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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2807/2022

ATAS/380/2023 du 25.05.2023 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2807/2022 ATAS/380/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 mai 2023

Chambre 3

 

En la cause

Madame A______
représentée par l'Association permanence défense des patients et assurés (APAS)

 

recourante

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en 1970, mariée, de nationalité malgache, est domiciliée en Suisse depuis octobre 2006.

b. Son époux a travaillé à l'ambassade de Madagascar à Genève jusqu'en 2015, année de son licenciement. Il est sans emploi depuis.

c. L'assurée, au bénéfice du baccalauréat, n'a jamais travaillé en Suisse. Elle vit avec son époux, leur fils – né en 2008 –, leur fille – née en 1999 –, le compagnon de cette dernière et leur petit-fils, né en 2018.

B. a. Le 12 février 2020, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : l’OAI) en invoquant un carcinome du sein droit et un état dépressif présents depuis 2012.

b. Du dossier constitué par l’OAI, il ressort qu'un carcinome canalaire invasif du sein droit a été diagnostiqué à l'assurée en 2012. Le 21 mars 2013, elle a subi une mastectomie, puis plusieurs cycles de chimiothérapie et hormonothérapie auprès des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : les HUG ; cf. notamment rapports des HUG des 30 avril 2013, 25 août et 8 octobre 2015 et rapport du docteur B______, médecin traitant, du 31 mars 2020). L'assurée a également souffert d'hypertension en novembre 2013 (rapport des HUG du 11 novembre 2013). Il a été fait état d’un état dépressif réactionnel depuis 2015 (rapports des HUG du 8 octobre 2015, du Dr B______ du 31 mars 2020, du docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie des 24 avril et 13 octobre 2021) et de lombalgies depuis 2016 (rapports des HUG du 15 février 2016, de la docteure D______– médecin traitant de l'assurée depuis mai 2020 – du 16 septembre 2020 et de la docteure E______, spécialiste FMH en neurochirurgie, du 26 novembre 2020), de paresthésies au niveau des membres inférieurs (rapport des HUG du 28 octobre 2020), de céphalées et de troubles mnésiques (cf. rapport des HUG du 11 mai 2017).

Les limitations fonctionnelles évoquées par les différents médecins consultés consistaient en une importante asthénie (rapport du Dr B______ du 31 mars 2020), de la fatigue (cf. notamment rapport du docteur F______ du 28 octobre 2020), un manque d'énergie, du découragement et de la démotivation décrits comme ne se manifestant pas de manière uniforme dans tous les domaines comparables de la vie (rapport du docteur G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, du 1er octobre 2020), et la nécessité d’éviter le port de charges lourdes et les activités nécessitant une flexion en avant de manière répétitive (rapport de la Dre E______ du 26 novembre 2020).

Quant à sa capacité de travail, dans une activité adaptée, elle a été évaluée, en mars 2020, à trois ou quatre heures par jour (rapport du Dr B______ du 31 mars 2020), à environ 80% en novembre 2020 (rapport de la Dre E______ du 26 novembre 2020) et, en mai 2021, à 50%, dans un travail léger, en raison de l'aggravation des douleurs lombaires (rapport de la Dre E______ du 25 mai 2021), sous réserve d’une imagerie par résonance magnétique (IRM) prévue le 26 mai 2021 - qui devait révéler une lombarthrose et une dessiccation discale débutante des quatre derniers segments, avec discopathie circonférentielle. Selon l'évolution de la douleur, une reprise du travail à 100% pouvait être envisagée. À cet égard, le 1er juillet 2021, le docteur H______, chiropraticien, a indiqué qu'après un mois de prise en charge, l’assurée ne présentait plus de douleurs lombaires au quotidien, mais uniquement lors d'efforts plus importants.

Les médecins ont mentionné que l'assurée ne travaillait pas. Elle avait expliqué ne pas en avoir le droit, parce que son époux travaillait pour l'ambassade de Madagascar (rapports du Dr B______ du 31 mars 2020 et des HUG du 28 octobre 2020).

Sur le plan psychiatrique, le Dr G______ a précisé que l'assurée se plaignait spontanément et essentiellement d'une fatigue en lien avec les lombalgies et paresthésies des membres inférieurs ; mais, sur le plan thymique, au premier abord, elle n'avait pas de plainte. Elle ne bénéficiait d'aucun suivi psychothérapeutique, ni médicamenteux et sa seule demande avait été de remplir le formulaire pour l’OAI. Le Dr G______ ne disposait pas d'éléments cliniques objectifs pour pouvoir se prononcer sur la capacité de travail de l'assurée. Les divergences entre les éléments anamnestiques et les constatations cliniques lors de l'entretien attesteraient, sans que cela soit objectivement démontrable, une recherche de bénéfices secondaires, influençant ainsi de manière négative l'état émotionnel de l'assurée.

