la vraisemblance prépondérante qu'il n'a pas travaillé sur les chantiers considérés à J______.

Dans la mesure où la condition objective de l'art. 40 LCA n'est pas réalisée et que les conditions de la prétention frauduleuse sont cumulatives, il n'y a pas lieu d'examiner la question de l'intention d’induire l’assureur en erreur.

La demande reconventionnelle doit dès lors être rejetée.

9.             Il convient donc d'examiner la demande principale.

9.1 En matière d'assurance collective contre les accidents ou la maladie, l'art. 87 LCA confère un droit propre au bénéficiaire contre l'assureur, dès qu'un accident ou une maladie est survenu. Cette disposition institue une créance indépendante au profit de l'ayant droit, créance qui naît au moment de la survenance du cas d'assurance.

9.2 En l'occurrence, l'employeuse en tant que preneuse d'assurance et la défenderesse en qualité d'assurance ont conclu un contrat collectif d'indemnité journalière selon la LCA. Par cette convention, le demandeur était couvert contre le risque de perte de gain due à la maladie. Il s'agit d'une assurance au profit de tiers (cf. art. 16 al. 1 LCA), qui confère un droit propre à l'assuré, qu'il peut faire valoir contre l'assureur en vertu de l'art. 87 LCA, de nature impérative (cf. art. 98 LCA ; ATF 141 III 112 consid. 4.3).

Par conséquent, le demandeur possède la légitimation active pour agir contre la défenderesse.

10.          

10.1 La preuve de la survenance d'un sinistre et de l'étendue de la prétention incombe à son prétendu ayant droit (ATF 130 III 321 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_193/2008 du 8 juillet 2008 consid. 2.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4D_73/2007 du 12 mars 2008 consid. 2.2 ; ATAS/325/2019 du 15 avril 2019 consid. 9).

En ce qui concerne la survenance d'un sinistre assuré, le degré de preuve nécessaire est en principe abaissé à la vraisemblance prépondérante (en lieu et place de la règle générale de la preuve stricte ; ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3).

Cependant, par un arrêt du 31 août 2021, le Tribunal a modifié la jurisprudence précitée, en ce sens que l’existence d’un cas d’assurance constitué par une incapacité de travail est désormais soumise au degré de la preuve stricte (ATF 148 III 105, consid. 3.3.1). Le degré de preuve ordinaire s'applique à l'incapacité de travail, laquelle peut être prouvée par un certificat correspondant. Une certitude absolue n'est pas nécessaire, mais le juge ne doit plus avoir de doutes sérieux ; les éventuels doutes qui subsistent doivent apparaître légers (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5A_53/2022 du 14 février 2023). Cette précision de jurisprudence concerne le droit matériel et est donc directement applicable (ATF 146 I 105 consid. 5.2.1 ; ATF 140 IV 154 consid. 5.2.1), y compris au présent litige.

11.          

11.1  

11.1.1 En matière d'assurances complémentaires, les parties sont liées par l'accord qu'elles ont conclu dans les limites de la loi, les caisses-maladie pouvant en principe édicter librement les dispositions statutaires ou réglementaires dans les branches d'assurances complémentaires qui relèvent de la liberté contractuelle des parties hormis quelques dispositions impératives en matière d’indemnités journalières (ATF 124 V 201 consid. 3d).

Le droit aux prestations d'assurances se détermine sur la base des dispositions contractuelles liant l'assuré et l'assureur, en particulier des conditions générales ou spéciales d'assurance (arrêt du Tribunal fédéral 5C.253/2000 du 6 mars 2001 consid. 4a).

