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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1913/2022

ATAS/362/2023 du 04.05.2023 ( LAA ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1913/2022 ATAS/362/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 mai 2023

Chambre 3

 

En la cause

Madame A______

recourante

 

contre

CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS - SUVA

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en 1962, a été engagée le 1er octobre 2012 en qualité de responsable des dossiers administratifs.

b. Le 31 octobre 2012, pendant le temps d'essai et jour où elle s’est vu signifier son licenciement avec effet au 7 novembre 2012, l’assurée a été victime d'un accident (chute dans les escaliers).

B. a. Le 22 janvier 2014, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI), en invoquant l'atteinte à la santé d'origine accidentelle survenue le 31 octobre 2012.

b. Par décision du 23 novembre 2016, l'OAI lui a reconnu le droit à une rente entière à compter du 1er juillet 2014. Il a retenu qu'une première atteinte à la santé (somatique) avait entraîné une incapacité à exercer la moindre activité du 31 octobre 2012 au 31 août 2014 ; une deuxième (d'ordre psychiatrique), apparue en mars 2013, avait également entraîné une totale incapacité de travail, de mars à novembre 2013, puis à partir du 4 juin 2014.

c. Saisie d’un recours interjeté par l’assurée, la Cour de céans l’a déclaré irrecevable, faute d’intérêt pour agir (arrêt du 28 septembre 2017 [ATAS/887/2017]). Cet arrêt ayant été annulé par le Tribunal fédéral (arrêt du 5 mars 2018 [9C_758/2017]), la Cour de céans a statué à nouveau en date du 25 octobre 2018 (ATAS/990/2018) et confirmé, après instruction complémentaire, l’irrecevabilité du recours de l’assurée, faute d’intérêt pour agir.

C. a. Parallèlement, la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : SUVA), qui avait pris en charge les suites de l’événement, a mis un terme à ses prestations avec effet au 31 août 2014, date au-delà de laquelle elle a considéré que les troubles dont l’assurée souffrait encore n’étaient pas en lien avec l’accident (cf. décision sur opposition du 30 septembre 2014).

b. Saisie d’un recours de l’assurée, la Cour de céans l’a rejeté par arrêt du 16 mars 2015 (ATAS/198/2015). La Cour a considéré, au vu des éléments au dossier, que l’accident du 31 octobre 2012 n’avait plus d'incidence sur la capacité de travail de l’intéressée sur le plan somatique. Quant aux troubles psychiques, la Cour a expliqué que l’argumentation de l’assurée – qui se fondait sur le principe « post hoc, ergo propter hoc », voire celui selon lequel le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assurée – était erronée. En effet, les psychiatres attribuaient unanimement la cause des troubles psychiques au conflit professionnel – et non aux conséquences de la chute en tant que telle. Le lien de causalité naturelle devait donc être nié, tout comme celui de causalité adéquate, les conditions permettant de retenir l’existence de ce dernier n’étant pas non plus remplies. Cet arrêt est entré en force.

D. a. Le 12 janvier 2016, l’assurée a adressé à la SUVA une déclaration de sinistre indiquant qu’en date du 2 janvier 2016, étaient survenues des douleurs dans son coude et son épaule gauches, ainsi qu’au niveau des cervicales, alors qu’elle déplaçait un lit lors d’un déménagement. Selon elle, cet événement devait être considéré comme une rechute de l’accident du 31 octobre 2012.

b. Par décision du 8 mars 2016, la SUVA a refusé de prester, au motif qu’au moment de l’événement du 2 janvier 2016, l’assurée n’était plus sous contrat de travail et ne bénéficiait d’aucune indemnité journalière. Cette décision est entrée en force.

c. Par courrier du 6 mai 2021, l’assurée a déposé auprès de la SUVA une « demande de révision et de reconsidération » de sa décision du 8 mars 2016.

d. Par décision du 20 mai 2021, confirmée sur opposition le 20 septembre 2021, la SUVA a refusé d’entrer en matière sur la demande en reconsidération et refusé de donner suite à la demande de révision procédurale, dont elle a considéré que les conditions n’étaient pas remplies.

