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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3986/2020

ATAS/668/2022 du 19.07.2022 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

.

A/3986/2020 ATAS/668/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 juillet 2022

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Daniel MEYER

recourante

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 20 février 2019, Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en 1967, mère de deux enfants nés en 2003 et 2007, concierge et femme de ménage de profession, a saisi l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : l’OAI ou l’intimé) d’une demande de prestations, en raison notamment d’une arthrose aux genoux.

b. Du dossier constitué par l’OAI, il ressort que l’assurée souffrait d’atteintes touchant l’épaule gauche (cf. arthro-IRM de l’épaule gauche du 23 novembre 2018), l’épaule droite (cf. arthro-IRM de l’épaule droite du 4 décembre 2018), le genou droit (cf. IRM du genou droit du 25 avril 2018 et rapports opératoires des 3 octobre 2018 et 13 mai 2019), le dos et l’abdomen (cf. IRM des articulations sacro-iliaques du 21 décembre 2017, tomodensitométrie axiale computérisée de l’abdomen supérieur et inférieur du 15 janvier 2018, IRM cervico-dorso-lombaire du 25 avril 2018). S’y ajoutait une atteinte psychique (rapports des doctoresses B______, médecin praticien, du 7 août 2019 et C_______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, du 26 septembre 2019).

c. La Dresse C_______ et le docteur D_______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, se sont prononcés sur la capacité de travail de l’assurée dans des rapports adressés à l’OAI en date des 26 septembre 2019, respectivement 27 mars 2020. Il en ressort que sur le plan psychique, l’assurée était capable de travailler à 50% dans son activité habituelle dès le 1er octobre 2019 et à 100% dans une activité adaptée dès la même date. Sur le plan orthopédique, la capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité adaptée, de type sédentaire, sans port de charges lourdes avec épargne du genou droit et des épaules, et ce dès le 5 mars 2020.

d. Sur la base des rapports précités, le service médical régional de l’assurance-invalidité (ci-après : SMR) a retenu, à titre d’atteintes incapacitantes principales, des gonalgies droites sur arthrose fémoro-patellaire, status après arthroscopie les 3 octobre 2018 et 13 mai 2019, et à titre d’autres atteintes incapacitantes, une lésion bilatérale de la coiffe des rotateurs des épaules, avec rupture complète du supra-épineux à droite et bursite sous acromiale à gauche, ainsi qu’une discopathie cervico-dorso-lombaire. Les atteintes précitées entraînaient des limitations fonctionnelles d’épargne des genoux, des épaules et du dos. La capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle dès le 3 octobre 2018 et entière dans une activité adaptée et ce dès le 5 mars 2020.

B. a. Par projet de décision du 25 mai 2020, l’OAI a informé l’assurée qu’il retenait un statut mixe, dès lors que sans atteinte, elle aurait exercé une activité lucrative à 90% et consacré 10% à son ménage. En raison de son incapacité totale de travailler quelle que soit l’activité retenue, le degré d’invalidité était de 90% dans un premier temps. Son état de santé s’était toutefois amélioré par la suite, avec une capacité de travail à 100% dans une activité adaptée, de sorte que la comparaison des revenus conduisait alors dès ce moment à un degré d’invalidité 15%. C’est pourquoi, l’OAI entendait octroyer à l’assurée une rente entière, limitée dans le temps, du 1er octobre 2019 au 31 mai 2020. L’office précité refusait également toute mesure d’ordre professionnel. En effet, au vu du large éventail d’activités non qualifiées existant sur le marché, une orientation professionnelle n’entrait pas en considération. Le degré d’invalidité de 15% n’était en outre pas suffisant pour donner droit à une mesure de reclassement professionnel. Enfin, dans la mesure où l’assurée ne présentait pas de limitation spécifique à son atteinte compromettant la recherche d’un emploi, l’aide au placement n’était pas non plus ouverte.

b. Malgré les protestations de l’assurée, l’OAI a statué formellement dans le sens du projet susmentionné par décision du 26 octobre 2020.

C. a. Le 26 novembre 2020, sous la plume de son Conseil, l’assurée a interjeté recours contre la décision précitée, concluant, sous suite de dépens, à son annulation en tant qu’elle limitait, au 31 mai 2020, le droit à la rente et qu’elle refusait toute mesure d’ordre professionnel et, cela fait, à la constatation de son droit à une rente d’invalidité entière, sans limitation de temps, subsidiairement, à la réalisation d’une expertise multidisciplinaire, rhumatologique et psychiatrique.

À l’appui de ses conclusions, la recourante a contesté toute capacité de travail à compter du 1er juin 2020, son état de santé s’étant aggravé conformément à un rapport du Dr D_______ du 18 novembre 2020, selon lequel, notamment, une intervention chirurgicale de l’épaule gauche, atteinte non prise en considération par l’office intimé, devait être envisagée. Par ailleurs, l’intimé n’avait pas non plus pris en considération l’émergence d’une symptomatologie psychique. Vu la complexité et l’intensité des atteintes, la reprise d’une activité professionnelle exercée à plein temps et sans diminution de rendement n’était ni exigible ni réaliste. Enfin, la recourante contestait l’absence d’empêchement retenu par l’intimé dans la sphère domestique.

b. L’office intimé a répondu en date du 4 janvier 2021 et a notamment conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée.

En substance, il a relevé qu’il n’était pas contesté que l’activité habituelle de femme de ménage et de concierge exercée par la recourante n’était plus exigible. Cela étant, tous les médecins, y compris le Dr D_______, s’accordaient à reconnaître une pleine capacité de travail dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles retenues. Par ailleurs, au cours de la procédure d’audition, la recourante avait été invitée à produire tout rapport détaillant son état de santé. Or, elle n’avait transmis aucun document, de sorte qu’elle supportait l’absence de preuve. S’agissant de l’abattement de 15% [qui ressort des calculs effectués le 8 avril 2020 par l’OAI en vue de la prise de décision], il était conforme au droit. Enfin, en ce qui concernait l’absence d’empêchements dans la tenue du ménage, l’office intimé relevait que l’activité habituelle de femme de ménage ne pouvait être comparée à la tenue du foyer familial. En effet, d’une part, la tenue du ménage privé recouvrait de nombreuses activités sans exigences physiques (planification, organisation, répartition du travail, contrôle, etc.) ou dont les exigences dépendaient directement de la taille du ménage et du nombre d’occupants (préparation des repas, entretien du linge, emplettes, etc.). D’autre part, des adaptations aux problèmes physiques étaient envisageables, ce qui n’était pas nécessairement compatible avec les exigences de rendement propres à l’exercice similaire dans un contexte professionnel.

c. La recourante a produit sa réplique en date du 2 mars 2021.

Se référant à plusieurs rapports médicaux qui y étaient joints, elle s’est interrogée sur l’existence d’une activité adaptée à ses nombreuses limitations fonctionnelles et a persisté dans ses conclusions.

d. Le 30 novembre 2021, la Chambre de céans a procédé à l’audition de la Dresse C_______.

À cette occasion, la psychiatre précitée a notamment évoqué une recrudescence du trouble de la personnalité (avec actes d’automutilation, comportements à risque, fluctuations de l’humeur et impulsivité) début 2020, ce qui avait motivé l’introduction d’un stabilisateur d’humeur dès le 6 février 2020. Malgré ce traitement, l'évolution avait été médiocre avec des fluctuations et des moments de crises. S’y ajoutait l’aggravation du trouble dépressif en 2021, avec une fatigue, un manque de motivation, une aboulie et anhédonie, un retrait social, une absence de sorties et d'envie de faire des choses, l’épisode étant désormais considéré comme sévère. En mars 2021, des apnées du sommeil avaient encore été diagnostiquées, ce qui pouvait augmenter la fatigue.

Le même jour, la Chambre de céans a également entendu la recourante, laquelle a notamment décrit ses douleurs au genou droit, à l’épaule gauche, aux deux mains et aux deux pieds (arthrose). Elle travaillait 3h à 3h30 par semaine dans un cabinet médical à côté de chez elle, le Dr D_______ lui ayant dit qu’elle pouvait continuer à travailler à 5 ou 10%. Femme de ménage était le seul métier qu’elle pouvait effectuer vu l'absence de formation. Lorsqu’elle avait trop de douleurs dans ce travail, son mari et ses enfants l'aidaient. La situation était la même pour les tâches ménagères à la maison. Elle ne faisait plus de repassage, car elle avait peur de porter des choses lourdes et d’avoir mal. Elle évitait les efforts pour ne pas avoir besoin d’une nouvelle opération au genou droit et à l'épaule gauche.

e. Par courrier du 7 décembre 2021, l’intimé a transmis à la Chambre de céans un bref rapport manuscrit du psychiatre traitant de la recourante, daté du 20 novembre 2021.

f. Le 4 janvier 2022, c’est la recourante qui a remis à la Chambre de céans le compte-rendu de l’IRM des deux avant-pieds, réalisée le 10 décembre 2021.

g. Le Dr D_______ n’ayant pu être entendu, la Chambre de céans lui a posé des questions par écrit, questions auxquelles il a répondu par courrier du 24 janvier 2022. Il en ressort notamment que la qualité de vie de la recourante était fortement diminuée par les atteintes qu’il avait diagnostiquées, lesquelles entraînaient des douleurs invalidantes rendant l’activité professionnelle de femme de ménage et de concierge impossible. Afin de lui « garder un pied dans la vie professionnelle », une capacité de travail de 5% était certifiée depuis le 30 janvier 2021. L’incapacité de travail de la recourante avait été de 100% du 3 octobre 2018 au 20 septembre 2020, de 80% du 21 septembre au 30 octobre 2020, de 90% du 31 octobre 2020 au 29 janvier 2021 et de 95% dès le 3 janvier 2021 et ce dans toute activité.

h. Le 8 mars 2022, l’intimé a produit ses écritures après comparution personnelle et enquêtes.

Se fondant sur un avis du SMR daté du 18 février 2022, qui y était joint, l’office intimé a considéré que l’état de santé de la recourante s’était aggravé en 2021. Dans la mesure où cela s’était produit postérieurement à la décision attaquée, les faits y relatifs sortaient du cadre du litige.

i. Par écriture du 25 avril 2022, la recourante a contesté, sous la plume de son conseil et en se référant aux déclarations de ses médecins traitants, que l’aggravation de son état de santé n’ait eu lieu qu’après 2021.

j. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021, est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA).

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

6.             Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d’invalidité au-delà du 31 mai 2020, singulièrement sur la question de la date de l’aggravation de son état de santé, le taux d’abattement retenu par l’intimé et les empêchements dans la tenue du ménage.

7.              

7.1. Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

7.2. En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

7.3. En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

7.4. Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'article 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5; ATF 113 V 273 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

8.              

8.1. Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

8.2. Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

8.2.1. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

8.2.2. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). En effet, un médecin traitant a naturellement le souci d'éviter tout ce qui pourrait perturber son travail et souhaite notamment éviter de provoquer chez son patient un ressentiment qui rendrait sa mission plus difficile ou même impossible (ATF 124 I 170 consid. 4). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

9.              

9.1. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.2. Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références ; ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b; ATF 122 V 157 consid. 1d).

9.3. De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; ATF 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

10.          

10.1. En l’espèce, la recourante a saisi l’OAI d’une demande de prestations d’invalidité en raison notamment d’une arthrose aux genoux. L’intimé a alors rassemblé divers documents médicaux évoquant des atteintes à l’épaule gauche (cf. arthro-IRM de l’épaule gauche du 23 novembre 2018), à l’épaule droite (cf. arthro-IRM de l’épaule droite du 4 décembre 2018), au genou droit (cf. IRM du genou droit du 25 avril 2018 et rapports opératoires des 3 octobre 2018 et 13 mai 2019), au dos et à l’abdomen (cf. IRM des articulations sacro-iliaques du 21 décembre 2017, tomodensitométrie axiale computérisée de l’abdomen supérieur et inférieur du 15 janvier 2018, IRM cervico-dorso-lombaire du 25 avril 2018). Des troubles psychiques étaient également évoqués (cf. rapports des Dresses B______ et C_______ des 7 août 2019, respectivement 26 septembre 2020).