11.2  

11.2.1 En matière d'assurance privée, les parties peuvent convenir d'une assurance de personnes (dite aussi assurance de sommes) ou d'une assurance contre les dommages. La première se distingue de la seconde par sa nature non indemnitaire : il s'agit d'une promesse de capital indépendante du montant effectif du préjudice subi par le preneur ou l'ayant droit. En bref, on est en présence d'une assurance de personnes lorsque les parties n'ont subordonné la prestation de l'assureur - dont elles ont fixé le montant lors de la conclusion du contrat - qu'à la survenance de l'événement assuré, sans égard à ses conséquences pécuniaires ; on est en revanche en présence d'une assurance contre les dommages lorsque la perte patrimoniale effective constitue une condition autonome du droit aux prestations. Lorsque le contrat d'assurance prévoit le versement à l'assuré d'une indemnité journalière forfaitaire en fonction du seul degré de l'incapacité de travail de l'assuré, il s'agit d'une assurance de sommes. Lorsque le droit à l'indemnité est subordonné à la survenance d'une perte effective sur le plan économique et que le montant de l'indemnité dépend des conséquences économiques réelles du sinistre pour l'assuré, il s'agit d'une assurance contre les dommages (arrêt du Tribunal fédéral 4A_332/2010 et 4D_126/2010 du 22 février 2011 consid. 5.2.3 et les références citées). Dans les assurances de sommes, la surindemnisation de l'ayant droit est possible et les prestations versées par un assureur social ne peuvent pas être imputées sur les allocations journalières dues par l'assureur privé, à moins que les conditions générales d'assurance ne prévoient exceptionnellement une telle imputation (ATF 133 III 527 consid. 3.2.5).

11.2.2 Lorsque l'assurance perte de gain pour maladie a été conclue sous la forme d'une assurance de dommage, la survenance du sinistre nécessite un dommage, soit en d'autres termes, une perte de gain (ATF 141 III 241 consid. 31.). Ainsi, conformément à l'art. 8 CC, le demandeur doit établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu'il éprouve une perte de gain.

À cet égard, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à la preuve de la perte de gain en matière de droit aux indemnités journalières LCA en cas de licenciement de la personne assurée (cf. ATF 147 III 73 ; 141 III 241), il faut distinguer notamment les deux situations suivantes :

-     Si l'incapacité de travail pour cause de maladie est antérieure à la décision de licenciement, il faut partir de la présomption de fait que sans la maladie qui l'affecte, la personne n'aurait pas été licenciée et aurait donc continué à percevoir le même salaire pendant toute la durée de l'incapacité de travail. Dans ce cas, la perte de gain correspond à la perte de salaire, même après la fin du délai de congé.

-     Si en revanche l'incapacité de travail survient durant le délai de congé, la personne assurée doit prouver l'existence d'une perte de gain et l'ampleur de celle-ci pour prétendre aux indemnités journalières au-delà de la fin du contrat de travail. Dans cette hypothèse et lorsque l'assuré aurait eu droit aux indemnités de chômage à la fin de son contrat s'il n'avait pas été en incapacité de travail, la perte de gain et, en conséquence, l'indemnité journalière doit être calculée sur la base de la perte d'indemnités de l'assurance-chômage.

11.3 En l'occurrence, la police d’assurance perte de gain conclue en 2018 par l'employeuse auprès de la défenderesse prévoit le versement d’une indemnité journalière pour le personnel en cas de maladie, à hauteur de 90% du salaire assuré durant 730 jours, après un délai d’attente par cas de 30 jours.

Selon l’édition 2015 des CGA, à laquelle renvoie la police d’assurance, la défenderesse paie le pourcentage convenu du gain assuré pendant la durée d'incapacité de travail prouvée et attestée médicalement, mais au plus tôt après l'expiration du délai d'attente indiqué dans la police (paragraphe 8.1 let. a CGA).

Est réputée incapacité de travail toute perte, totale ou partielle, de l’aptitude de l’assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique. En cas d'incapacité de travail de longue durée, l'activité qui peut être exigée de lui peut aussi relever d'une autre profession ou d'un autre domaine d'activité (paragraphe 6.1 CGA).

Est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur un marché du travail équilibré dans son domaine d'activité, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigible. Seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain. De plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (paragraphe 6.2 CGA).

Par maladie, au sens de l'assurance, il faut entendre toute atteinte à la santé physique, mentale ou psychique qui n'est pas due à un accident et qui exige un examen ou un traitement médical ou provoque une incapacité de travail (paragraphe 2 let. a CGA).

La couverture d'assurance se termine notamment à la fin du contrat de travail (paragraphe 16.2, 2e hypothèse, CGA).

S'il existe une incapacité de travail /gain justifiant le versement de prestations à la fin de la couverture d'assurance, la défenderesse continue de servir ses prestations contractuelles au-delà de cette date (paragraphe 8.6 let. g CGA).