E. a. Le 26 mai 2021, l’assurée a remis à la SUVA une nouvelle déclaration de sinistre indiquant que, le 18 avril 2021, alors qu’elle descendait sa poubelle, sa cheville gauche avait lâché dans les escaliers, elle avait trébuché et s’était « tapé fort l’épaule gauche contre le mur », ce qui lui avait occasionné une forte douleur dans l’épaule et le côté gauches, des cervicales vers l’oreille.

b. Par décision du 16 décembre 2021, confirmée sur opposition le 5 mai 2022, la SUVA a refusé de prendre le cas en charge en rappelant que l’assurée ne lui était plus affiliée en avril 2021.

F. a. Par écriture du 6 mai 2022 expédiée le lendemain, l’assurée a saisi le Tribunal fédéral qui, par courrier du 10 juin 2022, a transmis son recours à la Cour de céans comme objet de sa compétence.

Dans son argumentation, l’assurée revient sur la décision de la SUVA de refuser de prester au-delà du 31 août 2014 suite à l’accident du 31 octobre 2012.

Elle allègue que, depuis lors, elle a subi deux nouveaux chocs au niveau de l’épaule gauche et qu’elle a dû subir une intervention à ce niveau en janvier 2022.

Elle reconnaît que le 12 janvier 2016 et le 18 avril 2021, elle n’était plus assurée contre le risque d’accident auprès de la SUVA, mais considère que les nouvelles atteintes seraient en lien de causalité avec l’accident initial d’octobre 2012.

Elle reproche à la SUVA une instruction lacunaire en tant qu’elle n’a pas cherché à établir si elle avait véritablement recouvré une pleine capacité de travail à compter de septembre 2014.

b. Invitée à se déterminer, l’intimée, dans sa réponse du 7 juillet 2022, a conclu au rejet du recours.

Elle rappelle que l’objet du litige se limite au point de savoir si l’assurée était au bénéfice d’une couverture d’assurance auprès d’elle lors de l’accident du 18 avril 2021, ce qui n’est pas le cas. La recourante se limite à remettre en cause l’instruction médicale de son dossier de manière quelque peu confuse. Or, il est évident qu’elle ne peut rattacher les troubles de son épaule et de sa cheville gauches à l’accident du 31 octobre 2012. L’intimée rappelle à cet égard que les troubles physiques encore présents au-delà du 31 août 2014 ont été considérés par arrêt entré en force comme n’étant plus en lien de causalité avec l’accident du 31 octobre 2012.

c. Une audience s’est tenue en date du 2 février 2023.

La recourante a expliqué qu’elle entend réclamer, par le dépôt de sa déclaration de sinistre, « la révision des décisions antérieures de la SUVA, vu toutes les erreurs commises » (sic). Il ne s’agit en réalité ni d’une demande de prestations pour rechute, ni d’une nouvelle demande de prestations, mais bel et bien d’une demande de révision pour éléments nouveaux.

Ce à quoi il lui a été fait remarquer que si elle entendait réclamer une révision procédurale, elle aurait dû saisir la Cour de céans et diriger sa demande contre l’arrêt du 16 mars 2015.

La recourante a expliqué qu’elle entend démontrer que les décisions de la SUVA et de la Cour ont été faussées en raison d'une confusion portant sur le nom de son psychiatre. En effet, la docteure A______, consultée en premier, est psychiatre au Centre chirurgical des Acacias. Ce médecin, qu’elle n’a plus consulté par la suite, était psychiatre. La SUVA et les autres assurances l'ont occulté pour se concentrer sur son médecin traitant, soit le docteur C______. La recourante souligne que le rapport initial a été signé par un psychiatre et non son médecin traitant, bien que le nom de celui-ci figurât dans l’en-tête. Cette méprise aurait, selon elle, eu pour conséquence un refus, à tort, des prestations.

L’intimée a fait remarquer que les faits ont été établis sur la base du rapport de la Clinique romande de réadaptation et non du rapport initial.

d. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             En l’occurrence, si l’on considère l’écriture de l’assurée du 6 mai 2022 - adressée au Tribunal fédéral et transmise par ce dernier à la Cour de céans comme objet de sa compétence – comme un recours contre la décision sur l’opposition du 5 mai 2022, il convient de considérer qu’interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, il est recevable (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

5.             Dans la mesure où, dans son écriture du 6 mai 2022, la recourante invoque deux nouveaux chocs au niveau de l’épaule gauche, en janvier 2016, puis en avril 2021, le litige porte sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’intimée a refusé de prester pour le nouveau sinistre annoncé le 26 mai 2021 et survenu le 18 avril 2021. On rappellera, s’agissant de l’évènement, survenu le 2 janvier 2016, que, par décision du 8 mars 2016, la SUVA a refusé de prester. Cette décision étant entrée en force et la SUVA ayant refusé de la reconsidérer, il n’y a pas lieu d’y revenir ici.

