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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2739/2022

ATAS/519/2023 du 29.06.2023 ( PC ) , REJETE

*** ARRET DE PRINCIPE ***
Descripteurs : PERTE(ARGENT);ART ET CULTURE;LOI COVID-19;ASSISTANCE PUBLIQUE;LOI FÉDÉRALE SUR LES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES À L'AVS ET À L'AI
Normes : LPC.11.al1.leta; LPC.11.al1.letd; LPC.11.al3.letb; LPC.11.al3.letc; COVID19.15.al1; RS 830.31.2.al3bis.leta; RS 442.15.3.al1; RS 442.15.4.al1; RS 442.15.5; RS 442.15.6; RS 442.15.11.al1; LPCC.5.letc
Résumé : Les aides versées par l’OCCS aux entreprises et acteurs culturels en tant qu’indemnisations pour pertes financières résultant de l’annulation, du report ou de la tenue dans un format réduit de manifestations ou de projets, ou en raison de limitations d’activités par suite de la mise en œuvre des mesures de l’État (cf. section 2 de l’ordonnance COVID-19 culture) ne sont pas octroyées en raison des besoins financiers concrets des bénéficiaires, mais en compensation d’un manque à gagner. Partant, ces indemnisations ne relèvent ni de l’aide sociale, ni de l’assistance au sens de l’art. 11 al. 3 let. b et c LPC et doivent être intégrées dans le calcul du droit aux prestations complémentaires. Leur montant n’est toutefois pas pris en compte dans leur intégralité, mais de manière privilégiée, soit comme une ressource provenant de l’exercice d’une activité lucrative au sens de l’art. 11 al. 1 let. a LPC. En l’occurrence, il n’est pas contestable que la recourante a perçu de l’OCCS des aides pour pertes financières au sens de la section 2 de l’ordonnances COVID-19 culture, de sorte que c’est à juste titre que l’intimé les a prises en compte, de manière privilégiée, dans le calcul du droit aux prestations complémentaires.
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2739/2022 ATAS/519/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 juin 2023

 

 

En la cause

A______

représentée par Me Éric MAUGUÉ, avocat

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : la bénéficiaire ou la recourante), née le ______ 1966, romancière et dessinatrice de profession, réalise des revenus en qualité d’artiste dans divers domaines d’activité. Elle est par ailleurs au bénéfice de prestations complémentaires (ci-après : PC).

b. Par décision du 20 juin 2022, le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) a sollicité le remboursement de CHF 20'849.40 correspondant à un trop-perçu de PC relatif à la période du 1er janvier 2021 au 31 mai 2022. La différence résultait d’une modification de la fortune pour 2021 et 2022, ainsi que du revenu de l’activité lucrative relatif à 2021.

c. La bénéficiaire a formé opposition contre cette décision le 27 juin 2022, contestant tant la fortune retenue pour 2022 que le revenu de l’activité lucrative relatif à 2021. Concernant le revenu de l’activité lucrative de 2021, le SPC ne devait pas prendre en compte les CHF 49'898.- qui lui avaient été versés dans le courant de l’année 2021 au titre d’aide à la culture versée en raison de l’annulation de ses activités d’indépendante dès mars 2020, du fait de la pandémie COVID-19. Il s’agissait d’une « sorte de réparation, d’un complément de revenu ». Quant à la fortune prise en compte à partir de juin 2022, elle contestait le montant retenu au titre d’épargne, soit CHF 149'733.-. Son relevé bancaire faisait en effet état, le 22 juin 2022, d’un montant de CHF 123'776.-.

d. Le 3 août 2022, le SPC a partiellement admis l’opposition de l’intéressée, corrigeant les montants de fortune pris en compte dès juin 2022 en fonction des relevés de la bénéficiaire. Pour le surplus, il a maintenu que le montant total de CHF 49'898.- reçu en 2021 et relatif à une « aide COVID à la culture », versé par l’office cantonal de la culture et des sports (ci-après : l’OCCS) devait être pris en compte au titre de revenu de l’activité lucrative.

Suite à ces modifications et au terme d’un nouveau calcul du droit aux prestations, l’intéressée restait tenue à restitution d’un montant de CHF 17'097.-.