12.         En l'espèce, la police d’assurance perte de gain conclue en 2018 par l'employeuse auprès de la défenderesse mentionne expressément qu'il s'agit d'une assurance dommages, ce que confirme défenderesse. Le demandeur ne contestant au demeurant pas sa nature, il convient d'admettre que l'assurance en cause est une assurance de dommage.

Ainsi, pour prétendre au versement d'indemnités journalières prévues par ledit contrat, le demandeur doit non seulement prouver qu'il se trouvait en incapacité de travail due à une atteinte à sa santé mais également qu'il a subi un dommage en raison de cette incapacité.

13.         S'agissant d'abord de l'incapacité de travail, il convient de relever ce qui suit.

13.1 Le demandeur fait valoir qu'il était totalement incapable de travailler au-delà du 31 mai 2021 et jusqu'au 28 février 2022. Il se fonde sur les certificats et rapports médicaux établis par ses médecins traitants qu'il a produit à l'appui de sa demande.

La défenderesse estime quant à elle que le demandeur a travaillé durant l'été 2021, de sorte qu'une incapacité de travail au-delà du 31 mai 2021 doit être exclue. Subsidiairement, elle considère que les documents médicaux produits par le demandeur ne suffisent quoi qu'il en soit pas à établir une incapacité de travail au degré de la preuve stricte.

13.2 En l'occurrence, comme exposé précédemment, la chambre de céans estime, à l'issue de son instruction, qu'il est prouvé que le demandeur n'a pas travaillé durant l'été 2021 à J______, de sorte qu'il convient d'emblée d'écarter ce contre-argument pour la question de l'incapacité de travail.

Concernant les certificats et rapports médicaux, il sied de retenir les éléments suivants :

13.2.1  Le principe de la libre appréciation des preuves s'applique lorsqu'il s'agit de se prononcer sur des prestations en matière d'assurance sociale. Rien ne justifie de ne pas s'y référer également lorsqu’une prétention découlant d'une assurance complémentaire à l'assurance sociale est en jeu (arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 4.2). Le principe de la libre appréciation des preuves signifie que le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de statuer sur le droit litigieux (arrêt du Tribunal fédéral 4A_253/2007 du 13 novembre 2007 consid. 4.2).

En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il convient que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Par ailleurs, le juge doit avoir égard au fait que la relation de confiance unissant un patient à son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci ; cela ne justifie cependant pas en soi d'évincer tous les avis émanant des médecins traitants. Il faut effectuer une appréciation globale de la valeur probante du rapport du médecin traitant au regard des autres pièces médicales (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_12/2012 du 20 juillet 2012 consid. 7.1).

13.2.2 En l'espèce, ont été versés à la procédure divers rapports et certificats médicaux d'arrêts de travail pour la période totale du 8 juillet 2020 au 28 février 2022.

Selon ces documents médicaux, l'arrêt de travail du demandeur a initialement été motivé par ses atteintes aux deux mains, qui ont nécessités chacune une intervention chirurgicale (cf. rapports du 8, 9 juillet, 19 août, 2 novembre 2020, 13 janvier et 27 avril 2023 de la Clinique de la main). Ces atteintes ont justifié une incapacité de travail jusqu'au 15 mars 2021 (cf. certificats du 8 juillet, 5, 19 août, 2 septembre, 15 octobre, 13 novembre, 8 décembre 2020, 12 janvier et 12 février 2021). Ce premier volet, afférent aux atteintes aux mains, et ses répercussions sur la capacité de travail du demandeur n'est pas contesté par la défenderesse, laquelle a d'ailleurs versé des indemnités journalières jusqu'au 31 mai 2021.

Dans un second volet, concernant cette fois-ci le genou droit du demandeur, le Dr N______ a prescrit un premier arrêt de travail du 15 mars au 15 avril 2021, qu'il a prolongé à plusieurs reprises, chaque mois, et ce jusqu'au 28 février 2022 (cf. certificats du 15 mars, 13 avril, 17 mai, 14, 30 juin, 22 juillet, 1er septembre, 1er octobre, 1er, 29 novembre, 22 décembre 2021, 1er, 21 février et 1er mars 2022). Ce médecin a établi divers rapports par lesquels il a expliqué que le demandeur souffrait d'altérations profondes des cartilages de grade IV avec œdème de l'os et lésions de grade II du ménisque fissuré avec subluxation moyenne (rapports du 28 juin 2021, 12 janvier, 14 novembre 2022 et 18 avril 2023).