c. Le dossier a été soumis au Service médical régional de l’assurance-invalidité (SMR), qui, le 25 février 2022, a conclu que les différentes atteintes avaient pour conséquence de limiter la capacité de travail de l’assurée à une activité adaptée légère, n’impliquant ni élévation du membre supérieur droit au-dessus de l'horizontale, ni port de charges avec le membre supérieur droit, ni travaux en hauteur, ni marche en terrain irrégulier et permettant d’éviter les stations statiques prolongées debout et assise ainsi que le port de charges lourdes. Le SMR a retenu une fatigabilité, mais aussi une bonne adaptation globale sur le plan psychiatrique.

d. Le 28 avril 2022, l'OAI a procédé à une enquête économique sur le ménage. Après avoir résumé la situation familiale et médicale de l'assurée, ainsi que ses limitations fonctionnelles, il a retenu un statut ménager du 1er décembre 2012 au 31 août 2015, puis un statut mixte dès le 1er septembre 2015. En effet, l'assurée avait expliqué que le statut de diplomate de son mari ne lui permettait pas de travailler, cela ne se faisant pas selon leurs traditions : une femme de diplomate se devait de rester à la maison pour s'occuper des enfants. Cette situation lui convenait ainsi, mais en 2015, lorsque son mari avait été licencié, elle avait songé à travailler, car leur situation ne leur permettait pas d'obtenir de l'aide financière de la part de la Suisse. Elle avait alors fait les démarches pour devenir patrouilleuse scolaire, ce qui avait été accepté par la commune d'Onex, où ils habitaient alors. Malheureusement, forcée de déménager dans un appartement social aux Acacias, elle n'avait pu accepter cet emploi. L'assurée disait vouloir travailler pour aider sa famille financièrement, mais ne pas souhaiter exercer à 100%. L'activité de patrouilleuse scolaire à 30% aurait été idéale dans sa situation. Son mari n'avait pas retrouvé d'activité lucrative. Il faisait du bénévolat deux matinées par semaine.

Les empêchements et l'aide exigible des proches pour l’accomplissement des tâches ménagères étaient évalués comme suit :

champs d’activité

exigibilité

pondération

empêchement

empêchement pondéré

alimentation

20%

40%

20%

8%

entretien du logement

50%

30%

50%

15%

achats et courses

50%

10%

50%

5%

lessive et entretien des vêtements

25%

10%

25%

2.5%

soins et assistance aux enfants et aux proches

0%

10%

0%

0%

jardin, extérieurs et animaux domestiques

0%

0%

0%

0%

total empêchement pondéré sans aide exigible

 

30.5%

aide exigible retenue

30.5%

total empêchement pondéré en tenant compte de l’aide exigible

 

0%

Il a ainsi été constaté que les empêchements, évalués à 30.5% dans la sphère ménagère, étaient complètement compensés par l’aide exigible de la part de la famille de l’intéressée, soit son mari, ses deux enfants et le compagnon de sa fille, qui partageaient le logement familial.

e. Le 23 mai 2022, l’OAI a adressé à l'assurée un projet de décision dont il ressortait qu'il se proposait de rejeter sa demande. L’existence d'une atteinte à la santé invalidante était reconnue dès 2012. La capacité de gain de l'assurée avait été nulle entre le 1er janvier 2012 et le 31 janvier 2014.

Le statut retenu était celui de personne non active consacrant tout son temps à ses travaux habituels jusqu'au 31 août 2015. Il ressortait de l'enquête ménagère que l’empêchement à effectuer les travaux habituels était totalement compensé par l’aide exigible des proches. Le taux d'invalidité était donc nul de l'issue du délai d'attente, le 1er janvier 2013.

À partir du 1er septembre 2015, le statut retenu était celui de personne se consacrant à 30% à son activité professionnelle et, pour les 70% restants, à son ménage. La capacité de gain, dans une activité, avait été entière depuis le 1er février 2014, de 80% du 1er février 2016 au 31 décembre 2020, de 50% du 1er janvier 2021 au 31 juillet 2021, puis à nouveau de 100% dès le 1er août 2021. En prenant en considération ces incapacités de travail, les taux d’invalidité étaient les suivants :

du 1er février 2016 au 31 décembre 2017 :

activités

parts en %

perte économique/

empêchement en %

invalidité en %

professionnelle

30%

20%

6%

travaux habituels

70%

0%

0%

taux d'invalidité

6%

du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020 (modification des règles de calcul en matière de comparaison des revenus) :

professionnelle

30%

44%

13.2%

travaux habituels

70%

0%

0%

taux d'invalidité

13.2%

du 1er janvier au 31 juillet 2021 :

professionnelle

30%

85%

25.5%

travaux habituels

70%

0%

0%

taux d'invalidité

26%

À partir du 1er août 2021, la capacité de gain de l’assurée était entière dans une activité adaptée.