10.2. Afin de déterminer la capacité de travail exigible malgré les atteintes précitées, l’intimé s’est adressé aux médecins traitants de la recourante, lesquels se sont prononcés comme suit.

-        Sur le plan psychique, la Dresse C_______ a retenu, dans des rapports destinés à l’OAI, datés des 19 juillet et 26 septembre 2019, que les diagnostics de trouble dépressif récurrent, épisode léger à moyen (F33), et de traits de personnalité émotionnellement labile de type borderline (F60.31) entraînaient les limitations fonctionnelles suivantes : fatigue irritabilité, douleurs chroniques. S’y ajoutaient des limitations fonctionnelles au niveau de la jambe, la recourante n’arrivant pas à monter les escaliers. D’un point de vue strictement psychiatrique, la capacité de travail dans une activité strictement adaptée allait être de 100% dès le 1er octobre 2019.

Lors d’un entretien téléphonique du 4 juin 2020, la recourante a été invitée à étayer son opposition au projet de décision en produisant des éléments médicaux nouveaux. La nécessité de produire de nouvelles pièces médicales lui a été rappelée le 10 juin 2020. Le même jour, à la demande de la recourante, l’intimé a adressé à la Dresse C_______ un CD-ROM contenant son dossier. Si la recourante a produit des pièces relatives à son atteinte orthopédique, pour la plupart déjà au dossier de l’OAI, la Dresse C_______ ne s’est pas manifestée. Le 15 juin 2020, l’intimé a, une nouvelle fois, invité la recourante à fournir, avant le 15 juillet 2020, un rapport médical détaillant les diagnostics, limitations fonctionnelles et capacité de travail. Le 2 juillet 2020, la recourante a encore produit des rapports concernant son atteinte orthopédique, rapports figurant pour la plupart déjà au dossier. Toutefois, aucun rapport relatif à l’atteinte psychique n’a été produit.

-        Sur le plan orthopédique, se déterminant pour la première fois sur la question de la capacité de travail dans une activité adaptée, le Dr D_______ a répondu, le 27 mars 2020, aux questions du SMR et notamment à celle de savoir si la capacité de travail de la recourante était entière dans une activité adaptée, de type sédentaire, sans port de charges lourdes, avec épargne du genou droit et des épaules et, dans l’affirmative, depuis quelle date. L’orthopédiste précité a alors indiqué « confirmé à 100% dès le 5.3.20 (date du rap. – AI établi) ».

Le 3 juin 2020, dans un rapport adressé à l’intimé, le Dr D_______ a expliqué qu’« une reprise de travail dans un poste nécessitant la position debout prolongée ou des longs trajets de marche n’[était] toujours pas possible. Un reclassement professionnel dans un poste sédentaire [était] nécessaire pour cette patiente ».

En évoquant dans ce courrier du 3 juin 2020 un reclassement dans une profession sédentaire, le Dr D_______ a implicitement confirmé l’existence d’une capacité de travail dans une activité adaptée.

Vu que les propres médecins de la recourante ont conclu, dans leurs rapports respectifs des 19 juillet et 26 septembre 2019 en ce qui concerne la Dresse C_______, et 27 mars et 3 juin 2020 en ce qui concerne le Dr D_______, à une capacité de travail entière dans une activité adaptée, aucun reproche ne peut être formulé à l'encontre du SMR qui a retenu, dans son avis du 8 avril 2020, une capacité de travail entière dans une activité adaptée sédentaire de type administratif, permettant l’alternance des positions assis-debout et n’impliquant pas le port de charges de plus de 5 kg à répétition ou 10 kg occasionnellement, les bras au-dessus de l’horizontale, les positions en porte à faux du dos et de la nuque, la station debout prolongée, la marche en terrain irrégulier, la position accroupie ou à genoux, les escaliers à répétition, les escabeaux ou échelles.

Postérieurement à la décision querellée du 26 octobre 2020, le Dr D_______ a écrit, dans son rapport du 27 novembre 2020, que « l’incapacité de travail [était] de 90% en tant que femme de ménage et concierge. Théoriquement dans une activité sédentaire et sans avoir d’effort pour l’épaule, une reprise du travail progressive serait possible. En voyant une évolution difficile pendant plusieurs années et le cas médicalement pas stabilisé, il [lui] sembl[ait] que le pronostic [était] mauvais pour une reprise dans son ancienne activité et un reclassement professionnel serait à discuter ». À nouveau, le médecin traitant a confirmé une capacité de travail dans une activité adaptée, dans la mesure où il a évoqué une reprise du travail progressivement dans une activité sédentaire et un reclassement professionnel.

Par la suite, dans son rapport du 1er février 2021, le Dr D_______ a encore expliqué qu’« il se trouv[ait] que deux tendons de la coiffe des rotateurs [étaient] déchirés ainsi que des fissurations du long chef du biceps rendant le travail en tant que femme de ménage et de concierge quasi impossible. ( ) Afin de permettre à la patiente de rester dans sa profession, on [prévoyait] de maintenir une capacité de travail de 5% ». Or, vu l’emploi du pronom possessif « sa » en lien avec la profession, force est de considérer que l’appréciation de la capacité de travail concernait uniquement l’activité habituelle.

Sur le plan psychique, la Dresse C_______ a évoqué pour la première fois, dans un courrier du 24 février 2021, une incapacité de travail totale en raison d’une anxiété accompagnée d’une dépression sévère. Cette aggravation a par la suite été confirmée lors de son audition du 30 novembre 2021.

