Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/991/2025 du 09.09.2025 ( FORMA ) , REJETE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
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 | POUVOIR JUDICIAIRE A/2552/2025-FORMA ATA/991/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 9 septembre 2025 1ère section | 
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dans la cause
A______, agissant par ses parents B______ et C______  recourant
 
contre
DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé
 
A. a. Né le______, A______ a terminé en juin 2024 sa onzième année de scolarité au cycle d'orientation D______, en section langues vivantes et communication. En août 2024, il a entamé sa première année de maturité gymnasiale au collège E______.
b. Au terme du 1er semestre de l'année scolaire 2024/2025, sa moyenne générale était de 4.4 avec quatre notes insuffisantes (mathématiques 1 : 3.2 ; allemand : 3.5 ; italien : 3.7 ; chimie : 3.9) et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 1.7.
À la fin du second semestre, sa moyenne générale était toujours de 4.4, avec trois notes insuffisantes (mathématiques 1 : 3.0 ; allemand : 3.7 ; italien : 3.9) et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 1.5.
c. Par décision du 4 juillet 2025, le conseil de direction du collège E______ a autorisé A______ à redoubler sa première année de maturité gymnasiale, rejetant implicitement sa demande de promotion par dérogation en deuxième année.
d. Sur recours de l'élève, la direction générale de l'enseignement secondaire II (ci‑après : la DGES II) a confirmé cette décision le 15 juillet 2025.
L'élève ne remplissait pas les conditions d'une promotion en deuxième année, telles que prévues par l'art. 27 al. 1 et 2 du règlement relatif à la formation gymnasiale au collège de Genève du 29 juin 2016 (RGymCG – C 1 10.71). Une promotion par dérogation au sens de l'art. 30 al. 1 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 (REST - C 1 10.31) aurait supposé d'une part que les résultats de l'élève s'approchent fortement des normes de promotion, ce qui n'était pas le cas, et d'autre part qu'un pronostic de réussite favorable pour le degré suivant puisse être posé, ce qui n'était pas le cas non plus au regard notamment de la péjoration, entre les premier et second semestres, de ses résultats en mathématiques. Bien qu'il se plaigne de la qualité de l'enseignement prodigué par l'enseignante de mathématiques et de la passivité sur ce point de la direction de l'établissement, l'élève n'invoquait aucun argument concret susceptible de justifier sa promotion par dérogation en deuxième année.
e. Le 8 août 2025, la DGES II a rejeté une demande de reconsidération formée par l'élève le 23 juillet 2025.
B. a. Par acte adressé le 17 juillet 2025 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), A______, agissant par ses parents B______ et C______, a recouru contre la décision de la DGES II du 15 juillet 2025. Il a ensuite complété son recours par actes déposés les 11 et 14 août 2025 au greffe de la chambre administrative.
Le refus de lui octroyer une promotion par dérogation en deuxième année lui inspirait un fort sentiment d'injustice. Malgré les difficultés et les revers, il s'était fortement investi dans sa scolarité et avait beaucoup travaillé, ce qui lui avait permis d'améliorer globalement ses résultats au second semestre. Sa situation était due à sa moyenne annuelle de 3.0 en mathématiques, alors qu'une moyenne de 3.5 lui aurait permis d'être promu par tolérance. Or, cette moyenne insuffisante était due aux insuffisances de l'enseignement de mathématiques, qui avaient eu pour conséquences de mettre plusieurs élèves de sa classe en difficultés (20 élèves sur 24 n'ayant pas obtenu la moyenne en mathématiques). Les démarches collectives entreprises dans un premier temps auprès de l'enseignante concernée puis dans un second temps auprès de la direction n'avaient eu aucun effet ; en particulier, aucun soutien pédagogique n'avait été fourni. Son échec n'était ainsi pas dû à son incapacité mais à une insuffisance du système d'encadrement et d'enseignement.
b. Dans ses observations du 22 août 2025, la DGES II a conclu au rejet du recours. Une promotion par dérogation ne pouvait être accordée que si deux conditions cumulatives étaient réalisées. D'une part, les résultats obtenus par l'élève devaient fortement s'approcher des normes de promotion. D'autre part, un pronostic de réussite au niveau supérieur pouvait être posé, en considération des progrès accomplis par l'élève au second semestre, du caractère régulier de la fréquentation des cours et de son comportement. Dans le cas d'espèce, l'écart par rapport aux normes de promotion était important et les résultats de l'élève s'étaient péjorés au second semestre dans sept disciplines.