f. L’assurée a informé l'OAI, par courrier du 28 juin 2022, que des acouphènes irréparables, chroniques, lui avaient été diagnostiqués, qui bouleversaient sa vie quotidienne. Dans un certificat du 20 janvier 2021, le docteur I______, spécialiste FMH en oto-rhino-laryngologie (ORL), attestait notamment que l’assurée présentait les signes d'une légère surdité de perception à gauche. La perte auditive à gauche, vraisemblablement à l’origine de l'acouphène, relevait probablement d'une surdité brusque, d'étiologie indéterminée. Il n'y avait pas de traitement efficace spécifique à proposer concernant l'acouphène. Il avait dès lors recommandé à l'assurée une attitude d'adaptation et d'« habituation ».

g. Le 30 juin 2022, le SMR a considéré que les acouphènes n'étaient pas invalidants, mais qu'il y avait lieu d'ajouter au nombre des limitations fonctionnelles déjà retenues la nécessité d’éviter les environnements bruyants depuis janvier 2021. Ses précédentes conclusions restaient valables.

h. Par décision formelle du 7 juillet 2022, l’OAI a nié à l'assurée le droit à toute prestation en reprenant les termes du projet précédemment communiqué.

C. a. Le 5 septembre 2022, l'assurée a interjeté recours auprès de la Cour de céans en concluant à l’octroi d’une demi-rente d’invalidité au moins dès août 2020. En substance, elle conteste être à nouveau capable de travailler depuis le 1er août 2021. Elle conteste également le taux d’occupation qui aurait été le sien si son état de santé le lui avait permis, ainsi que l’aide considérée comme exigible pour le ménage de la part de ses proches.

b. Invité à se déterminer, l’OAI, dans sa réponse du 1er novembre 2022, a conclu au rejet du recours.

c. Entendue en comparution personnelle le 2 février 2023, la recourante a déclaré n'avoir jamais travaillé, parce que, dans la culture malgache, les femmes ne travaillent pas.

Cependant, elle a tenu une petite épicerie, à Madagascar, qu’elle a conservée un moment après son mariage, sans pouvoir dire pendant combien de temps exactement.

Lorsque son mari a été licencié en 2015, elle a cherché un emploi de patrouilleuse scolaire, un tel poste correspondant à son état de santé. Elle est vite fatiguée. La commune d'Onex a accepté de l'engager, mais elle a dû renoncer à cet emploi en raison de son déménagement aux Acacias.

La recourante allègue que, si son état de santé le lui avait permis, elle aurait aimé travailler à la Poste à un taux compris entre 50% et 70%, voire plus. Elle estime toutefois ne pouvoir travailler qu'à 50%, en raison de ses problèmes de santé et, surtout, de la fatigue mentale qu'ils entraînent.

Elle conteste que son état de santé se soit amélioré depuis 2020. Les injections de cortisone la soulagent, mais ne la guérissent pas et contribuent à son état de fatigue.

À l'issue de l'audience, un délai a été octroyé à la recourante afin qu'elle produise tous documents médicaux utiles à l'appui de sa position.

d. Après avoir demandé un report de délai, la recourante a informé la Cour de céans, par courrier du 15 mars 2023, n'avoir aucune pièce médicale supplémentaire à produire.

e. Le 30 mars 2023, l'intimé a persisté dans ses conclusions.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité, du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’assurance-invalidité ; RO 2021 705).

4.1 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

4.2 En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées ci- après dans leur ancienne teneur.

5.             Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement, le recours est recevable (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

6.             Le litige porte sur la question de savoir si la recourante a droit à une rente d’invalidité, singulièrement sur le taux d'activité qui aurait été le sien si son état de santé le lui avait permis, le taux de l’aide exigible dans le ménage de la part des membres de sa famille et le degré d’incapacité de travail dès le 1er août 2021.

7.              

7.1  

7.1.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

7.1.2 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

7.1.3 En vertu de l’art. 29 al. 1 LAI, le droit à la rente au sens de l’art. 28 prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré présente une incapacité de gain durable de 40 % au moins (art. 7 LPGA), ou dès laquelle l’assuré a présenté, en moyenne, une incapacité de travail de 40 % au moins pendant une année sans interruption notable (art. 6 LPGA).

