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Décisions | Chambre civile

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C/24388/2019

ACJC/82/2025 du 21.01.2025 sur JTPI/14902/2023 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/24388/2019 ACJC/82/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 21 JANVIER 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 3ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 14 décembre 2023, représenté par Me B______, avocat,

et

Monsieur C______, domicilié c/o Mme D______, ______, intimé, représenté par
Me E______, avocat.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/14902/2023 du 14 décembre 2023, reçu le 18 décembre 2023 par les parties, le Tribunal de première instance a débouté A______ de toutes ses conclusions (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 2'360 fr., mis à la charge de celui-ci et laissés provisoirement à la charge de l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision de l'assistance judiciaire (ch. 2), condamné A______ à verser à C______ 2'500 fr. à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Par acte expédié le 1er février 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé appel de ce jugement, sollicitant son annulation. Cela fait, il a conclu à ce que C______ soit condamné à lui verser, avec intérêts à 5% dès le 23 septembre 2017, les sommes de 9'500 fr., à titre d'indemnité pour tort moral, 19'992 fr. 80 et 167 fr. 20, à titre de remboursement de ses frais médicaux, sous suite de frais judiciaires et dépens de première et seconde instances.

b. Dans sa réponse, C______ a conclu au rejet de cet appel, sous suite de frais judiciaires et dépens.

c. Dans leurs réplique et duplique, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Par avis du 30 août 2024 du greffe de la Cour, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le soir du 22 septembre 2017, l'association d'étudiants F______ a organisé une soirée dans l'établissement genevois G______.

b. Le 23 septembre 2017 à 00h06, la police est intervenue audit établissement, à la suite d'une altercation entre un bénévole, C______, et un client, A______, lequel présentait des lésions au niveau de la mâchoire.

c. A______ a été hospitalisé du 23 au 28 septembre 2017 au service de chirurgie maxillo-faciale des HUG, en raison d'une fracture mandibulaire symphysaire/para-symphysaire gauche, d'une fracture sous-condylienne haute à droite et intracapsulaire à gauche et de fractures dentaires multiples. Une intervention chirurgicale d'urgence a été nécessaire, avec pose de matériel devant être conservé à vie.

d. Le 18 octobre 2017, A______ a déposé plainte pénale pour ces faits (P/1______/2017).

Lors de son audition, il a déclaré à la police avoir bu, le soir du 22 septembre 2017, quatre "shots" de whisky et quatre "shots" de vodka avant de se rendre aux G______. Une fois dans cet établissement, il n'avait pas consommé d'alcool et était ressorti dix minutes plus tard, avec un ami, pour fumer une cigarette. Malgré le fait qu'il était muni d'un tampon au poignet lui permettant d'accéder à l'établissement, le videur, C______, avait refusé de le laisser rentrer. Il avait attendu quarante minutes en dehors de l'établissement, puis avait appelé la police. C______ l'avait alors saisi par le cou, avec son avant-bras gauche, alors qu'il se trouvait derrière lui, en le sommant de partir. Il l'avait soulevé du sol, pour l'éloigner de l'entrée de l'établissement. Ses pieds ne touchaient plus le sol. N'arrivant plus à respirer, il avait perdu connaissance durant cinq à dix minutes. Lorsqu'il s'était réveillé, il se trouvait au sol et son ami le secourait. Il ne se rappelait pas avoir chuté.

e. Entendue en qualité de témoin le 3 novembre 2017 par la police, H______ a déclaré que, le soir des faits, alors qu'elle fumait une cigarette à l'extérieur de l'établissement, deux individus avaient tenté de rentrer dans celui-ci pendant quarante-cinq minutes, mais le videur leur refusait l'entrée. Ces individus avaient alors fait un scandale. Ils étaient venus au contact du videur en tentant de le saisir par l'épaule, tout en l'invectivant. Alors qu'ils avaient le dos tourné, le videur en avait saisi un par le cou, l'avait soulevé et porté sur plusieurs mètres avant de le relâcher. L'individu s'était effondré, car il avait perdu connaissance en raison de la strangulation. Le videur n'avait pas l'intention de l'étrangler, mais souhaitait qu'ils cessent de déranger la clientèle. L'individu s'était relevé après quelques secondes et s'était redirigé vers l'entrée de l'établissement, crachant du sang sur les vitres, ainsi que sur les clients. Il n'y avait pas eu d'échanges de coups entre les protagonistes et le videur était resté longtemps stoïque face aux provocations des deux individus. Il était poli et non agressif.

f. Lors de son audition du 11 novembre 2017, C______ a déclaré à la police travailler comme bénévole lors de soirées étudiantes, notamment [à l'établissement] G______. Le manager de cet établissement lui avait demandé de sortir deux individus, dont A______, qui avaient commis des déprédations. Ces derniers étaient sortis sans problème, mais une fois dehors ils avaient essayé pendant plus d'une heure de rentrer à nouveau dans l'établissement, malgré les injonctions de quitter les lieux. A______ avait un comportement agressif envers lui et les clients. Il l'avait alors enlacé au niveau du torse pour l'éloigner de l'entrée. Il l'avait saisi par derrière avec ses deux mains au niveau du thorax, et non du cou, sans le traîner ou le pousser. Lorsqu'il avait relâché son étreinte, celui-ci était tombé au sol sur la mâchoire. Il était conscient et s'était tout de suite relevé, continuant à importuner les clients, jusqu'à l'arrivée de la police.

g. Par ordonnance pénale du 12 novembre 2017, le Ministère public a reproché à C______ d'avoir saisi A______ en mettant son avant-bras gauche autour de son cou, puis de l'avoir soulevé de terre et élargi de l'établissement, étant précisé que ce dernier avait perdu connaissance, de sorte que lorsque C______ l'avait déposé au sol, il avait chuté et s'était fracturé la mâchoire, soit des faits qualifiés de lésions corporelles simples.

C______ a formé opposition contre cette ordonnance pénale.

h. Lors de l'audience du Tribunal de police du 4 juillet 2018, C______ a confirmé exercer en tant que bénévole dans plusieurs bars et discothèques. Le soir des faits, il n'avait pas enserré A______ par le cou, mais il l'avait éloigné de l'entrée de l'établissement en le tenant par le torse. Il ne comprenait pas comment ce dernier avait pu tomber, lorsqu'il avait enlevé ses bras de son thorax.

A______ a confirmé sa plainte et ses précédentes déclarations. Il était un peu alcoolisé le soir des faits, mais se sentait bien. Alors qu'il fumait une cigarette sans ennuyer personne, C______ lui avait enserré le cou avec son bras gauche et l'avait soulevé sur dix ou quinze mètres. Il lui donnait des coups avec ses pieds, quand il était en l'air, et essayait de se débattre pour enlever le bras du précité, puis il s'était évanoui.

Entendue en qualité de témoin, H______ a confirmé ses précédentes déclarations, en particulier le fait que C______ avait serré, avec son bras droit, le cou de A______, et non son torse, et l'avait soulevé sur cinq ou six mètres, ses pieds ne touchant plus le sol. Quand C______ avait enlevé son bras, le précité s'était écroulé sur le sol, la tête la première, sans mettre ses mains. Il s'était tout de suite relevé. Elle ne savait pas si, durant ce déplacement, A______ était conscient ou non.

i. Lors de l'audience du Tribunal de police du 28 septembre 2018, I______, entendue en qualité de témoin, a déclaré que A______, après avoir été sorti de l'établissement par la sécurité, tentait de forcer le passage pour y entrer à nouveau. Il titubait comme quelqu'un qui avait bu. C______ lui avait demandé, à plusieurs reprises, de s'écarter, mais ce dernier refusait. Alors que A______ s'énervait, le précité l'avait saisi sous les bras pour l'emmener à l'écart, sur six ou sept mètres. Pour le saisir de cette manière, C______ était un peu recroquevillé sur celui-ci, ce qui l'avait marquée, parce que la situation était risible. A ce moment-là, soit lorsque A______ était amené à l'écart, ce dernier marchait et parlait dans une langue étrangère. Lorsque C______ l'avait lâché, il était tombé d'un coup, le tête en avant, et s'était relevé très vite.

j. Par jugement du Tribunal de police du 28 septembre 2018, C______ a été reconnu coupable de lésions corporelles par négligence.

C______ a formé appel de ce jugement.

k. Par arrêt AARP/79/2019 du 8 mars 2019, la Chambre pénale d'appel et de révision a acquitté C______ du chef de lésions corporelles par négligence, au motif que les témoignages, tous deux crédibles, étaient contradictoires et qu'aucun élément du dossier ne permettait d'en retenir un plutôt que l'autre. En application du principe in dubio pro reo, il fallait retenir le témoignage le plus favorable au prévenu, soit celui de I______. Ainsi, sur la base de celui-ci, les conditions de la négligence et du lien de causalité faisaient défaut.

