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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2240/2022

ATAS/42/2023 du 27.01.2023 ( LAMAL ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2240/2022 ATAS/42/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 janvier 2023

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à DIVONNE-LES-BAINS, France

 

 

recourant

 

contre

HELSANA ASSURANCES SA, sise avenue de Provence 15, LAUSANNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré) est assuré auprès de Helsana Assurances SA (ci-après : l’assurance) pour l’assurance obligatoire des soins.

b. Le 9 juillet 2021, l’assuré a retiré le médicament Saxenda auprès de la Pharmacie B______ (ci-après : la pharmacie) pour un montant de CHF 244.60. Ce médicament avait été prescrit par le docteur C______, spécialiste FMH en endocrinologie et diabétologie auprès des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), par ordonnance du même jour.

c. Par courriers des 13 août et 23 novembre 2021, l’assurance a requis des informations médicales aux HUG.

d. Le 8 décembre 2021, l’assuré a à nouveau retiré le médicament Saxenda auprès de la pharmacie pour un montant de CHF 602.20.

e. Par courrier du 12 janvier 2022, l’assurance a réitéré sa demande d’informations auprès des HUG.

f. Par attestation du 20 janvier 2022, le Dr C______ a informé l’assurance de ce que son patient pesait désormais 110 kg, alors qu’il en pesait 114 lors de la première prescription.

g. Par courrier du 18 février 2022, l’assurance a informé le Dr C______ qu’elle assumait la prise en charge du médicament pour la période du 9 juillet au 29 octobre 2021 uniquement, au motif que la perte de poids exigée après cette période n’était pas atteinte.

h. Par décompte de prestations du 19 février 2022, l’assurance a pris en charge la prestation du 9 juillet 2021 pour un montant de CHF 244.60 et a refusé de prendre en charge la prestation du 8 décembre 2021 pour un montant de CHF 602.20. Il était notamment précisé que le médicament Saxenda était dans la liste des spécialités avec une limitation.

B. a. Par décision du 1er avril 2022, l’assurance a considéré que la perte de poids avait été insuffisante et que les conditions pour la poursuite du traitement au-delà de la 16ème semaine n’étaient pas remplies. Elle a donc refusé de servir des prestations au-delà du 29 octobre 2021.

b. Par courrier du 2 avril 2022, l’assuré a formé opposition à cette décision. Il reprochait à l’assurance de ne pas l’avoir informé à temps. S’il avait été dûment renseigné au sujet de la prise en charge du médicament, il n’aurait pas poursuivi le traitement. Il était en outre dans une situation financière difficile.

c. Par décision sur opposition du 27 juin 2022, notifiée à l’assuré le 7 juillet 2022, l’assurance a maintenu sa décision. L’achat du médicament du 8 décembre 2021 nécessitait une garantie préalable avec consultation du médecin-conseil, ce qui n’avait pas été effectué. Les conditions pour la prise en charge du médicament n’étaient pas remplies, ce que l’assuré ne contestait pas. L’assuré avait la possibilité de déposer une demande de remise.

C. a. Par acte du 6 juillet 2022, l’assuré a recouru contre cette décision par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant à la prise en charge par l’assurance de la facture, sous déduction de la quote-part, subsidiairement à la prise en charge de la moitié de celle-ci. Il a fait valoir en substance que l’assurance n’avait pas compris le motif de son opposition. Il s’agissait d’une question de principe et non de droit, étant précisé qu’il ne contestait pas que les conditions légales n’étaient pas remplies pour la prise en charge du médicament litigieux. Il s’opposait, en revanche, à la « gestion administrative » de l’assurance, qui l’avait renseigné tardivement sur le refus de prise en charge.

b. Par réponse du 21 juillet 2022, l’assurance a conclu au rejet du recours, subsidiairement à son irrecevabilité. L’assuré invoquait sa bonne foi et sa situation financière difficile, de sorte que son recours devait être considéré comme une demande de remise.

c. Le 6 décembre 2022, l’assuré a informé la chambre de céans de ce que l’assurance réclamait le remboursement de la facture litigieuse.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans la forme et le délai prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

2.             Le litige porte sur la prise en charge, par l’intimée, au titre de l’assurance obligatoire des soins, du traitement prescrit à base du médicament Saxenda pour la période postérieure au 29 octobre 2021.

2.1 Selon l’art. 24 LAMal, l’assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des prestations définies aux art. 25 à 31 LAMal en tenant compte des conditions des art. 32 à 34 LAMal (al. 1). Les prestations prises en charge sont rattachées à la date ou à la période de traitement (al. 2).

