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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1334/2022

ATAS/208/2023 du 21.03.2023 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1334/2022 ATAS/208/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 mars 2023

3ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée en FRANCE, représentée par le Syndicat SIT

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), s’est annoncée auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) et un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur le 9 juillet 2021.

b. L'assurée est mariée et mère de trois enfants nés en 2008, 2011 et 2013.

c. Le 9 décembre 2021, l’assurée a été reçue par B______ SA (ci-après : B______) pour un entretien d’embauche. Deux contrats de durée déterminée lui ont été proposés, le premier, du 13 décembre 2021 au 7 janvier 2022, de 18h50 à 20h50, le second, du 20 au 31 décembre 2021, de 06h15 à 9h15.

d. Par courriel du même jour, B______ a informé l’office régional de placement (ci-après : ORP) que l’assurée avait refusé les postes proposés, au motif que le salaire horaire, fixé selon la convention collective de travail du nettoyage en suisse romande (ci-après : CCT du nettoyage), ne lui convenait pas.

e. Par courriel du 10 décembre 2021 à l'assurée, l’agence de placement C______ SA a sollicité la remise de différents documents en vue d'une mission temporaire, du 27 décembre 2021 au 7 janvier 2022.

f. Par contrat de mission daté et signé du 14 décembre 2021, l'assurée a été engagée par C______ SA en tant que lingère/nettoyeuse à 100%, pour une mission de deux semaines au maximum débutant le 27 décembre 2021.

g. Invitée à s’expliquer sur les raisons ayant motivé son refus des postes offerts par B______, l’assurée a répondu, par courriel du 14 décembre 2021, que si elle avait refusé le poste proposé, à un taux de 40%, c’est parce qu’elle avait trouvé un autre emploi à plein temps.

B. a. Par décision du 31 janvier 2022, le service juridique de l'OCE a prononcé une suspension de douze jours dans l'exercice du droit à l'indemnité de l’assurée, au motif que celle-ci s’était privée d’un emploi convenable en refusant le poste à un taux situé entre 50 et 100% proposé par B______ pour une durée déterminée, du 1er décembre 2021 au 9 janvier 2022. Il était tenu compte du fait que le poste offert n’aurait constitué qu’une activité en gain intermédiaire ne permettant pas à l’intéressée de quitter complètement le chômage.

b. Le 20 février 2022, l’assurée s’est opposée à cette décision en expliquant qu’elle venait de terminer une formation de contrôle esthétique en horlogerie, qu’un des responsables lui avait promis un travail pour mars 2022 et qu’elle avait refusé l’offre de B______ à « 40% », car elle avait une autre proposition à 60% de la part de C______ SA.

c. Par décision du 18 mars 2022, l’OCE, considérant qu’en refusant le poste proposé, l’assurée avait laissé échapper une possibilité d’emploi convenable qui lui aurait permis de réduire le dommage causé à l’assurance-chômage, a rejeté l’opposition.

C. a. Par écriture du 29 avril 2022, l’assurée a interjeté recours auprès de la Cour de céans en concluant à l’annulation de toute sanction.

Elle argue que si elle a refusé le poste proposé par B______, c’est en raison des horaires, très contraignants du point de vue de son organisation familiale.

Elle ajoute qu’on ne saurait lui reprocher de négligence, puisqu’elle s’est assurée un emploi durant la période concernée, pour un salaire plus élevé.

Pour le surplus, elle estime avoir démontré sa bonne volonté en entreprenant une formation à ses frais, afin de trouver un emploi dans un autre secteur d’activité.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 27 mai 2022, a conclu à l’admission partielle du recours, en ramenant la durée de la suspension de douze à six jours.

En effet, l’intimé reconnaît avoir rendu la décision litigieuse sur la base d’éléments partiellement erronés : il ne s’agissait pas d’un emploi entre 50 et 100%, mais de 5 heures par jour, pendant deux semaines, puis de 2 heures par jour les deux semaines suivantes. Qui plus est, il n’était pas proposé du 1er décembre 2021 au 9 janvier 2022, mais du 13 décembre 2021 au 7 janvier 2022. La modification du gain intermédiaire perdu en tenant compte de ces éléments conduit à retenir une suspension réduite.

c. Par écriture du 13 juin 2022, la recourante a persisté dans ses conclusions. Selon elle, le calcul du gain intermédiaire « perdu » reste erroné. À cet égard, elle rappelle que la CCT du nettoyage fixe le travail à temps plein à hauteur de 43 heures par semaine, ce qui correspond usuellement à un horaire de 8 heures par jour, du lundi au vendredi, auxquelles s’ajoutent 3 heures le samedi.

d. Par écriture du 15 juillet 2022, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

e. Une audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 27 octobre 2022.