Cet arrêt est définitif et exécutoire.

D. a. Par acte du 2 avril 2020, A______ a assigné C______, G______ SA et J______, soit l'administratrice présidente de celle-ci, pris conjointement et solidairement, en paiement de la somme totale de 29'660 fr., avec intérêts à 5% dès le 23 septembre 2017, à titre d'indemnité pour tort moral (9'500 fr.) et de remboursement de ses frais médicaux (19'992 fr. 80 et 167 fr. 20).

Il a allégué avoir été agressé, le soir du 22 septembre 2017, par C______, videur [à l'établissement] G______. Il était entré dans cet établissement, muni d'un tampon au poignet lui permettant d'entrer et de sortir, et était ressorti peu après. C______ lui avait refusé l'entrée, de sorte qu'il avait attendu quarante minutes en dehors de l'établissement, puis avait appelé la police. C______, constatant cet appel, l'avait saisi par le cou, avec son avant-bras gauche, alors qu'il se trouvait derrière lui, en le sommant de partir. Il l'avait alors soulevé, ses pieds ne touchant plus le sol. Il l'avait étranglé, de sorte qu'il ne pouvait plus respirer et avait perdu connaissance. Lorsque C______ avait lâché son étreinte, il avait chuté et s'était fracturé la mâchoire et des dents, ce qui avait nécessité une intervention chirurgicale d'urgence avec la pose de matériel devant être conservé à vie. En raison de ce matériel, il ressentait des douleurs intenses l'empêchant de dormir. Il subissait également un préjudice esthétique au niveau des lèvres, ainsi que des douleurs morales d'intensité sévère.

A teneur des pièces produites, il avait consulté un dentiste, dont le montant de la consultation s'élevait à 167 fr. 20, lequel avait estimé le coût d'une opération dentaire à 19'992 fr. 80.

b. Par courrier du 15 juin 2020, G______ SA et J______ ont contesté bénéficier de la légitimation passive, au motif que C______ n'était pas employé de la société, mais bénévole de l'association d'étudiants ayant organisé l'événement. Elles ont sollicité la limitation de la procédure à cette question.

c. Par ordonnance du 6 juillet 2020, le Tribunal a limité la procédure à la question de la légitimation passive des précitées.

d. Par jugement JTPI/132225/2021 du 15 octobre 2021, le Tribunal a dit que G______ SA et J______ ne bénéficiaient pas de la légitimation passive, débouté en conséquence A______ de toutes ses conclusions prises à l'encontre de celles-ci, dit que C______ bénéficiait de la légitimation passive et réservé la suite de la procédure concernant la demande de A______ à l'encontre du précité.

A______ a formé appel de ce jugement, déclaré irrecevable par arrêt de la Cour du 7 juillet 2022, faute d'avoir effectué l'avance de frais.

e. Dans sa réponse, C______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Il a allégué ne pas être au bénéfice d'une carte d'agent de sécurité, ni avoir suivi de formation à ce titre, acquérant toutefois une bonne expérience du métier par ses diverses missions bénévoles dans les bars et boîtes de nuit de Genève. Le soir des faits, A______ avait fait un scandale, en bousculant les clients et en forçant l'entrée dans l'établissement, malgré le refus qui lui avait été opposé. Ce dernier était également violent et agressif, alors que lui-même était resté calme. Il n'avait jamais saisi A______ par le cou. Ses bras l'entouraient, sans pression, au niveau du torse. Le précité avait maintenu ses pieds au sol et marchait. Lorsqu'il avait relâché son étreinte, A______ était debout, pieds au sol, mais n'avait pas réussi à se tenir sur ses membres et s'était laissé tomber la tête la première, ne se servant pas de ses mains pour se rattraper. Il s'était immédiatement relevé après sa chute et n'avait pas perdu connaissance.

f. Lors de l'audience du Tribunal du 22 mai 2023, A______ a déclaré que sa mâchoire avait été fracturée, de même qu'un os de la tête, et plusieurs de ses dents avaient été cassées. Il portait dorénavant une attèle mécanique dans la bouche, avec douze vis, qu'il devait garder à vie. Il n'arrivait plus à mâcher correctement ses repas, de sorte qu'il souffrait de problèmes à l'estomac. Au niveau esthétique, son visage était déformé, ce qu'il cachait en portant une barbe. Il avait également subi un préjudice psychique. Il souffrait de dépression, d'angoisses et son sommeil était perturbé.

