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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1427/2021

ATAS/184/2022 du 01.03.2022 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1427/2021 ATAS/184/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 1er mars 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1976, travaillait à plein temps comme administratrice d'une entreprise active dans la sous-location d'appartements meublés. Le 26 octobre 2015, elle a subi un clipping d'un anévrisme non rompu de l'artère communicante postérieure gauche, pratiqué par le docteur B______, spécialiste FMH en neurochirurgie.

b. Dans un rapport du 8 mars 2018, le Dr B______ a indiqué que les suites post-opératoires avaient été compliquées par une hémiparésie gauche nécessitant un séjour en neuro-rééducation, avec une bonne récupération. Lors du testing (du 7 mars 2018), une faiblesse relative de l'hémicorps gauche en comparaison avec l'hémicorps droit avait été objectivée, ne gênant pas la patiente, droitière. Cette dernière avait également souffert d'une lésion du nerf III à gauche avec ptose, mydriase et ophtalmo-parésie, en amélioration ; seule persistait la mydriase. Elle avait par ailleurs bénéficié de plusieurs séances de lipo-filling en raison de la fonte musculaire liée à l'atrophie du muscle temporal, avec des résultats satisfaisants. Elle se plaignait ce jour de céphalées habituelles, supportables, présentes environ une fois par semaine, et parfois, d'une diplopie ou vision floue sans gêne. L'assurée avait repris son emploi à 75%.

c. Le 29 août 2018, elle a déposé une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI).

d. Dans un rapport du 4 septembre 2018, le docteur C______, spécialiste en médecine interne générale et médecin traitant, a posé le diagnostic, avec effet sur la capacité de travail, de status post-clipping d'un anévrisme cérébral avec complications (hématome, AVC, craniotomie), et celui, sans effet sur la capacité de travail, de maladie de Biermer. La capacité de travail de l'assurée était nulle dans toute activité depuis le 26 octobre 2015. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : troubles de concentration, céphalées, vertiges, nausées, migraines, dépression, asthénie et insomnie.

e. Dans un rapport du 6 juin 2019, le Dr C______ a mentionné un état stationnaire avec stabilisation définitive des séquelles cognitives depuis un an. L'assurée présentait des vertiges, des céphalées quotidiennes, des troubles de concentration et de mémoire, une asthénie, des insomnies, une labilité émotionnelle, une photophobie, ainsi qu'une intolérance à la télévision et aux écrans. Elle ne souffrait pas d'un état dépressif au sens psychiatrique, mais d'un « syndrome post rupture d'anévrisme ». Sa capacité de travail était de 25% dans toute activité.

f. Suivant les recommandations du service médical de l’assurance-invalidité (ci-après : SMR), l'OAI a mis sur pied une expertise pluridisciplinaire, confiée aux docteurs D______, spécialiste FMH en médecine interne générale, E______, spécialiste en neuro-ophtalmologie, F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, G______, spécialiste FMH en neurologie, ainsi qu'à Madame H______, neuropsychologue FSP.

Dans leur rapport intitulé « expertise consensuelle » du 3 novembre 2020, les experts ont retenu les diagnostics de status après craniotomie pour clippage d'un anévrisme de l'artère communicante postérieure gauche le 26 octobre 2015 avec troubles sensitifs de l'hémiface gauche, très discrets troubles sensitivomoteurs au membre inférieur gauche ; de migraines sans aura ; d'hémianopsie homonyme gauche partielle, asymétrique, plus marquée à l'œil gauche (atteinte partielle des voies visuelles rétro-chiasmatiques droites) ; de perte du champ visuel périphérique de l'œil gauche (perte du croissant temporal monoculaire gauche) ; de minime séquelle d'une parésie du nerf III gauche, sous la forme d'une légère diminution de l'élévation de l'œil gauche en abduction uniquement ; de photophobie en partie liée aux migraines ; de douleurs plantaires dans le cadre d'un névrome de Morton des deux côtés ; et de trouble de l'adaptation avec réaction dépressive prolongée (F 43.21). La capacité de travail de l'assurée était jugée entière depuis début 2017 dans l'activité habituelle, qui était adaptée à l'état de santé.

g. Par avis du 2 décembre 2020, le SMR a fait siennes les conclusions de l'expertise.

B. a. Dans un projet de décision du 18 décembre 2020, lui ayant reconnu le statut de personne active à plein temps, l’OAI a annoncé à l’assurée qu’il entendait lui nier le droit à des prestations. Bien que, à l'échéance du délai d'attente d'un an, le 26 octobre 2016, elle présentât un taux d'invalidité de 100%, la rente ne pouvait lui être versée qu'à compter de février 2019, en raison du dépôt tardif de sa demande. Or, dès cette date, son degré d'invalidité, inférieur à 40%, n'ouvrait pas de droit à des prestations sous forme de rente.

b. Le 6 janvier 2021, l'assurée a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l'OAI, en invoquant un névrome de Morton aux deux pieds pour lequel elle était en incapacité de travail totale depuis le 21 juillet 2020. Elle a annexé un rapport d'imagerie par résonnance magnétique du 14 juillet 2020 du pied gauche, et celui du 21 juillet 2020 du pied droit.

c. Par pli du 19 janvier 2021, complété le 19 février suivant, l'assurée a contesté le projet de décision.

Elle a joint notamment :

      les certificats d'arrêt de travail total établis par le Dr C______ pour la période du 21 juillet 2020 au 31 janvier 2021 ;

      un rapport du 22 décembre 2020 de la doctoresse I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, diagnostiquant une dysthymie (F34.1) ;

      un rapport du 25 janvier 2021 du Dr C______, faisant état des séquelles neurologiques et psychiatriques de l'assurée consécutives à son opération du cerveau et relevant l'apparition d'une nouvelle maladie, celle de Morton, qui nécessiterait deux interventions chirurgicales ;

      un rapport du même jour de Monsieur J______, physiothérapeute, listant les séquelles fonctionnelles de l'assurée liées à son anévrisme cérébral pour lesquelles elle avait suivi un traitement de rééducation ;

      et un rapport du 19 février 2021 de Madame K______, ergothérapeute spécialisée en basse-vision du Centre d'information et de réadaptation de l'Association pour le bien des aveugles et malvoyants, mentionnant les solutions déjà mises en œuvre (non concluantes) et celles envisagées aux problèmes de photophobie de l'assurée pour réduire les incidences de ce symptôme sur les activités quotidiennes de celle-ci.

d. Par avis du 1er mars 2021, le SMR a considéré que les nouvelles pièces n'apportaient pas d'élément objectif susceptible de modifier l'appréciation du cas.

e. Par décision du 22 mars 2021, l'OAI a confirmé son projet de décision.

C. a. Par acte du 25 avril 2021, posté le lendemain, l'assurée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS) contre la décision précitée du 22 mars 2021, en concluant implicitement à son annulation. Elle a proposé, en tant que de besoin, l'audition de son médecin traitant et de son physiothérapeute, ainsi que celle de ses parents et de son frère. Elle a produit en particulier les rapports des 22 décembre 2020, 25 janvier et 19 février 2021 déjà cités.

b. Dans sa réponse du 17 mai 2021, l'intimé a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique du 4 juin 2021, la recourante a persisté dans ses conclusions.

Elle a versé au dossier :

      un rapport du 4 novembre 2020 du Dr B______ relatif au suivi radio-clinique d'un status post-clipping de l'anévrisme non rompu de l'artère communicante postérieure gauche ;

      un rapport du 12 novembre 2020 du docteur L______, médecin-chef au service de neurologie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), posant les diagnostics de céphalées migrainoïdes post-craniotomie (date inconnue) et de clipping d'un anévrisme non rompu de l'artère communicante postérieure gauche (26 octobre 2015) et mentionnant, à titre de comorbidités, une maladie de Biermer, ainsi qu'une névralgie de Morton des deux côtés (date inconnue) ;

      un rapport d'hospitalisation du 25 mars 2021 du docteur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, retenant les diagnostics de fistulisation chronique sur sérome sur status post excision d'un névrome de Morton du 3ème espace du pied droit le 18 janvier 2021 (mise en place d'un pansement VAC le 22 mars 2021), ainsi que d'un névrome de Morton du 3ème espace du pied gauche, et indiquant que l'intervention avait consisté en l'ablation du pansement VAC et en la fermeture secondaire du pied droit, puis en l'excision d'un névrome de Morton du 3ème espace du pied gauche ;

      et un courrier du 25 mai 2021 du service de neurologie des HUG concernant la consultation agendée au 15 juin 2021.

d. Le 23 juin 2021, la recourante a produit un rapport du Dr C______ établi la veille, posant, à la lumière des résultats des tests sanguins réalisés, le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde séropositive, facteur rhumatoïde et anti-ccp, et estimant que la reprise du travail semblait définitivement compromise.

e. Dans sa duplique du 28 juin 2021, l'intimé a maintenu ses conclusions, en se ralliant à l'avis annexé du SMR du même jour, dans lequel ce dernier se prononçait sur les rapports des 4 novembre 2020, 12 novembre 2020 et 25 mars 2021 précités.

f. Dans son écriture du 12 juillet 2021, l'intimé, se référant à l'avis joint du SMR du 1er juillet 2021, a souligné que le nouveau diagnostic posé par le Dr C______, mis en évidence postérieurement à la décision querellée, ne modifiait pas l'issue du litige.

g. Le 28 juillet 2021, l'intimé a adressé à la CJCAS, comme objet de sa compétence, le courriel que lui avait envoyé la recourante le 19 juillet écoulé, par lequel cette dernière requérait l'envoi d'un formulaire pour le dépôt d'une nouvelle demande de rente en lien avec la nouvelle pathologie.

h. Dans son écriture du 5 août 2021, la recourante s'est étonnée du fait que sa polyarthrite rhumatoïde, qui existait probablement depuis plusieurs années, mais diagnostiquée récemment, ne soit pas prise en compte dans le cadre de la présente procédure. Elle a joint le formulaire de nouvelle demande de prestations d’assurance-invalidité (ci-après : AI), dûment complété et signé le 29 juillet 2021.

i. Dans ses observations du 31 août 2021, l'intimé a persisté dans ses conclusions, relevant qu'il ne pourrait pas procéder à des mesures d'instruction dans le cadre de la nouvelle demande de prestations tant que la présente procédure de recours était pendante.

j. Invitée à se déterminer, la recourante ne s'est pas manifestée dans le délai imparti.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021, est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA.

3.1 Sur le plan matériel, sont en principe applicables les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 1 consid. 1 ; ATF 127 V 467 consid. 1 et les références). En ce qui concerne en revanche la procédure, et à défaut de règles transitoires contraires, le nouveau droit s'applique sans réserve dès le jour de son entrée en vigueur (ATF 117 V 93 consid. 6b ; ATF 112 V 360 consid. 4a ; RAMA 1998 KV 37 p. 316 consid. 3b).

3.2 Déposé après le 1er janvier 2021, le recours sera donc traité sous l'angle du nouveau droit de la LPGA (cf. ATAS/360/2021 du 15 avril 2021 consid. 3).

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

4.1 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

4.2 En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques inclusivement (art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a LPA), le recours est recevable.

6.             Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité, singulièrement sur l'étendue de sa capacité de travail.

7.             Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

8.             En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

8.1 Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

8.2 En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40 % en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40 % au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

9.             Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'AI, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; ATF 102 V 165 consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

9.1 La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

9.2 Le Tribunal fédéral a modifié sa pratique lors de l'examen du droit à une rente d'invalidité en cas de troubles psychiques (ATF 143 V 409 consid. 4.5 et ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 du 30 novembre 2017). La jurisprudence développée pour les troubles somatoformes douloureux, selon laquelle il y a lieu d'examiner la capacité de travail et la capacité fonctionnelle de la personne concernée dans le cadre d'une procédure structurée d'administration des preuves à l'aide d'indicateurs (ATF 141 V 281), s'applique dorénavant à toutes les maladies psychiques, y compris les troubles dépressifs de degré léger ou moyen (ATF 143 V 409 consid. 4.5.1). En effet, celles-ci ne peuvent en principe être déterminées ou prouvées sur la base de critères objectifs que de manière limitée (ATAS/945/2018 du 17 octobre 2018 consid. 6b).

Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).

Les indicateurs pertinents sont notamment l'expression des constatations et des symptômes, le recours aux thérapies, leur déroulement et leurs effets, les efforts de réadaptation professionnelle, les comorbidités, le développement et la structure de la personnalité, le contexte social de la personne concernée, ainsi que la survenance des restrictions alléguées dans les différents domaines de la vie (travail et loisirs ; ATAS/676/2019 du 26 juillet 2019 consid. 10a).

9.3 Selon la jurisprudence, une dysthymie (F34.1) est susceptible d'entraîner une diminution de la capacité de travail lorsqu'elle se présente avec d'autres affections, à l'instar d'un grave trouble de la personnalité. Pour en évaluer les éventuels effets limitatifs, ces atteintes doivent en principe faire l'objet d'une procédure probatoire structurée selon l'ATF 141 V 281 (arrêt du Tribunal fédéral 9C_599/2019 du 24 août 2020 consid. 5.1 et la référence).

10.         Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

10.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

10.2 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

10.3 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201] ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

10.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

10.5 En cas de divergence d’opinions entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I.514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

11.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

12.         Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

13.         En l'espèce, l'intimé nie le droit de la recourante à une rente de l'assurance-invalidité, en s'appuyant sur l'avis du SMR du 2 décembre 2020, lui-même basé sur le rapport d'expertise pluridisciplinaire (« consensuelle ») du 3 novembre 2020, ainsi que sur l'avis du SMR du 1er mars 2021.

13.1 Sur la forme, le rapport d'expertise est fondé sur l'examen de la recourante par des spécialistes des disciplines médicales pertinentes eu égard aux atteintes à la santé invoquées effectué les 8 juillet (médecine interne), 21 août (ophtalmologie), 31 août (neurologie), 17 septembre (neuropsychologie) et 22 septembre 2020 (psychiatrie) , sur une analyse du dossier et comprend une anamnèse, ainsi que les plaintes de la recourante.

13.2 Sur le fond, les experts, procédant à une « évaluation interdisciplinaire », posent des diagnostics tant somatiques que psychiques, sans incidence sur la capacité de travail de la recourante à compter du 1er janvier 2017.

13.2.1 Sur le plan somatique, l'expert ophtalmologue retient une hémianopsie homonyme gauche partielle, asymétrique, plus marquée à l'œil gauche qu'à l'œil droit (atteinte partielle des voies visuelles rétro-chiasmatiques droites) ; une perte du champ visuel périphérique de l'œil gauche (perte du croissant temporal monoculaire gauche) ; et une minime séquelle d'une parésie du nerf III gauche sous la forme d'une légère diminution de l'élévation de l'œil gauche en abduction uniquement. Il explique que le déficit homonyme gauche est très faible, sans gêne pour la recourante dans ses activités habituelles. La perte du croissant temporal a pour conséquence que celle-ci est parfois surprise par l'irruption de quelqu'un ou d'un objet en mouvement dans son hémi-champ visuel gauche qu'elle perçoit un peu plus tard que s'il arrivait dans son hémi-champ visuel droit (rapport du 4 septembre 2020, p. 2). Il ajoute que l'acuité visuelle de l'œil droit est légèrement diminuée par rapport à celle de l'œil gauche (normale) en raison d'une amblyopie ancienne connue non évolutive. La recourante ne souffre plus d'une mydriase gauche, seulement d'une légère anisocorie physiologique. Quant à la paralysie du nerf III gauche, elle a évolué favorablement. Seule une diplopie verticale existe lors de l'élévation de l'œil gauche en abduction (p. 3).

L'expert en conclut que, sur le plan strictement ophtalmologique, la recourante est apte à travailler à plein temps. Il précise que la photophobie, dont se plaint celle-ci, ne résulte pas d'une affection ophtalmologique, mais d'un phénomène central (intervention intracrânienne et/ou complications neurologiques consécutives à l'opération, p. 3).

L'expert neurologue, quant à lui, retient un status après craniotomie pour clippage d'un anévrisme de l'artère communicante postérieure gauche le 26 octobre 2015 avec troubles sensitifs de l'hémiface gauche et de très discrets troubles sensitivomoteurs au membre inférieur gauche ; des migraines sans aura ; et des douleurs plantaires dans le cadre d'un névrome de Morton des deux côtés (rapport du 31 août 2020, p. 4). Il considère qu'il n'existe pas de limitation fonctionnelle significative dans l'activité habituelle sur le plan neurologique (p. 5).

Enfin, l'experte neuropsychologue retient un déficit à un test de dénomination d'actions et un ralentissement à la lecture sous contrainte temporelle ; des résultats effondrés à une épreuve de mémoire antérograde épisodique verbale ; un ralentissement à des tâches de programmation motrice et d'inhibition et des difficultés à une tâche de planification ; un ralentissement modéré de la vitesse de traitement et sévère des temps de réaction, ainsi que des troubles sévères à une épreuve d'attention divisée (rapport du 29 septembre 2020, p. 3). Elle relève, par rapport à l'examen neuropsychologique de novembre 2015 jugé à l'époque dans les normes , une aggravation, sans lien avec le clippage de l'anévrisme réalisé en octobre 2015. Sous réserve d'éléments médicaux pouvant expliquer la présence actuelle des troubles mnésiques sévères, les résultats évoqués suggéraient, selon elle, des fluctuations dans la mobilisation des ressources, si bien qu'ils ne permettaient pas d'apprécier objectivement la nature et la sévérité d'une possible atteinte cognitive (p. 4).

Sur le plan psychique, l'expert retient des troubles de l'adaptation avec une réaction dépressive prolongée (F43.21), en présence d'une thymie abaissée et fluctuante liée à des séquelles post-craniotomie et à des difficultés conjugales, sans répercussion sur la capacité de travail (rapport du 23 septembre 2020, p. 3-4).

13.2.2 La chambre de céans constate que, sous l'angle psychique, quand bien même l'expert et la psychiatre traitante posent des diagnostics différents, cette dernière évoque une dysthymie (F34.1 ; rapport du 22 décembre 2020) ce qui n'est pas inhabituel, compte tenu de la marge d'appréciation inhérente à la science médicale (ATF 145 V 361 consid. 4.1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_212/2020 du 4 septembre 2020 consid. 4.2 et 9C_762/2019 du 16 juin 2020 consid. 5.2) , cela, en soi, ne porte pas à conséquence, puisque, comme on le verra ci-après à l'aide des indicateurs jurisprudentiels (ATF 141 V 281), l'atteinte à la santé psychique (quel que soit le diagnostic considéré) n'entraîne pas de répercussions fonctionnelles.

En effet, s'agissant du « succès du traitement et de la réadaptation », la recourante consulte sa psychiatre depuis février 2020, sans prendre de médication psychotrope (rapport du 3 novembre 2020, p. 7). Aucune pièce au dossier ne fait état d'une hospitalisation en milieu psychiatrique. La recourante n'est donc pas encore confrontée à un échec de toute thérapie médicalement indiquée.

S'agissant de la « comorbidité », si celle-ci présente également des troubles somatiques concomitants, encore faut-il examiner si l'interaction de ces troubles ayant valeur de maladie prive l'assuré de certaines ressources (arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3). Tel n'est toutefois pas le cas en l'occurrence, la recourante dispose de bonnes capacités et ressources personnelles, compte tenu de ses activités quotidiennes et ménagères (en particulier, elle sort se promener, prépare à son rythme ses repas, fait les courses et la lessive, écoute de la musique, fréquente les salles de cinéma et conduit sur de courts trajets ; rapport du 3 novembre 2020 de la Dresse D______, p. 8).

S'agissant du complexe de « la personnalité », ni la psychiatre traitante ni l'expert ne retiennent un trouble spécifique de la personnalité au sens d'une classification diagnostique reconnue. Celui-ci relève au contraire que la personnalité structurée de la recourante lui permet de faire face à ses problèmes de santé et à ses difficultés conjugales (rapport du 23 septembre 2020, p. 4).

Pour ce qui est du « contexte social », lors de l'expertise, la recourante avait déclaré entretenir des relations avec des amis (rapport du 3 novembre 2020 de la Dresse D______, p. 8). Quand bien même la psychiatre traitante mentionne, dans un rapport postérieur, que celle-ci vit une situation de repli, la recourante garde néanmoins des contacts réguliers avec ses parents et son frère (rapport de la Dresse D______ précité, p. 8 ; rapport du 22 décembre 2020 de la Dresse I______ ; courrier du 19 février 2021). Le contexte familial est donc susceptible de lui fournir des ressources pour surmonter son atteinte à la santé.

En ce qui concerne la catégorie « cohérence », les atteintes à la santé ne limitent pas la recourante dans l'exécution de ses travaux habituels, puisqu'elle est, comme on l'a dit plus haut, autonome dans les fonctions de la vie quotidienne. Elle gère par ailleurs ses tâches administratives à son rythme (rapport du 3 novembre 2020 de la Dresse D______, p. 8) et son hygiène personnelle est respectée (p. 9). Ces éléments tendent à démontrer que les symptômes psychiques de la recourante ne peuvent l'empêcher de travailler dans une activité lucrative.

Du reste, aucun médecin n'a mis la recourante en arrêt de travail, ni n'a attesté d'une incapacité de travail en raison de l'atteinte psychique, étant relevé que, le Dr C______ (médecin traitant) écartait tout trouble dépressif pathologique dans son rapport du 6 juin 2019.

En définitive, on doit admettre avec l'expert psychiatre que la recourante est apte à exercer une activité professionnelle à plein temps, en dépit de son affection psychique qui n'a pas valeur de maladie, faute d'atteindre un degré de gravité suffisant.

13.2.3 Sous l'angle somatique, aucun rapport au dossier ne permet de remettre en cause l'appréciation de l'expert ophtalmologue sur le plan strictement ophtalmologique. En revanche, alors que, selon cet expert, la photophobie, qui n'est pas due à une lésion oculaire, résulte de la craniotomie et/ou de complications neurologiques (entre autres la parésie du nerf III gauche), l'expert neurologue ne discute point de ce symptôme et de ses éventuelles limitations fonctionnelles. Dans le rapport intitulé « expertise consensuelle » du 3 novembre 2020, signé uniquement par les médecins interne et psychiatre, sans qu'il ne soit en réalité complété par une appréciation consensuelle de l'ensemble des experts (p. 7-8), il est indiqué que la photophobie est « en partie » liée aux migraines, qu'elle est probablement consécutive à l'opération intracrânienne (p. 3-5) et qu'elle limite le temps de travail d'affilée à l'écran d'ordinateur sur des périodes supérieures à 30-45 minutes (p. 5). Or, malgré cette restriction et la nécessité pour la recourante d'aménager des pauses, ces experts concluent à une pleine capacité de travail dans l'activité habituelle (p. 6), sans expliquer les motifs pour lesquels ils excluent (implicitement) une baisse de rendement étant relevé qu'au 19 février 2021, une solution n'était pas encore trouvée aux problèmes de photophobie (rapport de Mme K______).

De plus, bien qu'il observe que la migraine soit insuffisamment traitée, l'expert neurologue considère qu'elle n'est pas invalidante à long terme, le pronostic étant favorable, moyennant une médication appropriée et un traitement de fond (rapport du 31 août 2020, p. 5). Dans le rapport d'expertise « consensuelle » du 3 novembre 2020, les experts se contentent ensuite de déclarer que, sur le plan neurologique, les limitations fonctionnelles sont peu importantes ; les migraines « pourraient » être améliorées dans leur prise en charge avec la mise en place d'une antalgie efficace sur les crises, de même qu'un traitement de fond (p. 5). Or, les experts, qui emploient le conditionnel, ne discutent pas de l'éventuelle incidence actuelle des migraines qui entravent la recourante pendant un à deux jours (avis du SMR du 28 juin 2021) entre deux à quatre fois par mois (rapport du 31 août 2020, p. 2 ; courrier du 19 février 2021, p. 4) sur le rendement de celle-ci, dans l'attente qu'un traitement médicamenteux porte ses fruits. À cet égard, dans son rapport du 12 novembre 2020, le Dr L______ indique avoir prescrit des médicaments à la recourante et qu'il convient d'évaluer son efficacité dans quelques mois. Cette dernière allègue que ce traitement n'a pas été bénéfique (cf. réplique du 4 juin 2021), raison pour laquelle elle consulterait ce médecin le 15 juin 2021 (cf. courrier des HUG du 25 mai 2021).

Par ailleurs, l'expert neurologue, s'agissant du système moteur et de la coordination, constate une instabilité « significative » à l'épreuve de Romberg à l'instar du Dr B______ (rapport du 4 novembre 2020 qui évoque un Romberg pathologique) ainsi qu'à la marche du funambule (rapport du 31 août 2020, p. 4), tout en concluant, de manière contradictoire, à de « très discrets » troubles (sensitivo)-moteurs au membre inférieur gauche, sans répercussion fonctionnelle (p. 4-5).

En outre, même si l'experte neuropsychologue fait état d'une aggravation des fonctions mnésiques et attentionnelles de la recourante, elle estime que cela découle d'une non-participation active de celle-ci au maximum de ses capacités cognitives (rapport du 29 septembre 2020, p. 3-4 ; rapport d'expertise « consensuelle » du 3 novembre 2020, p. 4), au motif que la recourante a effectué le trajet depuis Genève en voiture, suivi d'une évaluation de trois heures, qu'elle projette une activité le soir même, que certaines épreuves, réussies, sur le plan attentionnel, attestaient d'un bon investissement dans les tâches et qu'il n'existait pas d'éléments médicaux expliquant la sévérité des troubles mnésiques (p. 3-4).

Or, la recourante conteste avoir conduit (jusqu'à Lausanne où a eu lieu l'expertise), affirmant que sa mère l'a accompagnée (courrier du 19 février 2021), ce qui semble vraisemblable, dès lors qu'elle avait déclaré à l'experte en médecine interne que, si elle conduit sur de courts trajets, elle ne prend par contre plus l'autoroute par crainte de malaise (rapport de la Dresse D______ du 3 novembre 2020, p. 9). Ensuite, on ne voit pas en quoi l'activité que planifiait la recourante le soir de l'expertise témoignerait d'un comportement incohérent, dès lors que se plaignant de fatigue et de troubles de la concentration , elle a précisé qu'elle projetait cette activité après un temps de repos (rapport du 29 septembre 2020, p. 3). De plus, l'experte neuropsychologue conclut de manière prématurée à l'absence d'atteinte cognitive, motif pris qu'il n'existe pas d'éléments médicaux (lésion organique ou psychique significative) expliquant les troubles neuropsychologiques sévères observés (rapport d'expertise « consensuelle » du 3 novembre 2020, p. 4 et 7). Il est en effet admis que la recourante souffre de migraines et de photophobie, et l'expert ophtalmologue n'exclut pas que ce dernier symptôme soit lié à une complication neurologique (et révélerait donc une atteinte neurologique sous-jacente) assertion qui n'a nullement été investiguée par l'expert neurologue, ce qu'il n'aurait certainement pas manqué de faire si tous les experts avaient procédé à une discussion interdisciplinaire -. Par ailleurs, si l'experte neuropsychologue pensait que la recourante ne participait pas activement aux tests au vu des résultats fluctuants, elle aurait dû, entre autres, effectuer des examens complémentaires afin de confirmer ou infirmer la présence d'une atteinte cognitive qu'elle n'était pas en mesure, selon elle, d'apprécier objectivement.

Force est de constater que les experts neurologue et neuropsychologue n'ont pas suffisamment instruit la situation médicale de la recourante.

13.2.4 Au vu de ces éléments, la valeur probante des expertises neurologique et neuropsychologique ne peut qu'être mise en doute, de sorte qu'il se justifie de renvoyer la cause à l'intimé afin qu'il mette en œuvre une nouvelle expertise comportant ces deux volets. Il appartiendra aux experts, qui devront notamment commenter et discuter les avis du Dr G______ et de Mme H______, de répondre en particulier aux questions en suspens : à savoir, si la photophobie est due à une atteinte neurologique et si ce symptôme, et/ou les migraines, ainsi que les troubles de l'équilibre baissent le rendement de la recourante (étant précisé que dans l'éventualité où la recourante ne souffrirait plus de migraines lors de la nouvelle expertise, il incombera néanmoins aux experts de se déterminer sur l'influence éventuelle de celles-ci sur le rendement de la recourante pour la période antérieure).

13.3 En ce qui concerne les douleurs plantaires dans le cadre d'un névrome de Morton des deux côtés, ainsi que la polyarthrite rhumatoïde, il convient de relever que, de jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement et qui ont modifié cette situation doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

13.3.1 La survenance d'une atteinte à la santé totalement différente de celle qui prévalait au moment du refus de la première demande de prestations et propre, de par sa nature et sa gravité, à causer une incapacité de travail de 40% au moins en moyenne sur une année a, compte tenu de l'absence de connexité matérielle avec la situation de fait prévalant au moment du refus de la première demande de prestations, pour effet de créer un nouveau cas d'assurance. Le principe de l'unicité de la survenance de l'invalidité cesse en effet d'être applicable lorsque l'invalidité subit des interruptions notables ou que l'évolution de l'état de santé ne permet plus d'admettre l'existence d'un lien de fait et de temps entre les diverses phases, qui en deviennent autant de cas nouveau de survenance de l'invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_697/2015 du 9 mai 2016 consid. 3.2 et les références).

13.3.2 En l'espèce, la recourante a d'abord été incapable de travailler en raison du clipping d'un anévrisme non rompu de l'artère communicante postérieure gauche le 26 octobre 2015, ainsi que de troubles apparus dans les suites de cette opération (notamment l'hémiparésie gauche ayant nécessité une neuro-rééducation), ce jusqu'en décembre 2016, date à partir de laquelle elle a pu reprendre son travail habituel presque à 100% (rapport du Dr B______ du 9 décembre 2016 ; avis du SMR du 2 décembre 2020), avant qu'elle ne soit, selon le Dr C______, à nouveau en totale incapacité de travail ou à raison de 75% dans toute activité pour des troubles cognitifs (rapports des 4 septembre 2018 et 6 juin 2019). Les douleurs plantaires ont ensuite occasionné une incapacité de travail totale dès le 21 juillet 2020 (attestation du Dr C______ du 31 août 2020 ; déclaration de maladie du 28 juillet 2020). Force est de constater que les atteintes somatiques d'octobre 2015 et de septembre 2018 sont distinctes de celles apparues en juillet 2020 et les secondes ne peuvent être rattachées par un lien temporel à l'opération réalisée en octobre 2015. Partant, un nouveau cas d'assurance est survenu en juillet 2020, entraînant le départ d'un nouveau délai de carence d'un an, échéant en juillet 2021, postérieurement à la décision litigieuse du 22 mars 2021. La chambre de céans ne peut dès lors, à ce stade, se prononcer sur le droit éventuel de la recourante aux prestations de l'assurance-invalidité consécutif à la maladie de Morton.

Il en va de même s'agissant de la polyarthrite rhumatoïde. En effet, quand bien même, aux dires de la recourante, cette atteinte existerait de longue date, avant la décision dont est recours, il n'empêche que, lors de l'expertise, celle-ci ne se plaignait pas de douleurs aux articulations, lesquelles sont apparues depuis le 22 mai 2021 au plus tôt (rapport du 22 juin 2021 du Dr C______). Ainsi, antérieurement à cette date, elles n'entraînaient aucune restriction fonctionnelle. En conséquence, ce diagnostic constitue un fait nouveau postérieur à la décision du 22 mars 2021. Aussi la chambre de céans ne saurait-elle en tenir compte.

Cela étant dit, au vu du renvoi de la présente cause à l’intimé pour qu'il instruise la situation de la recourante, il lui incombera également, dans ce cadre, d'apprécier, à l'aune des pièces médicales (autres que celles figurant déjà au dossier) que lui fournira celle-ci, l'opportunité de compléter la nouvelle expertise par un volet rhumatologique et/ou orthopédique, pour rendre une décision sur la base de faits dûment actualisés.

14.         Vu le renvoi de la cause à l'intimé, il n'est pas nécessaire d'entendre les témoins cités par la recourante.

15.         Par conséquent, le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse annulée et le dossier renvoyé à l’intimé afin qu’il procède conformément aux considérants, et rende une nouvelle décision.

La recourante, non représentée, n'a pas droit à des dépens (art. 61 let. g LPGA).

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument, arrêté en l'espèce à CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision du 22 mars 2021.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour instruction complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le