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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1735/2022

ATAS/501/2023 du 28.06.2023 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1735/2022 ATAS/501/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 juin 2023

Chambre 4

 

En la cause

A______

représentée par Gérard GUILLEMAUD, mandataire

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante) est née le ______ 1952, ressortissante du Portugal, titulaire d’un permis C, divorcée de Monsieur B______ et mère d’un fils né en 1983. Elle a vécu avec feu Monsieur C______, né le ______ 1943, qui est décédé le ______ 2021.

B. a. Le 3 mars 2020, l’intéressée a demandé au service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) des prestations complémentaires à l’AVS, indiquant notamment partager son logement avec son conjoint et avoir touché un capital LPP de CHF 178'615.10 en 2017.

b. Selon les extraits du compte bancaire de l’intéressée, celle-ci a reçu ce dernier montant le 10 février 2017 et le solde de son compte était de CHF 75'724.30 à fin 2017, de CHF 3'664.77 à fin 2018 et de CHF 0.- à fin 2019.

c. Le 30 août 2021, l’intéressée a informé le SPC du décès de son conjoint C______. Elle vivait actuellement seule et recevait uniquement CHF 2'000.- de l’AVS par mois. Elle demandait le traitement rapide de son dossier pour éviter des complications financières sérieuses. Elle transmettait également l’attestation de sa rente portugaise mensuelle, soit EUR 48.24 ainsi qu’une attestation de loyer de la régie.

d. Par décision du 9 février 2022, le SPC a calculé le droit aux prestations complémentaires de l’intéressée pour la période courant du 1er mai 2020 au 31 décembre 2021, selon le droit en vigueur jusqu’en 2021, plus favorable (dépassement du seuil de la fortune selon le nouveau droit) et dès le 1er janvier 2022.

Le total des prestations rétroactives du 1er mai 2020 au 28 février 2022 était de CHF 144.- de prestations complémentaires fédérales (PCF). Elle n’avait pas droit aux prestations complémentaires cantonales (PCC) mais droit à CHF 671.- de PCF dès le 1er mars 2022.

Dans ses plans de calcul, le SPC a retenu, pour la période du 1er mai au 31 décembre 2020, un montant total dessaisi de CHF 130'698.- et une rente hypothétique 2ème pilier de CHF 12'145.83. Le loyer net était de CHF 14'340.- et les charges locatives de CHF 1'920, les deux pris en compte à hauteur de CHF 8'130.-.

S’agissant des biens dessaisis, le SPC précisait que les pièces remises faisaient état d’une diminution du patrimoine dont il était tenu compte dans le calcul du revenu déterminant comme s’il n’y avait pas eu de dessaisissement (donation, diminution non justifiée ou sans contre prestation équivalente). Le montant retenu était réduit de CHF 10'000.- par an dès la deuxième année suivant la date du dessaisissement. Le montant du loyer retenu tenait compte du nombre de personnes partageant le logement.

Pour la période du 1er janvier au 31 juillet 2021, le SPC a tenu compte, dans un plan de calcul des prestations complémentaires favorables, de CHF 120'698.- de biens dessaisis et d’une rente 2ème pilier hypothétique de CHF 12’145.83. Le loyer net était de CHF 14’340 et les charges locatives de CHF 1'920.-, pris en compte à hauteur de CHF 8'130.-.

Pour la période du 1er août au 31 décembre 2021, le plan de calcul des prestations complémentaires favorables retenait CHF 120'698.- à titre de biens dessaisis et CHF 12’145.83 de rente de 2ème pilier hypothétique. Le loyer net était de CHF 14'340.- et les charges locatives de CHF 1'920.-, pris en compte à hauteur de 13’200.-. Le SPC précisait que le loyer était pris en compte dans le calcul de sa prestation jusqu’à CHF 13'200.- et que les charges étaient comprises dans ce montant. Pour cette raison, son loyer et les charges ne figuraient pas intégralement dans le plan de calcul.

