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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/392/2022

ATA/1314/2022 du 23.12.2022 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/392/2022-EXPLOI ATA/1314/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 décembre 2022

2ème section

 

dans la cause

 

A______ SA
représentée par Me Mark Muller, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI
représenté par Me David Hofmann, avocat

 



EN FAIT

1) A______ SA (ci-après : A______) est une société anonyme inscrite depuis le ______ 2012 au registre du commerce (ci-après : RC) du canton de Genève. Elle a pour but statutaire : « ______ ».

2) Le 23 février 2021, A______ a déposé auprès du département du développement économique, devenu entretemps le département de l'économie et de l'emploi (ci-après : le département), une demande d'aide financière pour cas de rigueur. Comme secteur d'activité, elle a coché la case « autres entreprises de services ».

Elle a transmis les informations comptables suivantes :

(Mois de clôture de la comptabilité :

Décembre)

Chiffre d'affaires 2018

0.-

Chiffre d'affaires 2019

4'835'080.-

Chiffre d'affaires 2020

0.-

Coûts totaux 2020

935'000.-

Soumise à la TVA

oui

TVA 2020

0.-

Chiffre d'affaires pendant la fermeture (2021)

0.-

Ses coûts fixes pour 2020 se décomposaient comme suit :

Loyer et charges locatives :

229'200.-

Fluides (électricité, eau) :

13'650.-

Abonnements et engagements fixes :

14'800.-

Assurances :

30'100.-

Frais administratifs :

33'000.-

Charges salariales totales :

258'450.-

Frais de véhicules :

60'240.-

Leasing :

87'000.-

Amortissement :

0.-

Charges financières :

3'600.-

3) Le 23 février 2021, A______ a signé avec le département une convention de contribution à fonds perdu (ci-après : la convention), dont il ressortait que l'entreprise s'engageait au respect de la véracité des déclarations faites (ch. 5.1) et des conditions liées à l'octroi de l'aide financière (ch. 5.2).

4) Par courriel du 24 février 2021, le département a demandé à A______ des explications, notamment au sujet de la variation des chiffres d'affaires entre 2018 et 2020.

5) A______ a répondu par courriel le lendemain en donnant des explications générales, à savoir que la société avait peu d'activités avant 2019 mais qu'elle avait pu en 2019 décrocher un gros contrat, qu'elle joignait, avec le gouvernement B______ (Afrique), contrat qui avait été suspendu en 2020 en raison de la situation sanitaire.

6) Par courriel du 25 février 2021, le département a demandé la production des bilans et comptes de résultat 2018 de « la société rachetée » et 2020 de A______.

7) Par décision du 12 avril 2021 fondée sur la loi 12’863 relative aux aides financières extraordinaires de l'État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus, du 29 janvier 2021 (ci-après : aLAFE-2021), le département a accordé à A______ une aide financière de CHF 483'508.-. Il s'agissait d'une aide à fonds perdu correspondant à la différence entre les coûts totaux et le chiffre d'affaires réalisé en 2020.

La décision précisait que le département était fondé à effectuer des contrôles a posteriori. Le cas échéant, cet examen pourrait s'effectuer sur la base de nouveaux documents dont la production serait exigée de l'entreprise. Dans l'hypothèse où il devait s'avérer qu'une aide ait été perçue à tort, elle devrait être restituée.

8) L'aide financière accordée n'a toutefois pas été versée par le département. Le 17 mai 2021, A______ s'est, par courrier, plainte de cette situation.

9) Le 30 juin 2021, le département a demandé par courriel des documents complémentaires à A______ (pour l'année 2019 : les factures d'achat des marchandises pour un montant de CHF 4'728'335.- ; les contrats avec les acheteurs, les factures établies ainsi que les relevés de réception des fonds ; les certificats de salaire ; et le contrat avec le gouvernement B______ ; pour l'année 2020 : les états financiers définitifs 2020 ; les certificats de salaire et les curriculums vitae des employés ; la preuve de la comptabilisation des charges sociales patronales ; en appui des charges administratives et d'exploitation, les factures, abonnements éventuels, contrats de leasing, contrats d'assurance, contrat de bail ; la copie de l'avis de crédit relatif à l'octroi du prêt Covid ; et le procès-verbal de l'annonce du surendettement au conseil d'administration).