7.1.4 Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

7.2  

7.2.1 Tant lors de l'examen initial du droit à la rente qu'à l'occasion d'une révision de celle-ci (art. 17 LPGA), il faut examiner sous l'angle des art. 4 et 5 LAI quelle méthode d'évaluation de l'invalidité il convient d'appliquer (art. 28a LAI, en corrélation avec les art. 27ss du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 - RAI - RS 831.201). Le choix de l'une des trois méthodes entrant en considération (méthode générale de comparaison des revenus, méthode mixte, méthode spécifique) dépendra du statut du bénéficiaire potentiel de la rente : assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, assuré exerçant une activité lucrative à temps partiel, assuré non actif. On décidera que l'assuré appartient à l'une ou l'autre de ces trois catégories en fonction de ce qu'il aurait fait dans les mêmes circonstances si l'atteinte à la santé n'était pas survenue. Lorsque l'assuré accomplit ses travaux habituels, il convient d'examiner, à la lumière de sa situation personnelle, familiale, sociale et professionnelle, si, étant valide il aurait consacré l'essentiel de son activité à son ménage ou s'il aurait exercé une activité lucrative. Pour déterminer le champ d'activité probable de l'assuré, il faut notamment prendre en considération la situation financière du ménage, l'éducation des enfants, l'âge de l'assuré, ses qualifications professionnelles, sa formation ainsi que ses affinités et talents personnels (ATF 144 I 28 consid. 2.3 ; 137 V 334 consid. 3.2 ; 117 V 194 consid. 3b ; Pratique VSI 1997 p. 301 ss consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_722/2016 du 17 février 2017 consid. 2.2). Cette évaluation tiendra également compte de la volonté hypothétique de l'assurée, qui comme fait interne ne peut être l'objet d'une administration directe de la preuve et doit être déduite d'indices extérieurs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2015 du 11 mai 2015 consid. 2.3 et l'arrêt cité) établis au degré de la vraisemblance prépondérante tel que requis en droit des assurances sociales (ATF 126 V 353 consid. 5b).

Selon la pratique, la question du statut doit être tranchée sur la base de l'évolution de la situation jusqu'au prononcé de la décision administrative litigieuse, encore que, pour admettre l'éventualité de la reprise d'une activité lucrative partielle ou complète, il faut que la force probatoire reconnue habituellement en droit des assurances sociales atteigne le degré de vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 28 consid. 2.3 et les références ; 141 V 15 consid. 3.1 ; 137 V 334 consid. 3.2 ; 125 V 146 consid. 2c ainsi que les références).

8.              

8.1  

8.1.1 Lorsqu'il convient d'évaluer l'invalidité d'un assuré d'après la méthode mixte, l'invalidité des assurés qui n'exercent que partiellement une activité lucrative est, pour cette part, évaluée selon la méthode ordinaire de comparaison des revenus (art. 28a al. 3 LAI en corrélation avec l’art. 16 LPGA). S'ils se consacrent, en outre, à leurs travaux habituels, l'invalidité est fixée selon la méthode spécifique pour cette activité. Dans ce cas, il faut déterminer la part respective de l'activité lucrative et celle de l'accomplissement des autres travaux habituels et calculer le degré d'invalidité d'après le handicap dont l'assuré est affecté dans les deux activités en question (art. 28a al. 3 LAI en corrélation avec l'art. 27bis RAI, ainsi que les art. 16 LPGA et 28a al. 2 LAI, en corrélation avec les art. 27 RAI et 8 al. 3 LPGA). La part de l'activité professionnelle dans l'ensemble des travaux de l'assuré est fixée en comparant l'horaire de travail usuel dans la profession en question et l'horaire accompli par l'assuré valide ; on calcule donc le rapport en pour-cent entre ces deux valeurs (ATF 104 V 136 consid. 2a ; RCC 1992 p. 136 consid. 1b). La part des travaux habituels constitue le reste du pourcentage (ATF 130 V 393 consid. 3.3 ; 104 V 136 consid. 2a). Activité lucrative et travaux habituels non rémunérés sont en principe complémentaires dans le cadre de la méthode mixte. En d’autres termes, ces deux domaines d'activités forment ensemble, en règle générale, un taux de 100% et la proportion de la partie ménagère ne doit pas être fixée en fonction de l'ampleur des tâches entrant dans le champ des travaux habituels. Aussi, ne sont pas déterminants le temps que l'assuré prend pour effectuer ses tâches ménagères, par exemple, s'il préfère les exécuter dans un laps de temps plus important ou plus court, ou la grandeur de l'appartement (ATF 141 V 15 consid. 4.5).