Pour la période dès le 1er janvier 2022, le plan de calcul des prestations complémentaires favorables retenait CHF 110'698.- à titre de biens dessaisis et CHF 12’145.83 de rente 2ème pilier hypothétique. Le loyer net était de CHF 14'340.- et les charges locatives de CHF 1'920.-, pris en compte à hauteur de CHF 13'200.-.

Le SPC a encore indiqué que les calculs selon la réforme PC 2021 pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022 n’étaient pas retenus en raison du dépassement du seuil de la fortune, qui était défavorable à l’intéressée, car sa fortune était supérieure au montant permettant de toucher les PCF et les PCC.

e. L’intéressée a formé opposition à cette décision contestant les biens dessaisis retenus suite à la dépense de son 2ème pilier, car son capital avait été totalement absorbé depuis 2017 du fait qu’elle ne vivait qu’avec une rente d’environ CHF 2'000.- de l’AVS. Elle demandait des explications sur le calcul permettant de retenir qu’elle avait une fortune du 2ème pilier alors que tous les documents nécessaires pour la constitution du dossier avaient été transmis au SPC.

Elle recevait uniquement une rente de l’AVS et une petite rente du Portugal. Depuis décembre 2021, elle était en traitement chimiothérapique afin de lutter contre un cancer du poumon. Elle était suffisamment épuisée pour ne pas avoir à supporter encore un souci financier. Elle ne demandait pas plus que ce à quoi elle avait droit. Elle avait travaillé une grande partie de sa vie à Genève.

f. Par décision sur opposition du 29 avril 2022, le SPC a rejeté l’opposition.

C. a. Le 27 mai 2022, l’intéressée a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice concluant à la vérification de la décision en tenant compte des relevés bancaires de tout le mois depuis janvier 2017 afin de prouver sa bonne foi. Elle pouvait également demander des attestations à toutes les institutions bancaires de la place de Genève pour confirmer qu’elle n’avait pas de coffre. Elle ne pouvait pas se permettre d’avoir des défauts de paiement, car elle avait un cancer et faisait de l’immunothérapie toutes les trois semaines.

b. Le 24 juin 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Les parties ont été entendues lors d’une audience du 5 octobre 2022.

d. La recourante a par la suite produit une pièce attestant qu’elle avait versé CHF 27'471.57 à l’office des poursuites et a fait valoir qu’elle avait encore payé CHF 2'147.35 d’impôt fédéral, CHF 8'615.50 d’impôt cantonal sur son capital LPP, et qu’elle avait utilisé pour ses besoins vitaux ses rentes, indemnités et pensions depuis 2017 à raison de CHF 1'000.- par mois, soit CHF 72'000.- pour un total de CHF 110'233.42.

Si l’on déduisait « Fortune, bien dessaisi pour la période dès le 1er janvier 2022 » de CHF 110'698.-, le solde était de CHF 468.54. En conclusion, l’intimé devait reconsidérer son calcul des prestations complémentaires.

e. Le 3 mars 2023, l’intimé a indiqué que le montant de CHF 72'000.- ne devait pas être déduit des biens dessaisis, dans la mesure où il s’agissait de sommes utilisées pour couvrir les besoins vitaux de la recourante. Il avait en effet déjà tenu compte dans le calcul du bien dessaisi d’un forfait de couverture des besoins vitaux de CHF 19'290.- × 3.2, conformément aux directives de l’Office fédéral des assurances sociales (ci-après : l’OFAS), soit un montant de CHF 61'728.- par an.

Dès lors, le montant de CHF 72'000.- allégué par la recourante venait en réalité s’ajouter au forfait déjà pris en compte par le SPC et, dans la mesure où aucune pièce n’avait été fournie pour justifier ses dépenses supplémentaires, il ne pouvait pas en être tenu compte.

Le SPC transmettait une note détaillant le calcul du bien dessaisi.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de PCC, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA; art. 43 LPCC; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10] et art. 43 LPCC).

Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]; art. 43 LPCC).

4.             Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249; RO 2020 585).