Pour sa part, le Dr D_______ a par la suite retenu, dans son courrier du 24 janvier 2022, sans fournir la moindre explication, que la recourante avait été en incapacité de travail à 100% du 3 octobre 2018 au 20 septembre 2020, à 80% du 21 septembre au 30 octobre 2020, à 90% du 31 octobre 2020 au 29 janvier 2021 et à 95% dès le 3 janvier 2022, à réévaluer le 31 janvier 2022 et que cette appréciation concernait tant la capacité de travail dans l’activité habituelle que celle dans une activité adaptée. Force est de constater que cette appréciation est contraire aux précédentes affirmations du Dr D_______, sans que ce revirement n’ait été motivé. Compte tenu de la jurisprudence fédérale, selon laquelle le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier, la Chambre de céans ne saurait retenir cette dernière appréciation du Dr D_______, celle-ci étant en contradiction avec les appréciations des 27 mars et 3 juin 2020, dans lesquelles ce médecin a expressément évoqué une capacité de travail entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles.

Compte tenu de ce qui précède, la Chambre de céans considère qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que la capacité de travail de la recourante était entière dans une activité adaptée, à tout le moins jusqu’au 26 octobre 2020, date à laquelle la décision querellée a été rendue. L’aggravation de l’état psychique de la recourante, avec répercussions sur la capacité de travail, indiquée par la psychiatre traitante, est en effet postérieure à cette date. Par ailleurs, les répercussions de l’atteinte à l’épaule évoquée par le Dr D_______ dans son rapport du 1er février 2021, soit postérieurement à la décision attaquée, ont été prises en considération dans les limitations fonctionnelles d’épargne des épaules.

10.3. Il ressort de ce qui précède que les propres médecins traitants de la recourante ont considéré que cette dernière était capable de travailler dans une activité adaptée, à 100%, depuis le 5 mars 2020, à tout le moins jusqu’au jour de la décision querellée.

On ne saurait donc, au vu des pièces du dossier, retenir qu’une aggravation antérieure à la décision attaquée aurait été rendue vraisemblable et c’est donc à juste titre que l’intimé a retenu qu’en date du 26 octobre 2020, la capacité de travail était entière dans une activité adaptée et qu’il a procédé à une comparaison des revenus.

10.4. Cela étant, en annexe à sa réplique du 2 mars 2021, la recourante a notamment produit un rapport de la Dresse C______ daté du 24 février 2021, dans lequel une aggravation de ses troubles psychiques avec répercussions sur la capacité de travail a été évoquée. Ce courrier du 24 février 2021, joint à la réplique du 2 mars 2021, doit être qualifié de nouvelle demande de prestations, de sorte que l’intimé est invité à examiner si l’aggravation de l’atteinte psychique invoquée par la recourante entraîne une incapacité de travail suffisamment importante pour donner droit à une rente d’invalidité.

11.         Dans son mémoire de recours du 26 novembre 2020, la recourante a considéré que vu la complexité et l’intensité des atteintes, la reprise d’une activité professionnelle exercée à plein temps et sans diminution de rendement n’était ni exigible ni réaliste. Dans sa réponse du l4 janvier 2021, l’intimé a interprété cette critique comme étant une remise en question de l’abattement de 15% appliqué au revenu avec invalidité. Dans un souci d’exhaustivité, la Chambre de céans examinera la question de l’abattement.

11.1. Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

11.2. Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consdi. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. C'est pourquoi il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des salaires (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1 et la référence).

11.3.1. Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). En l'absence d'un revenu effectivement réalisé - soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l'atteinte à la santé, n'a pas repris d'activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible -, le revenu d'invalide peut alors être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l’enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) (ATF 139 V 592 consid. 2.3 ; ATF 126 V 75 consid. 3b/aa et bb ; voir également arrêt du Tribunal fédéral 9C_140/2017 du 18 août 2017 consid. 5.4.1).

11.3.2. Il est notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d'une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels ; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb).

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3). Cette évaluation ressortit en premier lieu à l'administration, qui dispose pour cela d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu'il est amené à vérifier le bien-fondé d'une telle appréciation. L'examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l'administration ; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6 ; ATF 123 V 150 consid. 2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

11.4. Selon la jurisprudence, le résultat exact du calcul du degré d'invalidité doit être arrondi au chiffre en pour cent supérieur ou inférieur selon les règles applicables en mathématiques. En cas de résultat jusqu'à x,49 %, il faut arrondir à x % et pour des valeurs à partir de x,50 %, il faut arrondir à x+1 % (ATF 130 V 121 consid. 3.2).

12.          

12.1. En l’espèce, la recourante a contesté l’abattement de 15% retenu par l’intimé.

C’est le lieu de rappeler qu’un abattement n'est pas automatique, mais qu’il se justifie dans les cas où il existe des indices suffisants pour admettre qu'en raison de différents facteurs (par exemple limitations liées au handicap, à l’âge, à la nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et au taux d'occupation), l’assuré ne peut mettre à profit sa capacité de travail (résiduelle) sur le plan économique que dans une mesure inférieure à la moyenne (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa ; cf. également l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_29/2012 du 27 juin 2012 consid. 4.2).

Dans le cas de la recourante, le SMR a retenu des mesures d’épargne du dos, du genou droit et des bras. De manière générale, le Tribunal fédéral a retenu les abattements suivants : de 10 à 15% en cas d’atteintes aux membres supérieurs ou au dos et entre 5 à 15% en cas d’atteinte aux membres inférieurs (IONTA, Fixation du revenu d’invalide selon l’ESS, in Jusletter du 22 octobre 2018, p. 31 et ss et les arrêts cités).

Dans ces conditions, l’abattement de 15% retenu par l’intimé ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmé, dès lors qu’il se situe à la limite supérieure de la pratique du Tribunal fédéral.

La recourante n’ayant pas contesté les revenus sans et avec invalidité, ceux-ci seront repris pour la détermination de l’invalidité en 2019, date d’ouverture d’un éventuel droit à la rente.