8.1.2 Selon l’art. 27bis RAI en vigueur depuis le 1er janvier 2018, pour les personnes qui exercent une activité lucrative à temps partiel et accomplissent par ailleurs des travaux habituels visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, le taux d'invalidité est déterminé par l'addition des taux suivants : a. le taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative ; b. le taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels (al. 2). Le calcul du taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative est régi par l'art. 16 LPGA, étant entendu que : a. le revenu que l'assuré aurait pu obtenir de l'activité lucrative exercée à temps partiel, s'il n'était pas invalide, est extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps ; b. la perte de gain exprimée en pourcentage est pondérée au moyen du taux d'occupation qu'aurait l'assuré s'il n'était pas invalide (al. 3). Pour le calcul du taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels, on établit le pourcentage que représentent les limitations dans les travaux habituels par rapport à la situation où l'assuré ne serait pas invalide. Ce pourcentage est pondéré au moyen de la différence entre le taux d'occupation visé à l'al. 3, let. b, et une activité lucrative exercée à plein temps (al. 4).

L’élément nouveau est que le revenu sans invalidité n’est plus déterminé sur la base du revenu correspondant au taux d’occupation de l’assuré, mais est désormais extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps. La détermination du revenu d’invalide est, quant à elle, inchangée. La perte de gain exprimée en pourcentage du revenu sans invalidité est ensuite pondérée au moyen du taux d’occupation auquel l’assuré travaillerait s’il n’était pas invalide.

Le taux d’invalidité en lien avec les travaux habituels est, comme c’était le cas auparavant, déterminé au moyen de la méthode de comparaison des types d’activités prévue à l’art. 28a al. 2 LAI. De même que pour les assurés qui accomplissent des travaux habituels à plein temps, l’invalidité est calculée en fonction de l’incapacité de l’assuré à accomplir ses travaux habituels. La limitation ainsi obtenue est pondérée au moyen de la différence entre le taux d’occupation de l’activité lucrative et une activité à plein temps. Le taux d’invalidité total est obtenu en additionnant les deux taux d’invalidité pondérés (cf. Ralph LEUENBERGER, Gisela MAURO, Changements dans la méthode mixte, in Sécurité sociale/CHSS n° 1/2018 p. 45).

En résumé, conformément à l’art. 27 RAI, dans le cadre de la méthode mixte, le degré d’invalidité est calculé comme suit (cf. n° 3101 de la circulaire sur l’invalidité et l’impotence dans l’assurance-invalidité [CIIAI], en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 et n° 3703 de la circulaire sur l’invalidité et les rentes dans l’assurance-invalidité [CIRAI], en vigueur depuis le 1er janvier 2022) :

(taux d’occupation avant l’invalidité x degré d’invalidité) + (taux des travaux habituels (ménage) x limitation dans le ménage) = degré d’invalidité.

8.2 Il existe dans l'assurance-invalidité – ainsi que dans les autres assurances sociales – un principe général selon lequel l'assuré qui demande des prestations doit d'abord entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement attendre de lui pour atténuer les conséquences de son invalidité (cf. ATF 138 I 205 consid. 3.2). Dans le cas d'une personne rencontrant des difficultés à accomplir ses travaux ménagers à cause de son handicap, le principe évoqué se concrétise notamment par l'obligation de solliciter l'aide des membres de la famille. Un empêchement dû à l'invalidité ne peut être admis chez les personnes qui consacrent leur temps aux activités ménagères que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies sont exécutées par des tiers contre rémunération ou par des proches qui encourent de ce fait une perte de gain démontrée ou subissent une charge excessive. L'aide apportée par les membres de la famille à prendre en considération dans l'évaluation de l'invalidité de l'assuré au foyer va plus loin que celle à laquelle on peut s'attendre sans atteinte à la santé. Il s'agit en particulier de se demander comment se comporterait une famille raisonnable, si aucune prestation d'assurance ne devait être octroyée. Cela ne signifie toutefois pas qu'au titre de l'obligation de diminuer le dommage, l'accomplissement des activités ménagères selon chaque fonction particulière ou dans leur ensemble soit répercuté sur les autres membres de la famille, avec la conséquence qu'il faille se demander pour chaque empêchement constaté s'il y a un proche qui pourrait le cas échéant entrer en ligne de compte pour exécuter en remplacement la fonction partielle correspondante (ATF 133 V 504 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_785/2014).

8.3  

8.3.1 Chez les assurés travaillant dans le ménage, le degré d'invalidité se détermine, en règle générale, au moyen d'une enquête économique sur place, alors que l'incapacité de travail correspond à la diminution – attestée médicalement – du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels (ATF 130 V 97).