Le diagnostic du Dr N______ confirme les conclusions du rapport d'IRM du genou droit réalisé le 18 juin 2021 par le Dr M______ et mettant en évidence : une chondropathie condylienne médiale, siège d'un large « défect » cartilagineux (grade IV) associé à un œdème osseux sous-chondral condylien médial étendu en regard ; un petit œdème osseux sous-chondral périphérique du plateau tibial médial ; une petite méniscopathie dégénérative de la corne postérieure et du segment moyen subluxé du ménisque médial, associé à une fine fissuration intra-méniscale horizontale (grade II) au sein de sa corne postérieure ; une chondropathie fémoro-patellaire profonde (grade IV) modérément étendue, plus marquée sur le versant patellaire et associée à un discret œdème osseux sous chondral patellaire ; un épanchement intra-articulaire abondant (cf. rapport d'IRM du 21 juin 2021 du Dr M______).

Aucun autre rapport médical n'a été produit et Monsieur C______, qui était en charge du dossier du demandeur jusqu'à l'action en justice, a d'ailleurs déclaré ne pas avoir demandé d'avis à un médecin conseil. Par ailleurs, la défenderesse n'a pas requis d'expertise médicale dans le cadre de l'instruction de la présente cause, de sorte qu'il n'y a pas d'avis médical contradictoire à ceux des médecins traitants concernant les atteintes au genou du demandeur.

La défenderesse estime que le demandeur n'a pas apporté la preuve stricte de son incapacité de travail. Elle fait valoir que les certificats médicaux produits par le demandeur, ne l'ont été qu'avec la demande en paiement, que le Dr N______ a d'abord indiqué à son attention dans son rapport rempli le 28 juin 2021, que la reprise de travail était prévue le 1er juillet 2021 et que, par la suite, elle n'avait reçu que le rapport d'IRM du 21 juin 2021 en décembre 2021, sans indication sur la capacité de travail, et le certificat médical du 12 janvier 2022 du Dr N______ en février 2022, indiquant cette fois-ci une incapacité de travail. D'ailleurs, Monsieur C______ a expliqué ne pas avoir instruit le dossier sur le plan médical, ne l'estimant pas nécessaire, car, selon lui, le demandeur avait travaillé et ainsi fait valoir une prétention frauduleuse.

En l'occurrence, il existe une incertitude quant à savoir si certains certificats médicaux d'arrêt de travail auraient été produits seulement dans le cadre de la procédure, étant relevé que le rapport du 28 juin 2021 rempli par le Dr N______ mentionne avoir mis en copie le rapport d'IRM du genou droit du demandeur mais que la défenderesse indique ne l'avoir reçu qu'en décembre 2021 et que lors de son audition, Monsieur C______ n'a pas pu confirmer avoir reçu ou non les certificats médicaux alors qu'il était en charge du dossier. Néanmoins, ces documents médicaux ont bel et bien été versé à la procédure, ils ont été établis en temps réel par un médecin dont les explications et conclusions sont convaincantes et ils n'ont été contredits par aucun autre médecin. À cet égard, la défenderesse, qui a renoncé à instruire l'aspect médical, avait en revanche l'opportunité de demander une telle instruction dans le cadre de la présente cause, par le biais par exemple d'une expertise judiciaire pour tenter d'apporter la contre-preuve, ce qu'elle n'a pas fait. Par ailleurs, le certificat médical du 12 janvier 2022 du Dr N______ a bien été transmis en février 2022 à la défenderesse, sans réaction de la part de celle-ci. Enfin, le fait que le Dr N______ ait d'abord indiqué dans son rapport du 28 juin 2021 une reprise du travail le 1er juillet 2021 ne permet pas de remettre en cause son appréciation, puisqu'il a ensuite établi un nouveau certificat le 30 juin 2021, prolongeant l'arrêt de travail total à nouveau d'un mois, comme il l’a au demeurant fait dans tous ses certificats suivants.

13.3 Dans la mesure de ce qui précède, il n'existe pas d'élément susceptible d'ébranler sérieusement la crédibilité des conclusions du Dr N______, de sorte que ses rapports et certificats d'arrêt de travail doivent se voir reconnaitre une pleine valeur probante.

En conséquence, il convient de retenir que le demandeur a prouvé à satisfaction de droit, soit au degré de la preuve ordinaire (stricte), son incapacité de travail totale jusqu'au 28 février 2022.