Toutefois, dans la mesure où la recourante était, au 1er janvier 2021, déjà bénéficiaire de prestations complémentaires, le nouveau droit est applicable pour autant qu’il n’entraîne pas, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à celle-ci (cf. Dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 – Réforme des PC). En l’occurrence, l’ancien droit est plus favorable à la recourante, car sa fortune nette est supérieure aux seuils prévus par l’art. 9a al. 1 LPC (CHF 100'000.- pour une personne seule), de sorte que si le nouveau droit lui était appliqué, son droit aux prestations complémentaires aurait été supprimé.

5.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision sur opposition du 29 avril 2022 et plus particulièrement sur les montants pris en compte au titre de fortune dessaisie dans les calculs de l’intimé.

6.              

6.1 Pour qu'un dessaisissement de fortune puisse être pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires, la jurisprudence soumet cet acte à la condition qu'il ait été fait « sans obligation juridique », respectivement « sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente ». Les deux conditions précitées ne sont pas cumulatives, mais alternatives.

Le Tribunal fédéral a précisé qu’un usage normal de la fortune - en l’occurrence CHF 14’490.- en une année pour des dépenses d’habillement, de loisirs et d’ameublement - n’était pas concerné par la question du dessaisissement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 6.3). A fortiori, une utilisation du patrimoine afin de couvrir les besoins vitaux ne saurait être considérée comme un dessaisissement (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, 2015, ch. 98 ad art. 11 aLPC et les références). Par ailleurs, le Tribunal fédéral a également considéré qu’il n'y avait pas dessaisissement dans le cas d'une assurée ayant épuisé sa fortune après avoir vécu dans un certain luxe (ATF 115 V 352 consid. 5b). L'existence d'un dessaisissement de fortune ne peut être admise que si l'assuré renonce à des biens sans obligation légale ni contre-prestation adéquate. Lorsque cette condition n'est pas réalisée, la jurisprudence considère qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'une fortune (hypothétique) dans le calcul de la prestation complémentaire, même si l'assuré a pu vivre au-dessus de ses moyens avant de requérir une telle prestation (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_50/2022 du 17 mai 2022 consid. 3.1 et les références). En effet, il n'appartient pas aux organes compétents en matière de prestations complémentaires de procéder à un contrôle du mode de vie des assurés (cf. ATF 146 V 306 consid. 2.3.1 et les références), ni d'examiner si l'intéressé s'est écarté d'une ligne que l'on pourrait qualifier de « normale » et qu'il faudrait au demeurant préciser. Il convient bien plutôt de se fonder sur les circonstances concrètes, à savoir le fait que l'assuré ne dispose pas des moyens nécessaires pour subvenir à ses besoins vitaux, et - sous réserve des restrictions découlant de l'art. 3c al. 1 let. g aLPC - de ne pas se préoccuper des raisons de cette situation (VSI 1994 p. 225 s. consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 65/04 du 29 août 2005 consid. 5.3.1).

6.2 Selon l'art. 17a de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, la part de fortune dessaisie à prendre en compte (art. 11 al. 1 let. g aLPC) est réduite chaque année de CHF 10'000.- (al. 1). La valeur de la fortune au moment du dessaisissement doit être reportée telle quelle au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement, pour être ensuite réduite chaque année (al. 2). Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).

Le Tribunal fédéral a admis la conformité de cette disposition à la loi et à la constitution (ATF 118 V 150 consid. 3c/cc).

Conformément à cette disposition, il faut qu'une année civile entière au moins se soit écoulée entre le moment où l'assuré a renoncé à des parts de fortune et le premier amortissement de fortune (Ralph JÖHL, Die Ergänzungsleistung und ihre Berechnung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, p. 1816 n. 247).