B. a. L’intéressée a recouru contre cette décision auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) par l’intermédiaire de son conseil, le 14 septembre 2022, concluant à son annulation. Elle a expliqué, en substance, que l’aide au revenu COVID-19 de CHF 49'898.- dont elle avait bénéficié en 2021 constituait une mesure de soutien au domaine culturel, couvrant en partie les pertes réalisées durant l’année 2020. S’agissant d’une aide fondée sur l’ordonnance sur les mesures dans le domaine de la culture prévues par la loi COVID-19 (ordonnance COVID-19 culture - RS 442.15), allouée à titre précaire et dont l’allocation faisait l’objet d’un réexamen périodique, avant chaque versement, en fonction des besoins du bénéficiaire, elle ne devait pas être prise en compte au titre de revenu déterminant.

b. Par réponse du 27 septembre 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours. En adéquation avec les recommandations fédérales consécutives à la situation particulière liée au coronavirus, « l’allocation corona-perte de gain » avait été prise en compte en tant que revenu et non à titre d’allocation pour perte de gain, afin de ne pas péjorer la situation de la recourante. La décision du 3 août 2022 était donc conforme au droit.

c. Le 4 novembre 2022, la recourante a expliqué que l’intimé confondait les allocations perte de gain pour indépendant au sens de l’ordonnance sur les mesures en cas de perte de gain en lien avec le coronavirus et l’aide d’urgence aux acteurs culturels versée conformément à l’ordonnance sur les mesures dans le domaine de la culture. Si les premières citées visaient effectivement à compenser une perte de gain, la seconde avait pour objectif de couvrir des frais d’entretien immédiats. Le fonds d’aide d’urgence avait d’ailleurs pour but de fournir un soutien supplémentaire aux acteurs culturels professionnels se trouvant dans une situation de détresse économique en raison du coronavirus et des mesures qui y étaient liées. L’aide d’urgence ne devait ainsi pas être prise en compte dans le calcul du revenu déterminant.

d. Sur demande de la chambre de céans, la recourante a produit, le 10 mai 2023, les différentes demandes d’aide financière ayant donné lieu aux décisions de l’OCCS.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

2.2 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).

2.3 En matière de prestations complémentaires fédérales, les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de trente jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1er LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]) auprès du tribunal des assurances du canton de domicile de l'assuré (art. 58 al. 1 LPGA).

S'agissant des prestations complémentaires cantonales, l'art. 43 LPCC ouvre les mêmes voies de droit.

Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision sur opposition du 3 août 2022 en tant qu’elle prend en compte au titre de revenu déterminant les aides COVID-19 que la recourante a reçues en 2021 au titre de mesures de soutien au domaine culturel.

4.              

4.1 Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de l'assurance-invalidité, conformément à l'art. 4 al. 1 let. c LPC.

Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

4.2  

4.2.1 L’art. 11 al. 1 let. a LPC précise que les revenus déterminants comprennent notamment deux tiers des ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une activité lucrative, pour autant qu'elles excèdent annuellement CHF 1'000.- pour les personnes seules.

Dans le régime des prestations complémentaires, comme dans l'AVS, il convient d'opérer une distinction entre les revenus d'une activité lucrative et les autres revenus. Cette distinction revêt en effet une grande importance dans la mesure où le revenu de l'activité lucrative est privilégié alors que les autres revenus sont entièrement pris en compte. Sur un plan général, la question de savoir si le revenu constitue le produit d'une activité lucrative ou une autre sorte de revenu doit être élucidée sur la base de l'ensemble des circonstances du cas particulier (VALTERIO, Commentaire de la LPC, 2015, art. 11 n. 3). Par ce privilège, le législateur ne voulait pas que l'octroi de prestations complémentaires paralysât l'exercice d'une modeste activité lucrative (Message du 21 septembre 1964 du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet de loi sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité; cf. FF 1964 II 705 p. 718). Il s'agissait, ainsi, par une prise en compte partielle des revenus, d'encourager les bénéficiaires de prestations complémentaires à entreprendre une activité lucrative sans qu'ils soient pénalisés par une réduction correspondante du montant des prestations (VALTERIO, art. 11 n. 5). Font partie du revenu du travail des salariés tous les salaires en espèce et en nature (par exemple : logement, montant dont le loyer est diminué, y compris les prestations sociales de l'employeur sous forme de nourriture et de logement accordé gratuitement) ainsi que les suppléments tels que pourboires, gratifications ou cadeaux pour ancienneté de service (VALTERIO, art. 11 n. 6).