10) Le 13 juillet 2021, le département a relancé A______.

11) Après avoir répondu par courriel le 14 juillet 2021 qu'elle n'avait pas pu finaliser la compilation des documents demandés, A______ a répondu au département, par courrier du 8 octobre 2021, qu'elle ne voyait pas de raison de donner suite à cette demande.

En effet, le département lui avait par décision accordé sans réserve une aide de CHF 483'508.-. Elle avait pour sa part respecté la procédure de demande de l'aide. Le département n'avait quant à lui pas exprimé de motifs permettant de mettre en doute l'exactitude et la véracité des informations fournies. En raison du non-versement de l'aide accordée, elle pourrait faire face à de graves difficultés financières et à des poursuites, voire une mise en faillite. Elle demandait donc que l'aide soit versée, ou à défaut qu'une décision de révocation lui soit adressée.

12) Le 11 octobre 2021, le département a renouvelé sa demande de production de documents en accordant à A______ un ultime délai au 22 octobre 2021 pour les fournir.

Cette demande venait du fait qu'il apparaissait, à la lumière de certains chiffres contenus dans la demande et d'explications subséquentes par téléphone, que les données fournies exigeaient une vérification ultérieure à l'aide de documents complémentaires. Un tel contrôle a posteriori était fréquent.

À défaut de production des documents dans le délai imparti, la décision d'aide serait annulée.

13) A______ n'a pas répondu à ce courrier.

14) Par décision du 17 décembre 2021, le département a révoqué sa décision d'octroi d'aide financière du 12 avril 2021.

Comme annoncé dans son courrier du 11 octobre 2021 et conformément à l'obligation générale de renseigner prévue notamment dans l'aLAFE-2021 et son règlement d'application, le refus de donner suite à la demande de renseignements formée près de six mois plus tôt contraignait le département à prononcer la révocation de l'aide accordée.

15) Par acte posté le 1er février 2022, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, concluant à son annulation, à ce que l'État de Genève soit condamné à lui verser la somme de CHF 483'508.-, et à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Les pièces nos 18 à 27 du chargé de pièces annexé au recours étaient les documents requis par le département.

Elle n'avait pas violé l'obligation de renseigner prévue par l'aLAFE-2021. Elle avait joint à sa demande d'aide toutes les pièces justificatives demandées, et avait fourni le 25 février 2021 les explications demandées plus tôt le même jour par courriel du département. Il en allait de même des ch. 5.1 et 6 de la convention, qui renvoyait à l'obligation générale de renseigner prévue par le règlement, laquelle ne concernait que l'instruction de la demande – à laquelle elle avait pleinement collaboré.

N'étaient au surplus pas révocables, hors cas de révision, les décisions prises après une instruction approfondie, ce qui était le cas en l'espèce, dès lors notamment que le département avait demandé des renseignements complémentaires le 25 février 2021.

La décision attaquée constituait une sanction et devait ainsi être prévue par une base légale, ce qui n'était pas le cas. Le département aurait dû exécuter sa décision et verser l'aide, puis, le cas échéant, exiger sa restitution en cas d'irrégularités ultérieures.

16) Le 17 mars 2022, le département a conclu au rejet du recours.

A______ perdait de vue les questions que lui avait posées le département par courriel le 30 juin 2021 et par écrit le 11 octobre 2021, et que ses bilans et ses comptes de résultat 2018/2019 et 2020 étaient très lacunaires. Le département pouvait ainsi, par le biais de l'obligation générale de renseigner prévue par l'art. 15 de la loi 12’863, demander des renseignements complémentaires. Ladite obligation ne s'éteignait pas avec l'octroi formel de l'aide, le dispositif « cas de rigueur » voulu par l'autorité politique devant permettre d'octroyer des aides très rapidement, quitte à procéder à des vérifications ultérieures. L'art. 23 du règlement d'application de la loi urgente 12’938, du 5 mai 2021 (RAFE-2021) prévoyait du reste un suivi de l'aide pendant trois ans.