L'évaluation de l'invalidité des assurés pour la part qu'ils consacrent à leurs travaux habituels nécessite l'établissement d'une liste des activités que la personne assurée exerçait avant la survenance de son invalidité, ou qu'elle exercerait sans elle, qu'il y a lieu de comparer ensuite à l'ensemble des tâches que l'on peut encore raisonnablement exiger d'elle, malgré son invalidité, après d'éventuelles mesures de réadaptation. Pour ce faire, l'administration procède à une enquête sur place et fixe l'ampleur de la limitation dans chaque domaine entrant en considération. En vertu du principe général de l'obligation de diminuer le dommage, l'assuré qui n'accomplit plus que difficilement ou avec un investissement temporel beaucoup plus important certains travaux ménagers en raison de son handicap doit en premier lieu organiser son travail et demander l'aide de ses proches dans une mesure convenable. La jurisprudence pose comme critère que l'aide ne saurait constituer une charge excessive du seul fait qu'elle va au-delà du soutien que l'on peut attendre de manière habituelle sans atteinte à la santé. En ce sens, la reconnaissance d'une atteinte à la santé invalidante n'entre en ligne de compte que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies le sont par des tiers contre rémunération ou par des proches et qu'elles constituent à l'égard de ces derniers un manque à gagner ou une charge disproportionnée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_191/2021 du 25 novembre 2021 consid. 6.2.2 et les références).

8.3.2 Selon la jurisprudence, une enquête ménagère effectuée au domicile de la personne assurée constitue en règle générale une base appropriée et suffisante pour évaluer les empêchements dans l’accomplissement des travaux habituels. En ce qui concerne la valeur probante d’un tel rapport d’enquête, il est essentiel qu’il ait été élaboré par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il y a par ailleurs lieu de tenir compte des indications de l'assuré et de consigner dans le rapport les éventuelles opinions divergentes des participants. Enfin, le texte du rapport doit apparaître plausible, être motivé et rédigé de manière suffisamment détaillée par rapport aux différentes limitations, de même qu'il doit correspondre aux indications relevées sur place. Si toutes ces conditions sont réunies, le rapport d’enquête a pleine valeur probante. Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision dans le sens précité, le juge n’intervient pas dans l’appréciation de l’auteur du rapport sauf lorsqu’il existe des erreurs d’estimation que l’on peut clairement constater ou des indices laissant apparaître une inexactitude dans les résultats de l’enquête (ATF 140 V 543 consid. 3.2.1 ; 129 V 67 consid. 2.3.2 publié dans VSI 2003 p. 221 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_625/2017 du 26 mars 2018 consid. 6.2 et arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 733/06 du 16 juillet 2007).

8.4  

8.4.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

8.4.2 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d’autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 ; 115 V 133 consid. 2 ; 114 V 310 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_442/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2).

8.4.3 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

8.4.4 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). En effet, un médecin traitant a naturellement le souci d'éviter tout ce qui pourrait perturber son travail et souhaite notamment éviter de provoquer chez son patient un ressentiment qui rendrait sa mission plus difficile ou même impossible (ATF 124 I 170 consid. 4). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

9.              

9.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, 126 V 353 consid. 5b, 125 V 193 consid. 2). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).

9.3 En l’espèce, la recourante ne conteste pas le statut mixte qui lui a été reconnu dès le 1er septembre 2015, mais soutient, dans un premier grief, que, si son état de santé le lui avait permis, elle aurait exercé une activité à un taux supérieur à celui de 30% retenu par l’intimé.

Dans son recours, l’assurée a d’abord évoqué un taux d’occupation compris entre 60% et 80%, puis, dans un second temps, lors de son audition, un taux de 50% ou 70%.

Il ressort des pièces, et notamment des rapports médicaux et des déclarations de la recourante lors de son audition par la Cour de céans, que l’intéressée n’a jamais exercé d'activité professionnelle en Suisse, même lorsqu'elle n'avait aucun problème de santé, ce qu’elle a expliqué par la culture malgache. Ce n'est que lorsque son époux a perdu son emploi qu’elle a recherché un emploi. Les déclarations de la recourante quant au fait qu'elle aurait recherché un poste à 60% ou 80%, voire 50% à 70%, ne sont étayées par aucun élément du dossier. Son unique recherche d'emploi a porté sur un poste de patrouilleuse scolaire à 30%, en 2015, auquel elle a finalement renoncé en raison de son déménagement. Elle a par ailleurs confirmé qu’elle ne souhaitait pas travailler à plein temps. Certes, lorsqu'elle a postulé pour le poste de patrouilleuse, l’assurée avait déjà rencontré des problèmes de santé importants, qui pourraient expliquer qu’elle se soit contentée d’un taux d’occupation de 30%. La Cour de céans relève cependant que, dans les années qui ont suivi, bien que son époux n'ait pas retrouvé d'emploi et alors que ses médecins lui avaient reconnu une capacité de travail de 50% à 80%, la recourante n'a pas recherché d’autre emploi. En tout cas, elle ne l’allègue pas et ne le démontre pas.

Au vu des considérations qui précèdent, force est d’admettre qu’aucun élément du dossier ne permet de retenir que la recourante aurait travaillé à un taux supérieur à 30% si elle n’avait pas été atteinte dans sa santé. Dans ces circonstances, c’est à juste titre que l’intimé a retenu un statut mixte de personne active à 30% seulement.