On précise, à cet égard, que le Tribunal fédéral a estimé que la réglementation en matière de revenu privilégié (art. 11 al. 1 let. a LPC) était restrictive dès lors qu'elle limite l'étendue de celui-ci au seul revenu tiré d'une activité lucrative. Selon lui, les prestations des assurances doivent être prises en compte intégralement, y compris les prestations de courte durée destinées à compenser, provisoirement ou partiellement, la perte de salaire telles que les indemnités de chômage (cf. ATF 119 V 271 consid. 3; cf. également arrêts du Tribunal fédéral 9C_390/2012 du 20 juillet 2012 et P 46/03 du 7 novembre 2003, consid. 2.3).

Pour les ayants droit qui exercent une activité lucrative indépendante (de nature non agricole), le revenu déterminant correspond au montant des recettes brutes, déduction faite de l’ensemble des frais généraux. En règle générale, on se fondera sur la taxation fiscale. Si l’ayant droit conteste l’exactitude de la taxation fiscale, il lui incombe de fournir des indications précises (office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS), Directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, état au 1er janvier 2021 (ci-après : DPC, ch. 3422.01).

4.2.2 Par ailleurs, l'art. 11 al. 1 let. d LPC prévoit que les revenus déterminants comprennent également les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l'AVS et de l'AI. Il s'agit de rentes et de prestations périodiques au sens large qui comprennent, outre les rentes versées par les assurances sociales, les rentes des caisses de pension de droit public et de droit privé, celles qui sont versées par des assurances ainsi que les prestations volontaires des employeurs et les rentes au sens du droit civil. Les indemnités journalières de l'assurance-maladie, accidents, invalidité et chômage doivent en particulier être intégralement prises en considération. Il en va de même des contributions aux frais de séjour dans un établissement médico-social payées périodiquement par une caisse-maladie en vertu d'une assurance pour soins de longue durée (VALTERIO, art. 11 n. 70) et des allocations pour perte de gain et maternité versées directement au bénéficiaire de PC (DPC ch. 3456.01).

4.2.3 Selon l'art. 11 al. 3 LPC, ne sont pas pris en compte à titre de revenus déterminants, les aliments fournis par les proches en vertu des art. 328 à 330 du code civil (let. a) ; les prestations d’aide sociale (let. b) ; les prestations provenant de personnes et d'institutions publiques ou privées ayant un caractère d'assistance manifeste (let. c) ; les allocations pour impotents des assurances sociales (let. d) ; les bourses d'études et autres aides financières destinées à l'instruction (let e) ; la contribution d'assistance versée par l'AVS ou par l'AI (let. f).

Cette disposition consacre le principe de la priorité des prestations complémentaires, en tant que prestations d’assurances, sur les prestations d’aide ou d’entretien. Du point de vue social, il importe que, lors de la détermination des prestations complémentaires, les secours des proches et de l’assistance publique ne soient pas pris en compte. Entrent dans cette dernière catégorie, les prestations qui ont un caractère marqué d’assistance, telles que les mesures de secours dans des cas spéciaux, les prestations des institutions d’utilité publique et les dons bénévoles de personnes privées. Les bourses d’études et autres aides financières à l’instruction en faveur d’orphelins ou d’enfants ne sont pas non plus prises en compte (Message du Conseil fédéral précité, FF 1964 II 732).

L’énumération légale des éléments de revenu à prendre en compte et des éléments de revenu à ne pas prendre en compte est exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral P.43/04 du 3 décembre 2004 consid. 2). Toutes les rentes et pensions qui ne sont pas exclues par l’art. 11 al. 3 LPC doivent être prises intégralement en compte comme revenu (DPC ch. 3451.01).

Par prestations d’aide sociale, il faut entendre les secours uniques ou périodiques de tous genres, octroyés par les organes de l’aide sociale (assistance publique). Sont considérés plus particulièrement comme prestations ayant manifestement le caractère d’assistance, les secours et les contributions payés périodiquement ou en un versement unique, à titre strictement gratuit, qui ne reposent sur aucune obligation. Sont également considérées comme prestations ayant manifestement un caractère d’assistance les prestations cantonales et communales d’aide aux personnes âgées, aux survivants, aux invalides, aux chômeurs et autres, ainsi que les prestations d’assurance-vieillesse, survivants et invalidité cantonales ayant le caractère d’assistance (DPC ch. 3412.04, 3412.05 et 3412.06).