6.              

6.1 La recourante argue que l’atteinte de 2021 serait en lien de causalité avec l’évènement de 2012, ce que l’intimée conteste, rappelant qu’il a été établi par décisions entrées en force qu’il n’y avait plus de lien de causalité entre les troubles physiques encore présents au-delà du 31 août 2014 et l’évènement initial.

6.2 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA ; ATF 129 V 402 consid. 2.1 ; 122 V 230 consid. 1 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

6.3 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

6.4 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 ; 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a : 117 V 359 consid. 5d/bb ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

6.5 Les prestations d'assurance sont également allouées en cas de rechutes et de séquelles tardives (art. 11 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents, du 20 décembre 1982 - OLAA - RS 832.202). Selon la jurisprudence, les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu'elles sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement, mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute lorsque c'est la même atteinte qui se manifeste à nouveau. On parle de séquelles tardives lorsqu'une atteinte apparemment guérie produit, au cours d'un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 123 V 137 consid. 3a ; 118 V 293 consid. 2c et les références).

Les rechutes et suites tardives se rattachent donc par définition à un événement accidentel effectif. Corrélativement, elles ne peuvent faire naître une obligation de l'assureur-accidents (initial) de verser des prestations que s'il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre les nouvelles plaintes de l'intéressé et l'atteinte à la santé causée à l'époque par l'accident assuré (ATF 118 V 296 consid. 2c et les références ; RAMA 2006 n° U 570 p. 74 consid. 1.5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 80/05 du 18 novembre 2005 consid.1.1).

Si la situation se modifie après la clôture du cas, une révision au sens de l’art. 17 LPGA n’est pas possible, dès lors que cette disposition ne peut porter que sur des rentes en cours. La modification de la situation, en lien de causalité avec l’accident, peut être invoquée en faisant valoir une rechute ou des séquelles tardives de l’événement accidentel ayant force de chose jugée. Cette manière de procéder correspond à la demande nouvelle en matière d’assurance-invalidité (RAMA 1994 n° U 189 p. 139).

7.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

8.             La procédure dans le domaine des assurances sociales est régie par le principe inquisitoire d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'assureur (art. 43 al. 1 LPGA) ou, éventuellement, par le juge (art. 61 let. c LPGA). Ce principe n'est cependant pas absolu. Sa portée peut être restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

Il incombe à l’assuré d’établir, au degré de vraisemblance prépondérante, l’existence d'un rapport de causalité naturelle entre l’état pathologique qui se manifeste à nouveau et l’accident (REAS 2002 p. 307). En l’absence de preuve, la décision sera défavorable à l’assuré (ATF 117 V 261 consid. 3b et les références ; RAMA 1994 n° U 206 p. 327 consid. 1 et les références). Plus le temps écoulé entre l’accident et la manifestation de l'affection est long, plus les exigences quant à la preuve, au degré de la vraisemblance prépondérante du rapport de causalité naturelle doivent être sévères (SVR 2016 n° UV p. 55 consid. 2.2.2 ; cf. également arrêt du Tribunal fédéral 17 du 3 mai 2018 consid. 4.2).

9.             En l’espèce, ainsi que le fait remarquer l’intimée, il a été établi, par décisions de cette dernière confirmées par la Cour de céans le 16 mars 2015, que le lien de causalité entre l’évènement initial et les atteintes – tant somatiques que psychiques – avait été rompu le 31 août 2014.

En l’occurrence, la recourante ne démontre aucunement l’existence vraisemblable d’un lien de causalité naturelle entre l’état pathologique de son épaule gauche et l’évènement initial. Au contraire, il ressort de ses explications que c’est un nouvel accident (décrit comme un choc sur l’épaule, après avoir trébuché dans les escaliers, en avril 2021), qui est à l’origine de la nouvelle atteinte, qui se trouve toucher à nouveau la même partie du corps, soit l’épaule gauche.

Il est manifeste que l’on ne se trouve dès lors pas en présence d’une atteinte à la santé qui n’aurait pas été totalement guérie : ce n’est pas une même atteinte qui se manifeste à nouveau, mais une même partie du corps touchée par un nouvel accident. Il ne s’agit dès lors pas de modifications organiques qui auraient conduit à un état pathologique différent, puisqu’il y a eu intervention d’un facteur extérieur. Celui-ci est survenu en 2021, alors que la recourante n’était plus affiliée à l’intimée, ce que l’intéressée ne conteste d’ailleurs pas. Elle en a convenu en audience.

Eu égard à ces considérations, c’est donc à juste titre que l’intimée a refusé de prester pour l’évènement annoncé en 2021.

10.         Ce que demande en réalité l’assurée, comme elle l’a expliqué en audience, c’est une révision de l’arrêt rendu par la Cour de céans en 2015. Elle soutient en effet qu’il a été à tort considéré qu’elle avait recouvré une pleine capacité de travail à compter de septembre 2014 – recte : que le lien de causalité avait été rompu à compter de cette date – et que des faits nouveaux permettraient de le démontrer. Ces nova, selon elle, consistent dans le fait que le rapport initial sur lequel se seraient fondés tous les intervenants a été signé par un médecin psychiatre et non par son médecin traitant, comme retenu de manière erronée par les autorités.

10.1 En vertu de l’art. 53 al. 1 LPGA, les décisions formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant.

Aux termes de l'art. 55 al. 1 LPGA, les points de procédure qui ne sont pas réglés de manière exhaustive aux art. 27 à 54 LPGA ou par les dispositions des lois spéciales sont régis par la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA - RS 172.021). Selon l'art. 67 al. 1 PA, la demande de révision doit être adressée par écrit à l'autorité qui a rendu la décision dans les 90 jours dès la découverte du motif de révision, mais au plus tard dans les dix ans dès la notification de la décision. La jurisprudence considère que les règles sur les délais prévues à l'art. 67 PA s'appliquent, en vertu de l'art. 55 al. 1 LPGA, à la révision procédurale d'une décision administrative selon l'art. 53 al. 1 LPGA (ATF U 561/06 du 28 mai 2007, consid. 4).

De la même manière, l'art. 80 let. b LPA prévoit qu’il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision définitive, il apparaît que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente.

Conformément à l’art. 81 al. 1 LPA, la demande de révision doit être adressée par écrit à la juridiction qui a rendu la décision dans les trois mois dès la découverte du motif de révision.

10.2 La notion de faits ou moyens de preuve nouveaux s'apprécie de la même manière en cas de révision (procédurale) d'une décision administrative (art. 53 al. 1 LPGA) et de révision d'un jugement cantonal (art. 61 let. i LPGA ; ATF U 57/06 du 7 février 2007, consid. 3.1).

Sont nouveaux au sens de cette disposition les faits qui n’étaient pas connus du requérant, malgré toute sa diligence, et qui se sont produits tant que, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables (ATF I 551/04 du 6 janvier 2006, consid. 4.1). En outre, les faits nouveaux doivent être importants, c'est-à-dire qu'ils doivent être de nature à modifier l'état de fait qui est à la base de l'arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte (Ueli KIESER, ATSG-Kommentar : Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts vom 6. Oktober 2000, Zurich 2003, n. 13 ad art. 53).

La révision suppose ainsi la réalisation de cinq conditions :

1° le requérant invoque un ou des faits ;

2° ce ou ces faits sont « pertinents », dans le sens d'importants (« erhebliche »), c'est-à-dire qu'ils sont de nature à modifier l'état de fait qui est à la base du jugement et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte ;

3° ces faits existaient déjà lorsque le jugement a été rendu : il s'agit de pseudo-nova (unechte Noven), c'est-à-dire de faits antérieurs au jugement ou, plus précisément, de faits qui se sont produits jusqu'au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables (ATF 134 IV 48 consid. 1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 4F_3/2007 du 27 juin 2007 ; 5A_382/2014 du 9 octobre 2014 consid. 4.1) ; les faits postérieurs qui se sont produits postérieurement à ce moment (les vrais faits nouveaux ou vrais nova echte Noven) sont expressément exclus (art. 328 al. 1 let. a in fine code de procédure civile du 19 décembre 2008 [CPC - RS 272]) ; en effet, seule une lacune dans l'état de fait à la base du jugement peut justifier sa révision, alors que des faits postérieurs pourront éventuellement donner lieu à une nouvelle action (MARTIN H. STERCHI, in Berner Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, vol. II, 2012, n° 12 ad art. 328 CPC) ;

4° ces faits ont été découverts après coup (« nachträglich »), soit postérieurement au jugement ou, plus précisément, après l'ultime moment auquel ils pouvaient encore être utilement invoqués dans la procédure principale ;

5° le requérant n'a pas pu, malgré toute sa diligence, invoquer ces faits dans la procédure précédente (ATF 143 III 272 consid. 2.2 p. 275 s. et les références).

Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Une preuve est considérée comme concluante lorsqu'il faut admettre qu'elle aurait conduit le juge à statuer autrement s'il en avait eu connaissance dans la procédure principale. Dans ce contexte, le moyen de preuve ne doit pas servir à l'appréciation des faits seulement, mais à l'établissement de ces derniers (ATF 127 V 353 consid. 5b et les références). Ainsi, il ne suffit pas qu'une nouvelle expertise donne une appréciation différente des faits ; il faut bien plutôt des éléments de fait nouveaux, dont il résulte que les bases de la décision entreprise comportaient des défauts objectifs.

En d'autres termes, les preuves concluantes, supposent aussi la réunion de cinq conditions :

1° elles doivent porter sur des faits antérieurs (pseudo-nova) ;

2° elles doivent être concluantes, c'est-à-dire propres à entraîner une modification du jugement dans un sens favorable au requérant ;

3° elles doivent avoir déjà existé lorsque le jugement a été rendu (plus précisément jusqu'au dernier moment où elles pouvaient encore être introduites dans la procédure principale) ;

4° elles doivent avoir été découvertes seulement après coup ;

5° le requérant n'a pas pu les invoquer, sans faute de sa part, dans la procédure précédente (ATF 143 III 272 consid. 2.2 p. 276).

Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure.

Une preuve est considérée comme concluante lorsqu'il faut admettre qu'elle aurait conduit le juge à statuer autrement s'il en avait eu connaissance dans la procédure principale.

11.         En l’espèce, en faisant même abstraction du fait que l’assurée – si elle entendait véritablement demander, par le dépôt de sa déclaration de sinistre du 26 mai 2021, la révision de l’arrêt du 16 mars 2015 –, ne s’est adressée ni à la bonne instance, ni dans le délai utile de trois mois, ni dans les formes requises, force est de constater qu’elle n’invoque ni argument, ni fait, ni moyen de preuve nouveau. Elle se contente de reprendre les arguments déjà longuement développés dans la procédure judiciaire précédemment menée. Elle produit un document qui l'a déjà été dans ladite procédure. Qui plus est, ce document n’a pas participé de manière déterminante à la formation des décisions qu’elle conteste. En effet, comme le fait remarquer l’intimée, sa décision – tout comme l’arrêt de la Cour – se basait, principalement, sur l’examen multidisciplinaire réalisé au printemps 2014 par la Clinique romande de réadaptation. Il n'y a donc à l'évidence aucun motif de révision valable, de sorte que la demande de l'assurée – en tant qu’elle devrait être considérée comme une demande de révision de l'arrêt de la Cour du 16 mars 2015 – doit être déclarée irrecevable.

12.         Cela étant, il apparaît utile d'attirer l'attention de l'assurée sur le fait que, si elle continue à saisir la justice des mêmes arguments, sans autre élément de preuve à faire valoir à l'appui de ses prétentions, elle s'expose à une amende pour emploi abusif des procédures.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable en tant qu'il est dirigé contre la décision sur opposition de la SUVA du 5 mai 2022.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Déclare la déclaration de sinistre du 26 mai 2021 et le courrier du 6 mai 2022 – en tant qu'ils devraient être considérés comme valant demande de révision de l'arrêt de la Cour de céans du 16 mars 2015 – irrecevables.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le