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Décisions | Chambre civile

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C/27999/2023

ACJC/1364/2025 du 07.10.2025 sur JTPI/10872/2025 ( OO )

Normes : CPC.315.al4.leta
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27999/2023 ACJC/1364/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 7 OCTOBRE 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 9ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 4 septembre 2025, représenté par Me Mirolub VOUTOV, avocat, de Candolle Avocats, place des Eaux-Vives 3, 1207 Genève,

et

Madame B______, domiciliée ______, Italie, intimée, représentée par
Me Samantha ROTH, avocate, Lawffice SA, rue du Général-Dufour 22, case
postale 315, 1211 Genève 4.

 


Attendu, EN FAIT, que par jugement JTPI/15067/2020 du 3 décembre 2020, le Tribunal de première instance, statuant d'accord entre les parties, a dissous par le divorce le mariage contracté par B______ et A______ le ______ 2015 et a notamment maintenu l'autorité parentale conjointe des parties sur leur fils C______, né le ______ 2015, attribué la garde exclusive de l'enfant à sa mère jusqu'au 30 juin 2021, statué sur les modalités du droit de visite en faveur du père (ch. 4A du dispositif), instauré une garde alternée sur l'enfant à compter du 1er juillet 2021 conformément à l'accord des parties (ch. 4B et 4C), libéré A______ de toute contribution à l'entretien de l'enfant dès l'instauration de la garde partagée (ch. 9) et fixé l'entretien convenable de C______ à 487 fr. 35 par mois (ch. 11);

Que le 21 décembre 2023, B______ a formé une demande en modification du jugement de divorce, concluant notamment à l'attribution de la garde exclusive de C______ et à être autorisée à déménager avec le mineur à D______ [Italie] (ville où elle et A______ sont nés) dès le 1er juillet 2024;

Qu'à l'appui de sa demande, elle a exposé avoir perdu son emploi avec effet au 1er septembre 2022 et n'être pas parvenue à en trouver un autre, en dépit de ses nombreuses recherches; que depuis lors, elle s'était rendue plus souvent en Italie, trouvant du soutien moral et financier auprès de sa famille; que sa mère lui avait offert un poste de travail pour un salaire mensuel de 1'000 euros; qu'elle s'était inscrite à la Faculté de droit de l'université de D______, dont elle suivait les cours à distance, en vue de passer le brevet d'avocat dans deux ans; qu'il était dans l'intérêt de C______ de déménager avec elle à D______; qu'il pourrait y poursuivre sa scolarité et fréquenter de bons clubs de football, sport qui était sa passion; que sa famille serait en outre très présente pour lui; que le mineur avait exprimé son souhait de partir vivre en Italie;

Que A______ a conclu à ce qu'il soit fait interdiction à B______ de déménager avec C______, au maintien du domicile de celui-ci à Genève et au maintien de la garde alternée, subsidiairement à l'octroi de la garde du mineur en sa faveur;

Que par ordonnance du 10 octobre 2024, le Tribunal, statuant sur mesures provisionnelles, a suspendu le droit de garde de A______ sur son fils et interdit tout contact entre eux;

Que par arrêt du 16 juin 2025, la Cour de justice, statuant sur appel, a annulé le chiffre 1 du dispositif de cette ordonnance en tant qu'il avait interdit tout contact entre le père et l'enfant et, statuant à nouveau sur ce point, réservé à A______ un droit de visite sur son fils devant s'exercer par visioconférence, deux fois par mois, en présence du psychologue de l'enfant, puis, aussitôt que le curateur l'estimerait possible, hors la présence du psychologue; qu'une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles a été instaurée;

Que dans son rapport du 23 décembre 2024, le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (SEASP) a préavisé l'attribution de la garde de l'enfant C______ à sa mère; celle-ci pouvait transférer le domicile légal du mineur en Italie et le père devait se voir réserver, dès que la situation le permettrait, un droit de visite;

Que par jugement JTPI/10872/2025 du 4 septembre 2025 (dont est appel), le Tribunal a modifié le chiffre 4 du dispositif du jugement du 3 décembre 2020 et a attribué à B______ la garde du mineur C______, réservé à A______ un droit aux relations personnelles avec l'enfant dont il a fixé les modalités, dès que E______ [centre de consultations familiales] et le Centre de thérapie familiale F______ à D______ l'estimeraient possible; qu'il a par ailleurs modifié les chiffres 9 et 11 du dispositif du jugement du 3 décembre 2020 et cela fait, a notamment autorisé B______ à déplacer la résidence habituelle du mineur C______ à D______; que le Tribunal a prononcé le caractère exécutoire anticipé de la décision (chiffre 15 du dispositif);

Que le Tribunal a retenu, en substance, que les parents n'exerçaient plus une garde partagée depuis l'été 2024; que dans ses dernières conclusions, A______ avait conclu à l'attribution de la garde de l'enfant à sa mère; que le mineur avait clairement exprimé son souhait de vivre auprès de sa mère, dont aucun élément ne permettait de douter de ses capacités parentales; que le mineur avait également manifesté le désir de vivre à D______; que par conséquent, il était dans l'intérêt de l'enfant de déménager avec sa mère à D______, dont le projet avait été préparé de manière réfléchie et complète;

Que la rentrée scolaire à D______ étant fixée au 15 septembre 2025, il se justifiait de prononcer le caractère exécutoire anticipé du jugement, "en application de l'art. 336 al. 1 let. b CPC";

Que A______ a formé appel contre ce jugement devant la Cour de justice le 10 septembre 2025 à 15h50, veille du Jeûne genevois, concluant à l'annulation des chiffres 1, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 15 et 18 de son dispositif et cela fait, à ce qu'il soit fait interdiction à B______ de quitter la Suisse avec C______, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, à ce que l'inscription du mineur aux fichiers RIPOL/SIS soit ordonnée, à ce qu'il soit fait interdiction à B______ de déménager à D______, à ce qu'il lui soit ordonné de maintenir le domicile légal de l'enfant à Genève et à ce qu'un droit de visite s'exerçant deux fois par mois, par visioconférence auprès de E______, lui soit réservé;

Que, préalablement, il a conclu, sur mesures superprovisionnelles, à l'octroi de l'effet suspensif;

Que par arrêt ACJC/1226/2025 du 12 septembre 2025 sur mesures superprovisionnelles puis par arrêt ACJC/1251/2025 du 17 septembre 2025, sur requête de restitution de l'effet suspensif, la Cour a constaté que l’appel formé par A______ le 10 septembre 2025 contre le jugement JTPI/10872/2025 rendu le 4 septembre 2025 par le Tribunal suspendait la force de chose jugée et le caractère exécutoire dudit jugement relativement aux chiffres 1, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 18 de son dispositif et a dit, en tant que de besoin, que le chiffre 15 du dispositif du jugement attaqué ne déployait aucun effet;

Que le 16 septembre 2025, B______ a sollicité le retrait de l’effet suspensif à l’appel formé par A______ formé le 10 septembre 2025 et le prononcé de l’exécution anticipée du jugement du 4 septembre 2025;

Qu’elle a relevé que, se fondant de bonne foi sur le jugement du 4 septembre 2025, elle avait déménagé avec C______ à D______, en Italie, le 9 septembre 2025; que C______ avait effectué sa première journée d’école le 12 septembre 2025 et il avait par ailleurs commencé ses entraînements de football; que l’intérêt de l’enfant commandait qu’il reste à D______ et un retour en Suisse lui serait préjudiciable; que l’enfant avait à plusieurs reprises affirmé vouloir vivre avec sa mère et s’installer à D______ et indiqué ne plus vouloir voir son père; qu’elle avait des perspectives professionnelles à D______, alors que sa situation financière était devenue intenable à Genève depuis la perte de son emploi;

Que A______ ne s’est pas déterminé sur cette requête dans le délai qui lui avait été imparti;

Que le 23 septembre 2025, B______ a produit des pièces nouvelles, à savoir notamment un préavis du SEASP du 18 septembre 2025 préavisant une suspension des relations personnelles entre C______ et son père et elle s’est par ailleurs prévalue de la bonne intégration de l’enfant dans le cercle familial maternel, scolaire et sportif;

Que le 25 septembre 2025, A______ a déposé à la Cour un courrier aux termes duquel il déclare s’opposer à la requête d’exécution anticipée;

Qu’invité à se déterminer sur les pièces nouvelles déposées par B______, A______ a expédié à la Cour le 29 septembre 2025 un "mémoire de réponse relatif à la demande d’exécution anticipée"; qu’il a conclu au rejet de la requête d’exécution et à ce qu’il soit ordonné à B______ de retourner immédiatement le mineur C______ en Suisse; que A______ a par ailleurs pris de conclusions sur mesures superprovisionnelles tendant au maintien de l’effet suspensif à l’appel qu’il a déposé, au rejet de la requête d’exécution anticipée, à ce qu’il soit interdit à B______ de quitter la Suisse avec C______, sous la menace de la peine de l’art. 292 CP, à ce que soit ordonnée l’inscription de C______ aux fichiers RIPOL/SIS et à ce qu’il soit ordonné à B______ de retourner immédiatement C______ en Suisse;

Considérant, EN DROIT, que l'appel suspend la force de chose jugée et le caractère exécutoire de la décision dans la mesure des conclusions prises en appel (art. 315 al. 1 CPC);

Que, selon l'art. 315 al. 4 let. a CPC, si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable, l'instance d'appel peut, sur demande, autoriser l'exécution anticipée et ordonner au besoin des mesures conservatoires ou la fourniture de sûretés;

Que l'effet suspensif de l'appel constituant la règle, l'exécution anticipée ne doit être accordée qu'exceptionnellement, lorsque les circonstances l'exigent, notamment si une des parties est exposée, à défaut, à subir un préjudice difficilement réparable; qu'en la matière, l'instance d'appel dispose d'un large pouvoir d'appréciation (Jeandin, Commentaire romand, CPC, 2ème éd., 2019, n. 4 ad art. 315 CPC);

Que le préjudice difficilement réparable de l'art. 315 CPC résulte d'un dommage principalement de nature factuelle, concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès : l'autorité cantonale d'appel doit ainsi procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 378 consid. 6.3);

Que dans la mesure où l'autorité parentale conjointe ne doit pas priver de facto les parents de leur liberté d'établissement (art. 24 Cst.) en les empêchant de déménager, le juge doit se demander si le bien-être de l'enfant sera mieux préservé dans l'hypothèse où il suivrait le parent qui envisage de déménager, ou dans celle où il demeurerait auprès du parent restant sur place (ATF 142 III 502 consid. 2.5; 142 III 481 consid. 2.6);

Qu’en l’espèce, l'appelant a déposé le 29 septembre 2025 un "mémoire de réponse relatif à la demande d'exécution anticipée"; que le délai qui lui avait été imparti le 25 septembre 2025 était toutefois uniquement destiné à lui permettre de s'exprimer sur les pièces nouvellement déposées par l'intimée le 23 septembre 2025, et non à rattraper le fait qu'il n'avait pas déposé de réponse à la requête dans le premier délai qui lui avait été imparti le 17 septembre 2025;

Que dans ladite écriture du 29 septembre 2025, l'appelant a requis le prononcé de mesures superprovisionnelles; que la recevabilité d’une telle requête dans le cadre d’une procédure provisionnelles d’exécution anticipée, alors que la partie adverse s’est déjà exprimée, est plus que douteuse; qu’en tout état, les mesures superprovisionnelles requises sont sans objet en tant qu’elles visent à ce qu’il soit fait interdiction à la mère de quitter la Suisse avec l’enfant C______ et à ce que ce dernier soit inscrit aux fichiers RIPOL/SIS dans la mesure où la mère avait déjà préalablement à la requête quitté la Suisse avec l’enfant;

Qu'en tout état de cause, il convient de relever que l’appelant conclu, dans ses déterminations sur exécution anticipée et dans son appel, à ce qu’il soit fait interdiction à l’intimée de quitter la Suisse avec l'enfant et de déménager en Italie et à ce qu’il lui soit ordonné de maintenir le domicile de l’enfant à Genève; que dans la mesure où est litigieuse la question du retour de l'enfant en Suisse uniquement, et non de la mère puisqu'il ne peut être interdit à celle-ci de déménager en Italie, et où l’appelant ne sollicite pas la garde de l’enfant, la question du lieu et des conditions d'hébergement de l'enfant en Suisse se poseraient s'il devait revenir seul; qu'en l'état, l'enfant est vraisemblablement bien intégré en Italie dans le cadre familial maternel ainsi que scolaire et sportif; qu'un environnement aussi favorable n'est pas garanti en l'état en Suisse; qu’il est vraisemblablement dans l’intérêt de l’enfant de rester, durant la procédure d'appel, dans le cadre connu dans lequel il évolue en Italie plutôt que dans celui, incertain, qui serait le sien à son retour en Suisse, faute en particulier de savoir où et dans quelles conditions il serait hébergé;

Qu'il ne peut être considéré à ce stade, prima facie, que l'appel est d'emblée manifestement fondé, notamment en tant qu'il conteste le jugement attaqué concernant l'attribution de la garde de l'enfant à la mère, que le père ne réclame pas devant la Cour, et l'interdiction pour la mère de déménager en Italie;

Qu'il résulte de ce qui précède que durant la procédure d’appel, le bien de l’enfant commande vraisemblablement qu’il reste en Italie, sans que cela préjuge de la décision qui sera rendue sur le fond de l’appel, qui ne devient pas sans objet, contrairement à ce que l'appelant soutient puisque la résidence de l’enfant en Italie ne l’est qu’à titre provisoire, le temps que la Cour statue sur l’appel, et que son retour en Suisse resterait possible si l'appelant devait obtenir gain de cause;

Que la requête d'exécution anticipée de l'ordonnance attaquée sera dès lors admise;

Qu'il sera statué sur les frais relatifs à la présente décision dans l'arrêt au fond.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant sur requête d'exécution anticipée du jugement entrepris :

Admet la requête formée par B______ tendant à l'exécution anticipée du jugement JTPI/10872/2025 rendu le 4 septembre 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/27999/2023.

Dit qu'il sera statué sur les frais relatifs à la présente décision dans l'arrêt au fond.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.