Ainsi, après abattement de 15%, le revenu avec invalidité s’élève, pour une femme dans une activité simple et répétitive à CHF 46'788.- en 2019, après indexation.

Comparé au revenu sans invalidité, en 2019, de CHF 50’849.- (cf. comparaison des revenus du 8 avril 2020), la perte de gain est de CHF 4'061.-, ce qui correspond à un degré d’invalidité de 8% ([CHF 4'061.- / CHF 50'849] = 0,07986, soit 7,99%).

La perte de gain et le degré d’invalidité seraient de CHF 9'711.-, respectivement de 17%, si l’on retenait un revenu sans invalidité de CHF 56'499.- en 2019 comme dans la décision querellée (CHF 9'711.- / CHF 56'499.- = 0,1718, soit 17%).

12.2. Au demeurant, même en appliquant l’abattement maximum de 25%, le degré d’invalidité 19% ([CHF 50'849.- - CHF 41'284.-] / CHF 50'849.- = 0,1881, soit 19%) aurait été insuffisant pour donner droit à une rente d’invalidité comme cela ressort des considérations qui suivent. Il en va de même en retenant le revenu sans invalidité de CHF 56'499.- comme dans la décision querellée ([CHF 56'499.- - CHF 41'284.-] / CHF 56'499.- = 0,269, soit 27%).

13.         Dans son recours, l’assurée a également reproché à l’intimé de ne pas avoir retenu d’empêchements dans la tenue de son ménage. Comme pour l’abattement, la Chambre de céans examinera ce point dans un souci d’exhaustivité.

13.1. Selon l’art. 27bis RAI en vigueur depuis le 1er janvier 2018, pour les personnes qui exercent une activité lucrative à temps partiel et accomplissent par ailleurs des travaux habituels visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, le taux d'invalidité est déterminé par l'addition des taux suivants : a. le taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative; b. le taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels (al. 2). Le calcul du taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative est régi par l'art. 16 LPGA, étant entendu que : a. le revenu que l'assuré aurait pu obtenir de l'activité lucrative exercée à temps partiel, s'il n'était pas invalide, est extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps; b. la perte de gain exprimée en pourcentage est pondérée au moyen du taux d'occupation qu'aurait l'assuré s'il n'était pas invalide (al. 3). Pour le calcul du taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels, on établit le pourcentage que représentent les limitations dans les travaux habituels par rapport à la situation si l'assuré n'était pas invalide. Ce pourcentage est pondéré au moyen de la différence entre le taux d'occupation visé à l'al. 3, let. b, et une activité lucrative exercée à plein temps (al. 4).

13.2. Sous l’empire de l’art. 27bis al. 2 à 4 RAI modifié, le calcul du taux d’invalidité pour la partie concernant l’activité lucrative demeure régi par l’art. 16 LPGA. L’élément nouveau est que le revenu sans invalidité n’est plus déterminé sur la base du revenu correspondant au taux d’occupation de l’assuré, mais est désormais extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps. La détermination du revenu d’invalide est, quant à elle, inchangée. La perte de gain exprimée en pourcentage du revenu sans invalidité est ensuite pondérée au moyen du taux d’occupation auquel l’assuré travaillerait s’il n’était pas invalide.

Le taux d’invalidité en lien avec les travaux habituels est, comme c’était le cas auparavant, déterminé au moyen de la méthode de comparaison des types d’activités prévue à l’art. 28a al. 2 LAI. De même que pour les assurés qui accomplissent des travaux habituels à plein temps, l’invalidité est calculée en fonction de l’incapacité de l’assuré à accomplir ses travaux habituels. La limitation ainsi obtenue est pondérée au moyen de la différence entre le taux d’occupation de l’activité lucrative et une activité à plein temps. Le taux d’invalidité total est obtenu en additionnant les deux taux d’invalidité pondérés (cf. Ralph LEUENBERGER, Gisela MAURO, Changements dans la méthode mixte, in Sécurité sociale/CHSS n° 1/2018 p. 45).

13.3. Chez les assurés travaillant dans le ménage, le degré d'invalidité se détermine, en règle générale, au moyen d'une enquête économique sur place, alors que l'incapacité de travail correspond à la diminution - attestée médicalement - du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels (ATF 130 V 97).

L'évaluation de l'invalidité des assurés pour la part qu'ils consacrent à leurs travaux habituels nécessite l'établissement d'une liste des activités que la personne assurée exerçait avant la survenance de son invalidité, ou qu'elle exercerait sans elle, qu'il y a lieu de comparer ensuite à l'ensemble des tâches que l'on peut encore raisonnablement exiger d'elle, malgré son invalidité, après d'éventuelles mesures de réadaptation. Pour ce faire, l'administration procède à une enquête sur place et fixe l'ampleur de la limitation dans chaque domaine entrant en considération. En vertu du principe général de l'obligation de diminuer le dommage, l'assuré qui n'accomplit plus que difficilement ou avec un investissement temporel beaucoup plus important certains travaux ménagers en raison de son handicap doit en premier lieu organiser son travail et demander l'aide de ses proches dans une mesure convenable. La jurisprudence pose comme critère que l'aide ne saurait constituer une charge excessive du seul fait qu'elle va au-delà du soutien que l'on peut attendre de manière habituelle sans atteinte à la santé. En ce sens, la reconnaissance d'une atteinte à la santé invalidante n'entre en ligne de compte que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies le sont par des tiers contre rémunération ou par des proches et qu'elles constituent à l'égard de ces derniers un manque à gagner ou une charge disproportionnée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_191/2021 du 25 novembre 2021 consid. 6.2.2 et les références).

13.4. En résumé, conformément à l’art. 27 RAI, dans le cadre de la méthode mixte, le degré d’invalidité est calculé comme suit (cf. n° 3101 de la circulaire sur l’invalidité et l’impotence dans l’assurance-invalidité [CIIAI], en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 et n° 3703 de la circulaire sur l’invalidité et les rentes dans l’assurance-invalidité [CIRAI], en vigueur depuis le 1er janvier 2022) :

(Taux d’occupation avant l’invalidité x degré d’invalidité)

+ (Taux des travaux habituels (ménage) x limitation dans le ménage)

= Degré d’invalidité

14.          

14.1. En l’espèce, le statut mixte a été reconnu à la recourante, à savoir 90% active et 10% ménagère.

Dans son recours, la recourante critique le fait qu’aucun empêchement n’ait été retenu dans la sphère ménagère Elle conteste par conséquent implicitement l’absence d’enquête économique et le degré d’invalidité dans la sphère ménagère.

14.2.1. Force est de constater que la réalisation d’une telle enquête est superflue comme cela ressort des considérations qui suivent. En effet, selon le dossier, l’intimé a considéré, sans être contredit par la recourante, qu’elle aurait travaillé à 90% et tenu son ménage à 10%. Or, même si l’on devait retenir un empêchement de 100% dans la sphère ménagère, ce qui n'est pas le cas étant donné que les atteintes dont souffre la recourante n’entraînent de toute évidence pas des empêchements dans tous les domaines examinés dans le cadre d’une enquête à domicile, le degré d’invalidité dans les travaux habituels serait de 10% au maximum, ce qui correspondrait à un degré d’invalidité général de 17%, insuffisant pour donner droit ne serait-ce déjà à un quart de rente :

Avec un degré d’abattement de 15% et un revenu sans invalidité de CHF 50'849.- (cf. comparaison des revenus du 8 avril 2020) :

90% x 8%

+ 10% x 100% au maximum soit

= 17,2%

7,2%

+ 10% au maximum

= 17,2%

Où 90% correspond au taux d’occupation avant l’invalidité et 7,2% au degré d’invalidité retenu et

Où 10% correspond au taux des travaux habituels et 10% à la limitation dans le ménage.


 

Avec un degré d’abattement de 15% et un revenu sans invalidité de CHF 56'499.- (cf. décision querellée) :

90% x 17%

+ 10% x 100% au maximum soit

= 25,3%

15,3%

+ 10% au maximum

= 25,3%

C’est encore le lieu de rappeler que l’empêchement de 10% est un maximum, dès lors qu’il a été établi sur la base d’une incapacité totale d’exercer tous les travaux habituels (soit l’alimentation [préparer et cuire les aliments, servir les repas, nettoyer la cuisine au quotidien, faire des provisions], l’entretien du logement ou de la maison [ranger, épousseter, passer l’aspirateur, entretenir les sols, nettoyer les installations sanitaires, changer les draps de lit, nettoyer en profondeur, soigner les plantes, le jardin, l’extérieur de la maison, sortir les déchets et garde des animaux domestiques], les achats [courses quotidiennes et achats plus importants, et courses diverses [telles que la poste, les assurances, les services officiels], la lessive et l’entretien des vêtements [laver, étendre et plier le linge, repasser, raccommoder, nettoyer les chaussures] et les soins et l’assistance aux enfants et aux proches] – cf. ch. 3087 CIIAI jusqu’au 31 décembre 2021, étant précisé que depuis le 1er janvier 2022, le soin du jardin et de l’extérieur de la maison et la garde des animaux domestiques constituent un domaine à part et ne figurent plus dans l’entretien de la maison, cf. ch. 3609 CIRAI) et sans tenir compte de l’aide de l’époux de la recourante et de leurs enfants. Ce pourcentage constitue dès lors un taux théorique maximum.

14.2.2. Le résultat ne serait pas différent si l’on devait appliquer un abattement de 25%, dès lors que cela conduirait à un degré d’invalidité de 27%, également insuffisant pour donner droit à une rente :

Avec un degré d’abattement de 25% et un revenu sans invalidité de CHF 50'849.- (cf. comparaison des revenus du 8 avril 2020) :

90% x 19%

+ 10% x 100% au maximum soit

= 27,1%

17,1 %

+ 10% au maximum

= 27,1%

Avec un degré d’abattement de 25% et un revenu sans invalidité de CHF 56'499.- (cf. décision querellée), situation la plus favorable pour la recourante :

90% x 27%

+ 10% x 100% au maximum soit

= 34,3%

24,3%

+ 10% au maximum

= 34,3%

14.3. Ainsi, force est de constater, compte tenu des considérations qui précèdent, que même si l’intimé avait effectué une enquête à domicile pour déterminer les empêchements dans la tenue du ménage et retenu l’hypothèse, improbable, d’un empêchement dans tous les domaines, l’invalidité en résultant ne serait pas suffisante pour donner droit à une rente.

Partant, il est superflu et contraire à l’économie de procédure d’effectuer une enquête ménagère à domicile.

15.         Enfin, dans sa réplique du 2 mars 2021, la recourante s’est interrogée sur l’existence d’une activité adaptée à ses nombreuses limitations fonctionnelles.

15.1. Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

15.2. Lorsqu'il s'agit d'examiner dans quelle mesure un assuré peut encore exploiter économiquement sa capacité de gain résiduelle sur le marché du travail entrant en considération pour lui (art. 16 LPGA), on ne saurait subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. Il s'ensuit que pour évaluer l'invalidité, il n'y a pas lieu d'examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l'offre de la main d'œuvre (VSI 1998 p. 293). On ne saurait toutefois se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Il est certes possible de s'écarter de la notion de marché équilibré du travail lorsque, notamment l'activité exigible au sens de l'art. 16 LPGA, ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu'elle n'existe quasiment pas sur le marché général du travail ou que son exercice impliquerait de l'employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant (cf. RCC 1991 p. 329 ; RCC 1989 p. 328 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_286/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.2 et 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.2). Le caractère irréaliste des possibilités de travail doit alors découler de l'atteinte à la santé - puisqu'une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance d'une invalidité (cf. art. 7 et 8 LPGA) - et non de facteurs psychosociaux ou socioculturels qui sont étrangers à la définition juridique de l'invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017 du 30 octobre 2017 consid. 4.2).

D'après ces critères, il y a lieu de déterminer dans chaque cas et de manière individuelle si l'assuré est encore en mesure d'exploiter une capacité de travail résiduelle sur le plan économique et de réaliser un salaire suffisant pour exclure une rente. Ni sous l'angle de l'obligation de diminuer le dommage, ni sous celui des possibilités qu'offre un marché du travail équilibré aux assurés pour mettre en valeur leur capacité de travail résiduelle, on ne saurait exiger d'eux qu'ils prennent des mesures incompatibles avec l'ensemble des circonstances objectives et subjectives (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1066/2009 du 22 septembre 2010 consid. 4.1 et la référence).

15.3. Ont notamment été considérées, par le Tribunal fédéral ou les offices de l'assurance-invalidité, comme étant des activités légères, ne requérant pas de formation particulière : les tâches simples de surveillance, de vérification, de contrôle ou encore les tâches d'approvisionnement de machines ou d'unités de production automatiques ou semi-automatiques (voir arrêt du Tribunal fédéral 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.3) ; les activités de vendeur(euse) / caissier(ère) dans un kiosque (arrêts du Tribunal fédéral 9C_502/2014 du 5 septembre 2014 ; 9C_659/2014 du 13 mars 2015 et 9C_474/2016 du 8 février 2017), les activités dans le domaine du bureau, réceptionniste, caissier(ère) en kiosque ou en station-service (arrêts du Tribunal fédéral 9C_502/2014 du 5 septembre 2014 et 9C_474/2016 du 8 février 2017), les emplois sur une chaîne de montage en position assise, les métiers de gardien de musée, de surveillant de parking, de vendeur de billets (arrêt du Tribunal fédéral 9C_21/2008 du 29 septembre 2008), les professions d'auxiliaires dans un magasin, dans une entreprise de lavage de voitures ou de gardien (de musée, de parking, sur un chantier) (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 836/02 du 14 février 2003) ; ou encore les métiers de surveillants de chantier, gardiens de musée, portiers, chauffeurs de taxi, opérateurs sur machines, garçons de course ou encore ouvriers à l'établi pour des travaux légers (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 482/00 du 21 mai 2001).

15.4. Le Tribunal fédéral a été amené à examiner à plusieurs reprises le caractère réaliste des activités adaptées envisageables.

Notre Haute Cour a ainsi considéré, dans un arrêt 9C_279/2008 du 16 décembre 2008 que les limitations fonctionnelles présentées par une assurée, souffrant de lombosciatalgies gauches irritatives L5 sur hernie intraforaminale L5-S1 gauche (pas de port de charges supérieures à 10 kg de façon répétitive, pas de position en antéflexion ou en porte-à-faux du tronc de façon répétitive ou contre résistance, pas de position statique assise au-delà de 40 minutes, diminution du périmètre de marche à 20 minutes, pas de position statique debout au-delà de 20 minutes, possibilité d'alterner les positions assise/debout au minimum deux fois par heure [de préférence à sa guise], pas d'activité en terrain instable, pas de montée ou descente d'escaliers à répétition, pas d'activité en hauteur, pas d'exposition à des machines ou outils provoquant des vibrations de 5 Herz ou moins) représentaient des mesures classiques d'épargne lombaire en vue d'éviter les douleurs provoquées par la pathologie susmentionnée. Pour le Tribunal fédéral, il convenait néanmoins d'admettre que le marché du travail offrait un éventail suffisamment large d'activités légères, dont on devait convenir qu'un nombre significatif étaient adaptées auxdites limitations et accessibles sans aucune formation particulière (consid. 4).

Dans un autre arrêt, le Tribunal fédéral a également considéré qu'il y avait suffisamment d'opportunités réalistes sur un marché du travail équilibré pour les personnes ne pouvant exercer que des travaux légers de type mono-manuel, à l'instar de simples activités de surveillance, d'essais et d'inspection, ainsi que du fonctionnement et de la surveillance de machines (semi-) automatiques ou d'unités de production qui ne nécessitent pas l'utilisation des deux bras et des deux mains. De tels emplois existent également dans les entreprises liées à la production, raison pour laquelle le Tribunal fédéral a jugé qu'une restriction, au secteur des services, du marché du travail à considérer ne s'imposait pas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_100/2012 du 29 mars 2012 consid. 3.4 et les références).

En revanche, dans l'arrêt 9C_313/2007 du 8 janvier 2008, le Tribunal fédéral a estimé qu’une assurée qui devait éviter le port de charges supérieures à 1 kg et les mouvements de bras au-dessus de l'horizontale et ne disposait que d'une force de préhension et de serrage limitées, ne pourrait pas travailler dans le secteur de la vente. Il en allait de même des tâches de vérification ou de contrôle (par exemple de machines automatiques utilisées dans le travail à la chaîne) qui supposaient le maintien d'une même position pendant une certaine durée, ce qui était difficilement compatible avec la restriction mise en évidence par les médecins au niveau de la nuque. Enfin, les empêchements au niveau des bras et des mains limitaient également l'action de l'assurée sur des objets ou machines dont elle devrait contrôler la destination ou le fonctionnement. Quant à l'activité de surveillance proprement dite - exceptée celle de gardien de musée -, elle impliquait dans la plupart des situations la faculté de réagir physiquement à un imprévu (emploi de la force ou courir après quelqu'un), dont l'assurée était dépourvue. Le Tribunal fédéral avait donc considéré qu'il n'y avait pas d'activité adaptée à l'état de santé de l'assurée (consid. 5.3).