Selon la doctrine et la jurisprudence, au sens du droit des prestations complémentaires, n'ont pas un caractère d'assistance les prestations qui ne sont pas allouées à titre précaire ou bénévole et dont l'allocation ne fait pas l'objet d'un réexamen périodique en fonction des besoins du bénéficiaire. Le Tribunal fédéral a notamment précisé qu'une rente viagère servie par une compagnie d'assurances ne revêtait pas un caractère d'assistance, dans la mesure où elle était déterminée à l'avance et ne variait pas en fonction des besoins effectifs de l'ayant droit (ATF 116 V 328 consid. 1). Le Tribunal fédéral a, en outre, nié le caractère d'assistance à une aide accordée sous forme de rente à un ressortissant suisse de l'étranger victime de la guerre (arrêt du Tribunal fédéral P.6/02 du 24 juin 2002 consid. 1b) et à une indemnité pour tort moral accordée en raison d'une condamnation pénale injustifiée (arrêt du Tribunal fédéral P.41/04 du 3 décembre 2004 consid. 3.2; VALTERIO, op. cit., n° 164 ad. art. 11, p. 205). La chambre de céans a également considéré qu'une indemnité mensuelle versée par l’État chilien, à titre de réparation pour le tort moral subi par le bénéficiaire pour les actes de torture, est une prestation périodique au sens de l’art. 11 al. 1 let. d LPC à prendre en compte en tant que revenu déterminant (ATAS/259/2013 du 13 mars 2013).

4.2.4 Pour le calcul de la prestation complémentaire fédérale annuelle, sont pris en compte en règle générale les revenus déterminants obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune le 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 1). Pour les assurés dont la fortune et les revenus déterminants à prendre en compte au sens de la LPC peuvent être établis à l'aide d'une taxation fiscale, les organes cantonaux d'exécution sont autorisés à retenir, comme période de calcul, celle sur laquelle se fonde la dernière taxation fiscale, si aucune modification de la situation économique de l'assuré n'est intervenue entre-temps (al. 2). La prestation complémentaire annuelle doit toujours être calculée compte tenu des rentes, pensions et autres prestations périodiques en cours (al. 3 de l'art. 23 aOPC-AVS/AI et OPC-AVS/AI).

4.3  

4.3.1 S’agissant des PCC, selon l’art. 2 al. 1 let. a, b et d LPCC, ont droit aux PCC les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève (let. a); et qui sont au bénéfice d'une rente de l'assurance-vieillesse et survivants, d'une rente de l'assurance-invalidité, d'une allocation pour impotent de l'assurance-invalidité ou reçoivent sans interruption pendant au moins six mois une indemnité journalière de l'assurance-invalidité (let. b); et qui répondent aux autres conditions de la présente loi (let. d).

Selon l’art. 4 LPCC, ont droit aux PCC les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable.

Selon l’art. 5 let. c LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, sous réserve notamment, qu’en dérogation à l'art. 11 al. 1 let. c de la loi fédérale, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de un huitième, respectivement de un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, et ce après déduction des franchises prévues par cette disposition (ch. 1), du montant des indemnités en capital obtenues à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice corporel, y compris l'indemnisation éventuelle du tort moral (ch. 2).

4.3.2 Selon l'art. 9 al. 1 LPCC, pour la fixation des prestations complémentaires cantonales, sont déterminantes les rentes, pensions et autres prestations périodiques de l'année civile en cours (let. a), la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée (let. b). En cas de modification importante des ressources ou de la fortune du bénéficiaire, la prestation est fixée conformément à la situation nouvelle (art. 9 al. 3 LPCC).

4.4 Selon le bulletin de l’OFAS à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC numéro 427, l’allocation Corona-perte de gain est une allocation d’urgence accordée dans le cadre d’une situation extraordinaire. Dans le cas des bénéficiaires de PC ayant une activité indépendante, l’allocation leur est directement versée. La prise en compte de cette allocation dans le calcul de la PC pour un bénéficiaire indépendant ne doit mener ni à une baisse ni à une suppression de la PC. Les rentes, pensions et autres prestations périodiques sont normalement prises en compte dans leur intégralité dans le calcul de la PC (art. 11, al. 1, let. d, LPC), seuls les revenus provenant d’une activité lucrative étant pris en compte de manière privilégiée (incitation au travail). Cependant, dans la situation particulière de la crise du Coronavirus, les bénéficiaires de PC étaient dans l’impossibilité d’exercer leur activité en raison d’un événement indépendant de leur volonté ou effort pour s’insérer professionnellement. Cette péjoration de leur situation ne doit pas encore être renforcée lors de la prise en compte de l'allocation Corona-perte de gain dans le calcul de leur PC. Le calcul tient déjà compte du revenu annuel annoncé par l'indépendant (acompte ou dernière décision de cotisation). Dans la mesure où le revenu a été pris en compte sur une base annuelle, l'allocation versée de manière limitée dans le temps fait en principe partie intégrante du revenu de l’indépendant. Si l’allocation était encore prise en compte selon l’art. 11, al. 1, let. d LPC au titre de revenu déterminant, cela reviendrait à la compter à double, ce qui doit être évité. Dans les situations particulières où le revenu de l’indépendant s’est nettement péjoré, il est même recommandé de revoir le calcul PC (par exemple lorsque le revenu pris en compte dans la PC ne correspond plus à la réalité car l’activité n’est plus exercée). Pour les cas dans lesquels l'allocation a déjà été prise en compte, le calcul devrait être réexaminé dans le sens du présent bulletin.