14.         Il convient encore de déterminer si le demandeur a subi une perte de gain du fait de l'incapacité de travail imputable à son état de santé.

Pour savoir si le demandeur a subi une perte de gain et, le cas échéant, dans quelle mesure, il convient de définir si, durant la période en cause, il était encore lié par son contrat de travail avec son ancienne employeuse, étant rappelé qu'il a été licencié le 29 mai 2020, initialement pour le 31 août 2020, mais qu'il s'est retrouvé en incapacité de travail avant la fin de son délai de congé.

14.1 En l'espèce, il ressort du dossier du demandeur auprès de la caisse de chômage, en particulier du formulaire « Attestation de l'employeur », remplie par l'employeuse le 6 mai 2022, que les relations de travail ont duré du 1er juillet 2001 au 30 avril 2022. Il est précisé que le demandeur a été licencié le 29 mai 2020 pour le 31 août 2020, que le délai de congé était initialement de trois mois mais qu'il s'est retrouvé en arrêt maladie du 7 juillet 2020 au 28 février 2022. Le dossier de la caisse de chômage comprend également les fiches de salaires du demandeur dont il ressort que ce dernier a touché un salaire pour son travail pour l'employeuse aux mois de mars et avril 2022.

En outre, le demandeur a déclaré en audience qu'à la fin de son incapacité de travail, il était retourné travaillé deux mois pour l'employeuse, car en raison de son incapacité de travail, sa date de licenciement avait été prolongée.

Ces éléments permettent de conclure que le demandeur et l'employeuse ont, à tout le moins par acte concluant, reporté la fin des relations de travail au 30 avril 2022.

14.2 Il sied donc de retenir que les rapports de travail ont pris fin seulement le 30 avril 2022 et que le demandeur était bien couvert par l'assurance perte de gain en cause, à tout le moins, jusqu'à cette date (voire au-delà conformément aux CGA). Ainsi, bien que l'incapacité de travail du demandeur soit postérieure à son licenciement, il n'y a pas lieu d'appliquer les règles jurisprudentielles précitées en matière de présomption (consid. 12.2.2 supra), lesquelles ne s'appliquent que dans l'hypothèse où les prestations de l'assurance perte de gain sont demandées au-delà du terme du contrat de travail.

Le demandeur a donc bel et bien subi une perte économique du fait qu'il ne percevait pas son salaire alors qu'il se trouvait en incapacité de travail pendant la durée de son contrat de travail.

15.         S'agissant de l'étendue et de la quotité du droit aux indemnités journalières, le demandeur a requis, à juste titre, le paiement de CHF 56'497.35, soit l'équivalent de 273 jours (nombre de jours entre le 1er juin 2021 et le 28 février 2022) d'indemnité journalière à CHF 206.95, ce qui correspond au montant formulé dans les décomptes d'indemnité journalière produits par la défenderesse. Le montant de de CHF 56'497.35 peut donc être confirmé.

16.         Le demandeur réclame encore des intérêts moratoires à 5% l'an, dès le 15 septembre 2021 (date moyenne).

16.1 L'art. 41 al. 1 LCA dispose que la créance qui résulte du contrat est échue quatre semaines après le moment où l'assureur a reçu les renseignements de nature à lui permettre de se convaincre du bien-fondé de la prétention. Les « renseignements » au sens de l'art. 41 LCA visent des questions de fait, qui doivent permettre à l'assureur de se convaincre du bien-fondé de la prétention de l'assuré (cf. l'intitulé de l'art. 39 LCA). Ils correspondent aux devoirs de déclaration et de renseignement institués par les art. 38 et 39 LCA (cf. ATF 129 III 510 consid. 3 p. 512 ; arrêts du Tribunal fédéral 4A_58/2019 du 13 janvier 2020 consid. 4.1 ; 4A_489/2017 du 26 mars 2018 consid. 4.3 ; 4A_122/2014 du 16 décembre 2014 consid. 3.5 ; BREHM, Le contrat d'assurance RC, 1997, nos 512 et 515 s.). Le délai de délibération de quatre semaines laissé à l'assureur ne court pas tant que l'ayant droit n'a pas suffisamment fondé sa prétention ; tel est par exemple le cas lorsque, dans l'assurance contre les accidents, l'état de santé véritable de l'ayant droit n'est pas éclairci parce que ce dernier empêche le travail des médecins (arrêt du Tribunal fédéral 4A_307/2008 du 27 novembre 2008 consid. 6.3.1 ; Jürg NEF, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, 2001, n° 15 ad art. 41 LCA).