g. Lors de l'audience du Tribunal du 18 septembre 2023, C______ a déclaré avoir été hôte d'accueil, lors de la soirée du 22 septembre 2017, et non videur. Il n'avait pas eu d'autre choix que d'agir quand A______ avait foncé sur lui. Il l'avait saisi sans pression et s'était déplacé avec lui sur plusieurs mètres, alors qu'il était conscient et marchait. Il s'exprimait dans une langue étrangère pendant qu'il marchait.

A l'issue de l'audience, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions, sur quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que C______ n'avait pas fait preuve d'un manque de diligence, ni adopté un comportement illicite. Il ne se justifiait pas de s'écarter de l'appréciation de la Chambre pénale d'appel et de révision. Ainsi, le précité ne pouvait raisonnablement pas prévoir que A______ allait soudainement s'écrouler et se fracturer la mâchoire, une fois libéré de son étreinte, dès lors que ce dernier était conscient.

Le lien de causalité naturelle et adéquate faisait également défaut. En effet, lorsque l'on relâche quelqu'un qui parle et marche, on ne peut s'attendre à ce qu'il s'écroule et se blesse.

Les conditions de la responsabilité au sens de l'art. 41 al. 1 CO n'étaient ainsi pas remplies.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement querellé est une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), rendue dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions était supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposé dans le délai utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131, 145 al. 1 let. c et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

2. La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_55/2017 du 16 juin 2017 consid. 5.2.3.2).

Elle applique la maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1, 58 al. 1 et 247 al. 1 CPC).

3. L'intimé fait valoir que les conclusions de l'appelant en première instance n'étaient pas recevables. Alors que la légitimation passive de G______ SA et J______ n'avait pas été retenue, l'appelant n'avait pas modifié ses conclusions tendant à une condamnation en paiement solidaire.

3.1.1 Selon l'art. 125 let. a CPC, le tribunal peut notamment, pour simplifier le procès, limiter la procédure à des questions ou des conclusions déterminées.

La limitation peut porter sur une question préjudicielle susceptible de mettre un terme au procès (p. ex. la prescription ou la légitimation), qui débouchera alors sur une décision finale (art. 236 CPC) ou incidente (art. 237 CPC; Haldy, Commentaire romand CPC, 2019, n° 5 ad art. 125 CPC).

3.1.2 Aux termes de l'art. 58 al. 1 CPC, le tribunal ne peut accorder à une partie ni plus ni autre chose que ce qui est demandé, ni moins que ce qui est reconnu par la partie adverse.

Les conclusions doivent toutefois être interprétées selon le principe de la confiance, à la lumière de la motivation de l'acte. L'interdiction du formalisme excessif commande, pour sa part, de ne pas se montrer trop strict dans la formulation des conclusions si, à la lecture du mémoire, on comprend clairement ce que veut le recourant (arrêts du Tribunal fédéral 4A_274/2020 du 1er septembre 2020 consid. 4 et 5A_368/2018 du 25 avril 2019 consid. 4.3.3).

3.2 En l'occurrence, le premier juge a, par jugement JTPI/132225/2021 du 15 octobre 2021, dénié la légitimation passive de G______ SA et J______ et expressément débouté l'appelant de ses conclusions prises à l'encontre de celles-ci. Une décision finale a donc été rendue à cet égard. Le premier juge a également indiqué réserver la suite de la procédure concernant la demande de l'appelant à l'encontre de l'intimé.

Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché à l'appelant de ne pas avoir formellement modifié ses conclusions de première instance, à la suite du jugement susvisé, en sollicitant la seule condamnation de l'intimé. En effet, la condamnation en paiement solidaire, initialement formulée, n'avait plus d'objet, seule la responsabilité de l'intimé pouvait encore être engagée.

Le grief de l'intimé est donc infondé.

4. L'appelant reproche au Tribunal de ne pas avoir considéré que les conditions d'application de l'art. 41 al. 1 CO étaient remplies.

