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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3483/2024

ATA/43/2025 du 14.01.2025 ( PE ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3483/2024-PE ATA/43/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 janvier 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Lassana DIOUM, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1995, alias B______, est originaire d'Égypte.

b. Il est arrivé en Suisse le 10 août 2015 et a déposé le lendemain une demande d'asile au Centre d'enregistrement et de procédure du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM).

c. Par décision du 18 janvier 2018, le SEM a rejeté sa demande et, simultanément, a prononcé son renvoi de Suisse. Un délai au 15 mars 2018 lui a été accordé pour quitter le territoire helvétique.

d. Par arrêt du 8 mai 2020, le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a rejeté le recours formé par A______ contre la décision précitée.

e. Le 12 mai 2020, le SEM lui a imparti un nouveau délai au 31 juillet 2020 pour quitter la Suisse.

f. Le 17 décembre 2020, l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a requis des services de police d'exécuter le renvoi de l'intéressé à destination de l'Égypte.

g. Le 19 mai 2021, A______ a été mis en détention administrative, laquelle a été levée par jugement du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) du 20 juillet 2021.

B. a. Par courrier du 22 avril 2024, A______ a déposé auprès de l'OCPM une demande d'autorisation de séjour en application des art. 30 et 83 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 14 de la loi sur l’asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31).

b. Par décision du 6 juin 2024, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur sa demande.

A______ avait déposé une demande d'asile en Suisse, il n'était pas retourné dans son pays d'origine depuis et il ne pouvait se prévaloir d'un droit à l'octroi d'une autorisation de séjour, de sorte que le principe de l'exclusivité de la procédure d'asile, décrit à l'art. 14 al. 1 LAsi, lui était applicable. Il en découlait que la demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur devait être examinée à l'aune de l'art. 14 al. 2 LAsi, et non à l'aune de l'art. 30 LEI. Or il ne remplissait pas l'une des conditions de l'art. 14 al. 2 LAsi, son lieu de séjour n'ayant pas toujours été connu des autorités. Aussi, il restait soumis à la décision de renvoi rendue par les autorités fédérales et était tenu de quitter la Suisse immédiatement. Enfin, il était rappelé que conformément à l'art. 14 al. 4 LASi, la personne concernée n'avait qualité de partie que lors de la procédure d'approbation du SEM.

c. Le 7 août 2024, A______ a sollicité une nouvelle fois un permis de séjour.

d. Par courrier du 19 septembre 2024, l'OCPM a confirmé son refus d'entrer en matière, le contenu de son courrier du 6 juin 2024 demeurant entièrement valable. Il était pour le surplus rappelé que conformément à l'art. 14 al. 4 LAsi, la personne concernée n'avait qualité de partie que lors de la procédure d'approbation du SEM.

C. a. Par acte du 21 octobre 2024, A______ a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après : la chambre administrative) à l'encontre de cette décision, concluant principalement à son annulation et à la délivrance d'un permis humanitaire au sens de l'art.14 LASi, subsidiairement à la constatation de l'inexigibilité de son renvoi et à son admission provisoire.

Son état de santé était très critique, notamment en raison de traumatismes vécus par le passé. En effet, il avait quitté son pays en raison de persécutions graves, mettant en danger son intégrité physique et sa vie. Par ailleurs, lors de son voyage migratoire, il avait été confronté à la noyade collective d'hommes, femmes et enfants après le naufrage de leur embarcation.

La décision querellée n'entrant pas dans le domaine de la police des étrangers mais se basant sur la LAsi, l'art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10) s'avérait inapplicable. De surcroît, aucune disposition légale spécifique n'attribuant cette compétence au TAPI, la chambre de céans était la juridiction administrative compétente pour connaître du recours.

Selon l'art. 14 al. 4 LAsi, la personne concernée n'avait pas qualité de partie lors de la procédure d'approbation du SEM. Cela étant, selon la jurisprudence, le défaut de voie de recours judiciaire contre la décision de l'administration cantonale refusant d'ouvrir une procédure en autorisation de séjour selon l'art. 14 al. 2 LAsi contrevenait à la garantie constitutionnelle offerte par l'art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101). Aussi, le recours était recevable.

Sur le fond, il était relevé que contrairement à ce qu'avait retenu la décision du 6 juin 2024, le recourant était à Genève aux domiciles communiqués aux autorités depuis son arrivée en Suisse. L'art. 14 al. 2 LAsi avait par ailleurs été violé, le recourant représentant un cas de rigueur grave en raison de son intégration poussée en Suisse, de l'impossibilité d'une réintégration en Égypte et de son état de santé. Par conséquent, les conditions d'un permis de séjour sur la base de l'art. 14 LAsi étaient données. L'OCPM aurait également dû entrer en matière sur la demande de permis de séjour sur la base de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), le recourant résidant en Suisse depuis une longue période.

b. Dans ses observations, l'OCPM a relevé que l'autorité cantonale compétente pour recevoir un recours contre une décision rendue en application de l'art. 14 LAsi serait le TAPI. Quoiqu'il en soit, le recours devait être déclaré irrecevable, le Tribunal fédéral ayant confirmé la décision d'irrecevabilité d'un recours déposé dans le cadre de l'art. 14 al. 2 LAsi et invité le législateur fédéral à réexaminer la teneur de l'art. 14 al. 4 LAsi afin qu'il trouve une solution conforme à la Constitution.

c. Dans sa réplique du 5 décembre 2024, A______ a persisté à considérer que la chambre de céans était compétente. Cela étant, si cette dernière devait considérer que le TAPI était compétent pour statuer sur le recours, celui-ci demeurait valable au sens de l'art. 64 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Par ailleurs, un refus d'entrée en matière constituerait une violation de l'art. 8 CEDH au regard des éléments particulièrement graves et significatifs exposés dans le recours, lesquels démontraient qu'un tel refus reviendrait à priver le recourant de tout respect de son intégrité physique et morale, compte tenu de l'ampleur des répercussions auxquelles il serait confronté en Égypte. Partant, le recours devait être déclaré recevable.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur la recevabilité.

EN DROIT

1.1 La chambre administrative est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative, sous réserve des compétences de la chambre constitutionnelle et de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Elle examine d'office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 LPA).

Sauf exceptions prévues par la loi ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ), elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA (art. 132 al. 2 LOJ).

1.2 Le TAPI connaît des recours dirigés contre les décisions de l'OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. LOJ ; art. 3 al. 1 LaLEtr).

Le recours adressé à une autorité incompétente est transmis d'office à la juridiction administrative compétente et le recourant en est averti. L'acte est réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité (art. 64 al. 2 LPA).

1.3 En l'espèce, la décision querellée émane de l'OCPM, de sorte que c'est le TAPI qui est compétent en première instance pour connaître du présent recours.

Il s'ensuit que la chambre de céans est incompétente pour statuer en l'état. Le recours sera donc déclaré irrecevable, et la cause transmise au TAPI, en application de l'art. 64 al. 2 LPA.

1.4 Vu cette issue, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA), ni alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA) pour la présente instance.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 21 octobre 2024 par A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 19 septembre 2024 ;

transmet la cause au Tribunal administratif de première instance pour raison de compétence, au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Lassana DIOUM, avocate du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au secrétariat d'État aux migrations ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.