En soutenant ne pas avoir violé la convention, A______ contrevenait à la bonne foi. Les données qu'elle avait fournies, notamment la variation spectaculaire du chiffre d'affaires entre 2018 et 2020, et surtout la communication d'un chiffre de CHF 87'111.- à titre de charges de personnel en 2019, alors que seuls CHF 17'903.20 avaient été annoncés à la caisse de compensation, montraient au contraire qu'elle avait omis des informations ou faits importants.

La remise des documents complémentaires demandés était le préalable indispensable à la vérification des conditions de l'aide. Il y avait une base légale formelle à la révocation de l'aide, à savoir l'art. 16 de l'aLAFE-2021, devenu l'art. 17 de la loi 12’938 relative aux aides financières extraordinaires de l'État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus, pour l'année 2021, adoptée le 30 avril 2021 (ci-après : LAFE-2021). Il aurait été contraire à une gestion économe et efficace des finances publiques de verser de l'argent alors que l'on savait que l'on allait en demander le remboursement. Enfin, les documents fournis avec le recours n'étaient toujours pas complets.

17) Le 23 mars 2022, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 22 avril 2022, prolongé par la suite au 6 mai 2022, pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

18) Le 6 mai 2022, A______ a persisté dans ses conclusions. Elle produisait encore des pièces, ainsi qu'elle l'avait annoncé dans son acte de recours.

19) Le département ne s'est quant à lui pas manifesté.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieuse la révocation de l'aide financière accordée par l'intimé le 12 avril 2021, mais non versée par la suite.

a. Le 25 septembre 2020, l’Assemblée fédérale a adopté la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de Covid-19 (loi Covid-19 - RS 818.102).

Le 25 novembre 2020, le Conseil fédéral a adopté l’ordonnance concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l’épidémie de Covid-19 (ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 ; ci-après : ordonnance Covid-19 - RS 951.262), modifiée à plusieurs reprises, qui prévoyait que la Confédération participait aux coûts et aux pertes que les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises occasionnaient à un canton (art. 1 al. 1). L’entreprise devait remplir un certain nombre d’exigences pour bénéficier du soutien financier (art. 2 et 3 ordonnance Covid-19).

b. Au plan cantonal genevois, le Grand Conseil a adopté, le 29 janvier 2021, l'aLAFE-2021, complétée par son règlement d’application du 3 février 2021 (ci-après : aRAFE-2021), dont le but était notamment de limiter les conséquences économiques de la lutte contre l’épidémie pour les entreprises sises dans le canton, conformément à la loi et à l’ordonnance Covid-19 (art. 1 al. 1 aLAFE 2021).

L'aLAFE-2021 loi a été abrogée par la LAFE-2021. Le 5 mai 2021, le Conseil d’État a adopté le règlement d'application de cette dernière (ci-après : RAFE-2021).

c. Aux termes de l'art. 14 al. 1 aLAFE-2021, l’aide financière est accordée sur demande du bénéficiaire potentiel ou de son mandataire ; la demande est adressée au département sur la base d’un formulaire spécifique, accompagné notamment de toutes les pièces utiles attestant des coûts fixes du bénéficiaire. Selon l'art. 15 aLAFE-2021, intitulé « obligation de renseigner », le bénéficiaire de l’aide et/ou son mandataire collaborent à l’instruction du dossier et renseignent régulièrement le département afin de lui présenter une image fidèle et transparente de l'évolution des charges du bénéficiaire (al. 1) ; le demandeur autorise en tout temps le contrôle du respect des conventions collectives ou usages applicables ainsi que le paiement effectif des charges sociales (al. 2) ; le département peut en tout temps effectuer des contrôles dans les locaux du bénéficiaire et y consulter les livres, ou tout document utile, et être renseigné sur l'état de comptes bancaires ou postaux (al. 3).

