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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1116/2021

ATAS/875/2021 du 30.08.2021 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1116/2021 ATAS/875/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 août 2021

6ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Maxime CLIVAZ

 

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A.      a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______1976, titulaire d’un certificat fédéral de capacité d’assistant en information documentaire et d’une licence professionnelle en management des ressources numériques, a bénéficié d’un délai cadre d’indemnisation du 1er février 2016 au 31 janvier 2018, du 1er février 2018 au 31 janvier 2020 (sans droit) et du 2 mars 2020 au 31 août 2022.

b. Le 29 mai 2020, l’office régional de placement (ci-après : l’ORP) a envoyé à l’assuré une assignation à un emploi vacant d’assistant bibliothécaire documentaliste archiviste, à 50 %, d’une durée limitée du 1er août 2020 au 31 décembre 2020, aux B______ (ci-après : l’employeur), auquel l’assuré a donné suite dans les délais. Par courriel du 13 juillet 2020, l’employeur a informé l’assuré que sa candidature n’avait pas été retenue. La liste récapitulative des assignations, remplie par l’employeur le 13 juillet 2020, mentionne que l’assuré a postulé, mais n’a pas été reçu, ni engagé. Il est noté que « lors de la prise de contact téléphonique pour l’inviter à un entretien, M. A______ a dit qu’il « n’était pas bien physiquement, pas en état de travailler ». Nous considérons cela comme un retrait de candidature ».

c. A la demande de l’OCE, l’assuré a indiqué le 22 août 2020 qu’il avait présenté une fatigue intense et une impression de faiblesse générale, évoquant le COVID-19, de sorte qu’il s’était rendu, le 14 juin 2020, aux HUG pour se faire tester ; le test était négatif mais compte tenu d’une fatigue et de tachycardie il avait à nouveau consulté le 22 juin 2020 et il avait découvert que ces symptômes étaient en lien avec l’arrêt d’un médicament prescrit par le docteur C______, FMH psychiatrie et psychothérapie, de sorte qu’il avait repris le traitement et se sentait désormais mieux. Il a joint des factures des HUG du 14 juin 2020, pour une consultation en urgence (laboratoires, consultation, électrocardiogramme et cardiologie et test COVID-19), ainsi que des factures des HUG du 22 juin 2020 (consultation, laboratoires et ECG).

B.       a. Par décision du 2 septembre 2020, l’OCE a suspendu le droit à l’indemnité de l’assuré pour une durée de 18 jours, au motif que, sans raison valable, l’assuré s’était privé de l’emploi assigné le 29 mai 2020, correspondant à un revenu mensuel brut de CHF 2'719.80, pour cinq mois. Il n’avait annoncé aucune incapacité de travail qui aurait pu justifier qu’il ne se rende pas à un entretien avec l’employeur pour l’emploi qui débutait, de surcroit, seulement le 1er août 2020. Le gain assuré de l’assuré était de CHF 4'505.-, donnant droit à une indemnité journalière de CHF 166.08 et le gain intermédiaire de l’emploi assigné était de CHF 2'719.80, de sorte que le dommage journalier était de CHF 100.27, ce qui, pour une durée de 30 jours (suspension prévue pour un refus d’emploi), équivalait à 18 jours de suspension (soit CHF 100.27 x 30 jours / CHF 166.08).

b. Le 24 septembre 2020, l’assuré a fait opposition à la décision précitée, en concluant à son annulation et en faisant valoir qu’il n’était pas certain que l’assignation aurait donné lieu à un entretien débouchant sur un engagement, que la réponse négative des HUG pouvait être motivée pour une autre cause que son impossibilité à assumer l’assignation, que c’était bien un problème de santé qui l’avait empêché de participer à un entretien d’embauche et fait craindre de ne pas pouvoir assumer le poste, qu’il aurait dû l’annoncer à l’OCE mais que sa conseillère en placement était absente, tout comme son médecin, que ce n’était qu’après avoir consulté son psychiatre fin juin que sa situation s’était clarifiée et qu’il avait fait tout son possible, depuis mars 2020, pour retrouver un emploi. Il a communiqué une attestation du Dr C______ du 21 septembre 2020, selon laquelle, dès fin mai 2020, l’assuré avait présenté une décompensation psychotique à la suite de l’arrêt de son traitement médicamenteux, lequel avait été réintroduit le 29 juin 2020 et dès le 15 juillet 2020, l’assuré avait retrouvé une stabilité psychologique.

c. Par décision du 23 février 2021, l’OCE a rejeté l’opposition, en relevant qu’en déclinant la proposition d’entretien de l’employeur, l’assuré avait fait échouer une possibilité d’emploi, que l’attestation du Dr C______ ne mentionnait pas d’incapacité de travail qui permettrait de justifier le manquement et qu’aucune incapacité de travail n’avait été déclarée dans les IPA de mai à septembre 2020.

C.       a. Le 26 mars 2021, l’assuré, représenté par un avocat, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée, en concluant, principalement, à son annulation, subsidiairement, à la réduction de la sanction. Dès fin mai 2020, il avait subi une péjoration de son état de santé en raison d’une décompensation psychotique qui avait justifié deux admissions aux urgences des HUG les 14 et 22 juin 2020 : il avait indiqué, par téléphone, à l’employeur qu’à court terme, vu son état, il n’était pas possible d’accepter un entretien, ce qui était objectivement justifié par son état de santé ; on ne pouvait exiger de lui une irréprochabilité administrative compte tenu de son affection ; il n’avait pas dit qu’il retirait sa candidature ; il prenait au sérieux ses obligations de chômeur. Il n’avait pas eu l’occasion, une fois sa capacité de travail recouvrée, de recontacter les HUG pour convenir d’un entretien, dès lors que le refus de sa candidature lui était parvenu le 13 juillet 2020. La sanction était disproportionnée, compte tenu de la décompensation psychotique et la faute était, au mieux, légère.

b. Le 27 avril 2021, l’OCE a conclu au rejet du recours.

c. Le 17 mai 2021, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

Le recourant a déclaré qu’il avait eu un problème de santé important après sa postulation, avec des symptômes cardiaques, motivant une consultation aux HUG. Suite à un malaise il avait à nouveau consulté aux HUG en urgence le 22 juin 2020 et vu le Dr D______. Il avait mal supporté le confinement et fait une décompensation. A son souvenir il avait reçu le téléphone de l’employeur après le 14 juin 2020 et l’avait averti qu’il n’était pas en état de travailler et qu’il ne pouvait se présenter à un entretien. En raison du confinement il n’avait pas pu voir le Dr C______ comme habituellement, pendant un mois, ce qui l’avait aussi déstabilisé. Il avait arrêté son traitement prescrit par le Dr C______ courant mai 2020, ce qui avait pu provoquer certains des troubles. Il s’était rendu à un entretien pour un autre poste le 18 juin 2020, mais il n’était pas en état de participer à un tel entretien, lequel s’était d’ailleurs mal passé. Il n’était pas en état de faire des démarches administratives.

La représentante de l’intimé a relevé que sur le formulaire IPA, le recourant n’avait pas indiqué qu’il était malade durant cette période.

d. Le Dr C______ a indiqué à la chambre de céans le 16 juin 2021 qu’il suivait l’assuré depuis le 17 octobre 2017 et qu’il l’avait vu en consultation en 2020 neuf fois, entre le 29 juin et le 14 décembre 2020 ; dès fin mai 2020, l’assuré avait présenté une décompensation psychotique et une incapacité de travail totale du 1er juin au 15 juillet 2020, pour une schizophrénie résiduelle ; la décompensation psychotique l’empêchait de se présenter, courant juin 2020, à un entretien d’embauche ; le Dr D______ a indiqué à la chambre de céans le 6 juillet 2021 qu’il avait vu l’assuré les 16 et 30 juin 2020, lequel présentait une gêne respiratoire à l’effort et avait consulté les urgences des HUG en raison d’une oppression thoracique et de palpitations dans le contexte d’un état de stress important et de la probable exacerbation d’un trouble psychique. Du point de vue somatique, l’assuré pouvait se présenter à un entretien d’embauche courant juin 2020, mais il ignorait si cela était possible du point de vue psychique.

e. Le 19 juillet 2021, l’assuré a relevé que le Dr C______ confirmait son incapacité à se présenter à un entretien d’embauche en juin 2020. Le 29 juillet 2021, l’OCE a estimé que le certificat du Dr C______ d’incapacité de travail ne pouvait pas être pris en compte, car il avait été établi postérieurement à la décision de sanction.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans la forme et le délai prescrits par la loi, le recours est recevable
(art. 56 et 60 LPGA).

3.        Le litige porte sur le point de savoir si l’intimé était fondé à suspendre le droit à l'indemnité du recourant pour une durée de 18 jours.

4.        a. L'art. 16 al. 1 LACI prévoit qu'en règle générale, l'assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage.

En vertu de l’art. 17 al. 3, 1ère phrase LACI, l'assuré est tenu d'accepter tout travail convenable qui lui est proposé.

Selon l’art. 30 LACI al. 1 let. d LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi qu’il n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but.

b. Le droit à l’indemnité de chômage a pour corollaire un certain nombre de devoirs qui découlent de l’obligation générale des assurés de réduire le dommage
(ATF
123 V 88 et les références citées). En font notamment partie les prescriptions de contrôle et les instructions de l’office du travail prévues à l’art. 17 LACI. Lorsqu’un assuré ne les respecte pas, il adopte un comportement qui, de manière générale, est de nature à prolonger la durée de son chômage. Afin justement de prévenir ce risque, l'art. 30 al. 1 let. d LACI sanctionne en particulier l'assuré qui n'observe pas les prescriptions de contrôle ou les instructions de l'office du travail par la suspension de son droit à l'indemnité de chômage. Jurisprudence et doctrine s’accordent à dire qu'une telle mesure constitue une manière appropriée et adéquate de faire participer l'assuré au dommage qu'il cause à l'assurance-chômage en raison d'une attitude contraire à ses obligations (ATF 125 V 197 consid. 6a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 208/06 du 3 août 2007 consid. 3).

Selon la jurisprudence, ne pas donner suite à une assignation, à postuler pour un emploi à repourvoir représente une violation de l’obligation de diminuer le dommage ; cela revient à laisser échapper une possibilité concrète – quoique incertaine – de retrouver un travail, le comportement de l’assuré important à cet égard plus que le résultat effectif du dépôt d’une candidature en termes d’obtention ou non d’un engagement (ATF 130 V 125 consid. 1 publié dans SVR 2004 ALV no 11 p. 31 ; ATF 122 V 34 consid. 3b ; DTA 2002 p. 58, arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 436/00 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_379/2009 du 13 octobre 2009 consid. 3 ; 8C_950/2008 du 11 mai 2009 consid. 2 et 8C_746/2007 du 11 juillet 2008 consid. 2). Aussi le défaut de candidature déposée est-il assimilé, sur le plan du principe, à un refus d’un emploi convenable, autrement dit à la violation d’une obligation qui, à l’instar de celle d’accepter un travail convenable, revêt une importance indéniable (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 368/99 du 16 mars 2000 ; ATAS/344/2017 du 2 mai 2017 consid. 5). Il y a refus d'une occasion de prendre un travail convenable non seulement lorsque l'assuré refuse expressément un travail convenable qui lui est assigné, mais également déjà lorsque l'intéressé s'accommode du risque que l'emploi soit occupé par quelqu'un d'autre ou fait échouer la perspective de conclure un contrat de travail (ATF 122 V 34 consid. 3b ; DTA 2002 p. 58 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 436/00 consid. 1 ; ATF 130 V 125 consid. 1 publié dans SVR 2004 ALV no 11 p. 31 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_379/2009 du 13 octobre 2009 consid. 3, 8C_950/2008 du 11 mai 2009 consid. 2 et 8C_746/2007 du 11 juillet 2008 consid. 2). Les éléments constitutifs d’un refus de travail sont également réunis lorsqu’un assuré ne se donne pas la peine d’entrer en pourparlers avec l’employeur ou qu’il ne déclare pas expressément, lors de l’entrevue avec le futur employeur, accepter l’emploi bien que, selon les circonstances, il eût pu faire cette déclaration (ATF 122 V 34 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral C 126/02 du 24 juin 2003), ou qu’il pose des restrictions ou manifeste des hésitations à s’intéresser véritablement au poste considéré, ou encore en faisant échouer la conclusion du contrat par un comportement trahissant un manque d’empressement, voire un désintérêt manifeste à vouloir s’engager (Boris RUBIN, commentaire de la loi sur l’assurance-chômage 2014, n°66, art. 30 et jurisprudence citée).

5.        a. L’art. 30 al. 3 LACI prévoit notamment que la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, soixante jours.

Conformément à l’art. 45 de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), la suspension dure d’un à quinze jours en cas de faute légère (al. 3 let. a), de seize à trente jours en cas de faute de gravité moyenne (al. 3 let. b) et de trente et un à soixante jours en cas de faute grave (al. 3 let. c). Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l'assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d'obtenir un nouvel emploi (al. 4 let. a) ou qu'il refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b). Si l'assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l'indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. Les suspensions subies pendant les deux dernières années sont prises en compte dans le calcul de la prolongation (al. 5).

b. Il y a notamment faute grave lorsque l’assuré refuse un emploi réputé convenable sans motif valable (cf. art. 45 al. 3 OACI) ; demeurent toutefois réservées des circonstances particulières faisant apparaître, dans le cas concret, la faute comme plus légère (ATF 130 V 125 ; arrêt du Tribunal fédéral C 128/04 du
20 septembre 2005). La jurisprudence considère que lorsqu’un assuré peut se prévaloir d’un motif valable au sens de l’art. 45 al. 3 OACI, il n’y a pas forcément faute grave, même en cas de refus d’un emploi assigné et réputé convenable. Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s’agir, dans le cas concret, d’un motif lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (ATF 130 V 125 consid. 3.4.3 et 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances
C 245/06 du 2 novembre 2007 consid. 4.1).

La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2). Le juge ne s'écarte de l'appréciation de l'administration que s'il existe de solides raisons. Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 123 V 150 consid. 2).

Le pouvoir d’examen de l’autorité judiciaire de première instance (donc de la chambre de céans) n’est pas limité dans ce contexte à la violation du droit (y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation), mais s’étend également à l’opportunité de la décision administrative (« Angemessenheitskontrolle »). En ce qui concerne l’opportunité de la décision en cause, l’examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l’autorité, dans un cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n’aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Le juge des assurances sociales ne peut toutefois, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l’administration ; il doit s’appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 110 ad art. 30)

c. En tant qu'autorité de surveillance, le Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : le SECO) a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution (Bulletin LACI IC). Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas d'espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

La durée de la suspension est fixée en tenant compte de toutes les circonstances du cas particulier, telles que le mobile, les circonstances personnelles (l'âge, l'état civil, l'état de santé, une dépendance éventuelle, l'environnement social, le niveau de formation, les connaissances linguistiques, etc.), des circonstances particulières (le comportement de l'employeur ou des collègues de travail, le climat de travail, etc.), de fausses hypothèses quant à l'état de fait (par exemple quant à la certitude d'obtenir un nouvel emploi (Bulletin LACI IC [juillet 2018] / D64).

Selon le barème du SECO, le refus d'un emploi convenable ou d’un emploi en gain intermédiaire à durée déterminée de cinq mois, assigné à l’assuré ou qu’il a trouvé lui-même, est considéré comme une faute grave, sanctionné d’une suspension de l'indemnité de 30 à 37 jours et l’inobservation d’instruction de l’ORP est considérée comme une faute légère sanctionnée d’une suspension de l’indemnité, la première fois, de 3 jours à 10 jours (Bulletin LACI IC / D79 2.A ch. 8 et 3B).

6.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

7.        a. En l’occurrence, l’intimé reproche au recourant d’avoir, en déclinant la proposition d’entretien de l’employeur, fait échouer une possibilité d’emploi. Quant au recourant, il estime que c’est en raison d’un motif de santé, soit une décompensation psychotique, qu’il n’a pas été en mesure d’honorer l’entretien proposé, de sorte que le refus d’engagement n’est pas fautif et que la sanction doit être annulée, voire réduite.

b. Le recourant a postulé auprès de l’employeur à la suite de l’assignation qui lui a été notifiée le 29 mai 2020. Il n’a, en revanche, pas donné suite à la demande d’entretien de l’employeur, formée par celui-ci courant juin 2020, plus précisément après le 14 juin 2020 (cf. procès-verbal d’audience du 17 mai 2021), en signifiant à celui-ci qu’il n’était pas en état de travailler. L’intimé conteste le caractère incapacitant de l’affection psychique invoquée, au motif que le certificat du Dr C______ a été établi postérieurement à la décision de sanction.

c. Il est établi que le recourant a consulté le service des urgences des HUG les 14 et 22 juin 2020, le Dr D______ les 16 et 30 juin 2020 et son psychiatre traitant dès le 29 juin 2020 (facture des HUG et rapports médicaux des Drs C______ et D______ des 16 juin et 6 juillet 2021). Il est également établi que le recourant est suivi, depuis octobre 2017, par le Dr C______ et qu’il a présenté, dès fin mai 2020, une décompensation psychotique (rapport du Dr C______ du 16 juin 2021).

Il ressort des éléments fournis par le psychiatre traitant et le Dr D______ que le recourant fait l’objet d’un suivi psychiatrique depuis octobre 2017, qu’il présente un diagnostic de schizophrénie résiduelle et que, dès juin 2020, il a souffert d’une décompensation psychotique, objectivée par des consultations en urgence aux HUG et les explications du Dr D______, qui a suivi le recourant durant la période en cause, en soulignant la présence d’une probable exacerbation d’un trouble psychique existant. L’avis du Dr C______, selon lequel ce trouble psychique empêchait le recourant de se présenter, courant juin 2020, à un entretien d’embauche est ainsi étayé par des constatations médicales effectuées en temps réel. En effet, même si le certificat de ce médecin a été établi postérieurement à la décision de sanction, il est corroboré par les consultations du recourant auprès du service des urgences des HUG et par celles du Dr D______, durant la période litigieuse, ainsi que par les motifs de ces consultations, attestées par le Dr D______, lequel a examiné le recourant en juin 2020 et a confirmé l’exacerbation d’un trouble psychique. Dans ces conditions, on ne saurait dénier toute valeur probante au rapport du Dr C______.

Dans ce contexte la réponse du recourant à l’employeur, ayant entrainé le retrait de sa candidature, ne relève pas d’un manque de sérieux de la part du recourant face à ses obligations de chômeur mais résulte de son état de santé psychique, soit une affection l’ayant entravé dans sa capacité à effectuer les démarches administratives attendues et à se comporter de façon adéquate face à l’employeur.

Au demeurant, il convient d’admettre que c’est de manière non fautive, c’est-à-dire en raison d’un empêchement dû à une maladie psychique, que le recourant n’a pas donné suite à l’entretien d’embauche litigieux.

Cela étant, il apparait que le recourant a été en mesure de se présenter à un entretien d’embauche le 18 juin 2020 (même si celui-ci s’est, selon ses dires, mal passé), de remplir son formulaire IPA le 19 juin 2020 et de postuler à un autre emploi le 23 juin 2020, ce qui démontre qu’il n’était pas, pour des raisons de santé, dans l’impossibilité totale d’effectuer toute démarche administrative. Dans ces conditions, le recourant aurait, à tout le moins, pu informer l’intimé de sa situation médicale et de son impossibilité à se rendre à l’entretien proposé par l’employeur en transmettant des certificats médicaux pertinents. Or, ce n’est que le 22 août 2021, à la demande de l’intimé, que le recourant a donné des explications sur sa situation.

En ne le faisant pas, le recourant a commis une négligence, laquelle justifie, selon le barème du SECO, s’agissant de l’inobservation d’instruction de l’ORP, le prononcé de la sanction maximale de 10 jours de suspension du droit à l’indemnité.

d. En conformité au calcul, non contesté, de l’intimé, la sanction de 10 jours est ramenée à une durée effective de 6 jours (CHF 100.27 x 30 jours / CHF 166.08 = 6.03).

8.        Le recours sera partiellement admis et la décision litigieuse réformée dans le sens que la suspension du droit à l’indemnité du recourant est ramenée à 6 jours.

Vu l’issue du litige, une indemnité de CHF 1’500.- sera accordée au recourant à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), à charge de l’intimé.

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision de l’intimé du 23 février 2021 dans le sens que la sanction est réduite à 6 jours de suspension du droit à l’indemnité du recourant.

4.        Alloue une indemnité de CHF 1'500.- au recourant, à la charge de l’intimé.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le