c. Par réplique du 29 août 2025, A______ a contesté le point de vue de l'autorité intimée. Son échec était dû uniquement à l'enseignement inadéquat en mathématiques, pour lequel la direction et l'enseignante concernée auraient dû trouver une solution. Il était conscient que la réussite de sa deuxième année, si une promotion par dérogation lui était octroyée, lui demanderait des efforts importants, et s'engageait à mettre en place un soutien renforcé, notamment à faire appel à un répétiteur en mathématiques, afin de rattraper les éventuels retards et garantir sa progression. Sous réserve de trois jours d'absence pour raison médicale, il n'avait jamais manqué de cours pendant sa première année. Ayant alors repris l'école en première année, sa situation était « insupportable » dès lors que les cours portaient sur des notions qu'il connaissait déjà et que le rythme était lent au point qu'il s'ennuyait profondément.
d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).
Les compléments de recours déposés les 11 et 14 août 2025, soit dans le délai de recours, sont eux aussi recevables.
2. Selon l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve (al. 2).
2.1 Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d’une certaine souplesse s’agissant de la manière par laquelle sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu’elles ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est, en soi, pas un motif d’irrecevabilité, pour autant que l’autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/634/2025 du 5 juin 2025 consid. 2.1).
2.2 En l’espèce, le recourant n’a pas pris de conclusions formelles. L’on comprend toutefois de ses écritures qu’il demande l'annulation de la décision attaquée ainsi que sa promotion par dérogation en deuxième année de maturité gymnasiale pour l'année scolaire 2025-2026, de sorte que le recours satisfait aux exigences minimales de motivation.
3. Le recourant sollicite une dérogation exceptionnelle pour passer en deuxième année de maturité gymnasiale au collège de Genève.
3.1 Selon l’art. 29 REST, les conditions de promotion sont déterminées par les règlements de chaque filière (al. 1). L’orientation des élèves constitue une part importante de la mission de l’école et, dans cette optique, lors de l’analyse de l’octroi d’une promotion par dérogation ou d’un redoublement ou lors d’une réorientation, il doit être tenu compte des aptitudes de l’élève à mener à bien son projet de formation (al. 2). Sont également prises en considération les circonstances ayant entraîné l’échec, les progrès accomplis, la fréquentation régulière des cours et le comportement de l’élève (al. 3).
3.2 Selon l'art. 27 al. 1 RGymGG, est promu en deuxième année du collège l'élève qui, au terme de la première année, obtient la note annuelle de 4.0 au moins pour chacune des disciplines d'enseignement suivies.
Est promu par tolérance (art. 27 al. 2 RGymGG) l'élève dont les résultats satisfont aux conditions suivantes : la moyenne générale est égale ou supérieure à 4 (let. a) et la somme des écarts à 4 des notes insuffisantes (au maximum trois notes) ne dépasse pas 1.0 (let. b).
Restent réservées les dispositions concernant la promotion par dérogation définies dans le REST.
3.3 La direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut accorder la promotion à des élèves qui ne remplissent pas complètement les conditions de promotion et qui semblent présenter les aptitudes nécessaires pour suivre l’enseignement de l’année suivante avec succès (art. 30 al. 1 REST). Un élève ne peut pas bénéficier de cette mesure plus d’une fois par filière (art. 30 al. 2 REST). Un élève ne peut bénéficier d’une dérogation à l’issue d’une année répétée (art. 30 al. 3 REST).
3.4 La promotion par dérogation, prévue à l’art. 30 al. 1 REST, prévoit deux conditions, la première étant que l’élève ne remplisse « pas complètement les conditions de promotion », ce qui signifie qu'il doit fortement s'en approcher.
Selon la jurisprudence de la chambre de céans, un écart à la moyenne de 1.2 au lieu de 1.0 n’est pas de peu d’importance puisqu’il dépasse de 20% le maximum de l’écart négatif autorisant d’entrer en matière sur une promotion par tolérance (ATA/776/2016 du 13 septembre 2016 consid. 4 concernant l’ancienne version de la disposition).
La deuxième condition prévue pour l’octroi d’une promotion par dérogation concerne les aptitudes que semble avoir l’élève et qui sont nécessaires pour suivre l’enseignement de l’année suivante avec succès en dépit de son échec.
3.5 Dans ce cadre, l’autorité scolaire bénéficie d’un très large pouvoir d’appréciation, dont la chambre de céans ne censure que l'abus ou l'excès. Ainsi, alors même que l’autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité (ATA/637/2025 du 10 juin 2025 ; ATA/1356/2024 du 19 novembre 2024).
3.6 En l’espèce, le recourant n’a pas obtenu, au terme de sa première année de collège, une note annuelle de 4.0 au moins pour chacune des disciplines d'enseignement suivies, de telle sorte qu'il ne remplissait pas les conditions d'une promotion ordinaire au sens de l'art. 27 al. 1 RGymGG. Il ne remplissait pas non plus les conditions d'une promotion par tolérance au sens de l'art. 27 al. 2 RGymGG en raison d'une somme des écarts négatifs à la moyenne (1.5) supérieure à 1, ce qu'il ne conteste pas.
Seul reste donc à examiner s'il pouvait bénéficier d'une promotion par dérogation au sens de l'art. 30 al. 1 REST.
S'agissant de la première condition à une telle promotion, soit un écart peu important entre les résultats de l'élève et les normes de promotion, elle ne peut être considérée comme réalisée. Cet écart s'établit en effet à 0.5 alors que, selon la jurisprudence de la chambre de céans, un écart de 0.2 seulement n'est déjà pas de peu d'importance. Les critiques émises par le recourant sur la qualité de l'enseignement des mathématiques, discipline à laquelle les deux tiers de l'écart à la moyenne peuvent être attribués (1 sur 1.5), ne lui sont à cet égard d'aucun secours puisqu'il ne conteste pas les notes en elles-mêmes.
La deuxième condition d'une promotion par dérogation, relative à la possibilité de poser un pronostic favorable de réussite de la deuxième année du collège, n'est pas non plus remplie. Certes, le recourant a été très peu absent en première année et son comportement paraît avoir été irréprochable, ce qui doit être relevé. Ses résultats n'ont cela étant pas connu d'évolution favorable entre les premier et second semestres : certaines notes (italien, allemand, chimie et anglais) se sont améliorées alors que d'autres (mathématiques, informatique, histoire, français, arts plastiques et éducation physique) se sont péjorées, la moyenne générale demeurant inchangée à 4.4. Surtout, les résultats du recourant en mathématiques se sont considérablement péjorés, passant d'une moyenne de 3.2 pour le premier semestre à 2.7 pour le second. Au vu de l'ensemble de ces résultats, la direction de l'établissement puis la DGES II pouvaient légitimement considérer que les lacunes accumulées par le recourant en mathématiques, ajoutées à celles constatées en allemand (3.7) et en italien (3.8), ne lui permettraient vraisemblablement pas de suivre avec succès l'enseignement dispensé en deuxième année, lequel se poursuit sur la base des connaissances supposées acquises en première année.
Quand bien même les critiques émises par le recourant sur la qualité, à ses yeux, gravement déficiente de l'enseignement en mathématiques dispensé en première année et l'absence de mesures correctrices de la direction de l'établissement sur ce point devraient s'avérer justifiées, ce qui échappe à la compétence de la chambre de céans et ne pourrait en toute hypothèse être examiné sur la base du dossier soumis à son appréciation, il ne pourrait en tirer aucun argument. Le but premier des notes, et donc des moyennes prises en considération au titre de normes de promotion, n'est en effet pas d'évaluer la qualité de l'enseignement d'une discipline ni de récompenser ou de sanctionner la motivation ou l'assiduité des élèves, mais bien de vérifier l'acquisition des connaissances faisant l'objet de l'enseignement, condition nécessaire à la poursuite fructueuse d'une scolarité supposant ces connaissances acquises. Dans la mesure où le recourant ne conteste pas en tant que tels les résultats obtenus, notamment en mathématiques, déclarant même vouloir faire appel à un répétiteur afin de rattraper les éventuels retards, il faut considérer que, quelle qu'en soit la raison, il n'avait effectivement pas acquis au terme de sa première année les connaissances nécessaires à une poursuite satisfaisante de sa scolarité en deuxième année.
Dans ces conditions, la direction de l’établissement et la DGES II n’ont pas violé le droit ni abusé du large pouvoir d’appréciation qui est le leur en considérant que le recourant ne remplissait aucune des deux conditions auxquelles est soumise une promotion par dérogation.
La décision sera en conséquence confirmée et le recours rejeté.
4. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de C______ et B______, pris solidairement (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
 LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 17 juillet 2025 par A______, agissant par ses parents, B______ et C______, contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 15 juillet 2025 ;
au fond :
le rejette ;
met à la charge de B______ et C______, pris solidairement, un émolument de CHF 400.- ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à B______ et C______ ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.
Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Patrick CHENAUX, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| la greffière-juriste : 
 
 D. WERFFELI BASTIANELLI 
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 | la présidente siégeant : 
 
 F. PAYOT ZEN-RUFFINEN | 
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le 
 
 
 
 
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 | la greffière : 
 
 
 
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