Selon l'art. 16 al. 1 aLAFE-2021, la participation financière indûment perçue doit être restituée sur décision du département.

d. Selon l'art. 17 aRAFE-2021, l'entreprise demanderesse et le département désignent une convention qui permet notamment au département d'obtenir des données sur l'entreprise nécessaires à l'étude des dossiers et à la gestion des aides auprès d'autres services fédéraux, cantonaux ou communaux. L'entreprise demanderesse collabore à l’instruction du dossier et renseigne régulièrement le département, afin de lui présenter une image fidèle et transparente de la marche de ses affaires (art. 20 aRAFE-2021). Les entreprises ayant bénéficié de l'octroi d'une aide s'engagent à faire parvenir au département, sur sa demande, durant les trois années qui suivent le versement de l'aide, la documentation permettant de vérifier que les conditions d'octroi ont été respectées (art. 23 aRAFE-2021).

e. Selon l’art. 15 al. 1 et 2 LAFE-2021, l’aide financière est accordée sur demande du bénéficiaire potentiel, et adressée au département sur la base d’un formulaire spécifique, accompagné notamment de toutes les pièces utiles nécessaires au traitement de la demande. La liste des pièces requises ainsi que les modalités de dépôt des demandes figurent dans le règlement d’application de la présente loi (at. 13 al. 3 LAFE-2021).

Selon l'art. 16 LAFE-2021, intitulé « obligation de renseigner », le bénéficiaire de l’aide et/ou son mandataire collaborent à l’instruction du dossier et renseignent régulièrement le département afin de lui présenter une image fidèle et transparente de l'évolution des charges du bénéficiaire (al. 1) ; le demandeur autorise en tout temps le contrôle du respect des conventions collectives ou usages applicables ainsi que le paiement effectif des charges sociales (al. 2) ; le département peut en tout temps effectuer des contrôles dans les locaux du bénéficiaire et y consulter les livres, ou tout document utile, et être renseigné sur l'état de comptes bancaires ou postaux (al. 3).

La participation financière indûment perçue doit être restituée sur décision du département (art. 17 al. 1 LAFE-2021).

f. Selon l’art. 15 al. 1 RAFE-2021, l’indemnité pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021 est déterminée sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise au 30 juin 2021 et correspond à la différence entre les coûts totaux, hors impôts et taxes, et le chiffre d’affaires de l'entreprise sur cette même période (art. 15 al. 2 RAFE-2021). Pour toute demande déposée jusqu’au 30 juin 2021 pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021, l'indemnité équivaut à 50 % du montant obtenu en application de l’al. 1, calculé sur douze mois (taux forfaitaire) (art. 15 al. 3 RAFE-2021). L’indemnité octroyée en application de l’al. 3 est versée à titre d’acompte, selon les modalités prévues par convention conclue en vertu de l’art. 22.

Le montant définitif est déterminé a posteriori sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise bénéficiaire au 30 juin 2021, selon les modalités prévues à l’al. 2 (art. 15 al. 4 RAFE-2021). L'entreprise bénéficiaire d’une indemnité octroyée à titre d’acompte au sens de l’al. 3 est tenue de remettre au département les états financiers visés à l’al. 4 au plus tard le 31 octobre 2021 (art. 15 al. 5 RAFE-2021).

L'entreprise demanderesse et le département signent une convention qui permet au département de se procurer des données sur l’entreprise concernée auprès d’autres offices de la Confédération et des cantons ou de communiquer à ces offices des données sur l’entreprise, dans la mesure où celles-ci sont nécessaires à l’examen des demandes, à la gestion des aides et à la lutte contre les abus (art. 22 RAFE-2021).

L'entreprise demanderesse collabore à l’instruction du dossier et renseigne régulièrement le département, afin de lui présenter une image fidèle et transparente de la marche de ses affaires (art. 25 RAFE-2021). En cas d'octroi d'une aide financière et versement d’un acompte, une décision rappelant les conditions et modalités d'octroi et de versement ainsi que les obligations du bénéficiaire est adressée aux entreprises (art. 27 al. 1 RAFE-2021). Les entreprises ayant bénéficié de l'octroi d'une aide s'engagent à faire parvenir au département, sur sa demande, durant l’exercice au cours duquel le versement de l’aide a été effectué et durant les trois années qui suivent, la documentation permettant de vérifier que les conditions d'octroi ont été respectées (art. 28 RAFE-2021). Les entreprises doivent porter sans délai à la connaissance du département tout événement qui rendrait exigible le remboursement de l'aide (art. 29 al. 1 RAFE-2021). À défaut de réception par le département des états financiers au 30 juin 2021, les acomptes versés au sens des art. 12, al. 2 et 3, et 15, al. 2 et 3, doivent être restitués.

3) De manière générale, une révocation est possible aux conditions prévues dans la loi (ATF 134 II 1 consid. 4.1) ou, en l’absence de base légale, également lorsqu'un intérêt public particulièrement important l'impose (ATF 139 II 185 consid. 10.2.3 ; 137 I 69 consid. 2.3 ; 135 V 215 consid. 5.2 ; 127 II 306 consid. 7a). La révocation d’une décision pour inexécution d’une obligation ne requiert pas de base légale, si cette obligation est l’une des conditions objectives que la loi pose à l’octroi d’une prestation : il s’agit là de « rétablir » l’ordre légal (Pierre MOOR/ Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd. 2011, p. 383s.).

4) En l'espèce, l'aide financière accordée n'a pas été versée, si bien que la révocation contestée porte sur la révocation de la décision d'octroi et non sur une demande de remboursement. On ne saurait toutefois en déduire, comme le fait la recourante, que la révocation n'est pas prévue par la loi, dès lors que si la restitution des aides indûment perçues est couverte par la loi (soit l'art. 16 aLAFE-2021 puis l'art. 17 LAFE-2021), il en va – a majore ad minus – de même pour la révocation d'une aide accordée mais non encore versée. La recourante perd de surcroît de vue que la révocation d’une décision pour inexécution d’une obligation ne requiert pas de base légale.

Or, en l'occurrence, la recourante n'a pas respecté son obligation de renseigner au sens des règlements applicables (art. 20 aRAFE-2021 et 25 RAFE-2021) et de la convention qu'elle a signée (ch. 5 et 6 de la convention), étant rappelé que l'obligation de renseigner ne s'arrêtait pas au moment de la décision d'octroi, mais perdurait pendant trois ans (art. 23 aRAFE-2021 et art. 28 RAFE-2021), le nouveau système – entré en vigueur quelques jours après la décision d'octroi de l'aide financière extraordinaire ici en cause – prévoyant même que le montant définitif de l'aide était déterminé a posteriori (art. 15 al. 4 RAFE-2021), dans la mesure où le système d’aide financière mis en place tant par la Confédération que le canton visait à apporter une aide provisoire immédiate aux entreprises particulièrement touchées par les restrictions induites pour leur activité en raison de la pandémie.

Bien que l'intimé l'ait relancée par courriel puis par courrier en octobre 2021, la recourante a refusé de s'exécuter en indiquant qu'elle ne voyait pas de raison de donner suite à cette demande. S'étant vu donner un ultime délai pour s'exécuter, elle n'y a pas donné suite. La recourante n'a donc pas respecté son obligation de renseigner pourtant prévue par la loi et le règlement, si bien qu'une révocation de la décision d'octroi de l'aide était possible, en application a majore ad minus de l'art. 17 LAFE-2021, et même en l'absence de toute base légale.

Il résulte des considérations qui précèdent que le département n’a pas violé la loi ni n’a commis d’excès ou d’abus de son pouvoir d’appréciation en révoquant sa décision du 12 avril 2021, faute pour la recourante d’avoir remis la documentation demandée dans le délai imparti. Ladite révocation, en tant qu'elle était justifiée au moment de son prononcé, ne saurait par ailleurs être annulée du fait que la recourante aurait remis, dans la présente procédure de recours, les documents demandés.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2022 par A______ SA contre la décision du département de l'économie et de l'emploi du 17 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ SA un émolument de CHF 500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mark Muller, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me David Hofmann, avocat du département de l'économie et de l'emploi.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Ravier

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :