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Décisions | Assistance juridique

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AC/347/2014

DAAJ/115/2024 du 01.10.2024 sur AJC/4098/2024 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/347/2014 DAAJ/115/2024

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 1ER OCTOBRE 2024

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée ______ [GE],

 

contre la décision du 24 juillet 2024 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 

 


EN FAIT

A.           a. Par décision du 28 février 2014, la vice-présidence du Tribunal civil a octroyé l'assistance juridique à A______ (ci-après : la recourante) pour une procédure en paiement (indemnité pour tort moral : 13'550 fr., intérêt en sus) et délivrance d'un certificat de travail qu'elle avait formée le 24 février 2014 par devant le Tribunal des Prud'hommes (ci-après : le Tribunal) à l'encontre de B______ SA (ci-après : la société). Aucune participation mensuelle ne lui a été demandée. Cet octroi a été limité à la première instance et Me C______, avocate, a été désignée pour défendre les intérêts de la recourante (C/1______/2013).

Par décision du 23 février 2015, la recourante a obtenu une extension de l'assistance juridique pour défendre au recours formé par la société.

b. A la suite de la faillite de la société le 5 mars 2015, de la clôture de celle-ci le 9 septembre 2015, puis de sa radiation le ______ 2015, la Chambre des prud'hommes de la Cour a constaté, par arrêt CAPH/158/2016 du 6 septembre 2016, que la procédure était devenue sans objet et a radié la cause du rôle.

c. A l'issue de cette procédure, le montant de 7'938 fr. avait été avancé par l'Etat au titre de l'indemnisation du conseil de la recourante.

d. Par courrier du 28 février 2017, le Greffe de l'assistance juridique (ci-après : le GAJ) a informé la recourante de ce qu'il avait avancé le montant sus évoqué dans le cadre de la procédure prudhommale et qu'il renonçait à lui en demander le remboursement, à la suite d'un réexamen de sa situation financière, en précisant que l'Etat de Genève disposait d'un délai de dix ans pour recouvrer sa créance.

B.            a. Par courrier recommandé du 20 juin 2024 et relance du 8 juillet 2024, le GAJ a interpelé à nouveau la recourante sur sa situation financière.

b. Par pli daté du 17 juillet 2024, la recourante a fourni les informations et documents sollicités.

C.           Par décision du 24 juillet 2024, notifiée le 27 juillet 2024, la vice-présidence du Tribunal civil a condamné la recourante à rembourser la somme de 7'938 fr. à l'État de Genève.

Il a été retenu que sa situation financière s'était améliorée, de sorte que le remboursement de l'intégralité des prestations de l'État pouvait être exigé d'elle, sans porter atteinte à ses besoins fondamentaux.

Les revenus du ménage de la recourante s'élevaient à 9'843 fr., selon ses déclarations (son salaire : 1'732 fr., celui de son époux : 7'800 fr. et allocations familiales : 311 fr.) et les charges du ménage totalisaient 8'829 fr. (loyer : 3'500 fr., primes LAMal alléguées pour la famille : 854 fr., abonnement TPG allégué : 200 fr., bases mensuelles d'entretien du couple et pour leur fils âgé de 2,5 ans, augmentées de 25% : 2'625 fr., frais de crèche à bien plaire : 1'800 fr. dès août 2024, saisie de l'Office des poursuites alléguée : 300 fr., sans les autres dettes ou actes de défaut de biens allégués, ni les impôts, déjà perçus à la source), soit un solde mensuel disponible du ménage de 1'014 fr., lequel lui permettait de rembourser la somme de 7'938 fr., au besoin en mensualités. Il était précisé qu'en affectant l'entier disponible au remboursement de la dette, celle-ci serait éteinte en moins de huit mois.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 6 août 2024 à la Présidence de la Chambre administrative de la Cour de justice, laquelle l'a transmise à la Présidence de la Cour de justice.

La recourante, qui conclut implicitement à l'annulation de la décision de la vice-présidence du Tribunal civil du 24 juillet 2024, sollicite une "réévaluation" de sa situation financière afin de considérer ses obligations familiales, académique et sa capacité de remboursement, sans la prise en compte des revenus de son époux, conformément aux principes juridiques applicables en matière de saisie.

La recourante a produit une pièce, laquelle a déjà été soumise à l'Autorité de première instance.

b. Dans ses observations du 12 août 2024, la vice-présidence du Tribunal civil a persisté dans sa décision du 24 juillet 2024, au besoin par substitution de motifs.

Elle a rappelé avoir admis à bien plaire l'abonnement des TPG en 200 fr., au lieu du maximum de 140 fr. admis en principe pour un couple, une saisie de l'Office des poursuites en 300 fr. et les frais de crèches estimés à 1'800 fr. par la recourante, en raison de la reprise de ses études depuis la rentrée 2024.

Le salaire mensuel [net] de la recourante de 1'732 fr. correspondait à 78h mensuelles, principalement déployées durant le week-end, selon son contrat de travail et avaient été réalisées durant son premier mois de travail, du 21 au 30 juin 2024, quand bien même celui-ci prévoyait une base de 25h hebdomadaires, soit 108h par mois, ce qui devait générer un revenu supérieur à celui retenu en 1'732 fr.

EN DROIT

1.             1.1. Les décisions de remboursement prises par la vice-présidence du Tribunal civil, rendues en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la présidence de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC, 11 et 19 al. 5 RAJ), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515, p. 453).

2. La recourante ne conteste pas les montants retenus par l'Autorité de première instance, mais la prise en compte des revenus de son époux, lequel n'est pas codébiteur de sa dette envers l'Assistance juridique.

2.1. D'après l'art. 123 al. 1 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ, une partie est tenue de rembourser l'assistance juridique dès qu'elle est en mesure de le faire.

L'art. 19 al. 3 RAJ précise que si la situation de la personne bénéficiaire s'est améliorée ou si elle est de toute manière en mesure d'effectuer un paiement, le paiement de l'intégralité des prestations de l'État peut être exigé.

La créance du canton se prescrit par dix ans à compter de la fin du procès (art. 123 al. 2 CPC et 19 al. 4 RAJ).

2.2 Une personne est indigente lorsqu'elle n'est pas en mesure d'assumer les frais de la procédure sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille (ATF 144 III 531 précité consid. 4.1; 141 III 369 consid. 4.1). Pour déterminer l'indigence, il convient de prendre en considération l'ensemble de la situation financière du justiciable, celui-ci devant indiquer de manière complète et établir autant que faire se peut ses revenus, sa situation de fortune et ses charges (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.1; 5A_287/2023 du 5 juillet 2023 consid. 3.1; 5A_984/2022 du 27 mars 2023 consid. 3.1).

L'obligation d'un époux d'assister l'autre en cas de litige par le versement d'une avance de frais de justice est l'émanation du devoir d'entretien entre époux selon l'art. 163 CC et du devoir d'assistance entre époux selon l'art. 159 al. 3 CC (ATF 148 III 21 consid. 3.1;
146 III 203 consid. 6.3; ATF 142 III 36 consid. 2.3). Ces deux obligations existent indépendamment du régime matrimonial, ce qui signifie qu'une avance de frais de justice est due indépendamment de la masse matrimoniale à laquelle les revenus et la fortune de l'époux débiteur doivent être attribués (arrêt du Tribunal fédéral 5A_251/2024 du 10 juillet 2024 consid. 2.4.1 et les références citées). Il n'est pas acceptable de faire supporter à la collectivité les frais de justice d'une personne dans le besoin dont le conjoint est en mesure de lui faire au moins l'avance des frais de justice (ATF 138 III 672 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_251/2024 du 10 juillet 2024 consid. 2.4.1 et la référence citée; 5A_456/2020 du 7 octobre 2020 consid. 5.2).

Cette obligation d'entretien impose d'effectuer un calcul global prenant en compte les revenus nets des époux, le montant mensuel de base qui leur est applicable, ainsi que l'ensemble des charges de leur ménage (arrêts du Tribunal fédéral 8C_65/2021 du 17 juin 2021 consid. 7; 8C_1008/2012 du 24 mai 2013 consid. 3.3.3; 9C_859/2008 du 15 décembre 2008 consid. 3.4.1).

Le minimum vital à considérer représente l'entier du solde entre les revenus nets des époux et les charges admissibles de leur ménage (DAAJ/1/2022 du 11 janvier 2022 consid. 2.2; DAAJ/18/2020 du 4 mars 2020 consid. 3.2; DAAJ/66/2018 du 7 août 2018 consid. 3.2; DAAJ/50/2018 du 16 juillet 2018 consid. 3.2; contra : DAAJ/97/2015 du 20 novembre 2015 consid. 2.2 où seuls les revenus et charges ont été considérés dans leur ensemble, mais où seul le revenu du justiciable a été pris en compte pour couvrir ses frais de justice et d'avocat).

2.3. En l'espèce, la recourante est mariée, de sorte que c'est avec raison que la vice-présidence du Tribunal civil a calculé son minimum vital en prenant l'ensemble des revenus du couple, ainsi que leurs charges mensuelles admissibles, selon les chiffres communiqués par la recourante et non contestés par celle-ci. Ainsi, l'Autorité de première instance a considéré que la recourante n'était pas indigente, puisque son ménage disposait d'un solde mensuel de 1'014 fr., lequel lui permettait de rembourser le montant de 7'938 fr. avancé par l'assistance juridique, cela en moins de huit mensualités.

Bien que son époux ne soit pas codébiteur de la dette d'assistance juridique, ses revenus mensuels participent néanmoins à l'extinction de celle de son épouse, le Tribunal fédéral ayant légitimé cette conséquence en vertu de son devoir d'entretien et d'assistance envers son épouse. Il a également considéré que l'octroi de l'assistance juridique, soit la mise en œuvre de la participation financière de la collectivité publique, était subsidiaire aux obligations d'entretien entre époux. Il s'ensuit qu'il incombe également à l'époux de participer à l'extinction de la dette de la recourante, puisque leur disponible mensuel le permet.

Par conséquent, l'argumentation de la recourante selon laquelle le calcul de son minimum vital aurait dû s'opérer sans tenir compte des revenus de son époux s'écarte de la jurisprudence fédérale applicable aux couples mariés. Il s'ensuit que le recours, infondé, sera dès lors rejeté.

3.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 6 août 2024 par A______ contre la décision rendue le 24 juillet 2024 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/347/2014.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ (art. 327 al. 5 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.