La recourante a souligné que, puisque le salaire proposé par B______ a été fixé selon la CCT du nettoyage, il est inférieur au salaire minimum et, par conséquent, non convenable.

L’intimé a quant à lui indiqué avoir contacté B______, qui a précisé que la recourante aurait effectué, en décembre 2021, 60 heures, rémunérées CHF 1'388.40, et, en janvier 2022, 10 heures, rémunérées CHF 232.70, ce qui aurait correspondu à un gain intermédiaire de CHF 1'621.10, justifiant une suspension de six jours, sanction justifiée par le fait que la recourante a refusé un poste alors qu'elle ne s’était pas encore assuré d’un emploi chez C______ SA.

f. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de six jours infligée à la recourante pour avoir décliné l'offre d'emploi du 9 décembre 2021.

4.              

4.1 L'art. 8 al. 1 let. g LACI dispose que l'assuré a droit à l'indemnité de chômage s'il satisfait, entre autres, aux exigences du contrôle (art. 17 LACI).

4.2 À ce titre, l'art. 17 al. 1 LACI prévoit que l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis.

4.3 L'art. 17 al. 3 1ère phr. LACI spécifie en outre que l'assuré est tenu d'accepter tout travail convenable qui lui est proposé. Par ailleurs, l'art. 16 al. 1 LACI prévoit qu'en règle générale, l'assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage.

4.4 Tant qu'un assuré n'est pas certain d'obtenir un autre emploi, il a l'obligation d'accepter immédiatement l'emploi qui se présente. Ce n'est que si l'engagement est imminent qu'un assuré peut refuser un emploi libre immédiatement. L'engagement doit cependant avoir lieu dans un délai maximal d'un mois. Un chômeur ne pourra donc pas s'appuyer sur la perceptive d'un engagement prochain pour refuser un autre emploi à repourvoir de suite lorsque l'engagement en question ne sera effectif que plusieurs mois après (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 64 ad art. 30 et les références citées).

 

 

5.              

5.1 La violation de ces obligations expose l’assuré à une suspension de son droit à l’indemnité.

5.1.1 Selon l’art. 30 al. 1 LACI, une telle suspension se justifie notamment lorsqu’il est établi que l’assuré ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (let. c) ou n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente (par exemple en refusant un travail convenable, en ne se présentant pas à une mesure de marché du travail ou en l’interrompant sans motif valable), ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (let. d).

5.1.2 Toutefois, un travail qui n’est pas réputé convenable est exclu de l’obligation d’être accepté et peut ainsi être refusé sans qu’il puisse y avoir de suspension (art. 16 al. 2 LACI ; ATF 124 V 62 consid. 3b et les références citées). Aux termes de l'art. 16 al. 2 LACI n'est notamment pas réputé convenable tout travail qui :

-          n’est pas conforme aux usages professionnels et locaux et, en particulier, ne satisfait pas aux conditions des conventions collectives ou des contrats-type de travail (let. a),

-          ne convient pas à l’âge, à la situation personnelle ou à l’état de santé de l’assuré (let. c).

5.1.3 En ce qui concerne l'art. 16 al. 2 let. a LACI, les éléments déterminants sont les prescriptions légales, les conditions de salaire et de travail pour un même travail dans l'entreprise ou dans la branche, ainsi que les conventions collectives et les contrats-type de travail. S'agissant du salaire, les directives des organisations professionnelles ou les statistiques des salaires peuvent également fournir des indications sur les tarifs en usage. L'administration dispose à cet égard d'une certaine liberté d'appréciation dans l'évaluation (Secrétariat d'État à l'économie [SECO], Bulletin LACI IC / B 284). Le fait qu’un emploi ne corresponde pas aux qualifications et aux vœux professionnels d’un assuré n’autorise pas encore celui-ci à refuser cette occasion de travail ; renoncer à un tel poste de transition que l’assuré pourrait changer en temps opportun contre un autre lui convenant mieux, n’est ainsi pas un motif propre à justifier la suppression d’une sanction (arrêt du Tribunal fédéral 8C_950/2008 du 11 mai 2009 consid. 4.1 et les références citées).