4.4.1 Selon l’art. 15 al. 1 de la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de COVID-19 du 25 septembre 2020 (loi COVID-19 – RS 818.102), en vigueur depuis le 1er avril 2021 (RO 2021 153), le Conseil fédéral peut prévoir le versement d’allocations pour perte de gain aux personnes qui doivent interrompre ou limiter de manière significative leur activité lucrative à cause de mesures prises pour surmonter l’épidémie de COVID-19. Seules les personnes frappées par une perte de gain ou de salaire et qui, dans leur entreprise, ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 30% par rapport au chiffre d’affaires moyen des années 2015 à 2019 sont considérées comme ayant dû limiter de manière significative leur activité lucrative.

D’après l’art. 2 al. 3bis let. a de l’ordonnance sur les mesures en cas de perte de gain en lien avec le coronavirus (ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 - RS 830.31), en vigueur depuis le 17 septembre 2020 (RO 2020 4571), les personnes qui exercent une activité lucrative indépendante au sens de l’art. 12 LPGA ont droit à l’allocation si leur activité lucrative est significativement limitée en raison de mesures de lutte contre l’épidémie de COVID-19 ordonnées par une autorité.

4.4.2 Le Conseil fédéral a, le 14 octobre 2020, adopté l’ordonnance sur les mesures dans le domaine de la culture prévues par la loi COVID-19 (ordonnance COVID-19 culture, RS 442.15), qui prévoit différents types de prestations autre que l’indemnité en cas de RHT pour les entreprises culturelles, les acteurs culturels et les associations culturelles d’amateurs. Selon son art. 3 al. 1, des aides financières peuvent ainsi être allouées sous les formes suivantes : indemnisation des entreprises culturelles pour les pertes financières en lien avec leurs manifestations, leurs projets ou les restrictions imposées à l’activité culturelle (a.) ; contributions à des projets de transformation (b.) ; prestations pécuniaires aux acteurs culturels pour couvrir leurs frais d’entretien immédiats (aide d’urgence) (c.) ; soutien d’associations culturelles d’amateurs pour les dédommager des pertes financières en lien avec leurs manifestations (d.).

4.4.3 La section 2 de l’ordonnance COVID-19 culture relative à l’indemnisation des entreprises culturelles pour pertes financières prévoit (art. 4 al. 1) que les entreprises culturelles reçoivent, sur demande, des aides financières pour les pertes financières résultant de l’annulation, du report ou de la tenue dans un format réduit de manifestations ou de projets, ou en raison de limitations d’activité par suite de la mise en œuvre des mesures de l’État. Selon l’art. 5 al. 1 de l’ordonnance COVID-19 culture ne peuvent être compensés par une indemnité que les dommages qui ont été causés par des mesures de l’État (a.) et qui ne sont pas compensés par d’autres indemnités (b.). L’indemnisation couvre au maximum 80% du dommage financier (al. 2). Un éventuel gain manqué n’est pas indemnisé (al. 3).

Les demandes d’indemnisation pour pertes financières sont à adresser aux services désignés par les cantons, qui statuent selon la procédure régie par le droit cantonal (art. 6 de l’ordonnance COVID-19 culture).

4.4.4 La section 4 régit quant à elle l’aide d’urgence aux acteurs culturels. Ainsi, selon l’art. 11 al. 1 de l’ordonnance COVID-19 culture, les acteurs culturels reçoivent, sur demande, des prestations pécuniaires non remboursables pour couvrir leurs frais d’entretien immédiats, pour autant qu’ils ne puissent les assumer eux-mêmes (aide d’urgence). Selon l’art. 13, le montant de l’aide d’urgence correspond à la différence entre les dépenses imputables et les revenus déterminants. Sont réputés dépenses imputables les coûts de logement, les primes d’assurance, les coûts de maladie et les autres frais d’entretien immédiats tels que les contributions d’entretien et les frais de garde extra-familiale des enfants (art. 12 al.2 de l’ordonnance COVID-19 culture). Est réputé revenu déterminant le revenu total imposable prévu provenant d’un emploi salarié ou d’une activité indépendante ainsi que d’autres revenus issus d’indemnités journalières, de rentes, de locations, de tantièmes et d’allocations pour perte de gain COVID-19 (art. 12 al. 3 de l’ordonnance COVID-19 culture).