En cas de dessaisissement d'une part de fortune, le calcul de la prestation complémentaire doit se faire comme si l'ayant droit avait obtenu une contre-prestation équivalente pour le bien cédé. Le revenu déterminant est donc augmenté, d'abord, d'une fraction de la valeur de ce bien conformément à l'art. 11 al. 1 let. c aLPC. Il est augmenté, ensuite, du revenu que la contre-prestation aurait procuré à l'ayant droit (arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2014 du 7 avril 2014 consid. 3.2). En règle générale, la jurisprudence se réfère, pour fixer ce revenu, au taux d'intérêt moyen sur les dépôts d'épargne servi par l'ensemble des banques au cours de l'année précédant celle de l'octroi de la prestation complémentaire (ATF 123 V 35 consid. 2a). Il convient toutefois de réduire de CHF 10'000.- par an la part de fortune dessaisie à prendre en considération, conformément à l'art. 17a aOPC-AVS/AI. On présume ainsi que l'ayant droit, à supposer qu'il ne se soit pas dessaisi de sa fortune, en aurait mis une partie à contribution pour subvenir à ses besoins; l'amortissement prévu par l'art. 17a aOPC-AVS/AI n'est cependant admis que sous la forme d'un forfait indépendant du montant exact de la fortune dessaisie ou de celle dont dispose encore l'ayant droit (cf. ATF 118 V 150 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2014 du 7 avril 2014 consid. 3.2 et la référence).

Les parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi doivent être prises en compte avec un produit de cette fortune même lorsque celui-ci n'est, effectivement, pas réalisé, mais qu'il pourrait raisonnablement l'être (ATF 110 V 17 consid. 4). Il importe dès lors de prendre en compte le produit de la fortune que le recourant aurait pu réaliser - s'il n'avait pas renoncé à des intérêts sur le prêt accordé - par un placement avec intérêt de la fortune cédée.

Pour que l'on puisse admettre qu'une renonciation à des éléments de fortune ne constitue pas un dessaisissement, il faut que soit établie une corrélation directe entre cette renonciation et la contre-prestation considérée comme équivalente. Cela implique nécessairement un rapport de connexité temporelle étroit entre l'acte de dessaisissement proprement dit et l'acquisition de la contre-valeur correspondante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 6.2).

Selon le ch. 3532.11 Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (DPC), état dès le 1er janvier 2022, si le bénéficiaire de prestations complémentaires et les membres de sa famille disposaient de revenus suffisants pendant les années où la fortune a diminué, le montant du dessaisissement de fortune correspond à celui de la diminution de la fortune. À l’inverse, s’ils ne disposaient pas de revenus suffisants, le montant du dessaisissement de fortune correspond à la différence entre la diminution non justifiée de la fortune et la part de la fortune dépensée pour son entretien usuel.

Le revenu est considéré comme suffisant s’il est supérieur à un montant forfaitaire applicable pour l’entretien usuel, et insuffisant s’il est inférieur à ce montant. Pour déterminer le montant forfaitaire applicable et le revenu, il faut tenir compte du bénéficiaire des prestations complémentaires, de son conjoint et des enfants qui étaient mineurs ou qui n’avaient pas encore achevé leur formation et étaient âgés de moins de 25 ans au moment du dessaisissement de fortune (ch. 3532.11).

Le montant forfaitaire pour l’entretien usuel est déterminé en multipliant le montant destiné à la couverture des besoins vitaux pour les personnes seules tel que défini à l’annexe 5.1 par le facteur correspondant tel que défini à l’annexe 8 (ch. 3532.12 DPC).

Selon l’annexe 5.1 : le montant destiné à la couverture des besoins vitaux d’une personne seule vivant à domicile et de CHF 19'610.-.

Selon l’annexe 1 DPC, dans le teneur dès le 1er janvier 2016, applicable en 2017, le montant destiné à la couverture des besoins vitaux d’une personne seule vivant à domicile était de CHF 19'290.-.

Selon l’annexe 8 des DPC (2022), le facteur pour la détermination de l’entretien usuel avant l’octroi de la prestation complémentaire est de 3.2 pour une personne seule.

6.3 Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références; ATF 126 V 353 consid. 5b et les références; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n'existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a et la référence).