5.1.4 S'agissant plus particulièrement de l'art. 16 al. 2 let. c LACI, il sied de préciser que l'incompatibilité avec la situation personnelle comprend notamment l'organisation de la vie, les conditions de vie et la situation familiale, étant rappelé que les motifs de pure convenance personnelle ne sont pas pris en compte. Un travail de nuit ou par équipe est réputé convenable dans la mesure où il convient à l'assuré compte tenu de son âge, de sa situation personnelle et de son état de santé (Bulletin LACI IC / B 289). L'art. 36 de la loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce du 13 mars 1964 (LTr, Loi sur le travail - RS 822.11) impose à l'employeur de tenir compte des responsabilités familiales dans la fixation des horaires de travail. Pour qu'elles puissent être prises en compte au sens de l'art. 16 al. 2 let. c LACI, l'âge des enfants doit être inférieur à 15 ans, par analogie avec ce qui prévaut en droit public du travail (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 179/04 du 21 août 2006). Toutefois, il n'appartient pas à l'assurance-chômage de résoudre les difficultés liées à l'organisation familiale des assurés (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 169/02 du 21 mars 2003 consid. 2.2).

L'exigence de disponibilité (d'aptitude au placement au sens de l'art. 15 LACI) prime sur les considérations familiales. L'aptitude au placement doit être admise avec beaucoup de retenue lorsqu'une personne au chômage ne peut travailler qu'à des heures déterminées de la journée en raison d'obligations familiales. À noter que la jurisprudence est plus conciliante avec les mères d'enfants de moins de 15 ans qui refusent un emploi impliquant un travail en partie après 23 heures, qu'avec celles qui quittent un tel emploi (Boris RUBIN, op. cit., n. 34-35 ad art. 16 et les références citées). Notre Cour Suprême a également considéré qu’un travail obligeant une mère à faire garder son enfant tous les soirs et durant la nuit, une semaine sur deux, n’était pas convenable au regard de l’assurance-chômage (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 60/05 du 18 avril 2006 consid. 5.2 et la référence cité).

6.              

6.1 La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 5.3).

6.1.1 L’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l'assurance-chômage, OACI - RS 837.02) distingue trois catégories de fautes – légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension : de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI).

Selon l’art. 45 al. 4 OACI, il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi (let. a) ou qu’il refuse un emploi réputé convenable (let. b). Des antécédents remontant à moins de deux ans justifient une prolongation de la durée de suspension (art. 45 al. 5 OACI ; Boris RUBIN, op. cit., n. 114 ss ad art. 30).

Lorsqu'un assuré peut se prévaloir d'un motif valable, il n'y a pas forcément faute grave, même en cas de refus d'un emploi assigné et réputé convenable. Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s'agir, dans le cas concret, d'un motif lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (ATF 130 V 125).

6.1.2 En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (arrêt du Tribunal fédéral 8C_537/2013 du 16 avril 2014 consid. 5.1).

6.2 La durée de la suspension en cas de refus ou d’abandon d’un emploi en gain intermédiaire est fixée selon le barème applicable pour refus ou abandon d'un emploi réputé convenable. La suspension porte uniquement sur la différence entre le montant de l'indemnité journalière à laquelle l'assuré a droit et celui de l'indemnité compensatoire ou de la différence qu’il touche. Il ne peut en effet, au regard des principes de causalité et de proportionnalité, être tenu pour responsable de la prolongation de son chômage qu’à hauteur de cette différence (Bulletin LACI IC / D68). Le but de la suspension en tant que sanction relevant du droit des assurances est la participation équitable de l'assuré au dommage qu'il a causé à l'assurance-chômage. Elle a en outre pour but d'exercer une certaine pression sur l'assuré afin qu'il remplisse ses obligations. La durée de la suspension se mesure d'après le degré de gravité de la faute commise et non en fonction du dommage causé (Bulletin LACI IC / D1).

6.3 La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2). Le pouvoir d’examen de la Cour de céans n’est pas limité à la violation du droit mais s’étend également à l’opportunité de la décision administrative (« Angemessen-heitskontrolle »). En ce qui concerne l’opportunité de la décision en cause, l’examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l’autorité, dans un cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n’aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Le juge des assurances sociales ne peut toutefois, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l’administration ; il doit s’appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 110 ad art. 30).

 

7.              

7.1  

7.1.1 La recourante allègue que C______ SA lui a fait une proposition d'emploi par téléphone, immédiatement après l’entretien d'embauche du 9 décembre 2021 avec B______. Cette proposition a été suivie, le lendemain, d’une demande de remise de divers documents. Elle estime ainsi avoir démontré qu’elle a reçu une promesse d’embauche bien avant la proposition de B______.

7.1.2 Selon l’intimé, l’examen de la faute doit s'effectuer au moment où elle a été commise. Dès lors, le fait que la recourante ait par la suite été engagée en mission temporaire à 70% est sans incidence sur le manquement qui lui est reproché.