Selon l’art. 14, les demandes d’aide d’urgence doivent être adressées à l’association Suisseculture Sociale qui les traite en tant qu’autorité sur la base de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021).

5.             En l’espèce, la recourante reconnaît avoir reçu CHF 49'898.- de l’OCCS en 2021. Elle conteste que ce montant, versé sur la base de l’ordonnance COVID-19 culture, soit assimilable à un revenu d’activité lucrative et pris en compte comme tel par l’intimé dans son calcul du droit aux PC pour 2021.

Elle soutient que les sommes reçues constituent une aide d’urgence entrant dans le champ d’application de l’art. 11 al 3 LPC au titre de prestations d’aide sociale (let. b) ou de prestations provenant de personnes et d’institutions publiques ou privées ayant un caractère d’assistance manifeste (let. c), de sorte qu’elles ne doivent pas être intégrées dans le calcul du revenu déterminant.

La chambre de céans ne saurait suivre ce raisonnement. Les demandes effectuées (pièces 7 à 13 rec.) et les décisions subséquentes (pièces 2 à 6 rec.) indiquent clairement que les aides dont a bénéficié la recourante sur la base de l’ordonnance COVID-19 culture lui ont été octroyées, non pas au titre de l’aide d’urgence (section 3), mais bien en tant qu’indemnisations pour pertes financières résultant de l’annulation, du report ou de la tenue dans un format réduit de manifestations ou de projets, ou en raison de limitations d’activité par suite de la mise en œuvre des mesures de l’État (section 2).

Les décisions d’octroi font explicitement référence aux art. 4 et 5 de l’ordonnance. Elles émanent en outre de l’autorité cantonale compétente pour ces aides et font référence à la procédure administrative cantonale (contrairement à l’aide d’urgence, octroyée par Suisseculture sociale selon la procédure administrative fédérale).

Quant aux formulaires de demandes, établis par l’OCCS et remplis par la recourante, ils stipulent explicitement qu’ils concernent « l’indemnisation des pertes financières des acteurs et actrices culturels ». En outre, ils comportent une rubrique requérant que « afin de faciliter les démarches », la recourante renonce aux allocations perte de gain (au sens de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19) ainsi qu’à l’aide d’urgence de Suisseculture sociale, ce que l’intéressée a accepté. Enfin, les différentes sections des formulaires de demandes font systématiquement référence aux « pertes financières non couvertes » et au « dommage », jamais aux frais d’entretien courants. Pour toutes ces raisons, il ne fait aucun doute que les sommes reçues constituent bien des indemnisations pour pertes financières au sens des art. 4 et 5 de l’ordonnance COVID-19 culture, couvrant (au maximum à hauteur de 80%) les pertes financières, - résultant de l’annulation, du report ou de la tenue dans un format réduit de manifestations ou de projets, ou en raison de limitations d’activité -, occasionnées par des mesures prises par l’État et qui ne sont pas compensées par d’autres indemnités. En tant qu’elles n’ont pas été octroyées en raison des besoins financiers concrets de la recourante, mais en compensation d’un manque à gagner, elles ne relèvent ni de l'aide sociale, ni de l'assistance au sens de l'art. 11 al. 3 let. b et c LPC.

Ces prestations sont ainsi assimilables à des allocations pour perte de gain et devraient, prima facie, être prises en compte intégralement dans le cadre du calcul du droit aux PC en vertu de l’art. 11 al. 1 let. d LPC. Dans la mesure cependant où, dans la « situation particulière de la crise COVID-19 les bénéficiaires de PC étaient dans l’impossibilité d’exercer leur activité en raison d’un évènement indépendant de leur volonté ou effort pour s’insérer professionnellement » (Bulletin 427 de l’OFAS précité), c’est à juste titre que l’intimé les a prises en compte de manière privilégiée, soit comme ressource provenant de l’exercice d’une activité lucrative au sens de l’art. 11 al.1 let. a LPC.

6.             Partant, le recours est rejeté.

La recourante, qui succombe n’a pas droit à des dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 89H al. 1 et 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

conformément à l'art. 133 al. 2 LOJ

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le