6.4 Par ailleurs, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). En particulier, dans le régime des prestations complémentaires, l'assuré qui n'est pas en mesure de prouver que ses dépenses ont été effectuées moyennant contre-prestation adéquate ne peut pas se prévaloir d'une diminution correspondante de sa fortune, mais doit accepter que l'on s'enquière des motifs de cette diminution et, en l'absence de la preuve requise, que l'on tienne compte d'une fortune hypothétique (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 65/04 du 29 août 2005 consid. 5.3.2; VSI 1994 p. 227 consid. 4b). Mais avant de statuer en l'état du dossier, l'administration devra avertir la partie défaillante des conséquences de son attitude et lui impartir un délai raisonnable pour la modifier; de même devra-t-elle compléter elle-même l'instruction de la cause s'il lui est possible d'élucider les faits sans complications spéciales, malgré l'absence de collaboration d'une partie (cf. ATF 117 V 261 consid. 3b; ATF 108 V 229 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 59/02 du 28 août 2003 consid. 3.3 et les références).

7.             En l’espèce, il ressort des pièces à la procédure, en particulier de la fiche de calcul établie le 9 février 2022 par l’intimé, que celui-ci a correctement établi le montant de la fortune dessaisie en prenant en compte le capital LPP touché par la recourante en 2017, ses revenus pendant la même année, le forfait pour les besoins vitaux valable en 2017 multiplié par le facteur de 3.2 et en établissant le déficit de revenu, qu’il a déduit du montant de la fortune dessaisie, obtenant ainsi un montant dessaisi de CHF 140'698.- au 30 décembre 2018.

La recourante a fait valoir qu’elle avait donné CHF 50'000.- à son fils qui les lui avait reversés, ce qui est établi par l’extrait de son compte bancaire pour 2017. Comme l’a relevé l’intimé, cela n’a pas d’influence sur le montant du dessaisissement retenu, puisque celui-ci a été établi au 31 décembre 2018, date à laquelle il restait moins de CHF 10'000.- sur le compte de la recourante.

Cette dernière ne peut pas non plus pas se prévaloir des sommes versées pour des rattrapages d'impôts pour son fils ni de son prêt de CHF 8'000.- à une amie, car ils ont été effectués sans contre-prestations adéquates. Elle n’a en outre pas produit de factures attestant des voyages qu’elle a indiqués avoir faits. L’intimé n’avait enfin pas à déduire des biens dessaisis les CHF 72'000.- que la recourante allègue avoir utilisés pour ses besoins vitaux, puisqu’il avait déjà tenu compte dans son calcul du bien dessaisi du forfait de couverture des besoins vitaux multiplié par le facteur de 3.2, conformément aux Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (DPC), et faute de factures attestant les dépenses dépassant le montant ainsi obtenu.

La recourante a toutefois produit, dans le cadre de la procédure de recours, la preuve qu’elle avait payé CHF 27'471.57 en 2017 à l’office des poursuites. L’intimé a indiqué le 6 décembre 2022 que ce montant pouvait être admis comme contrepartie adéquate et déduite du bien dessaisi, relevant toutefois que cela restait sans impact sur son droit aux prestations complémentaires, dans la mesure où le seuil de fortune restait dépassé, référence faite à l’art. 9 al. 1 let. a LPC. Cette référence apparaît erronée, dès lors que c’est le droit applicable jusqu’au 31 décembre 2020 qui s’applique en l’occurrence.

Dans ses dernières écritures, l’intimé a conclu au rejet du recours, se référant au tableau fait le 9 février 2022 pour établir le montant retenu en dessaisissement, lequel n’avait toutefois pas été mis à jour pour tenir compte des CHF 27'471.57 versés par la recourante à l’office des poursuites. Si l’on tient compte d’un dessaisissement corrigé de CHF 113'221.43 (CHF 140'698.- moins CHF 27'471.57), réduit de CHF 10'000.- en 2020 (CHF 103'221.43), puis encore de CHF 10'000.- en 2021 (CHF 93'221.43), les dépenses reconnues sont plus élevées que les revenus déterminants dès le 1er août 2021, même en tenant compte des réductions individuelles des primes mensuelles, ce qui ouvre le droit à des prestations complémentaires fédérales pour la recourante, ainsi qu’à des prestations plus importantes que celles fixées par l’intimé dès janvier 2022.