Le débiteur d'une obligation exigible est mis en demeure par l'interpellation du créancier (art. 102 al. 1 CO en lien avec l'art. 100 al. 1 LCA). L'intérêt moratoire de 5% l'an (art. 104 al. 1 CO) est dû à partir du jour suivant celui où le débiteur a reçu l'interpellation, ou, en cas d'ouverture d'une action en justice, dès le lendemain du jour où la demande en justice a été notifiée au débiteur (arrêt du Tribunal fédéral 5C.177/2005 du 25 février 2006 consid. 6.1). Toutefois, lorsque l'assureur refuse définitivement, à tort, d'allouer des prestations, on admet, par analogie avec l'art. 108 ch. 1 CO, qu'une interpellation n'est pas nécessaire ; l'exigibilité et la demeure sont alors immédiatement réalisées (arrêts du Tribunal fédéral 4A_16/2017 du 8 mai 2017 consid. 3.1 ; 4A_122/2014 précité, consid. 3.5 ; 4A_206/2007 du 29 octobre 2007 consid. 6.3 ; 5C.18/2006 du 18 octobre 2006 consid. 6.1 in fine ; cf. NEF, op. cit., n° 20 in fine ad art. 41 LCA, et GROLIMUND/VILLARD, in Basler Kommentar, Nachführungsband 2012, n° 20 ad art. 41 LCA). Un débiteur peut valablement être interpellé avant même l'exigibilité de la créance (ATF 103 II 102 consid. 1a ; Rolf WEBER, Berner Kommentar, 2000, n. 102 ad art. 102 CO). La demeure ne déploie toutefois ses effets qu'avec l'exigibilité de la créance (cf. ATAS/1176/2019 du 18 décembre 2019).

16.2 En l'espèce, les CGA ne prévoient aucun terme pour l'exigibilité des prestations qui y sont stipulées. Par ailleurs, comme vu précédemment, la défenderesse a refusé de verser ses prestations au-delà du 31 mai 2021 et instruit le cas sous l'angle de la prétention frauduleuse, n'estimant plus nécessaire d'instruire le volet médical.

Quant au demandeur, il a interpellé la défenderesse par pli du 22 juillet 2021 et contesté sa position.

Dans ces circonstances, il sied de retenir que par ce courrier, le demandeur a mis en demeure la défenderesse, de sorte que l'intérêt moratoire est dû seulement depuis le jour suivant, soit le 23 juillet 2021. Dans la mesure où le demandeur conclut au versement d'intérêts à compter de la date moyenne du 15 septembre 2021 spécifiquement, c'est cette date qui sera retenue.

17.         La demande est en conséquence fondée et la défenderesse sera condamnée au paiement de CHF 56'497.35, avec intérêts à 5 % l’an dès le 15 septembre 2021.

18.          

18.1 Les cantons sont compétents pour fixer le tarif des frais comprenant les dépens (art. 96 CPC en relation avec l’art. 95 al. 3 let. b). A Genève, le règlement fixant le tarif des frais en matière civile du 22 décembre 2010 (RTFMC - E 1 05.10) détermine notamment le tarif des dépens, applicable aux affaires civiles contentieuses (art. 1 RTFMC).

Le demandeur, représenté par un conseil, obtenant gain de cause, la défenderesse est condamnée à lui verser une indemnité de CHF 8'397.- à titre de dépens, TVA et débours inclus (art. 106 al. 1 CPC; art. 20 à 26 de la loi d'application du code civil suisse et d’autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 [LaCC - E 1 05] ; art. 84 et 85 du RTFMC).

18.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 114 let. e CPC).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande et la demande reconventionnelle recevables.

Au fond :

2.        Admet la demande.

3.        Rejette la demande reconventionnelle.

4.        Condamne la défenderesse à payer au demandeur la somme de CHF 56'497.35, avec intérêts à 5 % l'an dès le 15 septembre 2021.

5.        Alloue au demandeur une indemnité de CHF 8'397.-, à titre de dépens, TVA et débours inclus, à charge de la défenderesse.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le