4.1.1 A teneur de l'art. 41 al. 1 CO, celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.

La responsabilité délictuelle instituée par cet article suppose que soient réalisées cumulativement les quatre conditions suivantes: un acte illicite, une faute de l'auteur, un dommage et un rapport de causalité, naturelle et adéquate, entre l'acte fautif et le dommage (ATF 137 III 539 consid. 5.2; 132 III 122 consid. 4.1).

Le demandeur supporte le fardeau de la preuve de chacun de ces faits pertinents, ce qui signifie que si le juge ne parvient pas à une conviction, n'est pas à même de déterminer si chacun de ces faits s'est produit ou ne s'est pas produit, il doit statuer au détriment du lésé (cf. art. 8 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_614 du 25 avril 2016 consid. 3.3).

4.1.2 L'acte illicite se définit comme la violation d'une norme protectrice des intérêts d'autrui, en l'absence de motifs justificatifs. L'illicéité peut résulter de l'atteinte à un droit absolu de la victime (illicéité de résultat) ou de la violation d'une norme de comportement destinée à protéger le lésé contre le type de dommage qu'il a subi (illicéité de comportement). Par droits absolus, on entend les droits qui s'imposent à tout le monde ou ceux dont la protection est inconditionnelle (droits à la vie, à l'intégrité corporelle, droits réels, droits de la propriété intellectuelle (Werro/Perritaz, Commentaire romand CO I, 2021, n° 72 et 75 ad art. 41 CO).

On définit en général la faute comme un manquement de la volonté au devoir imposé par l'ordre juridique. Il peut s'agir d'une faute intentionnelle ou d'une négligence. Traditionnellement, on considère que la faute représente l'aspect subjectif de la responsabilité alors que l'illicéité en constitue l'aspect objectif. Dans l'analyse de la négligence, le manquement est cependant objectivé: le responsable commet une faute lorsqu'il manque à la diligence dont aurait fait preuve une personne de la catégorie à laquelle il appartient. Pour choisir la catégorie déterminante, on prend toutefois en compte des éléments subjectifs tels que la formation, les connaissances techniques particulières, l'âge ou le sexe de l'auteur (Werro/Perritaz, op. cit., n° 56 et 57 ad art. 41 CO).

Un fait est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non. En d'autres termes, il existe un lien de causalité naturelle entre deux événements lorsque, sans le premier, le second ne se serait pas produit; il n'est pas nécessaire que l'événement considéré soit la cause unique ou immédiate du résultat. L'existence d'un lien de causalité naturelle entre le fait générateur de responsabilité et le dommage est une question de fait que le juge doit trancher selon la règle du degré de vraisemblance prépondérante (ATF 133 III 462 consid. 4.4.2).

Il y a causalité adéquate lorsque le comportement incriminé était propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 142 III 433 consid. 4.5). La jurisprudence a précisé que, pour qu'une cause soit adéquate, il n'est pas nécessaire que le résultat se produise régulièrement ou fréquemment; une telle conséquence doit demeurer dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles (arrêt du Tribunal fédéral 1C_334/2017 du 27 juin 2018 consid. 3.1).

4.1.3 Aux termes de l'art. 53 CO, le juge n'est point lié par les dispositions du droit criminel en matière d'imputabilité, ni par l'acquittement prononcé au pénal, pour décider s'il y a eu faute commise ou si l'auteur de l'acte illicite était capable de discernement (al. 1). Le jugement pénal ne lie pas davantage le juge civil en ce qui concerne l'appréciation de la faute et la fixation du dommage (al. 2).

Néanmoins, cette disposition n'interdit pas au juge civil de se rallier aux constatations de fait du juge pénal (ATF 107 II 151 consid. 5b et c; arrêts du Tribunal fédéral 5P.326/2004 du 13 octobre 2004 consid. 2.3 et 4C.74/2000 du 16 août 2001 consid. 1). Ainsi, rien n'empêche le juge civil de reprendre à son compte les constatations du juge pénal, sachant que ce dernier a des moyens d'investigation plus étendus. Si le juge civil considère qu'il peut suivre l'avis du juge pénal, il rend là une décision d'opportunité et n'applique pas une règle de droit fédéral (ATF 125 III 401 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_230/2021 du 7 mars 2022 consid. 2.2).

4.2 En l'espèce, les déclarations des parties, ainsi que celles des deux témoins entendus dans le cadre de la procédure pénale, sont contradictoires sur les faits pertinents à fonder une éventuelle responsabilité civile de l'intimé.

En effet, le témoin H______ a déclaré que l'intimé avait saisi l'appelant par le cou pour l'emmener à l'écart de l'entrée de l'établissement et l'avait soulevé, de sorte que ses pieds ne touchaient plus le sol. Lors de son audition par la police, ce témoin a indiqué que l'appelant avait perdu connaissance, en raison d'une strangulation involontaire, de sorte qu'il s'était effondré au sol lorsque l'intimé avait relâché son étreinte. Ce témoin a toutefois précisé, par-devant le Tribunal de police, ne pas savoir si l'appelant était conscient ou non lors dudit déplacement.

Le témoin I______ a, en revanche, déclaré que l'intimé avait saisi l'appelant sous les bras pour le déplacer et que les pieds de celui-ci touchaient le sol. Ce témoin a indiqué être sûre de ce qui précède, dès lors qu'elle avait trouvé la situation risible, l'intimé étant recroquevillé sur l'appelant pour pouvoir le tenir de la sorte et marcher avec lui. Ce témoin a également déclaré que, durant ce déplacement, l'appelant parlait, dans une langue étrangère.

Dans son arrêt AARP/79/2019 du 8 mars 2019, la Chambre pénale d'appel et de révision a considéré que ces deux témoignages étaient crédibles et qu'aucun élément du dossier ne permettait de retenir que l'un était plus probant que l'autre. Le premier juge n'était pas formellement lié par cet arrêt et les constatations du juge pénal, cependant il n'avait aucune raison de s'en écarter. En effet, l'instruction de la cause civile n'a pas apporté de nouvel élément permettant d'étayer les allégations de l'appelant ou de retenir que l'un des deux témoignages susvisés était plus crédible que l'autre.

Il s'ensuit que l'appelant n'a pas établi, à satisfaction de droit, avoir perdu connaissance en raison d'une strangulation effectuée par l'intimé, qui l'aurait saisi par le cou et soulevé du sol sur plusieurs mètres.

Or, s'il n'est pas établi que l'appelant était inconscient lorsque l'intimé le maintenait et que ses pieds ne touchaient pas le sol, on ne saurait reprocher à ce dernier d'avoir violé une quelconque règle de diligence en relâchant son étreinte. En effet, il n'avait pas à prendre de précautions particulières pour protéger l'intégrité physique de l'appelant, en particulier en le déposant délicatement au sol, alors que ce dernier était, a contrario, conscient et au contact du sol. Le témoin I______, qui accrédite cette thèse, a d'ailleurs précisé que l'appelant parlait, dans une langue étrangère, lorsque l'intimé le maintenait. L'intimé n'a donc pas adopté un comportement déraisonnable et commis une quelconque faute, même par négligence. En effet, dans ces circonstances, un agent de sécurité formé n'aurait pas agi avec plus de prudence. Le fait que l'intimé n'a pas suivi une telle formation n'est ainsi pas déterminant, contrairement à ce que soutient l'appelant.

A cela s'ajoute qu'il n'était pas prévisible, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, que l'appelant, qui était conscient, les pieds au sol, et parlait, tomberait, la tête la première, une fois libéré de l'étreinte de l'intimé, au lieu de se tenir débout. Il sied de relever que les parties n'ont pas allégué, ni a fortiori établi, qu'un éventuel état d'ébriété de l'appelant l'aurait empêché de se maintenir sur ses deux jambes.

Ainsi, comme retenu par le premier juge, certaines conditions cumulatives de l'art. 41 al. 1 CO n'étant pas remplies, l'intimé n'est pas tenu de réparer le dommage allégué par l'appelant.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé.

5. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'800 fr. (art. 17 et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).

Celui-ci plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, ces frais seront provisoirement laissés à la charge de l'Etat de Genève (art. 122 CPC), qui pourra en réclamer le remboursement ultérieurement (art. 123 al. 1 CPC).

L'appelant sera également condamné à verser 2'400 fr. à l'intimé à titre de dépens d'appel (art. 96 CPC; art. 84, 85 al. 1 et 90 RTFMC), débours et TVA compris (art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er février 2024 par A______ contre le jugement JTPI/14902/2023 rendu le 14 décembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/24388/2019.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'800 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision de l'assistance judiciaire.

Condamne A______ à verser 2'400 fr. à C______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Emilie FRANÇOIS, greffière.

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.