Il se justifie en conséquence d’annuler la décision sur opposition du 29 avril 2022 et de renvoyer la cause à l’intimé pour qu’il intègre le montant de CHF 27'471.57 dans son tableau du montant dessaisi et recalcule le droit aux prestations complémentaires de la recourante pour chaque période de calcul faisant l’objet de la décision du 9 février 2022.

8.             Dans les calculs annexés à sa décision du 9 févier 2022 en lien avec les PCC, la chambre de céans a constaté que l’intimé a pris en compte une rente hypothétique et des biens dessaisis en lien avec le capital LPP que la recourante a touché.

8.1 Le droit cantonal exclut du droit aux prestations cantonales les personnes qui ont choisi au moment de la retraite un capital de prévoyance professionnelle en lieu et place d’une rente et qui l’ont consacré à un autre but que celui de la prévoyance (art. 2 al. 4 LPCC).

La chambre de céans a jugé que l'on pouvait résumer ainsi les principes régissant l'octroi de PCC en cas de retrait du 2ème pilier en capital : si le capital de prévoyance n'est pas épuisé selon le calcul de la couverture des besoins, il convient de calculer les revenus déterminants en y intégrant la rente du 2ème pilier à laquelle l'assuré aurait pu prétendre en lieu du capital. Si ces revenus excèdent les dépenses reconnues, l'assuré n'a pas droit aux PCC. Si, au contraire, ces revenus sont inférieurs aux dépenses reconnues, l'assuré peut prétendre aux PCC qui lui auraient été servies en cas de versement d'une rente de la prévoyance professionnelle. En revanche, dès qu'il est établi que le capital de prévoyance a été entièrement utilisé selon le calcul de la couverture des besoins, l'assuré a, dans tous les cas, droit à des PCC. Dans cette dernière hypothèse, leur calcul s'opère sans tenir compte d'une rente hypothétique de la prévoyance professionnelle à titre de revenu (ATAS/808/2021 du 16 août 2021 consid. 12 et les références).

En définitive, le capital LPP dépensé, en tout ou partie, au jour du calcul des prestations complémentaires, est pris en considération selon les règles du dessaisissement en matière de PCF, alors qu'en matière de PCC, il est fait application de l'art. 2 al. 4 LPCC et de la jurisprudence y relative (ATAS/703/2022 du 11 août 2022 consid. 13.2).

8.2 En l’espèce, l’intimé a également correctement pris en compte, en application du droit cantonal, la rente 2ème pilier à laquelle la recourante aurait pu prétendre en lieu du capital, soit CHF 12'145,83, obtenus en multipliant le montant du capital au taux de conversion (6.8% x CHF 178'615.10).

En revanche, il ne devait pas, en plus, tenir compte d’un bien dessaisi pour les PCC. La représentante de l’intimé a expliqué lors de l’audience devant la chambre de céans qu’il était compliqué pour le système informatique de ne prendre en compte un bien dessaisi que pour les PCF et pas pour les PCC. Un calcul manuel lui avait permis de constater que même si on ne prenait pas en compte de bien dessaisi pour les PCC, cela ne changeait pas le résultat, car le montant de la rente hypothétique suffisait à ce que les revenus soient plus importants que les dépenses pour les PCC, de sorte que la recourante n'avait toujours pas droit à des PCC.

La chambre de céans constate toutefois que cela n’est pas le cas pour les plans de calculs du 1er août au 31 décembre 2021 et dès le 1er janvier 2022, pour lesquelles le total du revenu déterminant est moins élevé que les dépenses reconnues, si l’on ne tient pas compte d’un montant de fortune dessaisi.

L’intimé devra également reprendre ses calculs sur ce point.

9.             Le recours est ainsi partiellement fondé. La décision querellée sera en conséquence annulée et la cause renvoyée à l’intimé pour nouveaux calculs au sens des considérants.

La recourante obtenant partiellement gain de cause et étant assistée d’un conseil, elle a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 1'000.- (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 29 avril 2022.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

5.        Alloue à la recourante une indemnité de CHF 1'000.- à la charge de l’intimé.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le