L’al. 1 de l’art. 34 LAMal dispose que les assureurs ne peuvent pas prendre en charge, au titre de l’assurance obligatoire des soins, d’autres coûts que ceux des prestations prévues aux art. 25 à 33 LAMal.

L’art. 25 LAMal prévoit que l’assurance obligatoire de soins prend en charge les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter une maladie et ses séquelles (al. 1). Ces prestations comprennent, entre autres, les examens et traitements dispensés sous forme ambulatoire, en milieu hospitalier ou dans un établissement médico-social, ainsi que les soins dispensés dans un hôpital par des médecins, des chiropraticiens et des personnes fournissant des prestations sur prescription ou sur mandat d’un médecin ou d’un chiropraticien (al. 2 let. a ch. 1 à 3), de même que les analyses, médicaments, moyens et appareils diagnostiques ou thérapeutiques prescrits par un médecin ou, dans les limites fixées par le Conseil fédéral, par un chiropraticien (al. 2 let. b).

Conformément à l’art. 32 LAMal, les prestations mentionnées aux art. 25 à 31 LAMal doivent être efficaces, appropriées et économiques. L’efficacité doit être démontrée selon des méthodes scientifiques (al. 1). L’efficacité, l’adéquation et le caractère économique des prestations sont réexaminés périodiquement (al. 2).

2.2 Sur la base de la délégation de compétence de l’art. 33 al. 1 et 5 LAMal, le Conseil fédéral, soit pour lui le Département fédéral de l’intérieur, a établi la liste des prestations fournies par des médecins dont les coûts ne sont pas à la charge de l’assurance obligatoire ou ne le sont qu’à certaines conditions (art. 33 let. a de l’ordonnance sur l'assurance-maladie du 27 juin 1995 [OAMal - RS 832.102] ; art. 1 de l'ordonnance du Département fédéral de l’intérieur sur les prestations dans l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie du 29 septembre 1995 [OPAS - RS 832.112.31] et son annexe 1).

Conformément à l'art. 52 al. 1 let. b LAMal (en corrélation avec les art. 34 et
37e OAMal), l'Office fédéral de la santé publique, après avoir consulté la Commission fédérale des médicaments et conformément aux principes des art. 32 al. 1 et 43 al. 6 LAMal, établit une liste, avec des prix, des préparations pharmaceutiques et des médicaments confectionnés (liste des spécialités, annexe 4 de l'OPAS). Aux termes de l'art. 73 OAMal, l'admission dans une liste peut être assortie d'une limitation ; celle-ci peut notamment se rapporter à la quantité ou aux indications médicales. De telles limitations constituent des instruments de contrôle de l'économicité et non pas une forme de rationalisation des prestations. Elles ont également pour but d'exclure ou de limiter la possibilité d'utiliser de manière abusive des médicaments de la liste des spécialités
(arrêt du Tribunal fédéral 
9C_912/2010 du 31 octobre 2011 consid. 3.4 et les références).

2.3 La liste des spécialités a un caractère à la fois exhaustif et contraignant. La prise en charge par l'assurance-maladie obligatoire d'une prestation correspondant à une analyse, un appareil ou un moyen, ou encore un produit thérapeutique suppose en principe que l'analyse, respectivement le moyen, l'appareil ou le médicament en cause, figure dans la liste des analyses (LAna, annexe 3 de l'OPAS), respectivement la liste des moyens et appareils (LiMA, annexe de l'OPAS) ou la liste des spécialités. En d'autres termes, le système légal exclut la prise en charge par l'assurance obligatoire des soins d'une prestation sous forme d'analyse, d'appareil, de moyen ou encore de produit thérapeutique si elle n'est pas mentionnée dans la LAna, respectivement la LiMA ou la liste des spécialités (RAMA 2003 p. 299, consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances
K 147/06 du 9 janvier 2008 consid. 4.1). En particulier, même si un médicament, qui ne figure pas sur la liste des spécialités (ou la liste des médicaments avec tarif) est prescrit par un médecin et est efficace, approprié et économique au sens de l'art. 32 al. 1 LAMal, il n'a pas à être pris en charge par l'assurance obligatoire des soins (ATF 134 V 83 consid. 4.1).