De même, dans un arrêt 9C_1035/2009 du 22 juin 2010, le Tribunal fédéral a considéré que compte tenu des limitations fonctionnelles retenues (pas de port de charges de plus de 10 kg de façon répétitive, pas de travail nécessitant le port de charges avec respiration bloquée et activité en force, pas de position statique assise au-delà de 40 minutes sans possibilité de varier les positions assise et debout, diminution du périmètre de marche à environ 20 minutes, pas de marche sur terrain instable, ni de montées ou descentes d'escaliers à répétition, pas de position en génuflexion ou accroupie, pas d'activité requérant un rendement imposé au niveau des membres supérieurs ou la pince pouce-index au niveau du membre supérieur droit contre résistance, pas d'activité minutieuse au niveau du membre supérieur droit), on devait admettre que, même en prenant en considération le large éventail d'activités simples et répétitives ne nécessitant pas de formation dans les secteurs de la production et des services, les possibilités d'un emploi adapté aux importantes limitations (en particulier au niveau des membres supérieurs) de l'assuré n'apparaissaient pas suffisantes pour qu'il put mettre en valeur sa capacité de travail résiduelle sur le plan économique dans une mesure significative (consid. 3 et 4.2.4).

16.          

16.1. En l’espèce, le SMR a retenu, dans son avis du 8 avril 2020, une capacité de travail entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles suivantes :

-          Épargne des genoux : éviter la station debout prolongée, la marche en terrain irrégulier, la position accroupie ou à genoux, les escaliers à répétition, les escabeaux ou échelles ; l’activité devait en outre permettre l’alternance des positions assis-debout ;

-          Épargne des épaules et du dos : éviter le port de charges de plus de 5 kg, à répétition ou 10 kg occasionnellement, éviter les bras au-dessus de l’horizontale, éviter les positions en porte à faux du dos et de la nuque ; une activité de type sédentaire administrative était à privilégier.

16.2. On constate au regard des pièces du dossier que l'intimé n'a donné aucun exemple concret d'activité qu'il estimait adaptée à la situation de la recourante. En particulier, si le SMR a certes conclu à ce qu'une activité strictement adaptée, respectant les limitations fonctionnelles concernant le genou droit, les deux épaules et le dos était théoriquement possible à un taux de 100%, il n'a toutefois pas indiqué concrètement quel type de travail correspondait à une telle activité. De même, la Division de réadaptation de l'intimé a repris cette évaluation de la capacité de travail, sans jamais mentionner aucun exemple d'activité concrète adaptée aux limitations fonctionnelles. Ni le projet de décision de l'intimé, ni la décision litigieuse ne comprennent non plus d'exemples d'une activité adaptée.

Au regard des nombreuses limitations et vu l'absence de formation de la recourante, seules des activités simples et répétitives sont susceptibles d'entrer en considération à titre d'activités adaptées.

La Chambre de céans voit toutefois mal comment une assurée qui ne peut marcher et ne peut rester longtemps debout (position sédentaire évoquée par les médecins) pourrait exercer des activités de surveillance, lesquelles impliquent notamment des positions debout statiques (gardien de musée, etc.) ou de la marche (rondes), voire, comme l'a retenu le Tribunal fédéral, la faculté de réagir physiquement à un imprévu. Il en va de même des tâches de bureau, de réceptionniste, de vérification ou de contrôle, lesquelles supposent le port de charges ou, pour certaines, à tout le moins des manœuvres de soulèvement au-dessus de l’horizontale. En outre, il paraît difficile pour une assurée qui ne saurait porter des charges de plus de 5 kg et qui doit éviter de mettre ses bras au-dessus de l’horizontale, de travailler dans le secteur de la vente, en tant qu'ouvrière en usine, à l'établi ou encore sur une chaîne de montage, en tant qu'opératrice sur machines ou encore d'effectuer des tâches d'approvisionnement de machines ou d'unités de production automatiques ou semi-automatiques, ces activités nécessitant par définition des mouvements des bras.

Au vu des considérations qui précèdent, se pose la question de l’existence de suffisamment d’activités, simples et répétitives, ne nécessitant pas de formation, dans les secteurs de la production et des services adaptées aux nombreuses limitations fonctionnelles - notamment au niveau des membres supérieurs, du dos et des membres inférieurs. La Chambre de céans est d’avis que, dans un cas aussi particulier et compte tenu des nombreuses limitations fonctionnelles et de l'âge de l'assurée, l’OAI aurait dû déterminer si la recourante était concrètement encore en mesure d’exploiter une capacité de travail résiduelle sur le plan économique et de réaliser un salaire suffisant pour exclure une rente. Or, de toute évidence, l’intimé n’a pas procédé à cet examen.

C’est pourquoi, la Chambre de céans lui renverra la cause afin qu’il détermine les activités concrètement envisageables au vu de la situation particulière de la recourante et des limitations fonctionnelles retenues. Si l’office intimé devait arriver à la conclusion qu’il en existe suffisamment, aucune rente ne sera due à la recourante, à tout le moins jusqu’au 31 mai 2020, et il appartiendra alors à l’intimé d’instruire la nouvelle demande. En revanche, si l’OAI devait arriver à la conclusion qu’il n’existe pas suffisamment d’activités raisonnablement envisageables, une rente entière devra être accordée à la recourante et l’instruction concernant la nouvelle demande s’avérerait superflue.

17.         Vu ce qui précède, le recours est partiellement admis et la décision du 26 octobre 2020 est annulée en tant qu’elle met un terme à la rente avec effet au 31 mai 2020. La cause est renvoyée à l’OAI pour instruction complémentaire sur la question des activités adaptées envisageables et nouvelle décision.

La recourante, représentée par un avocat, a droit à une indemnité de procédure de CHF 1'500.- (art. 61 let. g LPGA a contrario).

La procédure n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), il y a par ailleurs lieu de condamner l’intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.-.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable,

Au fond :

2.        L’admet partiellement et annule la décision du 26 octobre 2020 en tant qu’elle met terme avec effet au 31 mai 2020 au droit à une rente entière.

3.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire sur l’existence d’activités adaptées aux limitations fonctionnelles retenues et nouvelle décision, ainsi que, cas échéant, instruction de la nouvelle demande de prestations.

4.        Condamne l’intimé à verser à la recourante une indemnité de dépens de CHF 1'500.-.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le