7.1.3 En l’espèce, aucun élément au dossier ne permet de retenir l’existence d'un accord écrit ou oral intervenu au plus tard le 9 décembre 2021, soit avant le refus par la recourante des postes proposés. En effet, l'assurance d'un autre emploi implique que l'employeur et l'employé aient, de façon expresse ou par actes concluants, manifesté réciproquement et d'une manière concordante leur volonté de conclure un contrat au sens des art. 319ss de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220 ; en ce sens : arrêts du Tribunal fédéral 8C_42/2014 du 21 mai 2014 consid. 5.2.1, C 302/01 du 4 février 2003 consid. 2.2 et les références citées). Or, en l’occurrence, il n’y avait rien de tel le 9 décembre 2021.

Même si le courriel du 10 décembre 2021 de C______ SA devait être interprété comme une promesse d'emploi, force est de constater que celle-ci serait intervenue postérieurement au refus de la recourante. Quoi qu’il en soit, on rappellera que la simple promesse d’un éventuel futur engagement ne permet pas de refuser un poste assigné.

Il y a donc lieu d'admettre, à l’instar de l’intimé, que l'assurée a refusé une proposition d'emploi alors même qu'elle n'avait pas eu la confirmation de son engagement auprès de C______ SA, peu importe à cet égard que le poste proposé par C______ SA offre une rémunération plus avantageuse que celle qu’aurait obtenue la recourante en acceptant les postes proposés par B______, vu l’obligation qui était la sienne d’accepter immédiatement si un emploi convenable lui était proposé.

Il ressort de ce qui précède que c’est à bon droit que l’intimé a sanctionné la recourante.

7.2  

7.2.1 Dans un second moyen, la recourante fait valoir sa situation personnelle et familiale. Elle allègue que les postes proposés auraient impliqué des horaires ne lui permettant pas d'assumer de manière adéquate son devoir de garde. Selon elle, un travail débutant très tôt et terminant très tard ne saurait être considéré comme étant convenable pour une mère de famille.

7.2.2 L’intimé fait remarquer pour sa part que ce n’est qu’au stade du recours que la recourante a fait valoir cet argument et qu’il ressort au demeurant de ses formulaires de preuves de recherches personnelles d’emploi qu’elle a, depuis son inscription à l’assurance-chômage, effectué de nombreuses postulations pour des postes à plein temps dans le secteur du nettoyage, secteur dans lequel il est usuel de travailler avant et après l’ouverture et la fermeture des bureaux.

7.2.3 Certes un horaire impliquant de travailler le soir jusqu'à 21h00 apparaît difficilement conciliable avec la prise en charge d'enfants. Cela étant, les horaires proposés par B______ n'impliquaient pas un travail de nuit (cf. art. 14 al. 1 CCT du nettoyage ; art. 10 al. 1 LTr).

Dans la mesure où la recourante s’est annoncée comme recherchant un emploi à 100%, une grande disponibilité sur le marché du travail est exigible de sa part.

Les postes litigieux consistaient, en l'occurrence, en un travail de deux heures, puis de cinq heures par jour. Les horaires réguliers, n'impliquaient, ni travail en fin de semaine – contrairement au contrat pourtant accepté par la recourante auprès de C______ SA –, ni absences de plusieurs jours.

En outre, bien que les enfants de la recourante soient âgés à l'époque de 8, 10 et 13 ans, il ne ressort pas du dossier qu'elle est la seule à s’en occuper. Elle ne prétend pas que son mari ne serait pas en mesure de les garder, lorsqu’elle travaille tôt le matin ou tard le soir.

Enfin, il s'agissait d'un emploi de courte durée, qui n'impliquait pas de mettre en place des solutions d'organisation sur le long terme.

Partant, on ne saurait prétendre, comme le fait la recourante, que les postes proposés étaient contre-indiqués au vu de sa situation personnelle.

7.3  

7.3.1 Finalement, lors de la comparution personnelle des parties devant la Cour de céans, la recourante a soutenu que l'emploi proposé, rémunéré en dessous du salaire minimum genevois, serait de ce fait non convenable.

7.3.2 La CCT du nettoyage, en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, prévoyait un salaire horaire de CHF 20.05 pour un employé E3 à Genève.

Il est vrai que ce montant est en deçà du salaire minimum fixé dans le canton de Genève à 23.14 CHF/h. au 1er janvier 2021 et à 23.27 CHF/h. au 1er janvier 2022 (cf. arrêtés relatif au salaire minimum légal pour 2020 et 2021 et relatif au salaire minimum cantonal pour l'année 2022 du Conseil d’État, publiés dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève les 30 octobre 2020 et 5 novembre 2021). Toutefois, la Cour de céans relève que, conformément à l'art. 39L de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 (LIRT - J 1 05), si le salaire prévu par une convention collective est inférieur à celui fixé dans la loi, c'est ce dernier qui s'applique.

