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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2171/2003

ATA/44/2004 du 13.01.2004 ( CE ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : FONCTIONNAIRE; MESURE DISCIPLINAIRE; ENQUETE ADMINISTRATIVE; CE
Normes : LPAC.27 al.2
Résumé : Aucune voie de recours n'est ouverte au tribunal administratif à l'encontre de la procédure d'enquête administrative (rappel de jurisprudence).
En droit

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 13 janvier 2004

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur X__________

représenté par Me Grégoire Rey, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

 

CONSEIL D'ETAT

 



EN FAIT

 

 

1. Au service de l'Etat de Genève depuis le 1er juillet 1976, Monsieur X__________ a exercé diverses fonctions administratives au sein de la prison de Y__________ (ci-après : la prison), notamment celle d'administrateur jusqu'au 30 janvier 2001. Dès le 1er février 2001, il a été transféré au centre des technologies de l'information (CTI) à la chancellerie d'Etat.

 

2. Par arrêt du 7 mars 2001, le Conseil d'Etat a prononcé l'ouverture d'une enquête administrative à l'encontre de M. X__________, en relation avec un certain nombre d'irrégularités découvertes dans la tenue de la comptabilité de la prison, alors que l'intéressé en était l'administrateur.

 

Cette décision n'entraînait pas la suspension provisoire de M. X__________.

 

3. Le rapport d'enquête administrative a été établi le 22 avril 2003. Au cours de cette enquête, M. X__________ a été entendu à cinq reprises et 16 témoins ont été entendus.

 

L'enquêteur a reconnu que seules quelques fautes constituaient une transgression objective des devoirs imposés à M. X__________ (frais de restaurant et achat de "Cartes privilèges club" auprès de l'Hôtel du Rhône), le penchant marqué de l'intéressé pour des réunions gastronomiques étant critiquable, dans la mesure où il y avait inutilement consacré le temps et l'argent des contribuables. En revanche, les investigations de l'enquête administrative aboutissaient à la même constatation déjà faite par le juge d'instruction : l'ancien administrateur de la prison n'avait pas agi par dessein de lucre. Il avait cru pouvoir, comme son directeur et ceux qui avaient précédé ce dernier dans cette fonction, s'affranchir de certaines contraintes normatives pour faciliter l'obtention de matériels ou de prestations qu'il croyait de bonne foi utiles à l'accomplissement de sa mission.

 

L'enquêteur a encore relevé que les faits incriminés ayant été commis entre 1998 et 2000, le facteur d'ancienneté devait être pris en compte pour l'appréciation du cas.

 

Et l'enquêteur de conclure :

 

"Dans ces conditions et tout bien considéré, compte tenu du peu de gravité des fautes commises, du contexte particulier qui a présidé au déclenchement successif des deux enquêtes parallèles et des désagréments collatéraux qu'elles ont provoqués, il ne serait pas scandaleux que le Conseil d'Etat retînt, en opportunité et par souci de proportionnalité, que ce fonctionnaire a déjà payé ses errements".

 

Cette réflexion laissait intacte la faculté de la direction départementale des finances du département de justice et police et sécurité de proposer au Conseil d'Etat l'application d'une sanction, si elle devait estimer que les fautes de l'intéressé n'étaient pas pardonnables.

 

4. M. X__________ a fait valoir ses observations par écrit le 27 mai 2003. Il a conclu à être clairement et entièrement lavé de toute accusation et qu'il soit renoncé à toute sanction administrative à son encontre, faute de toute prévention d'infraction et de toute irrégularité susceptible de sanction.

 

5. Par arrêté du 29 octobre 2003, le Conseil d'Etat a prononcé la clôture de l'enquête administrative ouverte à l'encontre de M. X__________ et transmis le dossier à la chancellerie d'Etat afin qu'une sanction disciplinaire soit prononcée à l'encontre de l'intéressé dans le sens des considérants.

 

6. M. X__________ a saisi le Tribunal administratif d'un recours par acte du 10 novembre 2003 contre l'arrêté précité.

 

Il a conclu à son annulation et à ce qu'aucune sanction ne soit prononcée contre lui, avec suite de frais et dépens.

 

L'arrêté querellé était une décision finale, car un tel jugement de renvoi ne laissait aucune marge de manoeuvre à l'administration qui avait pour consigne claire et obligatoire de prononcer une sanction à son encontre. Dût-on considérer qu'il s'agissait d'une décision incidente, le recours n'en serait pas moins recevable. En effet, le caractère contraignant de l'arrêté entrepris était de nature à lui causer un préjudice irréparable puisqu'il se verrait sanctionner de manière certaine.

 

7. Dans ses observations du 15 décembre 2003, le Conseil d'Etat a conclu principalement à l'irrecevabilité du recours. Référence était faite à la jurisprudence du Tribunal administratif ayant admis qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'ouvrait la voie du recours en ce qui concernait la procédure d'enquête administrative au sens de l'article 27 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). Sur le fond, le recours devait être rejeté, le Tribunal administratif n'ayant pas la compétence d'apprécier si la décision de clore l'enquête administrative et de renvoyer le dossier à la chancellerie d'Etat pour le prononcé d'une sanction était opportune. Enfin, la procédure disciplinaire et la poursuite pénale étaient indépendantes l'une de l'autre, raison pour laquelle l'appréciation des faits par l'une des autorités ne liait pas l'autre.

 

 

EN DROIT

 

 

1. Depuis le 1er janvier 2001, le Tribunal administratif dispose d'une attribution générale de compétence, dont le but principal est de combler les lacunes de la protection juridique et d'aménager une voie de recours conformément aux exigences des articles 98a de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ - E 2 0) et 6 § 1 CEDH (cf. ATF 127 I 115 consid. 3b). Selon l'article 56A de la loi genevoise du 1er janvier 1942 sur l'organisation judiciaire genevoise (ci-après : LOJ/GE), le Tribunal administratif est ainsi l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative. L'article 56B alinéa 4 lettre a LOJ/GE précise cependant que le recours au Tribunal administratif n'est recevable à l'encontre d'une décision concernant le statut ou les rapports de service des agents de l'Etat que dans la mesure où une disposition légale (ou d'une autre nature) le prévoit expressément.

 

2. En sa qualité de fonctionnaire de l'Etat de Genève, le recourant est soumis à la LPAC.

 

3. Selon l'article 27 alinéa 2 LPAC, le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut en tout temps ordonner l'ouverture d'une enquête administrative qu'il confie à un ou plusieurs magistrats ou fonctionnaires, en fonction ou retraités. Il doit le faire dans les hypothèses visées aux articles 16 alinéa 1 lettre c (retour au statut d'employé en période probatoire), 21 alinéa 2 lettre b et 22 (résiliation pour un motif objectivement fondé).

 

Aucune voie de recours n'est ouverte au Tribunal administratif à l'encontre de la procédure d'enquête administrative (ATA S. du 19 février 2002; ATA M. du 9 janvier 2001, confirmé par ATF du 24 octobre 2001).

 

4. Ainsi, au regard du droit cantonal, le présent recours est irrecevable.

 

5. Au surplus, et dans l'arrêt précité, le Tribunal administratif a jugé qu'il n'était pas compétent pour revoir l'opportunité de l'ouverture d'une enquête administrative. Les mêmes considérations président à la clôture d'une même enquête. Cela étant, les droits du recourant ne sont à l'évidence pas lésés. Il pourra en effet utiliser les voies de recours à sa disposition si une éventuelle sanction administrative devait être prononcée à son encontre.

 

6. Le recours sera donc déclaré irrecevable.

 

Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

 

déclare irrecevable le recours interjeté le 10 novembre 2003 par Monsieur X__________ contre l'arrêté du Conseil d'Etat du 29 octobre 2003;

 

met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-;

 

communique le présent arrêt à Me Grégoire Rey, avocat du recourant, ainsi qu'au Conseil d'Etat.

 


Siégeants : M. Thélin, président, MM. Paychère, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le président :

 

C. Del Gaudio-Siegrist Ph. Thélin

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci