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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4174/2016

ATAS/1137/2017 du 13.12.2017 ( LCA ) , REJETE

En fait
En droit

 

 

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4174/2016 ATAS/1137/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 13 décembre 2017

4ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à THONEX, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Dominique BAVAREL

 

 

demanderesse

 

contre

SWICA ASSURANCE MALADIE SA, sise Römerstrasse 38, WINTERTHUR, représentée par Swica assurance-maladie, direction générale de Lausanne, avenue Mon Repos 22, LAUSANNE

 

 

défenderesse

EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après l’assurée ou la demanderesse) est née le ______ 1963, originaire d’Espagne et au bénéfice d’un permis C. Elle a été engagée le 26 septembre 1992 par B______ (ci-après B______). Selon un avenant du 30 juillet 2014, son taux d'activité était, dès le 18 août 2014, de 31 heures par semaine, soit un 80.52%, pour un salaire de CHF 3'405.-.

2.        Elle était assurée auprès de Swica Assurance-maladie SA (ci-après Swica ou la défenderesse), par l’intermédiaire de son employeur, pour une assurance d'indemnités journalières perte de gain maladie. Le contrat d’assurance prévoyait un délai de carence de 14 jours et une couverture d’assurance s’élevant à 90% du salaire pendant 730 jours.

3.        En 2012, l’assurée a commencé à souffrir de douleurs au niveau des rachis cervical et lombaire. Des séances de physiothérapie lui ont été prescrites.

4.        Le docteur C______, spécialiste FMH en médecine interne et maladies rhumatismales, a indiqué, le 5 octobre 2015, au docteur D______, médecin généraliste traitant de l’assurée, avoir reçu sa patiente le 11 juin puis le 29 septembre 2015. Elle avait présenté plusieurs problèmes mécaniques au coude droit en 2008, au coude gauche en 2011 et la cheville droite en mars 2015. Elle se plaignait de douleurs cervico-brachiales prédominant à droite de longue date, dans une moindre mesure accompagnées de dorso-lombalgies avec sciatalgies droites. À l’examen clinique, il n’avait retenu que des zones d’irritation cervicale prédominant à droite accompagnant une limitation de la coiffe des rotateurs des deux épaules. Malgré l’ensemble des moyens thérapeutiques mis en œuvre, à savoir une physiothérapie classique puis à l’aide des ondes de choc sur le sus-épineux, associée à une infiltration radioguidée de corticoïdes sur l’épaule droite, l’ensemble des plaintes persistaient tant au niveau du rachis que des épaules et des coudes. Compte tenu de la longue évolution des douleurs persistantes, sans signe de synovite ou d’autres éléments spécifiques pour une connectivité, il pensait que la patiente était entrée dans un cercle de douleurs chroniques qui évoquait une fibromyalgie. Dans ce contexte, il proposait que l’assurée puisse bénéficier d’un traitement de fond avec la gabapentine associée à un antidépresseur afin de relever son seuil douloureux et le Dafalgan 3 x 1 g. Le recours aux corticoïdes n’était pas indiqué en raison de son diabète.

5.        Le 15 octobre 2015, le Dr D______ a répondu de façon manuscrite à des questions de Swica. La patiente l'avait consulté le 2 septembre 2015 pour des cervicalgies avec des fourmis aux bras, sans déficit, depuis quelques temps, avec blocage de la nuque plus lombalgie. La capacité de travail dans l'activité habituelle était possible à mi-temps par exemple. La capacité dans une autre activité était limitée par activité physique. S'agissant de l'environnement social, il n'y avait rien à signaler, si ce n'était une fragilité psychique à cause de la douleur chronique (légère dépression).

6.        Le 8 janvier 2016, l’assurée a requis des prestations de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI).

7.        Swica a confié une expertise pluridisciplinaire de l’assurée à la clinique Corela. L'expertise a été réalisée par la docteure E______, rhumatologue, et le docteur F______, psychiatre. Les experts ont mentionné dans leur rapport du 26 février 2016 qu'ils s'étaient fondés sur une consultation de psychiatrie du 19 janvier 2016 et une consultation de l’appareil locomoteur du 26 janvier 2016. Une incapacité totale de travail de l'assurée avait été attestée dès le 3 juin 2015. Au mois d’octobre de la même année, son médecin traitant avait estimé comme possible une reprise de l’activité professionnelle à 50%. En l’absence de reprise de l’activité professionnelle depuis plus de sept mois, l’expertise pluridisciplinaire de rhumatologie et de psychiatrie avait été requise afin de réaliser un examen clinique exhaustif, de préciser les diagnostics, de faire une discussion sur les points-clés des rapports antérieurs, de définir les limitations médicales et d’examiner les possibilités thérapeutiques et de réadaptation. Il est mentionné dans l'anamnèse personnelle, que l'examinée était née en Espagne, puis venue en Suisse à l’âge de 17 ans. Elle était mariée. Elle avait été très marquée par des tromperies de son mari, qu'elle avait apprises en 2012, mais, au moment de l'expertise, elle se sentait apaisée sur le plan conjugal. Le couple avait un fils âgé de 27 ans qui effectuait un apprentissage de préparateur en pharmacie. Celui-ci souffrait d'un diabète de type I et lui avait déclaré son homosexualité quelque temps auparavant, ce qui avait été difficile au début, mais les choses étaient rentrées dans l'ordre. Selon l’anamnèse professionnelle, l'expertisée avait obtenu un certificat fédéral de capacité de coiffeuse après son arrivée en Suisse et a travaillé deux ans dans ce domaine. Elle avait ensuite été engagée par le magasin B______. Depuis un accident à l’épaule gauche en 2011, le port de charges lui était contre-indiqué sur son lieu de travail et elle n'en portait plus. L'expertisée ne décrivait aucun stress dans son activité professionnelle et disait adorer son travail. Elle mentionnait en revanche du stress en raison des douleurs qu'elle ressentait au niveau des coudes, de la cheville et des régions cervicale et lombaire, lesquelles rendaient son travail difficile. S’agissant de ses habitudes sportives, elle avait indiqué avoir diminué la marche de trois heures à trente minutes actuellement. Elle nageait une heure par semaine.

En janvier 2016, le médecin traitant de l’examinée avait mis en place un traitement morphinique sous forme de patch de Durogesic tous les trois jours. L’expertisée avait signalé une légère amélioration des douleurs de l’ordre de 25%. Il ressortait du dossier qu’en raison de la persistance d’algies chroniques, l’assurée avait présenté une fragilité psychique. Dans ce contexte, le Dr D______ avait évoqué une légère dépression. L’expertisée alléguait que les douleurs étaient intolérables depuis une année. Le Dr C______ lui avait prescrit du Neurontin, qui avait été arrêté pour cause d’alopécie, du Tramal qui avait été interrompu en raison d’une intolérance ainsi que du Laroxyl. Actuellement l’expertisée bénéficiait d’une prescription de morphine qu’elle disait avoir commencé quinze jours avant l’expertise, en plus de son traitement habituel. L’expertisée rapportait être en incapacité totale de travail depuis le mois d’octobre 2015 pour des douleurs touchant les cervicales, les épaules, les bras, le dos et les jambes. Elle n’avait jamais consulté de psychiatre. Tous les symptômes évoqués, par exemple les troubles du sommeil, étaient clairement en lien avec la problématique algique. Sous la rubrique « plaintes et efforts dans la vie quotidienne », il est mentionné que l’expertisée se levait entre 6h00 et 8h00 et qu’elle pouvait réaliser ses soins personnels et sa toilette avec lenteur. Elle ne cuisinait plus que ce qui était léger ou de petits repas. C’était son mari qui s’occupait des activités ménagères et qui passait l’aspirateur. Elle ne pouvait pas effectuer de grosses courses et n’arrivait pas à tenir les bras en l’air. Elle s’occupait de la lessive et avait pris une aide pour le repassage. Elle indiquait pouvoir réaliser des activités standards en général.

Sur le plan des relations sociales, l’expertisée signalait qu'elle voyait toujours ses amies, qui venaient lui rendre visite à son domicile. Toutefois, ces dernières lui auraient signalé qu’elle allait se renfermer sur elle-même. L’expertisée dénotait une légère amélioration, même si à certains moments, elle n’avait envie de voir personne. Elle sortait de temps en temps au restaurant et avait récemment contracté un abonnement au Vitam Parc où elle allait une fois par semaine.

L’investiguée mentionnait pouvoir lire plusieurs romans de fiction et historiques. Elle regardait la télévision sans difficultés particulières et s'intéressait à différentes choses. Les activités nécessitant de la concentration n’étaient pas altérées.

L’expertisée considérait qu’il lui serait impossible de reprendre une activité professionnelle. Elle relatait avoir essayé tous les postes de travail au sein du magasin B______, lesquels étaient tous trop douloureux pour elle en raison de l’orthostatisme prolongé.

Les experts ont décrit ses plaintes en rapport avec les diagnostics retenus.

Le traitement actuel était :

- Durogesic (analgésique opioïde), patch à 50 µg t tous les trois jours ;

- Flector, EP Tissugel, posé à la demande ;

- Imovane (hypnotique) 7.5 mg, ½ cp au coucher ;

- Laroxyl (antidépresseur tricyclique) 25 mg, 2 cp le soir ;

- Movicol (laxatif osmotique) pris à la demande.

Le médecin de famille habituel était de le Dr D______. L'assurée n’avait pas de suivi spécialisé régulier, que ce soit au niveau somatique ou psychiatrique.

Les experts retenaient, sur le plan locomoteur, au rachis cervical, les diagnostics de protrusion des disques intervertébraux C5 à C6 et C6 à C7. L’examen clinique ne confirmait pas les lésions retrouvées sur les examens d’imagerie, dans le sens où les plaintes se situaient surtout au niveau de C7 et non pas en C5 et C6, sans qu’il n’y ait de rétrécissement patent des trous de conjugaison, puisqu’il n’y avait pas de signes neurologiques aux membres supérieurs. Il n’y avait donc pas de compression radiculaire associée. Des paresthésies avaient été évoquées par le Dr D______ le 16 octobre 2015, mais pas par l’intéressée le jour de l’expertise et elles étaient dans tous les cas non déficitaires. Cela pouvait expliquer l’absence de consultation neurochirurgicale demandée par le praticien.

Les experts posaient également, sur le plan locomoteur, au rachis dorso-lombo-sacré, le diagnostic de protrusion discale et dégénérescence interapophysaire postérieure de L5 à S1. L'examen clinique retrouvait une douleur lors de la palpation de l'épineuse de L5, mais sans signe objectif puisqu'il n'y avait pas de contracture des muscles paravertébraux associée, ni de trouble de la statique. Le rétrécissement des trous de conjugaison évoqué sur l’IRM ne pouvait être de caractère patent, en l’absence de plaintes actuelles au niveau des membres inférieurs et de signes de Lasègue ainsi que de tous signes neurologiques aux membres inférieurs (absence d’anomalie des réflexes, absence d’anomalie sensitivo-motrice). Il n’y avait donc aucun critère de gravité retrouvé tout comme à l’étage cervical. Il s’agissait de constatations purement radiologiques, sans parallélisme clinique, ce qui pouvait là encore expliquer l’absence d’avis neurochirurgical. Aucune limitation n’était retenue dans la mesure où les lésions discales étaient extrêmement minimes et en rapport avec l’âge. L’examen clinique ne venait pas corréler les lésions retrouvées. Des limitations en porte-à-faux cervical ne pouvaient pas être retenues, bien que l’investiguée ait signalé des douleurs de manière subjective. Si le Dr D______ signalait que l’expertisée ne pouvait pas effectuer des activités physiques (rapport du 16 octobre 2015), cela ne pouvait pas être ramené à un examen clinique objectif, mais uniquement aux plaintes rapportées par l’expertisée. De même, la normalité de l’examen clinique n’expliquait pas les difficultés alléguées dans les soins personnels, la cuisine, l’utilisation de l’aspirateur et le repassage ainsi que les grosses courses. En effet, les constatations radiologiques retenues au niveau cervical n’entraînaient aucune limitation. À l’étage lombaire, les lésions retrouvées étaient extrêmement banales pour l’âge et ne pouvaient pas faire appel à des limitations. L’examen clinique ne montrait pas de signes objectifs. Ainsi si l’intéressée se plaignait d’une limitation lors de l’orthostatisme prolongé au-delà de trente minutes, mais également à la marche au-delà de trente minutes, il ne s’agissait pas de réelles limitations, car les lésions retrouvées ne permettaient pas de retenir une telle restriction. L’expertisée relatait également un port de charge difficile au-delà de 5 kg, ce qui ne s’expliquait pas par les lésions retrouvées. Sur le plan médical objectif, dans son temps partiel de 81% ou dans un plein temps, l’incapacité de travail était de 0%, horaire sans baisse de rendement, au jour de l’expertise, soit le 26 janvier 2016. En l’absence de limitations retenues dans la dernière activité, la question d’un emploi adapté n’avait pas lieu d’être envisagée.

S’agissant des épaules de l’assurée, le diagnostic était une inflammation avec calcification (tendinopathie calcifiante). L’anamnèse dirigée ne permettait pas de faire ressortir une étiologie particulière, mais allait en tout cas à l’encontre d’une pathologie acromio-claviculaire. En ce qui concernait les épaules, on ne retrouvait pas de notification particulière sur le schéma corporel. Il semblait uniquement exister des douleurs thoraciques antérieures à l’effort et de caractère intense. Par ailleurs, les douleurs relatées spontanément comme étant localisées au niveau des trapèzes, avec irradiation jusqu’à la face antérieure des bras, n’apparaissaient à aucun endroit de l’auto-questionnaire. La palpation des articulations acromio-claviculaires se révélait indolore de manière bilatérale. On notait une différence entre les amplitudes actives et passives, que ce soit à droite ou à gauche. En effet, l’élévation antérieure était limitée en actif à 150 degrés, alors qu’elle était normale en passif à 160 degrés. Il en était de même pour la rotation interne, laquelle était limitée au niveau de L5 de manière bilatérale en mobilité active, alors qu’en mobilité passive, elle était normale au niveau de D10. L’abduction active retrouvait également des restrictions de manière bilatérale à 90 degrés, alors qu’en passif elle était normale à 180 degrés. Seule la rotation externe était retrouvée normale, que ce soit en mobilité active ou mobilité passive, et cela de manière bilatérale.

Au jour de l’expertise, les amplitudes articulaires étaient normales, du moins au niveau du testing passif, alors qu’en actif on retrouvait des limitations, probablement en lien avec un défaut de participation de l’assurée. En effet, on retrouvait à droite comme à gauche des tests de conflits négatifs, ce qui n’était pas en faveur d’un conflit sous-acromial et donc de l’imputabilité de la calcification dans les plaintes de l’intéressée. Or, il était retrouvé des tests tendineux tous positifs. La recherche des tests tendineux faisait appel à la participation de l’expertisée, dont la réponse était très subjective. En ce sens, on ne retrouvait pas de concordance entre la négativité des tests de conflit et la positivité de tous les tests à valeur localisatrice. Il n’y avait donc pas d’éléments cliniques en faveur d’une atteinte réelle et patente du supra-épineux. On retrouvait sur l’échographie de décembre 2014 une atteinte du supra-épineux avec présence d’une calcification en son sein, mais actuellement, il n’y avait pas de corrélation radio-clinique pour en permettre de retenir l’imputabilité de l’inflammation visualisée sur l’échographie et de la présence de la calcification aux plaintes de l’expertisée.

Aucune limitation fonctionnelle n’était retenue en ce qui concernait l’épaule gauche. En effet, la dernière imagerie de 2012 concernant cette épaule avait montré une régression de l’inflammation, notamment au niveau du sous-scapulaire. L’imagerie n’avait pas été refaite, mais l’examen clinique n’était pas en faveur d’une nouvelle inflammation sous-jacente et, en ce sens, aucune limitation n’était retenue, y compris dans les mouvements d’élévation antérieure, de rotation interne ou d’abduction, mais également dans le port de charges. Les mouvements au-dessus de l’horizontale n’étaient donc pas contrindiqués.

En ce qui concernait l’épaule droite, côté dominant, aucune limitation n'était retenue, puisque l’examen clinique n’allait pas dans le sens d’une responsabilité du tendon du supra-épineux dans les plaintes de l’expertisée. La dernière imagerie, datant de 2014, avait certes montré une inflammation du supra-épineux avec bursite sous-acromio-deltoïdienne associée, mais il n’y avait aucun argument pour penser à une inflammation persistante. Ainsi, les mouvements d’élévation antérieure et notamment au-dessus de l’horizontale n’étaient pas contrindiqués, de même que le port de charges au-delà de 5 kg. Au vu de ce qui précédait, les difficultés alléguées dans les activités de la vie quotidienne se référaient uniquement à des plaintes et non à des limitations à proprement parler, en ce qui concernait les épaules.

Du fait de la prescription d'analgésiques opioïdes, et compte tenu du fait que l'expertisée portait un patch de Durogesic le jour de l'expertise (traitement instauré trois semaines auparavant), un dépistage urinaire avait été réalisé dont le résultat était négatif, ce qui correspondait à une absence de compliance thérapeutique (analgésiques opioïdes), qui pouvait possiblement s’expliquer par le fait que l’expertisée avait posé son patch peu de temps avant l’expertise, sans que la diffusion soit suffisante pour que la molécule morphinique soit retrouvée au niveau urinaire.

Au jour de l’expertise, soit le 26 janvier 2016, dans la mesure où aucune limitation n’était retenue, l’incapacité de travail était de 0%, horaire sans baisse de rendement. La question d’une activité adaptée n’avait pas lieu d’être envisagée, en l’absence de limitations retenues dans le dernier emploi.

S’agissant du diagnostic de fibromyalgie, l’expert rhumatologue relevait que dès lors que l’expertisée était droitière, il aurait été logique de retrouver une force supérieure du côté dominant, ce qui n’était pas le cas. On retrouvait une nette diminution des valeurs, d’environ 50% par rapport à leur moyenne, ce qui ne s’expliquait pas de façon objective, mais pouvait éventuellement être rapporté à un défaut de participation de l’expertisée. Le diagnostic de fibromyalgie était retenu sur la base des douleurs diffuses des quatre cadrans du corps depuis plus de trois mois et devant la présence de 12 sur 18 points de fibromyalgie sur les 11 requis, selon les critères ACR 1990. La présence de 4/5 signes de Waddel avait été constatée, ce qui correspondait à une nette tendance à la majoration. Un dépistage urinaire avait été réalisé montrant l'absence de compliance thérapeutique au traitement par antalgique de palier II, puisque le résultat était négatif. Du fait d'un traitement par antidépresseur spécifique associé, prescrit dans le cadre de douleurs persistantes, un dosage sérique du Laroxyl avait été réalisé. Le taux retrouvé était largement en deçà de la fourchette d'efficience thérapeutique, indiquant une mauvaise compliance à cette médication. En outre, l’assurée faisait état de plaintes de fatigue. En ce qui concernait la fibromyalgie, le traitement par antidépresseurs tricycliques était indiqué sous réserve qu’il soit pris de façon effective, ce qui n’était pas le cas actuellement. En revanche, les morphiniques n’avaient pas leur place dans la prise en charge thérapeutique de la fibromyalgie et devaient être arrêtés. On pourrait également préconiser des thérapeutiques décontractantes de type balnéothérapie. Aucune limitation fonctionnelle n’était retenue en lien avec la fibromyalgie. Tout au plus et à titre de confort, il était généralement suggéré d’éviter une exposition au froid, en raison du risque de contractures, ainsi que les fréquents changements d’horaires de travail s’ils altéraient la qualité du sommeil. Toutefois, ils n’étaient pas rencontrés dans le métier de l’explorée. Certes, il existait des horaires variables, mais pas d’horaires nocturnes pouvant altérer la qualité du sommeil.

L'expert-psychiatre ne retenait pas de diagnostic en matière psychiatrique. Les plaintes de l'expertisée étaient essentiellement algiques. Le score de 19 à l’auto-questionnaire de dépression de Beck-II correspondait à une dépression légère et marquait l’absence d’un processus dépressif objectif. Ce score pouvait s’expliquer par la présence de plaintes algiques, qui avaient un impact sur certains items de l’auto-questionnaire de la dépression, notamment l’appétit, le sommeil ou encore l’irritabilité.

Le score de 46 de l’auto-questionnaire de Spielberger (STAIY), qui évaluait la tendance naturelle anxieuse de la personne examinée, dénotait une tonalité anxieuse moyenne, qui était plus à mettre en lien avec un contexte assécurologique conflictuel selon les dires de l’expertisée et l’impossibilité alléguée de travailler à cause des douleurs qu’avec une véritable tendance naturelle anxieuse.

Sur un plan purement psychiatrique, un trouble de l’adaptation n’était pas retenu, puisqu’il n’existait pas de facteurs de stress psychosocial identifiable. En effet, les douleurs éprouvées ne remplissaient pas les critères d’un tel facteur de stress, et les difficultés conjugales rapportées s’étaient amendées et n’avaient pas engendré de symptomatologie particulière, ni de prise en charge spécifique.

Un épisode dépressif n’était pas non plus retenu, en l’absence des critères majeurs retrouvés. En effet, la tristesse était réactionnelle à la situation actuelle, l’intérêt et le plaisir étaient conservés et la perte d’énergie était mise en lien avec les plaintes algiques. Actuellement, l’expertisée bénéficiait d’un traitement de type Laroxyl le soir, en raison des algies évoquées et non pas à visée antidépressive. De plus, elle ne bénéficiait d’aucun suivi psychiatrique spécialisé. Son discours au jour de l’expertise ne mettait pas en exergue des plaintes importantes hors du champ des douleurs. Aucun diagnostic de la lignée d’un trouble de l’humeur, d’un trouble anxieux ou d’un trouble de l’adaptation ne pouvait être retenu. Le médecin traitant de l’expertisée évoquait une légère dépression en lien avec les douleurs présentées, ce qui confirmait les constatations de l'examen clinique auquel l'expert avait procédé, hormis en ce qui concernait le terme de « dépression ». L'assurée décrivait une confiance et une estime altérées du fait de la mauvaise évolution de la symptomatologie, mais l'expert relevait qu'elle gardait quand même confiance en elle. Le médecin de l'assurée avait parlé à l'expertisée d'une consultation prochaine auprès d'un centre antidouleur, ce qui lui redonnait de l'espoir. La concentration n’était pas altérée, avec une activité de lecture conservée ou le visionnage de la télévision. Les idées de mort n'étaient jamais présentes. L'assurée ne souffrait pas de ralentissement psychomoteur, mais d'un ralentissement réactionnel à la problématique algique. L'appétit était décrit comme variable. L'expertisée avait pris du poids du fait de sa ménopause, disait-elle. La prescription de Laroxyl pouvait également favoriser la prise pondérale. L'intérêt et le plaisir étaient conservés.

Sous discussion et synthèse pluridisciplinaire, il est mentionné que l’ensemble des plaintes était plutôt intégré dans le cadre d’une fibromyalgie telle qu’évoquée par le Dr C______. Toutefois, malgré les diagnostics somatiques retenus, la présence de 4/5 signes de Waddell correspondait à une certaine majoration des plaintes et venait renforcer la discordance entre l’intensité alléguée des plaintes et un examen clinique pauvre, tout comme l’absence de compliance à la médication antalgique ainsi qu’à sa médication antidépressive.

Les algies en lien avec la fibromyalgie ne remplissaient pas les critères jurisprudentiels pour être considérées comme incapacitantes, en l’absence de limitations d’ordre somatique ou psychiatrique. Les algies relatives à la fibromyalgie semblaient avoir une intensité légère interférant avec la vie quotidienne durant les crises algiques, mais permettant encore à l’assurée d’aller de temps en temps au restaurant, de recevoir des amis chez elle, d’effectuer de petites activités en ce qui concernait les tâches ménagères ou encore de lire, de regarder la télévision et d’aller à la piscine une fois par semaine.

À en juger indirectement par l’absence de maladie psychiatrique ou somatique grave ou chronique, l’expertisée avait la capacité à surmonter les douleurs par des efforts importants. On ne pouvait pas dire que toutes les options thérapeutiques semblaient avoir été épuisées, puisqu’il ressortait de la présente expertise que l’intéressée n’était pas compliante à sa médication par antalgiques opiacés et antidépresseurs et qu’elle n’avait pas de suivi psychiatrique spécialisé. Actuellement, l’incapacité à surmonter les douleurs par des efforts importants ne pouvait pas être retenue en ce qui concernait l’explorée, comme en témoignait également la tendance à la majoration des plaintes ainsi que les discordances cliniques relevées.

8.        Le 5 février 2016, Swica a informé l’assurée, s'agissant de son incapacité de travail ayant débuté le 22 octobre 2015, qu’elle lui verserait sa prestation jusqu’au 15 février 2016, dès lors que les experts avaient conclu qu’elle pouvait reprendre le travail à 100%.

9.        Le 23 février 2016, le Dr C______ a établi un certificat médical à l’attention de Swica attestant suivre l’assurée depuis juin 2015, pour un syndrome polyalgique intéressant la région cervico-scapulo-brachiale droite. Au contrôle du 9 février 2016, il avait compris qu'elle avait revu son médecin traitant, sans signe d’amélioration. Compte tenu de tous les éléments qui avaient été portés à sa connaissance, il ne concevait pas que l'assurée puisse reprendre son activité professionnelle pour l’instant.

10.    L'assurée a transmis à Swica un rapport établi le 19 février 2016 par le docteur G______, de l'institut de radiologie de la Clinique des Grangettes à la suite d'une IRM dorsale de l'assurée effectuée le jour-même. Les conclusions étaient : « Données IRM de la jonction cervico-dorsale illustrant une enthésopathie du ligament inter-épineux à la hauteur de C7. Pas d'argument formel en faveur d'une bursite inter-épineuse. Composante œdémateuse de part et d'autre de l'espace intersomatique antérieur en D5-D6. Discopathie C5-C6 et C6-C7 avec débord pré-foraminal droit. Dimension normale du canal rachidien. Pas d'argument en faveur d'une myélopathie cervicale ».

11.    Le 14 mars 2016, Madame H______, physiothérapeute a attesté avoir eu des séances avec l'assurée à raison de dix en 2012, trois en 2013, treize en 2014 et seize en 2015, précisant que le traitement n'avait pas été résolu avec la physiothérapie.

12.    Le 14 avril 2016, la Dre E______ a complété son rapport d’expertise à la demande de Swica. L’IRM dorsale du 19 février 2016 avait été effectuée au motif de douleurs de la charnière cervico-thoracique avec irradiations en cintre. Elle avait été réalisée avec une technique différente de celle du 4 septembre 2015, avec injection de gadolinium. Au niveau cervical, la différence qu’elle apportait tenait à la technique d’observation avec injection de gadolinium, mais on ne pouvait pas dire que ce qu’elle révélait était nouveau et créerait une nouvelle douleur. À l’imagerie, sous gadolinium, on observait une enthésopathie au niveau de C7, soit une dégénérescence du ligament. Ce trouble était bénin, relativement ubiquitaire et tout autant retrouvé chez les personnes ne se plaignant pas d’algies. Tout au plus, l’intéressée pouvait ressentir une certaine tension liée au remaniement avec probable sclérose de la discrète ostéophytose dorsale liée à l’âge, ce qui était banal. Cette enthésopathie du ligament inter-épineux était tout à fait isolée, ce qui excluait une spondylarthropathie sous-jacente. À l’étage dorsal, un œdème antérieur en D5 à D6 sur une ostéophytose sous-jacente avait été évoqué sur la dernière IRM de février 2016. Là encore, la visualisation de l’œdème était révélée par l’injection de gadolinium. Une ostéophytose en progression s’accompagnait souvent d’un léger œdème. Attribuer une cause de douleurs significatives à cet œdème n’était pas possible. L’assurée se plaignant uniquement de douleurs de la charnière cervico-thoracique, cet œdème était une découverte fortuite qui ne pouvait expliquer les pics algiques pouvant aller jusqu’à 10 sur 10 sur l’échelle visuelle analogique (EVA). Un traitement antidépresseur à visée antalgique par Laroxyl était prescrit, mais le monitoring de l’antidépresseur réalisé dans le cadre de l’expertise psychiatrique avait démontré que ce traitement n’était pas pris. L’état de santé de l’intéressée ne pouvait expliquer la poursuite d’une incapacité de travail et les constats nouveaux ne modifiaient pas son opinion.

13.    Le 25 avril 2016, Swica a informé l'assurée, référence faite à son courrier du 29 mars 2016, qu'elle avait transmis son courrier et le rapport médical du 19 février 2016 à la Clinique Corela pour prise de position. Selon les experts, le rapport de la Clinique des Grangettes ne justifiait pas une incapacité de travail prolongée. Elle tenait cependant compte de sa lettre du 5 février 2016.

14.    Le 21 juin 2016, la docteure I______, psychiatrie et psychothérapie FMH, a attesté avoir revu l’assurée à sa consultation du 11 février 2016. Elle était déprimée et angoissée et disait que la vie ne valait pas la peine d’être vécue. Selon l’échelle de Hamilton, la patiente souffrait d’un état anxio-dépressif sévère. Elle se plaignait de troubles du sommeil. Elle était tendue, irritable et inquiète. Elle se plaignait de sécheresse de la bouche, d’indigestions, de gaz, d’éructations, de diarrhée par moment, de crampes, de palpitations et serrements dans la poitrine, de soupirs et de céphalées ainsi que de lourdeur des membres, fourmillements dans le doigt auriculaire gauche et de douleurs musculaires. Elle présentait un trouble de l’appétit avec prise de poids (9 kg), se sentait fatiguée, avec perte d’énergie et baisse de libido. Elle était très inquiète pour son état de santé et son avenir et disait avoir des difficultés à faire face dans la vie de tous les jours. Elle n’avait pas de plaisir, ni de loisirs et se repliait sur elle-même. Elle était en retrait social et n’avait plus confiance en elle ni en les autres et avait des idées de culpabilité avec un grand mal être. Son traitement de Laroxyl avait été augmenté à 75 mg. Le traitement était prescrit pour un état anxio-dépressif sévère avec fibromyalgie. En plus, elle prenait du Xanax 3 x 0,5 mg par jour et Imovane 16,5 mg par jour/soir. De ce fait, la Dre I______ était en désaccord avec les conclusions de la clinique Corela.

15.    Le 5 juillet 2016, le Dr C______ a informé le conseil de l’assurée que sur la base des documents qu’il avait eus à sa disposition et de son examen clinique, il considérait que l’expertise Corela soulignait à juste titre que les troubles dégénératifs objectivés à la radiologie, tant au niveau cervical que lombaire, étaient modérés et compatibles avec l’âge. De même, la pathologie tendineuse de l’épaule gauche restait mineure et s’était en bonne partie améliorée par le traitement conservateur. Ces différents troubles ostéo-articulaires n’entraînaient pas de limitations fonctionnelles significatives. L’expert-psychiatre excluait à juste titre une pathologie psychiatrique, mais retenait un syndrome d’accompagnement à la douleur, lequel n’entraînait toutefois aucun dysfonctionnement psychique particulier. La même expertise retenait le diagnostic de fibromyalgie, cependant sans aucune limitation somatique. Il lui apparaissait au contraire que c’était l’abaissement sévère du seuil douloureux lié à la fibromyalgie qui exacerbait les symptômes des problèmes mécaniques réputés banals de l'assurée. Il avait en particulier de la peine à imaginer que l’expertisée doive suivre régulièrement un traitement de Saroton, Sirdalud, Xanax, Imovane, Transtec et Temgesic sans symptômes. Pour sa part, il considérait que l’assurée souffrait d’une fibromyalgie, sous la forme d’un abaissement sévère du seuil douloureux et d’une fatigabilité importante, qui l’empêchait de mener une activité professionnelle jusqu’à nouvel avis.

16.    Le 28 juillet 2016, le Dr D______ a informé le conseil de l’assurée que d’après son examen clinique et en discutant avec ses collègues rhumatologue, spécialiste de la douleurs et psychiatre, il considérait que sa patiente présentait une réelle douleur somatique et psychique malgré les différents types d’antalgiques consommés. Actuellement, son état physique et psychique ne lui permettait pas de reprendre son activité professionnelle.

17.    Par projet de décision du 15 novembre 2016, l'OAI a informé l'assurée qu'elle rejetait sa demande de rente d'invalidité, considérant qu'à teneur des pièces médicales en sa possession, elle ne présentait pas d'atteinte à la santé au sens de l'assurance-invalidité.

18.    Le 6 décembre 2016, l’assurée a formé une demande en paiement contre Swica auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice concluant, préalablement, à l’audition des parties et des Drs C______, I______ et D______ et à ce qu’une expertise pluridisciplinaire de rhumatologie et de psychiatrie soit ordonnée pour déterminer sa capacité de travail depuis le 15 février 2016. Elle concluait, principalement, à ce qu’il soit constaté qu’elle ne disposait pas d’une capacité de travail depuis le 22 octobre 2015 jusqu'au jour du dépôt de la demande, à ce que Swica soit condamnée au paiement de CHF 31'749.-, avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 2016, date moyenne, à lui payer, des indemnités journalières en CHF 109.48 par jour dès le 1er décembre 2016 jusqu’à la fin de la couverture d’assurance et tous les frais judiciaires ainsi qu’une indemnité pour ses dépens. Elle faisait valoir qu’elle présentait encore à ce jour une incapacité totale de travail, se fondant sur les avis de Drs C______, I______ et D______. Sans ambiguïté, ces trois médecins contestaient les conclusions du rapport d’expertise de la clinique Corela. La demanderesse relevait que les auteurs de l’expertise ne présentaient pas leur qualification ni leur spécialisation.

19.    Le 13 janvier 2017, Swica a répondu à la demande. Elle constatait tout d’abord que le Dr C______ estimait, comme la Dre E______ que les différents troubles ostéo-articulaires de l'assurée n’entraînaient pas de limitations fonctionnelles significatives. S’agissant du diagnostic de fibromyalgie, les experts avaient retenu que les algies relatives à la fibromyalgie ne pouvaient pas être considérées comme incapacitantes. Ce rapport permettait de saisir le raisonnement des experts qui les avait amenés à considérer que l’assurée était en mesure de travailler et avait donc valeur probante. En conclusion, Swica concluait au rejet de la demande.

20.    Le 6 février 2017, la demanderesse a fait valoir qu’elle contestait l’absence d’observance thérapeutique qui lui était reprochée. Elle avait suivi de façon sérieuse les prescriptions du docteur J______, spécialiste FMH en anesthésiologie, diagnostics et traitements de la douleur. Celui-ci avait par ailleurs modifié la prescription de la prise de la molécule morphinique par voie orale. Toutefois, plusieurs tests d’urine avaient eu lieu auprès de Synlab Suisse en modifiant les moments auxquels la prise des médicaments avait été faite. Ils avaient tous abouti à des résultats négatifs s’agissant du dépistage des opiacés. Les tests avaient en particulier été effectués le 7 juillet 2016 à 8h30, le 22 juillet 2016 à 7h30, le 22 juillet 2016 à 16h00, le 15 décembre 2016 à 8h29 et le 19 décembre 2016. Le 26 décembre 2016, le Dr J______ avait adressé une correspondance au Dr D______ dans laquelle il indiquait notamment avoir pris bonne note que le test de dépistage aux opiacés s’était révélé négatif à deux reprises alors qu'elle était traitée respectivement par buprénorphine et hydromorphone, sans aucun bénéfice. Il s’expliquait d’autant moins le premier résultat négatif que les effets secondaires étaient alors marqués par une rétention hydrique significative. Il pensait qu’il serait intéressant de bénéficier d’un avis pharmacologique sur ce cas et à cette fin proposait de l’adresser à la consultation de la douleur des HUG. Les raisons pour lesquelles les tests de dépistage étaient négatifs étaient aujourd’hui inexpliquées, mais cela ne résultait pas du fait qu’elle ne serait pas compliante à la médication. Les investigations étaient en cours à ce sujet par la docteure K______, médecin adjoint, responsable consultation de la douleur, HUG.

À l’appui de son écriture, la demanderesse a produit :

-          un courrier du 25 novembre 2016 par lequel elle conteste le projet de décision de l’OAI du 15 novembre 2016 ;

-          un rapport médical établi le 27 décembre 2016 par le Dr I______ dans lequel ce médecin certifie que la demanderesse était suivie à sa consultation et qu’elle souffrait d’un état anxio-dépressif sévère lié à ses souffrances physiques et à des douleurs assez importantes, malgré un fort dosage de morphine. Elle se plaignait d’insomnies avec des réveils nocturnes fréquents, dus à des douleurs intenses et un réveil matinal avec grande fatigue et mauvaise humeur. Elle se sentait épuisée, en avait « ras le bol de la vie » et avait des difficultés à faire face dans la vie de tous les jours. Elle se plaignait également de troubles de la mémoire à court terme, troubles de l’attention, de prise de poids malgré le manque d’appétit et de manque de libido. Elle ne supportait pas le bruit, tout l’énervait et elle se repliait sur elle-même et était en retrait social ;

-          un rapport médical établi le 21 novembre 2016 par le Dr J______ qui concluait qu’il n’y avait pas d’indication à poursuivre l’approche minimalement invasive et qu’ils avaient convenu d’adapter le traitement opiacé. Actuellement, la patiente bénéficiait modérément de la prise de 12 mg par jour d’hydromorphone qui serait progressivement augmentée en fonction de la réponse clinique ;

-          un courrier, adressé le 3 janvier 2017 par le Dr C______ à l’OAI, indiquant que l’expertise Corela retenait, comme lui-même, le diagnostic de fibromyalgie, cependant sans aucune limitation somatique. À cet égard, il lui paraissait au contraire que c’était l’abaissement sévère du seuil douloureux lié à cette fibromyalgie qui exacerbait les symptômes en lien avec les problèmes mécaniques de l’assurée. Il avait en particulier de la peine à imaginer qu’elle doive suivre régulièrement un traitement de Saroton, Sirdalud, Xanax, Imovane, Transtec et Temgesic sans symptômes majeurs. Restait à définir si ce syndrome polyalgique était accompagné d’une comorbidité psychiatrique. Il ne pouvait bien entendu pas se prononcer sur ce point ;

-          un courrier du 6 janvier 2017 par lequel l’employeur de l’assurée résiliait leurs relations de travail avec effet au 31 mai 2017 ;

-          les résultats des analyses établis par Synlab Suisse à la demande du Dr D______ du 24 janvier 2017 relatifs à des prélèvements effectués les 7 et 22 juillet 2016 et du 19 décembre 2016 relatif à un prélèvement effectué le 15 décembre 2016, indiquant chacun un résultat négatif pour les dosages urinaires sous dépistage opiacés ;

-          un courrier adressé par le Dr J______ au Dr D______ le 26 décembre 2016, dans lequel il indique ne pas s’expliquer le premier résultat négatif du test de dépistage aux opiacés, dès lors que les effets secondaires étaient marqués par une rétention hydrique significative. Il pensait qu’il serait intéressant de bénéficier d’un avis pharmacologique sur le cas et lui proposait d’adresser la patiente à la consultation de la douleur des HUG.

21.    Le 24 février 2017, Swica a persisté à soutenir que l’expertise avait valeur probante, relevant que si le Dr J______ estimait que la demanderesse avait pris son médicament puisqu’il avait constaté un effet secondaire, il ne prenait pas position sur son incapacité de travail. Enfin, la présence d’un effet secondaire n’attestait pas non plus qu'un traitement était pris de manière régulière.

22.    Le 16 mars 2017, Swica a informé la chambre des assurances sociales que l’OAI avait confirmé sa décision de rejet de la demande de rente de l’assurée le 3 mars 2017. Elle avait également appris que l’employeur de l’assurée avait résilié le contrat collectif qui le liait à elle avec effet au 31 décembre 2016. Dès lors que le contrat avait été repris par un nouvel assureur au 1er janvier 2017, l’assurée ne pouvait plus faire valoir de droits auprès de Swica dès cette date et sa demande de transfert dans l’assurance individuelle était à adresser au nouvel assureur.

Swica a produit en annexe du courrier précité la décision rendue par l'OAI le 3 mars 2017 rejetant le droit de l'assurée à une rente d'invalidité, considérant au vu des pièces du dossier et de l'appréciation de ces pièces par son service médical régional, qu'elle ne présentait pas d'atteinte à la santé au sens de la LAI.

23.    Le 24 mars 2017, la demanderesse a informé la chambre de céans qu’elle entendait recourir contre la décision rendue par l’OAI le 3 mars 2017.

24.    Le 9 juin 2017, l’assurée a informé la chambre de céans que, le 12 mai 2017, le service de pharmacologie et toxicologie clinique du département d’anesthésiologie, de pharmacologie et des soins intensifs des HUG avait établi un rapport médical qui confirmait le diagnostic de fibromyalgie par une autre méthode. Par ailleurs, des tests avaient été effectués afin de déterminer si son activité enzymatique pouvait expliquer le résultat négatif aux opioïdes. Le 6 juin 2017, l’Institut de chimie clinique, analyses médicales et toxicologique, avait établi un rapport qui exposait que le résultat d’analyse du 19 mai 2016 « recte 19 décembre 2016 » sur le prélèvement du 15 décembre 2016 était négatif, car il s'était fondé sur une valeur-seuil utilisée pour une matrice urinaire, ce qui était erroné, puisque le prélèvement du 15 décembre 2016 était du sérum. Dans le sérum, les valeurs-seuils étaient plus basses que dans l’urine. Ainsi, en reconsidérant le résultat vis-à-vis du seuil sérique, il avait constaté que celui-ci aurait dû être rendu positif. Ainsi un rapport correctif avait été réédité en date du 26 mai 2017.

En ce qui concernait les dépistages « opiacés » demandés par le laboratoire Synlab sur les prélèvements du mois de juillet de l’assurée, il convenait de préciser que ce type de dépistage ne permettait pas de mettre en évidence une éventuelle consommation de buprenorphine. Un screening général aurait dû être demandé, car la buprenorphine n’appartenait pas chimiquement à la classe des opiacés, malgré le fait que cette substance était utilisée dans le même but clinique. Un résultat négatif au dépistage opiacé sur ces deux prélèvements n’excluait donc pas que la personne ait consommé de la buprenorphine. Il en résultait que le rapport du 19 décembre 2016 de l’institut Synlab Suisse était erroné et que le dépistage aux opiacés aurait dû indiquer un résultat positif. S’agissant du dépistage effectué à la demande de la clinique Corela, on pouvait douter également du résultat. Le rapport d’expertise indiquait qu’un dépistage aux opiacés s’était révélé négatif, alors qu’il s’agissait d’un patch de buprenorphine qui n’appartenait pas chimiquement à la classe des opiacés. Cela étant, il était essentiel de relever que le rapport médical du 12 mai 2017 des HUG constatait également qu’elle était atteinte de fibromyalgie. Cette atteinte à la santé entraînait une incapacité pleine et entière.

À l’appui de son écriture, l’assurée a produit :

-          un avis médical établi par la Dre K______ le 12 mai 2017, dans lequel cette dernière pose le diagnostic de douleurs diffuses dans le cadre d'une fibromyalgie avec diabète type II (comorbidité). Actuellement, l'intéressée présentait des douleurs diffuses principalement au niveau des coudes, épaules et de la main à gauche, cervicales et lombaires avec une irradiation dans la fesse droite et les deux membres inférieurs jusqu'aux chevilles. Elle les décrivait comme des décharges électriques et des brûlures dans les cervicales, en coup de poignard dans la fesse droite, sous forme d'engourdissement et paresthésies dans les membres supérieurs et de lourdeur dans les membres inférieurs. Elle décrivait également ses douleurs comme épuisantes, pénibles et angoissantes. L'intensité des douleurs était évaluée entre 5.5/10 et 7/10. Les changements de temps, toutes positions prolongées, la pression localisée au niveau des coudes, les massages, le froid et la fatigue les aggravaient, alors que le chaud et certains mouvements doux les soulageaient partiellement. Malgré les douleurs, elle essayait de rester un peu active dans son ménage. Les jours où elle se sentait mieux, elle sortait se promener ou nager. Environ deux jours par semaine, elle ne pouvait pas sortir de chez elle en raison des douleurs. Elle avait stoppé la physiothérapie qui aggravait les douleurs. Les divers traitements médicamenteux : plusieurs AINS, myorelaxants, gabapentine et prégabaline, SSRI, amitriptyline, tramadol, buprénorphine avaient été stoppés devant leur inefficacité ou intolérance. Le traitement actuel était hydromorphone (Palladon) que l'intéressée prenait jusqu'à 2x16 mg/j. Elle diminuait progressivement les doses sans modification des douleurs. Elle prenait encore les traitements suivants : Metfin, Saroten, Crestor, Xanax et Nexium. L'intéressée était mariée. Son mari était en bonne santé et son fils souffrait de diabète de type I. Ses parents vivent en Espagne. Elle avait dû faire face à une enfance marquée par la violence de son père et la maladie de sa mère. Elle avait été élevée par sa tante et était venue en Suisse à l'âge de 17 ans. Elle se décrivait comme tendue et triste, parfois découragée et en permanence épuisée. Le réflexe nociceptif de flexion R-III était considéré comme un corrélat spécifique, physiologique et objectif de la perception douloureuse. Un abaissement du seuil de ce réflexe était donc compatible avec la présence d'une sensibilisation centrale qui accompagnait la majorité des neuropathies (chroniques) connues ainsi que les douleurs diffuses dans le cadre d'un syndrome somatoforme douloureux persistant ou une fibromyalgie. L'équipe du centre multidisciplinaire de la douleur utilisait ce réflexe depuis de nombreuses années, en particulier pour tester l'effet de divers antalgiques ou évaluer les patients souffrant de fibromyalgie. La méthode utilisée actuellement reposait sur un algorithme intégrant les réponses électromyographiques du muscle ischiojambier à une série de stimulations transcutanées du nerf sural. Un seuil inférieur à 12 mA était considéré anormal. Le seuil de l'intéressée était de 8 mA et était compatible avec une sensibilisation centrale sous-tendant une fibromyalgie. L'activité enzymatique observée le 31 mars 2017 ne pouvait pas expliquer les dosages retrouvés en 2016. Cependant, avant de conclure que l'intéressée ne prenait pas son traitement médicamenteux, il fallait se renseigner auprès du laboratoire pour savoir quelle méthodologie avait été utilisée, probablement un Elia assay et leur demander leurs limites de détection, car les concentrations de buprénorphine et hydromorphone étaient relativement faibles. Il faudrait demander alors une analyse par LC-MSMS qui était plus précise et plus sensible ;

-          un rapport établi le 6 juin 2017 par l’Institut de chimie clinique reconsidérant le résultat des analyses faites pour l’assurée et indiquant avoir constaté que le résultat de l’analyse sur le prélèvement du 15 décembre 2016 était erroné puisque le prélèvement était du sérum. Le résultat d’analyse aurait dû être positif. Un rapport correctif avait été réédité en date du 26 mai 2017. En ce qui concernait le dépistage des opiacés demandé par le laboratoire Synlab sur les prélèvements du mois de juillet de la demanderesse, il convenait de préciser que ce type de dépistage ne permettait pas de mettre en évidence une éventuelle consommation de buprenorphine. En effet, un screening général aurait dû être demandé, car la buprenorphine n’appartenait pas chimiquement à la classe des opiacés. Un résultat négatif au dépistage « opiacés » sur les prélèvements en cause n’excluait donc pas que la personne ait consommé de la buprenorphine ;

-          un rapport établi le 29 mai 2017 par l'Institut de chimie clinique, annulant et remplaçant celui du 19 décembre 2016, relatif au serum prélevé le 15 décembre 2016, dont il ressort un résultat positif aux opiacés.

25.    Le 29 juin 2017, Swica a observé que si l’Institut de chimie clinique, qui avait sous-traité les analyses de Synlab et rectifié son rapport concernant le prélèvement du 15 décembre 2016, cela ne signifiait pas pour autant que le défaut de compliance constaté par les experts en janvier 2016 à la suite d’un prélèvement urinaire effectué d’ailleurs auprès d’un autre laboratoire, à savoir Dianalabs, était erroné. Si la Dre K______ indiquait en mai 2017 que l’anamnèse, le status clinique et le réflexe de retrait de nociception évoquaient la présence de douleurs diffuses dans le cadre d’une fibromyalgie, elle ne prenait pas position sur l’expertise, ni n’attestait que les douleurs seraient invalidantes. Au demeurant, l’assurance-invalidité se référant au SMR avait considéré, comme Swica, que les douleurs n’étaient pas invalidantes, ce qu’elle avait confirmé par une décision du 3 mars 2017. En conséquence, elle maintenait ses conclusions en rejet de la demande.

26.    La demanderesse a transmis le 13 octobre 2017 à la chambre des assurances sociales un rapport établi par le Dr C______ le 9 octobre 2017. Ce dernier revenait sur son courrier du 3 janvier 2015, dans lequel il avait indiqué que la même expertise retenait, comme lui-même, le diagnostic de fibromyalgie, cependant sans aucune limitation somatique. Cette phrase prêtait à confusion. Pour être plus clair, il retenait pour sa part le diagnostic de fibromyalgie avec les limitations fonctionnelles qu'il avait indiquées dans son rapport adressé à l'OAI en février 2016. Ces limitations étaient en lien avec l'abaissement sévère du seul douloureux lié à la fibromyalgie. Il considérait que ce n'était pas les troubles ostéo-articulaires qui entraînaient des limitations fonctionnelles significatives de l'assurée, mais sa fibromyalgie sévère.

27.    Lors d'une audience du 29 novembre 2017, la demanderesse a déclaré à la chambre de céans que le Dr D______ était son médecin généraliste depuis plusieurs années. Depuis le 5 février 2016, elle estimait que son état de santé avait empiré. Comme la morphine n’avait pas d’effet sur elle malgré une dose maximale, elle avait des douleurs partout. Au moment où elle avait été expertisée, elle venait de commencer un mois auparavant un traitement antidouleur par Durogesic. Au début, ses douleurs avaient diminué un petit peu, mais cela n’avait pas duré. Elle avait dû changer de médicament. Le Dr D______ l'avait adressée à un spécialiste de la douleur, le Dr J______, qui lui avait prescrit du Transtec, un médicament encore plus fort. Elle avait toujours pris ses médicaments comme cela lui était recommandé et en particulier le Durogesic. Ce qui avait empiré son état, c’était la fibromyalgie. Lorsqu'elle avait été expertisée, elle avait déjà des troubles du sommeil. Les douleurs la réveillaient. Cette situation n’avait pas changé. Elle avait pris un moment un médicament pour le sommeil, mais cela ne l'avait pas aidée à dormir mieux, car elle n'avait pas de véritables problèmes de sommeil, mais c'était les douleurs qui la réveillaient. Le Dr I______ lui avait dit que cela ne servait à rien de prendre des somnifères.

Le déroulement de ses journées n'avait pas vraiment changé depuis l'expertise, si ce n'était qu'elle pouvait faire de moins en moins de choses. L'été précédent, elle avait été faire une marche et avait dû s'arrêter au bout d’une demi-heure. Elle était avec sa sœur et des amis. Avant ses problèmes de santé aux épaules et au bas du dos, elle faisait régulièrement de la marche. Lors de l’expertise, elle nageait une fois par semaine dans de l’eau chaude, ce qui lui faisait du bien. Ces derniers temps, elle avait arrêté, car elle avait eu des problèmes avec sa famille en Espagne. Quand elle allait à la piscine, elle nageait un petit peu et faisait également les petits jets, mais pas les forts. Elle s'y rendait seule en voiture. Son mari l'aidait au ménage et elle continuait à s'occuper de la lessive. Comme ils n'étaient que deux, c'était des petites lessives. Elle s'était acheté un petit aspirateur pas très lourd qu'elle utilisait. Elle ne faisait toujours pas le repassage, ni les vitres. Elle aimait bien lire, mais oubliait la moitié des choses. Elle regardait aussi la télévision. Deux amies et des couples lui rendaient visite, une à deux fois par semaine. Elle se sentait entourée. Elle s'entendait bien avec son mari et ils allaient parfois avec des connaissances au restaurant. Au moment de l’expertise, elle faisait moins de choses, car elle n'était pas bien du tout.

Sur le plan psychologique, elle avait des hauts et des bas. Le fait de ne pas pouvoir travailler avait influé sur son moral. Chaque fois qu'elle allait voir ses collègues, ce qui lui arrivait encore, ce n'était pas évident. Son moral dépendait aussi des douleurs et du fait qu'elle restait à la maison, alors qu'à son âge, elle devrait travailler. Elle avait été offusquée que l'expert dise qu'elle avait mis le patch exprès le jour de l’expertise et pas avant. Elle pensait que la clinique Corela avait un a priori contre elle, parce qu’elle avait déjà fait une expertise dans le cadre de ses problèmes de coude qui l’avaient opposée à la Swica assurances SA. La rhumatologue qui l'avait reçue lui avait dit qu'elle connaissait sa situation pour avoir pris connaissance de tout le dossier. La Dre E______ n’avait pas été correcte avec elle par rapport à son attitude, en disant qu'elle en faisait trop parce qu'elle soupirait alors qu'elle avait mal. Avec l’expert-psychiatre, elle s'était sentie entendue. À l’époque, elle n’avait pas encore les gros problèmes qu'elle avait eus par la suite. Lorsqu'elle l'avait rencontré, elle pensait qu’on allait lui trouver un traitement et était assez positive. Ensuite, comme elle avait toujours des douleurs, elle avait « descendu en pic ». Sa situation était toujours la même. Elle était « en bas », car il ne lui était plus possible de faire les mêmes choses avec son mari. Parfois, elle devait s'allonger lorsque des amis étaient là. Ses proches comprenaient la situation.

Le conseil de l'assurée a indiqué que celle-ci maintenait ses conclusions jusqu’au 31 décembre 2016, étant rappelé qu’il y avait eu un changement d’assurance à la fin de l’année 2016.

La représentante de la défenderesse a indiqué que cette dernière demandait, si l’expertise Corela n'était pas prise en compte, qu’une nouvelle expertise soit ordonnée par la chambre de céans, subsidiairement la suspension de la cause dans l'attente du résultat de la procédure AI, étant relevé qu'il n'y avait pas de retard à statuer dans ce cas de figure, référence faite à l’arrêt 4A 409/2015. Selon ses conditions générales, Swica intervenait en complément de l’assurance-invalidité (art. 26-28). Dans la mesure où l’OAI avait refusé le droit à une rente d’invalidité à la demanderesse, Swica estimait qu’elle n’avait pas à avancer les indemnités journalières au sens de l’art. 28.

28.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur depuis le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la LAMal, relevant de la loi fédérale sur le contrat d'assurance, du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1).

Selon la police d’assurance, le contrat liant l'employeur de l'assurée à Swica est régi par la LCA.

La compétence de la chambre de céans à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        L'art. 46a LCA prescrit que le for se définit selon la loi du 24 mars 2000 sur les fors (LFors) qui a été abrogée au 1er janvier 2011 par l’entrée en vigueur du CPC, auquel il convient désormais de se référer. Sauf disposition contraire de la loi, pour les actions dirigées contre les personnes morales, le for est celui de leur siège (art. 10 al. 1 let. b CPC), étant précisé que l’art. 17 al. 1 CPC consacre la possibilité d’une élection de for écrite.

En l’occurrence, l’art. 90 des Conditions générales d'assurance (CGA) régissant l'assurance collective indemnité journalière selon la LCA de Swica prévoit que le preneur d'assurance et l'assuré peuvent élire à leur choix le for ordinaire ou celui de leur domicile suisse.

La demanderesse ayant son domicile à Genève, la chambre de céans est compétente à raison du lieu pour connaître de la présente demande.

3.        Les litiges relatifs aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l'art. 197 CPC lorsque les cantons ont prévu une instance cantonale unique selon l'art. 7 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6; ATAS/577/2011 du 31 mai 2011), étant précisé que le législateur genevois a fait usage de cette possibilité (art. 134 al. 1 let. c LOJ).

4.        La procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la LAMal (art. 243 al. 2 let. f CPC) et la chambre de céans établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC).

5.        Selon l’art. 8 CC, le demandeur doit prouver les faits qui fondent sa prétention, tandis que sa partie adverse doit prouver les faits qui entraînent l’extinction ou la perte du droit. Ces principes, qui sont également applicables dans le domaine du contrat d’assurance, impliquent qu’il incombe à l’ayant droit d’alléguer et de prouver notamment la survenance du sinistre (ATF 130 III 321 consid. 3.1). Cette preuve étant par nature difficile à apporter, l’exigence de preuve est réduite et il suffit que l’ayant droit établisse une vraisemblance prépondérante (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3). L’art. 8 CC donne à l’assureur le droit à la contre-preuve et il peut donc apporter des éléments propres à créer un doute et à ébranler la vraisemblance que l’ayant droit s’efforce d’établir. Le juge doit procéder à une appréciation d’ensemble des éléments qui lui sont apportés et dire s’il retient qu’une vraisemblance prépondérante a été établie (ATF 130 III 321 consid. 3.4; arrêt du Tribunal fédéral 4A_525/2010 du 4 janvier 2011 consid. 2.2).

Seules doivent être prouvées les allégations qui sont expressément contestées. Une telle contestation doit être suffisamment précise afin que l'on puisse déterminer quelles sont les allégations du demandeur qui sont contestées. En d'autres termes, la contestation doit être concrète à telle enseigne que la partie qui a allégué les faits sache quels sont ceux d'entre eux qu'il lui incombe de prouver. Le degré de la motivation d'une allégation exerce une influence sur le degré exigible de motivation d'une contestation. Plus détaillées sont certaines allégations de la partie qui a le fardeau de la preuve, plus concrètement la partie adverse doit expliquer quels sont au sein de celles-ci les éléments de fait qu'elle conteste. Le fardeau de la contestation ne saurait toutefois entraîner un renversement du fardeau de la preuve (ATF 141 III 433 consid. 2.6 p. 438 et les références).

La vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités ou hypothèses envisageables ne revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2; ATF 132 III 715 consid. 3.1; ATF 130 III 321 consid. 3.3).

En revanche, l'art. 8 CC ne régit pas l'appréciation des preuves, de sorte qu'il ne prescrit pas quelles sont les mesures probatoires qui doivent être ordonnées (ATF 127 III 519 consid. 2a), ni ne dicte au juge comment forger sa conviction (ATF 128 III 22 consid. 2d ; 127 III 248 consid. 3a, 519 consid. 2a); cette disposition n'exclut pas non plus que le juge puisse, sur la base d'une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, refuser l'administration d'une preuve supplémentaire au motif qu'il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3 p. 226; 129 III 18 consid. 2.6 p. 24 ss).

L’expertise en tant que moyen de preuve admis au sens de l’art. 168 al. 1 let. d CPC ne vise que l’expertise judiciaire au sens de l’art 183 al. 1 CPC. Une expertise privée n’est en revanche pas un moyen de preuve mais une simple allégation de partie (ATF 141 III 433 consid. 2.5.2 et 2.5.3).

Du point de vue probatoire, un rapport médical est une simple expertise privée qui n’est selon la jurisprudence pas un moyen de preuve mais une simple allégation (ATF 132 III 83 consid. 3.4; ATF 140 III 24 consid. 3.3.3).

Les allégations précises de l'expertise privée – contestées de manière globale – peuvent apporter la preuve de leur véracité si elles sont appuyées par des indices objectifs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_318/2016 du 3 août 2016 consid. 3.1 et 3.2). Si elles ne sont pas corroborées par de tels indices, elles ne peuvent être considérées comme prouvées en tant qu’allégations contestées (arrêt du Tribunal fédéral 4A_626/2015 du 24 mai 2016 consid. 2.5). Dans le cadre d’un litige portant sur le versement d’indemnités journalières d’une assurance-maladie perte de gain soumise à la LCA, l’existence d’un tel indice objectif peut revêtir la forme d’une décision de refus de prestations par laquelle l’office de l’assurance-invalidité estime que la capacité de gain d’un assuré est entière (arrêt du Tribunal fédéral 4A_318/2016 du 3 août 2016 consid. 3.2).

6.        En l'espèce, il convient d'examiner en premier lieu la valeur probante de l'expertise rendue le 26 février 2016. Le rapport d'expertise est fondé sur le dossier médical, des examens cliniques de l'assurée et des examens biologiques. Il contient une anamnèse complète, décrit les plaintes de l'assurée et le résultat des examens cliniques de cette dernière, sur les plans rhumatologique et psychiatrique. Les conclusions auxquelles les experts sont parvenus sont convaincantes et ne contiennent pas de contradiction.

La demanderesse remet en cause la valeur probante de l'expertise en se prévalant d'un rapport établi le 6 juin 2017 par l’Institut de chimie clinique, aux termes duquel le résultat de dépistage opiacés rendu le 19 décembre 2016 sur le prélèvement du 15 décembre 2016 aurait à tort été rendu négatif en se fondant sur une valeur seuil utilisée pour une matrice urinaire, ce qui était erroné puisque le prélèvement du 15 décembre 2016 était du sérum.

Ce rapport ne remet pas sérieusement en cause les conclusions de l'expertise, dès lors qu'il répond à une demande émanant du conseil de la demanderesse dont on ignore la teneur exacte, mais surtout parce qu'il a trait à un prélèvement effectué le 15 décembre 2016 et à des analyses demandées par le Dr D______ et pas aux prélèvements effectués par les experts. En effet, à teneur du rapport d'expertise, l'experte-rhumatologue a procédé à un dépistage urinaire le 26 janvier 2016 (du fait de la prescription d'analgésiques opioïdes) et l'expert-psychiatre a procédé à un dosage sérique du Laroxyl le 19 janvier 2016. Il est en outre établi que le traitement au Durogesic a été instauré trois semaines à un mois avant le dépistage urinaire effectué par l'experte-rhumatologue. Il en résulte que les analyses effectuées à la demande du Dr D______ sur des prélèvements effectués en juillet 2016 et le 15 décembre 2016 ne sont pas pertinents pour juger de la compliance de l'assurée en lien avec la prise de Durogesic en janvier 2016. La demanderesse n'apporte ainsi pas le moindre indice pertinent remettant en cause les résultats des analyses effectuées par les experts et par voie de conséquence leurs conclusions.

L'experte-rhumatologue a bien effectué un dépistage urinaire pour établir la compliance au traitement d'analgésique opioïde, étant relevé que la demanderesse portait alors un patch de Durogesic - ce qu'elle a confirmé lors de l'audience du 29 novembre 2017 - dont le principe actif est du fentanyl, un analgésique opioïde. Il ne s'agissait donc pas d’un patch de buprenorphine, contrairement à ce qu'a soutenu la demanderesse dans ses écritures du 9 juin 2017.

Les conclusions de l'expertise ne sont, en outre, pas sérieusement remises en doute par le très bref et peu motivé avis médical du Dr D______ du 28 juillet 2016, lequel retenait que l'état physique et psychique de sa patiente ne lui permettait pas de reprendre son activité professionnelle, dès lors qu'il n'est pas spécialiste en rhumatologie ni en psychiatrie.

Sur le plan rhumatologique, le Dr C______, médecin rhumatologue de la demanderesse, rejoint les conclusions des experts, dès lors qu'il considérait, dans son rapport du 5 juillet 2016, que les différents troubles ostéo-articulaires de celle-ci n’entraînaient pas de limitations fonctionnelles significatives. Contrairement aux experts, il estimait en revanche que la demanderesse souffrait d'une fibromyalgie invalidante. Il a toutefois précisé, à juste titre, le 3 janvier 2017, que s'il estimait que le diagnostic de fibromyalgie était invalidant, dès lors que la patiente devrait suivre régulièrement un traitement de Saroton, Sirdalud, Xanax, Imovane, Transtec et Temgesic, il admettait que cette question était du ressort d’un psychiatre, ce qu'il n'est pas. Son appréciation n'est ainsi pas déterminante.

Les 21 juin et 27 décembre 2016, la Dre I______, a indiqué être en désaccord avec les conclusions de l'expertise du 26 février 2016, relevant que la demanderesse souffrait d’un état anxio-dépressif sévère, de troubles du sommeil, qu'elle restait tendue, irritable et inquiète, qu'elle se sentait fatiguée, qu'elle était très inquiète pour son état de santé et son avenir et disait avoir des difficultés à faire face dans la vie de tous les jours. Elle n’avait pas de plaisir, ni de loisirs et se repliait sur elle-même. Dans son second rapport, elle mentionnait qu'elle en avait « ras le bol de la vie ». Ces brefs avis médicaux peu détaillés ne remettent pas non plus en cause les conclusions contraires des experts, étant relevé que la Dre I______ ne s'est pas prononcée sur la capacité de travail de l'assurée.

Quant à l'avis médical établi par la Dre K______ le 12 mai 2017, il confirme le diagnostic de fibromyalgie sans se prononcer quant à son effet sur la capacité de travail de la demanderesse.

Pour les motifs sus-évoqués, la chambre de céans reconnaît une pleine valeur probante à l'expertise du 26 février 2016.

Il s'agit certes là d'une expertise privée, qui ne constitue pas un moyen de preuve et qui doit être considérée comme une simple allégation de partie. Dans la mesure toutefois où la demanderesse en conteste les conclusions de façon globale en se référant aux avis partiellement contraires de ses médecins traitants et ne discute pas précisément les allégations figurant dans le rapport d'expertise, pas plus que ne l'ont fait ses médecins, l'on se trouve dans un cas où une telle expertise est suffisante pour apporter la preuve de la véracité des allégations, dans la mesure où elle est appuyée par des indices objectifs. Constitue un tel indice, selon la jurisprudence, le fait que l'OAI a refusé le droit à une rente d’invalidité à la demanderesse. Constitue également un tel indice le fait que les rapports médicaux du Dr C______ des 5 juillet 2016 et 3 janvier 2017 confirment que les troubles ostéo-articulaires dont souffre la demanderesse n’entraînent pas de limitations fonctionnelles significatives. Enfin, les déclarations de l'assurée en audience ont également permis de confirmer les faits décrits dans l'anamnèse du rapport d'expertise, faits qui sont déterminants dans le cas d'une fibromyalgie pour déterminer si cette dernière peut être considérée comme invalidante selon les indicateurs développés par le Tribunal fédéral dans sa jurisprudence récente. En conséquence, il peut être retenu, sans violation de l'art. 168 CPC, que l'expertise privée de la défenderesse établit suffisamment la capacité de gain totale de la demanderesse, sans qu'il se justifie de faire procéder à une expertise judiciaire, ni d'entendre les Drs C______, I______ et D______, qui ont pu s'exprimer par le biais de leurs rapports.

La seule critique de l'expertise plus précisément développée par la demanderesse a trait à la conclusion de sa non-compliance retenue par les experts, qui serait, selon elle, fondée sur des résultats erronés. Or, il a été démontré précédemment que les pièces produites par la demanderesse à ce sujet n'emportent pas conviction, de sorte qu'il n'est pas rendu vraisemblable que l'expertise est fondée sur des résultats d'analyse erronés.

7.        En ce qui concerne le diagnostic de fibromyalgie posé par les experts et considéré par eux comme non incapacitant, il convient d'analyser si leurs conclusions sont compatibles avec la nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral en la matière.

La reconnaissance de l'existence de troubles somatoformes douloureux persistants suppose d'abord la présence d'un diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) et s'appuyant lege artis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 130 V 396 consid. 5.3).

Le diagnostic d'un trouble douloureux somatoforme doit être justifié médicalement de telle manière que les personnes chargés d’appliquer le droit puissent vérifier que les critères de classification ont été effectivement respectés. En particulier, l’exigence d’une douleur persistante, intense et s’accompagnant d’un sentiment de détresse doit être remplie. Un tel diagnostic suppose l’existence de limitations fonctionnelles dans tous les domaines de la vie (tant professionnelle que privée). Les médecins doivent en outre prendre en considération les critères d’exclusion de ce diagnostic retenus par la jurisprudence (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1. et 2.2). Ainsi, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (ATF 131 V 49 consid. 1.2).

Les principes jurisprudentiels développés en matière de troubles somatoformes douloureux sont également applicables à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1) au syndrome de fatigue chronique ou de neurasthénie à l’exception de la fatigue due au cancer (ATF 139 V 346; arrêt du Tribunal fédéral 9C_662/2009 du 17 août 2010 consid. 2.3), à la neurasthénie (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 70/07 du 14 avril 2008 consid. 5), à l'anesthésie dissociative et aux atteintes sensorielles (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 9/07 du 9 février 2007 consid. 4 in SVR 2007 IV n° 45 p. 149) ainsi qu'en matière de troubles moteurs dissociatifs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2007 du 30 avril 2008 consid. 3.4) et de traumatisme du type « coup du lapin » (ATF 136 V 279 consid. 3.2.3).

L'évaluation des syndromes sans pathogenèse ni étiologie claires et sans constat de déficit organique ne fait pas l'objet d'un consensus médical (arrêt du Tribunal fédéral 9C_619/2012 du 9 juillet 2013 consid. 4.1). Dans un arrêt récent (ATF 141 V 281), le Tribunal fédéral a abandonné la présomption qui prévalait jusqu’à ce jour, selon laquelle les syndromes du type troubles somatoformes douloureux et affections psychosomatiques assimilées peuvent être surmontés en règle générale par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 132 V 65; ATF 131 V 49; ATF 130 V 352).

Désormais, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant de mettre en regard les facteurs extérieurs incapacitants d’une part et les ressources de compensation de la personne d’autre part (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). Il n'y a plus lieu de se fonder sur les critères de l'ATF 130 V 352, mais sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4). Ces indicateurs concernent deux catégories, à savoir celle du degré de gravité fonctionnelle et celle de la cohérence.

Ces indicateurs sont classés comme suit :

I. Catégorie « degré de gravité fonctionnelle »

Les indicateurs relevant de cette catégorie représentent l’instrument de base de l’analyse. Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence (ATF 141 V 281 consid. 4.3).

A. Axe « atteinte à la santé »

1. Expression des éléments pertinents pour le diagnostic et des symptômes

Il faut davantage tenir compte du degré de gravité inhérent au diagnostic du trouble somatoforme douloureux : comme « plainte essentielle », il faut une « douleur persistante, intense, s'accompagnant d'un sentiment de détresse » (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1).

Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l’atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés. Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l’étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour le diagnostic. Par exemple, sur le plan étiologique, la caractéristique du syndrome somatoforme douloureux persistant est, selon la CIM-10 F45.5, qu’il survient dans un contexte de conflits émotionnels ou de problèmes psycho-sociaux. En revanche, la notion de bénéfice primaire de la maladie ne doit plus être utilisée (consid. 4.3.1.1).

2. Succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à ces derniers

Ce critère est un indicateur important pour apprécier le degré de gravité. L’échec définitif d’un traitement indiqué, réalisé lege artis sur un assuré qui coopère de manière optimale, permet de conclure à un pronostic négatif. Si le traitement ne correspond pas ou plus aux connaissances médicales actuelles ou paraît inapproprié dans le cas d’espèce, on ne peut rien en déduire s’agissant du degré de gravité de la pathologie. Les troubles psychiques sont invalidants lorsqu'ils sont graves et ne peuvent pas ou plus être traités médicalement. Des déductions sur le degré de gravité d’une atteinte à la santé peuvent être tirées non seulement du traitement médical mais aussi de la réadaptation. Si des mesures de réadaptation entrent en considération après une évaluation médicale, l’attitude de l’assuré est déterminante pour juger du caractère invalidant ou non de l’atteinte à la santé. Le refus de l'assuré d'y participer est un indice sérieux d'une atteinte non invalidante. A l’inverse, une réadaptation qui se conclut par un échec en dépit d’une coopération optimale de la personne assurée peut être significative dans le cadre d’un examen global tenant compte des circonstances du cas particulier (consid. 4.3.1.2).

3. Comorbidités

La comorbidité psychique ne joue plus un rôle prépondérant de manière générale, mais ne doit être prise en considération qu’en fonction de son importance concrète dans le cas d’espèce, par exemple pour juger si elle prive l’assuré de ressources. Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l’influence du trouble somatoforme douloureux avec l’ensemble des pathologies concomitantes. Un trouble qui, selon la jurisprudence, ne peut pas être invalidant en tant que tel (cf. consid. 4.3.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 9C_98/2010 du 28 avril 2010, consid. 2.2.2, in : RSAS 2011 IV n° 17, p. 44) n’est pas une comorbidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1040/2010 du 6 juin 2011, consid. 3.4.2.1, in : RSAS 2012 IV n° 1, p. 1) mais doit à la rigueur être pris en considération dans le cadre du diagnostic de la personnalité (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Ainsi, un trouble dépressif réactionnel au trouble somatoforme ne perd pas toute signification en tant que facteur d’affaiblissement potentiel des ressources, mais doit être pris en considération dans l’approche globale (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3).

B. Axe « personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

Il s’agit d’accorder une importance accrue au complexe de personnalité de l’assuré (développement et structure de la personnalité, fonctions psychiques fondamentales). Le concept de ce qu’on appelle les « fonctions complexes du Moi » (conscience de soi et de l’autre, appréhension de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation) entre aussi en considération. Comme les diagnostics relevant des troubles de la personnalité sont, plus que d’autres indicateurs, dépendants du médecin examinateur, les exigences de motivation sont particulièrement élevées (consid. 4.3.2).

C. Axe « contexte social »

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles continuent à ne pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l’assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social. Il faut toujours s’assurer qu’une incapacité de travail pour des raisons de santé ne se confond pas avec le chômage non assuré ou avec d’autres difficultés de vie (consid. 4.3.3).

II. Catégorie « cohérence »

Cette seconde catégorie comprend les indicateurs liés au comportement de l’assuré. (consid. 4.4).

A. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

Il s’agit ici de se demander si l’atteinte à la santé limite l’assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l’exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social utilisé jusqu’ici doit désormais être interprété de telle sorte qu’il se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l’assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d’activité sociale de l’assuré avant et après la survenance de l’atteinte à la santé (consid. 4.4.1).

B. Poids de la souffrance révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

La prise en compte d’options thérapeutiques, autrement dit la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, permet d’évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons que l'atteinte à la santé assurée (consid. 4.4.2).

Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

8.        En l'espèce, s'agissant des indicateurs de la catégorie du degré de gravité fonctionnelle, il ressort de l'expertise et des déclarations de la demanderesse que les douleurs ressenties par celle-ci sont d'une intensité variable et ne s'accompagnent pas d'un sentiment de détresse marqué. En effet, ses algies lui permettaient et lui permettent encore d’aller de temps en temps au restaurant, de recevoir des amis chez elle, de faire quelques tâches ménagères, de lire, de regarder la télévision et d’aller à la piscine. Selon l'expert psychiatre, l'assurée n'avait pas vécu de facteurs de stress psychosocial identifiables. Les douleurs éprouvées ne remplissaient pas les critères d’un tel facteur de stress et les difficultés conjugales rapportées s’étaient amendées et n’avaient pas engendré de symptomatologie particulière, ni de prise en charge spécifique. Il n'apparaît donc pas que les douleurs dont souffre la demanderesse sont survenues dans un contexte de conflits émotionnels ou de problèmes psycho-sociaux. L'expert a relevé que l'assurée présentait une certaine tristesse réactionnelle à sa situation actuelle, mais l’intérêt et le plaisir étaient conservés et la perte d’énergie était mise en lien avec les plaintes algiques. Son discours au jour de l’expertise ne mettait pas en exergue des plaintes importantes hors du champ des douleurs. La concentration n’était pas altérée, avec une activité de lecture conservée ou le visionnage de la télévision. Les idées de mort n'étaient jamais présentes. Ces observations sont confirmées par les déclarations de la demanderesse lors de l'audience du 29 novembre 2017. En effet, si elle indiqué en premier lieu que son état de santé avait empiré depuis le 5 février 2016, il résulte toutefois de la suite de ses déclarations que sa situation n’a pas changé depuis l'expertise. Si elle ne se rendait plus à la piscine, elle a précisé que c'était en raison de problèmes avec sa famille en Espagne et non d'un état douloureux plus important. Elle continuait à s'occuper de la lessive et mentionnait même utiliser un petit aspirateur, ce qu'elle ne faisait pas au moment de l'expertise. Elle continuait à lire, à regarder la télévision et des amis lui rendaient visite. Elle se sentait entourée et s'entendait bien avec son mari avec lequel elle allait parfois, avec des connaissances, au restaurant. Sur le plan psychologique, elle avait des hauts et des bas. Le fait de ne pas pouvoir travailler influait sur son moral. Chaque fois qu'elle allait voir ses collègues, ce qui lui arrivait encore, ce n'était pas évident. Son moral dépendait aussi des douleurs et du fait qu'elle restait à la maison, alors qu'à son âge, elle devrait travailler. Certes, elle indiquait souffrir de douleurs qui la limitaient, en particulier dans la marche, et ne plus pouvoir faire les mêmes activités qu'auparavant. Néanmoins, il résulte de ses déclarations que son état n’atteint pas l'intensité correspondant à une douleur persistante, intense, s'accompagnant d'un sentiment de détresse et qu'elle éprouvait lors de l'expertise - et qu'elle éprouve encore - du plaisir et de l'intérêt à certaines activités.

S'agissant de l'indicateur du succès du traitement, les experts ont retenu une absence de compliance au traitement médicamenteux de la demanderesse sur la base d'examens biologiques. À cet égard, il sera rappelé que cette dernière n'a pas sérieusement remis en cause les résultats de ces examens avec les pièces produites. Il n'y a donc pas lieu de s'éloigner des conclusions de l'expertise à cet égard et il doit être retenu que la compliance n'était pas totale. Par ailleurs, il ressort de l'expertise que l'assurée n’avait pas de suivi spécialisé régulier que ce soit au niveau somatique ou psychiatrique, ce qui est confirmé par le rapport établi par la Dre I______ le 21 juin 2016, dont il ressort que l'assurée l'a consultée le 11 février 2016, soit après ses rendez-vous avec les experts, qui ont eu lieu les 19 et 26 janvier 2016. Il ne ressort en outre pas de ce rapport qu'elle suivrait depuis lors un traitement régulier auprès de cette spécialiste.

S'agissant de l'indicateur de la comorbidité, aucun diagnostic de la lignée d’un trouble de l’humeur, d’un trouble anxieux ou d’un trouble de l’adaptation ne pouvait être retenu selon l'expert-psychiatre. Les plaintes de l'expertisée étaient essentiellement algiques. Il n'apparaît ainsi pas que la comorbidité psychique joue un rôle prépondérant et qu'elle prive la demanderesse de ses ressources.

S'agissant de la structure de sa personnalité, l'expert-psychiatre a relevé que la demanderesse décrivait une confiance et une estime altérées du fait de la mauvaise évolution de la symptomatologie, mais qu'elle gardait quand même confiance en elle. Elle ne souffrait pas de ralentissements psychomoteurs, mais d'un ralentissement réactionnel à la problématique algique. La demanderesse n'apparaît ainsi pas dénuée de ressources personnelles.

S'agissant de l'indicateur du contexte social, il ressort du rapport d'expertise et de ses propres déclarations que la demanderesse bénéficie du soutien de son fils et son mari ainsi que d'amis. Son contexte social est dès lors favorable, même s'il reste limité.

S'agissant des indicateurs liés à la cohérence, il convient de relever que la demanderesse n'est pas totalement inactive sur le plan personnelle, puisqu'elle a des activités dans le cadre de sa maison et également à l'extérieur, indiquant sortir pour aller au restaurant, à la piscine et rendre visite à ses anciens collègues.

Au vu de l'analyse des indicateurs, il doit être retenu comme établi, avec le degré de vraisemblance prépondérante requis, que la fibromyalgie dont souffre la demanderesse est surmontable et, partant, que celle-ci n'est pas invalidante, comme les experts l'ont retenu en précisant qu'en témoignaient également la tendance à la majoration des plaintes ainsi que les discordances cliniques relevées. À cet égard, la chambre de céans doit convenir qu'une tendance à l'exagération est confirmée par la teneur des déclarations de la demanderesse lors de l'audience du 29 novembre 2017. Cette dernière a en effet indiqué en premier lieu que son état s'était dégradé depuis l'expertise, sans toutefois le démontrer par la suite, dans la mesure où il ressort de ses déclarations que ses activités et relations sociales n'ont pas changé. Elle a, en outre, dans un second temps, déclaré de façon contradictoire qu'au moment de l'expertise, elle faisait moins de choses qu'actuellement, car elle n'était pas bien du tout.

9.        Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de retenir qu'il est suffisamment établi que la demanderesse n'était pas en incapacité de travail du 15 février au 6 décembre 2016 et sa demande en paiement d'indemnités journalière pour perte de gain maladie pour cette période doit en conséquence être rejetée.

Il n'y a pas lieu de lui allouer de dépens dès lors qu'elle succombe (art. 22 al. 3 let. b de la loi d'application du code civil suisse et d’autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 [LaCC - E 1 05]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 114 let. e CPC).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        La rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le