D’ailleurs, par courriel du 27 avril 2022, l'employeur a indiqué à la recourante qu'il « ( ) s'agissait d'un salaire conformément à la CCT Nettoyage Romandie dont B______ était signataire et de plus salaire minium Genevois » (sic).

L'employeur a ainsi confirmé, dans un courriel du 24 octobre 2022, que le salaire horaire était de CHF 23.14 en 2021 et de 23.27 CHF en 2022, selon la CCT du nettoyage et en respect du salaire minimum genevois.

Par conséquent, rien ne permet de penser que l'employeur n'aurait pas respecté le salaire minimum légal genevois.

Si la recourante nourrissait réellement des doutes à cet égard, il lui appartenait, avant de refuser le poste, de vérifier sa compréhension des faits auprès de l'assurance-chômage avant de refuser la proposition de B______.

On rappellera que, quoi qu’il en soit, le fait qu’un emploi ne corresponde pas aux prétentions salariales n'est pas un motif propre à justifier la suppression d’une sanction.

Il convient de considérer, au vu de ce qui précède, que le travail proposé était conforme aux usages professionnels et locaux, et satisfaisait aux conditions des conventions collectives de travail.

7.4 Ainsi, à défaut de remplir l'un des critères exhaustivement énumérés à l'art. 16 al. 2 LACI, il sied de constater que l'emploi refusé était convenable.

8.             Reste à déterminer si l'intimée a outrepassé son pouvoir d'appréciation dans la fixation de la quotité de la sanction.

En refusant de postuler, la recourante a renoncé à un gain intermédiaire qui aurait pu être acquis entre le 13 décembre 2021 – date de commencement du poste proposé – et le 27 décembre 2021 – date de sa nouvelle prise d'emploi – soit une durée de deux semaines.

Le barème du SECO prévoit une suspension entre 6 à 10 jours pour le refus d'un gain intermédiaire d'une durée de deux semaines.

On ne voit pas pour quelle raison l'intimé a retenu une durée de quatre semaines (Bulletin LACI IC / D79 2. A ch. 4), dès lors que le dommage ne dépasse pas deux semaines pendant lesquelles la recourante a perçu les indemnités de chômage (en ce sens : ATAS/523/2020 du 25 juin 2020).

La quotité de la suspension de 15 jours entiers est dès lors disproportionnée (cf. Bulletin LACI IC / D79 2. A ch. 2).

La Cour de céans considère que la sanction doit être ramenée à 6 jours entiers, soit au bas de la fourchette prévue (6 à 10 jours de suspension), dès lors que le gain intermédiaire perdu n'a pas dépassé deux semaines.

L'intimé a ensuite réduit à 6 jours de suspension la durée effective de la suspension, afin que la sanction soit en rapport avec la seule différence entre les montants pertinents de l'indemnité journalière et de l'indemnité compensatoire considérées. Il s'est toutefois basé sur un montant de départ de 15 jours entiers de suspension, ce qui, comme indiqué ci-avant, est disproportionné.

Le gain assuré est de CHF 3'921.-. La durée moyenne des jours d'indemnité est de 21,7 jours. L'indemnité journalière est fixée à CHF 139.15 pour un 77%. Le gain intermédiaire perdu a été fixé à CHF 809.90 (du 13.12.2021 au 17.12.2021, l’assurée aurait travaillé 10 heures et réalisé un salaire de CHF 231.40 ; du 20.12.2021 au 25.12.2021, elle aurait travaillé 25 heures et réalisé un salaire de CHF 578.50).

En appliquant la formule gain intermédiaire perdu : CHF 28.80 (indemnités journalières selon le gain intermédiaire) x 6 jours (nombre de jours de suspension entiers) : CHF 139.15 (indemnités journalières selon le gain assuré), on obtient le chiffre d’un jour de suspension, en lieu et place des six jours retenus par l'intimé.

9.             Au vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis et la décision litigieuse réformée, la sanction étant réduite de six à un jour de suspension du droit à l’indemnité de la recourante.

La recourante qui obtient partiellement gain de cause et est assistée d’un conseil a droit à des dépens arrêtés à CHF 800.- à charge de l’intimé (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Réforme la décision du 18 mars 2022 et réduit la sanction à un jour de suspension.

4.        Alloue à la recourante, à charge de l'intimé, CHF 800.- à titre de dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le