Le médicament Saxenda est admis dans la liste des spécialités. Selon ladite liste, le traitement nécessite une garantie de prise en charge par l’assurance-maladie après consultation préalable du médecin-conseil. Le traitement doit être arrêté chez les patients dont l’indice de masse corporelle (ci-après : IMC) est supérieur à 28 et inférieur à 35 et qui n’ont pas perdu au moins 5% de leur poids corporel initial après 16 semaines de traitement (4 semaines de titrage, 12 semaines de traitement à 3 mg/jour) et chez les patients dont l'IMC est supérieur à 35 et qui n'ont pas perdu au moins 7% de leur poids corporel initial après 16 semaines de traitement (4 semaines de titrage, 12 semaines de traitement à 3 mg/jour) par rapport au début du traitement par Saxenda. Après 6 mois de plus, le traitement doit être arrêté si une réduction supplémentaire d'au moins 5% du poids obtenu après 16 semaines n'est pas atteinte.

3.             Le devoir de conseil de l'assureur social au sens de l'art. 27 al. 2 LPGA comprend l'obligation d'attirer l'attention de la personne intéressée sur le fait que son comportement pourrait mettre en péril la réalisation de l'une des conditions du droit aux prestations (ATF 131 V 472 consid. 4.3).

Il s'étend non seulement aux circonstances de fait déterminantes, mais également aux circonstances de nature juridique (SVR 2007 KV n° 14 p. 53 et la référence). Son contenu dépend entièrement de la situation concrète dans laquelle se trouve l'assuré, telle qu'elle est reconnaissable pour l'administration. Aucun devoir de renseignement ou de conseil au sens de l'art. 27 LPGA n'incombe à l'institution d'assurance tant qu'elle ne peut pas, en prêtant l'attention usuelle, reconnaître que la personne assurée se trouve dans une situation dans laquelle elle risque de perdre son droit aux prestations (ATF 133 V 249 consid. 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_557/2010 consid. 4.1).

D'après la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (a) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (b) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (c) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour (d) prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice, et (e) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 131 II 627 consid. 6.1 et les références citées).

Ces principes s'appliquent par analogie au défaut de renseignement, la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante : que l'administré n'ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu'il n'avait pas à s'attendre à une autre information (ATF 131 V 472 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_601/2009 du 31 mai 2010 consid. 4.2).

4.             Devant la chambre de céans, le recourant ne conteste pas que les conditions de prise en charge du médicament litigieux après un premier traitement pendant 16 semaines ne sont pas remplies, puisque l’assuré n’a perdu que 3.5% de son poids corporel après 16 semaines de traitement. Il fait toutefois valoir que l’intimée lui a causé un dommage en ne l’informant pas suffisamment tôt de son refus de prendre en charge le médicament litigieux. Implicitement donc, il se prévaut du droit à la protection de la bonne foi.

En l’occurrence, il n’est pas contesté que le médicament litigieux nécessite une garantie de prise en charge par l’assurance-maladie après consultation préalable du médecin-conseil. Or, il ressort du dossier que l’intimée a interpellé les HUG à trois reprises, les 13 août et 23 novembre 2021 et 12 janvier 2022, afin d’obtenir les informations nécessaires permettant de statuer sur la prise en charge du médicament prescrit par le médecin traitant du recourant. Ce n’est qu’après avoir reçu la réponse dudit médecin, le 20 janvier 2022, que l’intimée a pu se déterminer par courrier du 18 février 2022. Sur la base de ces éléments, il n’apparait pas que l’intimée a donné au recourant une quelconque promesse ou assurance relativement à la prise en charge du médicament litigieux. Elle n’a pas davantage adopté un comportement qui eût été de nature à induire en erreur le recourant. Les conditions tirées du droit à la protection de la bonne foi ne sont dès lors pas réunies. C’est le lieu de préciser que le médecin traitant assume à l’égard de son patient un devoir contractuel d’information minimale en matière économique. Il lui appartient ainsi d’attirer l’attention du patient lorsqu’il sait qu’un traitement, une intervention ou ses honoraires ne sont pas couverts par l’assurance-maladie ou lorsqu’il éprouve ou doit éprouver des doutes à ce sujet (ATF 127 V 49 consid. 2f ; 119 II 460 consid. 2d).

Le moyen soulevé par le recourant n’est dès lors pas fondé.

5.             Pour le reste, et en tant que le recourant se prévaut d’une situation financière difficile, son recours peut être considéré comme une demande de remise qui, en tant que telle, doit être traitée par l’intimée après l’entrée en force de la présente décision (cf. art. 4 et 5 de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales [OPGA ; RS 830.11]). La cause lui sera donc transmise pour raison de compétence, ce à quoi l’intimée conclut d’ailleurs explicitement.

6.             Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et transmis à l’intimée dans le sens des considérants.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Le transmet à l’intimée, dans le sens des considérants.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le