9.4 Dans un second grief, la recourante critique l’aide exigible retenue s’agissant de sa famille. Elle ne conteste en revanche pas le contenu de l'enquête ménagère quant au descriptif de sa situation personnelle, médicale ou encore de la répartition des tâches. Elle reproche seulement à l'intimé d'avoir surestimé l'aide de ses proches.

L'intimé a retenu une aide exigible des membres de la famille de l’assurée de 30.5%. La recourante soutient que ce taux devrait être de 15% au maximum. Elle explique que sa fille suit des études, rencontre quelques problèmes de santé et a un enfant en bas âge. Quant au compagnon de sa fille, il travaille dans la restauration, avec des horaires incompatibles avec ses besoins d’aide. En outre, sa fille et son compagnon cherchent à quitter le domicile familial. Quant à son fils, il est encore jeune et en études.

En l'occurrence, l'enquête ménagère constate en particulier que le mari de la recourante, ainsi que sa fille et son compagnon, adultes, et le fils de la recourante, adolescent, participent activement aux tâches ménagères. Les repas du soir sont élaborés par la recourante, avec l'aide de son fils et de son mari, car elle rencontre des difficultés à rester debout pour surveiller la cuisson des plats. Sa fille se charge de la vaisselle. Son fils se débrouille seul pour son repas de midi et son mari prépare un repas simple pour leur petit-fils. Elle-même se réchauffe un plat de la veille. Pour ce qui est de l'entretien du logement, les enfants, le compagnon de la fille, ainsi que le mari de la recourante le prennent majoritairement en charge, la recourante s'occupant de la chambre conjugale et passant le balai. Elle continue à faire les emplettes dans le quartier et ses proches s'occupent des courses le samedi. Toutes les lessives sont faites par les enfants, sous la supervision de la recourante, qui ne porte rien. Elle aide à étendre le linge et à le plier, assise sur le canapé. Chacun range son linge. La recourante continue à participer à l'éducation de ses enfants, mais son fils est autonome et sa fille adulte. Avant qu’elle ne soit malade, son mari était en charge des contacts scolaires et accompagnait les enfants aux activités sportives. Elle accompagnait les enfants aux rendez-vous médicaux. À présent, c'est son mari qui accompagne leur fils à ces rendez-vous, si besoin. La recourante se charge de récupérer son petit-fils au jardin d'enfants se trouvant à côté de leur domicile. Elle le garde, avec son mari, l'après-midi, mais elle n'a pas beaucoup besoin de s'occuper de l'enfant, car il dort ou s'occupe seul. Il lui arrive de le laisser seul avec son mari, pendant qu'elle va se reposer. Ainsi, il apparaît que les tâches sont réparties équitablement entre les membres de la famille et que l'aide demandée à chacun ne dépasse pas ce qui peut être raisonnablement exigé de chacun.

Quoi qu’il en soit, dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a rappelé que, selon sa jurisprudence constante, dans l'assurance-invalidité, ainsi que dans les autres assurances sociales, on applique de manière générale le principe selon lequel un assuré doit, avant de requérir des prestations, entreprendre de son propre chef tout ce qu'on peut raisonnablement attendre d'une personne raisonnable dans la même situation, pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité. Dans le cas d'une personne rencontrant des difficultés à accomplir ses travaux ménagers à cause de son handicap, le principe évoqué se concrétise notamment par l'obligation d'organiser son travail et de solliciter l'aide des membres de la famille dans une mesure convenable. Un empêchement dû à l'invalidité ne peut être admis chez les personnes qui consacrent leur temps aux activités ménagères que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies sont exécutées par des tiers contre rémunération ou par des proches qui encourent de ce fait une perte de gain démontrée ou subissent une charge excessive. L'aide apportée par les membres de la famille à prendre en considération dans l'évaluation de l'invalidité de l'assuré au foyer va plus loin que celle à laquelle on peut s'attendre sans atteinte à la santé. Il s'agit en particulier de se demander comment se comporterait une cellule familiale raisonnable si elle ne pouvait pas s'attendre à recevoir des prestations d'assurance. La jurisprudence ne pose pas de grandeur limite au-delà de laquelle l'aide des membres de la famille ne serait plus possible. L'aide exigible de tiers ne doit cependant pas devenir excessive ou disproportionnée (ATF 9C_248/2022 du 23 avril 2023 consid. 5.3.1).

La jurisprudence ne répercute pas sur un membre de sa famille l'accomplissement de certaines activités ménagères, avec la conséquence qu'il faudrait se demander pour chaque empêchement si cette personne entre effectivement en ligne de compte pour l'exécuter en remplacement. Au contraire, la possibilité pour la personne assurée d'obtenir concrètement de l'aide de la part d'un tiers n'est pas décisive dans le cadre de l'évaluation de son obligation de réduire le dommage. Ce qui est déterminant, c'est le point de savoir comment se comporterait une cellule familiale raisonnable, soumise à la même réalité sociale, si elle ne pouvait pas s'attendre à recevoir des prestations d'assurance. Dans le cadre de son obligation de réduire le dommage (art. 7 al. 1 LAI), la personne qui requiert des prestations de l'assurance-invalidité doit par conséquent se laisser opposer le fait que des tiers – par exemple son conjoint (art. 159 al. 2 et 3 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210) ou ses enfants (art. 272 CC) – sont censés remplir les devoirs qui leur incombent en vertu du droit de la famille (arrêt op. cit. consid. 5.3.2). 

En l’occurrence, le taux retenu – 30,55 – paraît parfaitement raisonnable, étant rappelé que le mari de la recourante ne travaille pas et que deux autres adultes partagent le foyer. À cet égard, on relèvera que, dans un arrêt du 5 mars 2014, le Tribunal fédéral a confirmé une exigibilité globale de 30% à charge du mari d'une assurée et de leurs trois enfants, considérant qu'il incombait à la famille de s'organiser afin de décharger l'assurée des travaux ménagers qu'elle ne pouvait plus accomplir ou effectuer qu'avec difficultés (arrêt du Tribunal fédéral 9C_784/2013 consid. 6).

9.5 Dans un troisième et dernier grief, la recourante conteste avoir recouvré une pleine capacité de travail le 1er août 2021. Elle l’estime pour sa part à 50% au maximum, en raison de ses douleurs lombaires, mais également des acouphènes qui affectent son quotidien, lui font perdre le sommeil et lui occasionnent des angoisses.

L’intimé, lui, considère que, dans une activité adaptée à son état de santé, la capacité de travail de l’assurée a été de 100% du 1er février 2014 au 31 janvier 2015, de 80% du 1er février 2016 au 31 décembre 2020, de 50% du 1er janvier 2021 au 31 juillet 2021, puis à nouveau de 100% dès le 1er août 2021.

Dans son rapport de mai 2021, la Dre E______ a estimé qu'un travail léger à 50% était exigible, tout en précisant qu'il était nécessaire d'attendre les résultats de l'IRM du 26 mai 2021 pour effectuer un nouveau bilan. La docteure a ajouté que, selon l'évolution de la douleur, une reprise du travail à 100% pouvait être envisagée. Le Dr H______, spécialiste chiropraticien, a soutenu, le 1er juillet 2021, que les douleurs lombaires quotidiennes de la recourante avaient disparu et n'apparaissaient plus que lors d'efforts plus importants, ce qui irait dans le sens d'une capacité de travail, dans une activité adaptée, retrouvée. En avril 2021, le Dr C______ a, quant à lui, attesté que, d'un point de vue psychiatrique, il n'y avait pas d'atteinte ayant un impact sur la capacité de travail. Il préconisait une activité adaptée aux limitations fonctionnelles physiques, afin de ne pas influencer négativement le tableau thymique.

Force est de constater que la Dre E______ n'a pas mentionné de date à partir de laquelle la pleine capacité de travail serait retrouvée et n'a pas émis d'avis à la suite de l'IRM de mai 2021, alors même qu'elle avait expressément réservé son opinion suite aux résultats de cet examen.

Bien qu'elle ait annoncé qu'elle fournirait des informations médicales complémentaires, la recourante n'en a produit aucune, que ce soit de la Dre E______ ou d’un autre médecin, sur la question des conséquences alléguées des acouphènes.

Quoi qu’il en soit, la question de la capacité de travail de l’assurée peut rester ouverte. En effet, il a été établi que, depuis le 1er septembre 2015, l'invalidité de la recourante doit être évaluée selon la méthode mixte, pour un statut d’active à 30%. Or, même en admettant une totale incapacité à exercer la moindre activité lucrative, cela conduirait à un taux d'invalidité de 30% au maximum, insuffisant pour ouvrir droit à une rente (art. 28 al. 2 LAI).

10.         Au vu de ce qui précède, la documentation versée au dossier permettant à la Cour de céans de statuer en connaissance de cause sur le bien-fondé de la décision attaquée, il n’y a pas lieu d’ordonner l'audition des proches ou des médecins de la recourante, par appréciation anticipée des preuves (ATF 122 II 464 consid. 4a).

11.         La décision de l’intimé de nier le droit à une rente à la recourante apparaît bien fondée. Le recours est rejeté.

12.         Un émolument de CHF 200.- est mis à la charge de la recourante, qui n’obtient pas gain de cause (art. 69 al. 1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le